JOURNAL
D'YPKES k DE L'ARRONDISSEMENT
Le todt payable d'avance.
YPRES, Di manche
Septiènie année. 33.
15 Aout 1869.
Paraissant le dimanche.
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POUR LA BELGIQUE
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lies Fuyards.
i, C'est le moment de nous
monlrer.... sauvons-nous
Le Conseil provincial discutait dans sa séance du
soir du 23 juillet dernier un projet de rèvision du
reglement sur les chemins vicinaux.
La deputation permanente proposait de placer sous
sa surveillance directe les commissaires-voyers qui
relèvent aujourd'hui des commissaires d'arrondisse-
ment. La 2mo commission, au contraire, a part quel-
ques modifications de détails, demandait le mainiien
de l'ancien règlement Un rapport trés remarquable
dü a M. Louis Vanheule soutint ces conclusions.
Quelques conseillers voulaient voir dans les nou-
velles propositions de la Députation permanente une
arrière-pensée d'influence electorale. 11 nous parait
toutefois difficile d'adopter cette apprécialion quand
nous voyons M. le gouverneur lui-même se ranger a
l'avis de la députation.
La question avant été renvoyée a l'année prochaine,
i! est inutile d'examiner en ee moment le fond du
debat. Disons simplement qu'ayant toujours consi-
dèré les commissaires d'arrondissement comme un
rouage pour le moins inutile, tout ce qui tendra a
restreindre le cercle de leur action, en attendant leur
suppression compléte, sera a nos yeux une bonne
mesure de decentralisation.
Placée sur le terrain de la politique, la discussion
ne pouvait manquer d'ètre passionnée au Conseil
provincial. Des violences de langage regrettables
portèrent promptement le tumulte a son comble.
Après un pénible échange d'interruptions et de de
mentis, l'assemblée allait passer au vote lorsque la
minorité libérale, cédant a une malheureuse inspira
tion de M. Mergheiynck, sortit de la salie. Cinq libé-
raux seulement, parmi lesquels l'honorable rappor
teur de la 2mo commission, restèrent a leur poste.
Le Conseil n'étant plus en nombre, il fallut lever la
séance.
La desertion de M. Mergbelynck et de ses amis a
été sévèrement jugée. On a dit, et non sans raison,
qu'après avoir apporté dans la discussion leurs argu
ments contre la confection d'un règlement qu'ils con-
sidéraient comme mauvais, ils devaient a leur dignité
de prolester par leur vote; mais que leur fugue, dans
le but mesquiu d'empêcher l'assemblée de voter faute
d'être en nombre, était un enfantillage qui sied tout
au plus a des collegiens faisant l'école buissonnière.
Mais peut-être ce jugement est-il l'expression de la
haine irréconciliable des ennemis de M. Mergheiynck.
Erreur. Ce jugement est celui de M. Mergheiynck lui-
même qui l'a formulé dans les termes les plus éner-
giques.
Au mois de juillet 1864, M. Orts, usant de son
initiative parlementaire, avait présenté un projet de
loi augmeDtant le nombre des sénateurs et des repré-
sentants dans la proportion de ('augmentation de la
population constatée par des documents oiïiciels. La
droite, que la proposition de M. Oris contrariat tout
autant que la revision du règlement sur lavoirie vi-
cinale contrariait les libéraux au Conseil provincial,
la droite se retirait en raasse et, par cette retraite,
empêchait l'assemblée de voter exactement comme
au Conseil provincial M. Mergheiynck et ses amis.
Or, voici comment le Progrès, dont M. Mergheiynck
était a cette époque rédacteur en chef, apprécie cette
conduite; il proclame dans son n° du 3 juillet que
la droite vient de poser la Chambre un acte de la
plus haute gravité, qu'elle a fait un coup-d'Etat et
qu'elle s'est mise en révolte ouverte contre la Consti
tution du pays.
Et il ajoute
La minorité a voulu dicter des lois a la majorité,
tous les membres cléricaux se sont successivement
retires, posant un acte révolutionnaire dont il n'y a
pas d'exemple dans un pays parlementaire.
Revenanl sur ce grave incident, le même journal,
dans une proclamation insérée en tête de son numéro
du 21 juillet, s'écriè
Electeurs
Le Roi vient de dissoudre la Chambre des reprè-
sentants, cette mesure extréme était devenue inévi-
tablepar la conduite factieese etanti-constitutionnelle
des représentants de la droite.
Ces hommes, revêlus d'une mission qu'ils te-
naient de votre confiance, ont méconnu leurs devoirs
jusqu'd refuser de remplir leur mandatils ont for
fait ainsi au sermenl d'obéissance qu'ils avaient prëté
a la Constitution et aux lois du pays.
Dans un second article signé un avocat, inséré
dans le méme n° nous lisons
Les cléricaux, en se retirant de la' Chambre, ont,
par un fait, empêché l'exercice d'un droit. Or, un fait
ne peut jamais prèvaloir sur un droit, sanS devenir
un acte de violence, un acte révolutionnaire.
