l'examen des comptes de 1869 et du budget de 1870. II y a deux ans a peine, lorsque nos amis rócla- maient eet examen, M. Carton s'y opposait de toutes ses forces. A l'enlendre alors, ces demandes dèno- taient une defiance iujurieust* (sic) pour sa personne. Singulière prèlention, en vérite Comment, contrai- remenl a tout ce qui ne s'est jamais pratique ailleurs, M. Carton prétendait dépenser a sa guise, sans en jamais rendre aucun compte, les fornls de la sociète! Est-il done a ce point sür de son infaillibilite? El ne pourrions-nous pas dire nolre tour et avec bien plus de fondement, que sa résislance était injurieuse pour l'Association. Enfin, l'omnipotent M. Carton a dü metlre les pouces. Soumis aujourd'hui a l'examen du comité, nous verrons bientót les coraples discules en assemblée généraleSic transit gloria mundi 11 EJbcrlé communale. S'il fa ut en croire les journaux doctrinaires, la Bel- gique est le pays d'iudependance communale par excellence. Suivanl eux, les communes administrent librement leurs affaires de menage. Cette assertion est malheureusemenl peu fondee. Sous une foute de rapports, les administrations communales sont sous fS tutelle du pouvoir central el du pouvoir provin cial. Leurs decisions n'ont de vyieur que pour autant qu'elles obtienuent soit une autonsation du gouver nement, soit une approbation du conseil provincial ou de la deputation permanente. C'est ainsi que ie conseil communal u'a pas mème le droit d'etablir des marchés publics sans avoir obteuu au prealable une autorisation qui lui est souvent refusée. Avant d'ac- corder une autorisation de ce genre, la deputation permanente procédé a une enquête et demande aux conseils communaux des locaiites vois nes de la com mune ou l'on se propose d'etablir un marche public, leur avis sur l'opporturiité d'une pareille creation. Le conseil provincial statue ensuite. Dans la dernière seance du conseil communal de Tournai, il a étè donnè lecture d'une depêche de la deputation permanentedu Hainautdemandant a ('ad ministration de cette ville sun avis sur une reqtiéte de la commune de Blandaiu pour l'établissement en cette commune d'un marche aux grains, oeufs, beurre, legumes, qui se tiendrail le jeudi de chaque semaine. Le collége échevinal de Tournai a propose de donner un avis defavorable a cette demande, attendu que rélablissement d'un semblable marchê enlèverait aux marchés de la ville une partie de leur importance et que les marchands francais iraieni de prèférence a Blandaiu. Le conseil communal s'est empressé d'adopter cette proposition. Nous ne savons si le conseil provincial rendra compte de 1'opposition de la ville de Tournai, mais il suffit qu'il puisse interdire l'établissement d'un mar che a Blandain parce que cela ne fail pas l'affaire des Tournaisiens pour que nous trouvions inique une loi qui l'autorise a consacrer un pareii deni de justice. La commune de Blandain a les mêmes droits que celle de Tournai; elle a le devoir de favoriser es in téréts de ses administres et n'a nul besoin de s'in- quiéter si cela fait ou non plaisir au conseil commu nal de Tournai. c'est a la léle de ces braves qu'il sort de la ville, tombe sur les pionniers de Bruges, déja occupes a construire le canal, en lue une partie el met le reste en fuite. Le comte, furieux en apprenant la conduite des Ganlois, exige la dissolution immédiate de la confré rie des Chaperons-Blancs. bonnes gens, du Yoens au people de Gand, vous avez vu comment ces Cha- perons-Blancs ont conserve vos franchises; si I'or- donnance de monseigneur s'exécule, je ne donne pas trois deniers de toutes vos libertès! Et les gens de Gand approuvèrent le conseil de Yoens et maintiurent la compagnie des Chaperons-Blancs. Alors le comte envoya a Gand un détaehement de cavalerie pour enlever Ie fauteur de la révolte; mais Yoens était sur ses gardes. Les Chaperons-Blancs, réunisè l'instant mêrne, vinrent attaquer les gens du comte, massacrèrent son bailli sur la place du Marché el déchirèrent sa bannière. Yoens, comprer.nnt qu'il n'y avait plus de paix a cspérer, porte a 10,000 le nombre de ses Chaperons- Blancs, les mène au chêteau de Wondelghem, rési- dence que le comte