La droite pouvait discuter la loi Orts, la com-
battre, l'amender au besoin, mais en entravant, par
un acte de violence, l'exercice du droit que M. Orts
tenait de notre pacle fondamental, la droite a inau-
guré l'ère des révolutions parlementaires elle a fait
un coup-d'Etat el c'est la droite et non M. Oris qui a
violé la Constitution.
Enfin, nous extrayons d'un long artidesur le même
sujet publiédans le n° du 24 juillet, les curieuses et
significatives déclarations que voici chaque phrase,
chaque mol de eet article veut être médité
La déserlion de la droite est un acte de la plus
haute gravité paree qu'elle forme un fêcheux précé
dent que les partis pourront invoquer tour d tour
pour enrayer le mécanisme de nos lois constitutionnelles.
Combien de fois en eft'et n'arrive-t-il pas que deux
opinions se balancent ou a peu prés dans une assem
ble élective or, en ['absence d'un ou de plusieurs
membres, il suffïrait a l'une de ces opinions de se re-
tirer pour entraver le jeu régulier de nos institutions.
Et que l'on ne croie pas que ces cas soient rares.
Ainsi, a la dernière session du Conseil provincial, si
les 33 conseillers qui ont voté pour MM. Vandevenne,
baron Peers, Mergheiynck, etc., s'étaient relirés,
notre Conseil provincial n'était plus en nombre et la
situation était la mdmequ'ci la Chambre.
Ce moyen est bien venu a Vidèe de quelques
membres libéraux du Conseilmais par patriotisme
ET PAR RESPECT POUR LA I.ÉGALITÉ, ÜS n'ont paS VOUlu
recourir a une manoeuvre qui ne peut tendre qu'a
déprécier nos institutions et a donner raison a, ceux
qui mettent en doute la viabililé du gouvernement
constitutionnel.
Toutefois, il ressort de la qu'il y a une lacune
dans la législation, et nous appelons de tous nos vceux
une réforme qui tendrait a considérer comme DÉMIS-
SI0NNA1RE les membres d'une assemblée élective qui,
ay ant accepté un mandat, refusent, sans motiflégitime,
de s'en acquitter.
Telle était l'opinion de M. Mergheiynck en 1864. Si
celui-ci est un homme sérieux, il est impossible que
cette opinion se modifie aujourd'hui par la seule rai
son qu'en 1864 les fuyards étaient des cléricaux et
que ce sont des libéraux aujourd'hui. Sans doute, la
part des circontances est a faire et nul ne sera assez
aveugle pour donner aux actes du Conseil provincial
l'importance de ceux de la Chambre des représentants
ni pour accorder a M. Mergheiynck et a ses amis l'in-
Quenceet la prépondérance d'un grand parti politique.
Mais, toutes choses mises en leur place, la conduite
tenue par les cléricaux a la Chambre en 1864 et celle
de quelques libéraux au Conseil provincial en juillet
derniér est identique au point de vue de la légalité.
De son propre aveu M. Mergheiynck a posé un acte
qui manque de patriotisme, illégal, révolutionnaire
et qui ne peut tendre qu'a déprécier nos institutions.
11 s'est qualifió lui-même, par anticipation, de FAG-
TIEUX, ayant méconnu ses devoirs et forfait au serment
d'obéissance prété a, la Constitution et aux lois du
pays.
Cédant aux voeux qu'il formulait il y a cinq ans, se
considérera-t-il comme démissionnaire maintenant
qu'ayant accepté un mandat électif, il a refusé,
sans motiflégitime, de s'en acquitter? II ne faut pas
trop s'y attendre. Et cependant le dilemme est la qui
se dresse terrible, impitoyable dans sa logique. II
s'agit de savoir si M. Mergheiynck a des principes de
rechange au gré de ses intéréts ou de ses caprices,
s'il croit lui-même aux thèses qu'il soutient ou bien
si, comme un vulgaire ambitieux, il vit d'expédients
et de trucs? La résolution qu'il prendra nous le dira
c'est elle qui décidera de sa considération politique
dans l'avenir.
Dernièrement le Journal d'Ypres lancait une apo
strophe furibonde aux lêcheS.
Savez-vous, s'écriait-il, quels sont ceux qui
perdent le monde? Sont-ce les scélérats, les ambi
tieux, les violents? Non; ce sont les laches. Ce sont
les bons hommes peureux, ce sont les braves gens
timides, ce sont ceux qui geignent en leur particulier
de ce qui se passé en public et demeurent sans rien
faire.
Avez-vous déja remarqué dans le Credo catho-
lique quel est le nom qui est chargé a perpétuité de
l'ignominie de la mort de Jèsus-Christ Est-ce le nom
d'un Pharisien, est-ce le nom de Judas, est-ce le nom
de quelqu'un qui a trempé ses maiusdans la partici
pation directe au crime? Non, c'est le nom de Ponce-
Pilate, du lêche qui a eu peur et qui a laissé faire.