venait de faire bütir, et le détruit de fond en comble. Nos communiers parcourent en- suite Mulst, Termonde, Alost, Ninove, Devnze, -en Correspondancc particuliere de l'OFINION. Bruxelles, Ie 17 février 1870. La chronique politique est aussi dépourvues cette semaine, que la semaine dernière. A la Chambre, pas le moindre petit incident dont on puisse tirer parti. Nos honorahles sont en pleine discussion du Code de commerce el ne font pas mine de vouloiren demordre. Au Senat, on a aborde l'examen du projet de loi sur la milice, qui, sanf les dispositions relatives aux exemptions ecclesiastiques. n'est pas bien fait non plus pour piquer ('attention publique. Bref, nous vivóns ici au milieu Ie plus parfait, le plus plat, si vous voulez, que i'on puisse imaginer. Jugt z alors si je dois être a tnon aise pour inieresser vos lecteurs a mes petils racontages de la semaine. Elle a eu cependant son evenement, cette maigre semaine, et un événement dont l'emolion dure encore. Je veux par er de la catastrophe dont le restaurant Depot ure a ete le ihetkre. A l'heure oü je vous ecris, le plus prolond mystere plane encore sur ce drame epouvanlable el le champ est ouvei l a toutes les con jectures. Tuut ce qu'on sail aujourd'hui de posilif, c'est que M. Duve.aer connaissail, depuis quelques mois deja, la victime el que celle-ci a dü la mort a l'ingestion d'une forte dose de noix vomique. Avaient-ils resolu de mourir enseioble Cette hypothese est bien diffioilenienl admissible. M. Duve laer, le soir mêuier avail joue tres gaiement sa pari ie de dominos aux Mille Colonnes avec des amis qu'il avail eusuite aceompagnes au theêire, d'oü ii u'est sorti que vers huil heuresel demie. Quant a la demoi selle, elle elait allee passer la soiree chez une amieoü eile est restee jusque vers huil heures a rire el a ba- diner, selon son habitude, car ede avail fhumeurex- trémeiuent gaie. Coinuunt c.-ncilier tout cela avec l'idee d'un suicidearrête a l'avance Faut-il plutól croire a un accident Quel accident? Revennnlsur ses premieres declarations, M. Duvelaer a dit, dans Lintei rogotoire qu'il a subi devanl lejuge d'instruciion, que la demoiselle avait ete subitemeiit prise d'une attaque d'epilepsie; que, pour ia calmer, il lui avail adminislre une forte dose de laudanum que voyant que le remède agissait en sens inverse de sou attente,l'idee qu'on poui rail l'accuser d'avoir em- poisonne cette jeune fitte lui avait fait perdre ia lête et qu'il avait avale le restant du laudanum pour uiourir a vee elle. Mais, contre cette version, s'accumule une série de fails accabiants. M. Depature, qui se trouvait dans la chambre en dessous de celle occupee par M. Duvelaer el la demoisel.e,affirme n'avoir entendu aucun bruit. Puis, coniprend-on que M. Duvelaer n'aurail pas songe a reclamer les seeours d'un medecin? El enfin, ce n'est pas par le laudanum, mais par de la noix vo mique que la viclime a ete empoisonnee. D'auires croient a un crime. Mais si M. Duvelaer avait voulu tmpoisonner celle jeune fille, avouez qu'il n'aurail pas pu s'y piendre plus stupidement pour se faire pincer. Puis, dans quel inièrêt aurait-il nieilile et execule un tel dessein Je vais au devant de voire soupcon, l'aulopsie a prouve que, non-seu- lement la victime n'etail pasenelal de grossesse,tnais qu'aucune violence n'avait ete pratiquee sur elle. ayatil som de ne point eparguer les chateaux el les inanoirs des gentilshonimes. Tandis que le comte faisait armer toute sa cheva- lcrie, les communes de Fiandre prirent le parti des Gantois; il n'y eul que Bruges qui resni fi Iele au prince; Yoens s'y rendit et la foica de s'unir aux autres villes du pays. II v avait alors pres de la porie du Sas, a Gand, une taverne tenue par Francois Royghem, vieux soldat, père de sept filles. Le cabaret du Lion d Or etait re- nommé autant pour la beauté de ses filles que pour la qualité de la bière qu'on y servait. Des sepi filles la plus agee avail vingt-trois ans et la plus jeune seize. Elles etaient toutes fiancees a des Brugeois, car Francois Royghem était ne a Bruges, et son sejour a Gand n'avait fail qu'augmenter I'af- fection qu'il portait a sa ville natale. En revenant de Bruges oü il elait alle itnposer Dal liance dont nous venons de parler, Jean Yoens, suivi de six officiers des Chaperons-Blancs, s'arrêta a l'au- berge du Lion d'Or. aAllons, ma belie, s'écria-t-il, en apercevanl Tune des filles de Francois Royghem qui altendait sur le seuil, versez-nousquelques pots de cette bonne bière qu'on nous a serviea la kermesse de l'été dernier. Ce qui achève de dèrouter toutes les conjectures c'est que, s il faut en croire certaines informations puisees a bonne source, M. Duvelaer n'était pas et n'a jamais été son amant. II la connaissail pour I'avoir rencontrée quelques fois chez une tierce personne voila tout. Ceci ne parait plus sujet a caution. Quoi qu'il en soit, ce mystérieux drame tient ici tous les esprits en éveil et Tassassinat de la rue de Brabant, dont on a tanl parle, n'a pas produit une pareille émotion. M. Coomans n'a pas encore repnru a Ia Chambre» C'est probablement a cette circonstance qu'il faut altribuer le retard que subil la presentation du pro- jet de reforme élecioraie arrêté par lui et M. Nothomb. Peut-être aussi ces messieurs sc seront-ils ravisés et aurout-ils ajourné leur proposition jusqu'a ce que la Ligue de la reforme, qu'ils out prise sous leur patro nage, soit assez fortement organisée pour les seoo i- der de son influence. M. Delaet est, lui aussi, absent de la Chambre de- puis le terrible réqnisiloire de M. I'avocal general Mesdagh dans Ie procés Van Ryswyck. Mais, soyez sans crainte le premier moment passé, Thonorable représentant d'Anvers y rentrera le front haul et le regard assuré, comtne, naguère, après l'arrêt de la Cour d'appel qui a acquit té TOpinion 4 Les répétitions du fameux Lohengrin sant on bonne voie el tout porte a croire que Toeuvre de Wasner sera completement sur pied dans les dernieis jours de mars. Les avis sont partagés sur le succès de Taeuvre. Mais cesera, dans tous les cas, un immense succès de curiosite qui va faire eouler des flots d'or dans la caisse de la direction. Necrologie. Mercredi ont. eu lieu les funerailles de M. Louis Co- myn. neen 1840, mort a la fleur de l'age. Esprit lucide, cceur droit, il élait aitné et estimé de tous ceux qui Tout connu. D'une grande intelligence et d'une fidelité inébranlable ii ses convictions qu'il exprimait toujours avec la plus comp'ète indepen- dance, il possèdait les qualites si rares dans notre siècle de platitudes et de bassesses, qui font l'homme dans la plus haute acceplion du mot. C'etait un ca- ractère. Aussi loute la ville et même beaucoup d'étrangers avaient-ils voulu, par leur présence a cette triste cérémonie, donner un dernier témoignage d'estime au defunl, uue marque de sympathie a la familie éplorèe. Nops dis»ns toute la ville. Nous nous trompons cependant. Quelques hommes ceux qui occupent ici les functions adrninistratives et politiques sem- blaient s'être donné le mot d'ordre pour s'abstenir en masse. Ni le souvenir de feu M. Comyn père qui fut leur ami, ni les merites du defunt, ni leurs rapports avec une grande partie de sa familie, rien n'a pu trouver grace devant eux. Et quand on les a vu ac- courir maintes fois au-devant de tant de nullités qui n'ont d'aulre mérite pendant leur existence que d'avoir bèlè la chanson du maitre, on ne peut s'einpê- Ce disant, il saula de son cheval et, suivi de ses officiers, il enlra dans la salie de l'auberge oü se trou- vaient téunies les autres filles du tavernier. Malgré la demande qu'avait faile Yoens en arri- vant, aucune des filles ne se derangea, si bien que remarquant ce peu d'empressemenl Ca mes belles ii, dit le commandant des Chaperons Blancs, hêtez-vous done un peu, car la route de Bruges Gand est longue el nous l'avons faite sans reprendre haleine. Allons l depêohez vous! Aucune de ces jolies femmes ne paraissait disposée a se rendre a celle invitation, lorsque Tainée, échan- geant un regard avec ses soeurs, se leva et descendit a la cave. Bientót elle reparut et, remplissant sept gobelets d'etain, elle les présenta aux Chapcrons-IÜancs. 0 Buvez avant nous, les belles 1 dirent les offi ciers A voire santé I messieurs. Chaque fille bul en souriant el tendit le verre son voisin. Et - drink, mynheerles officiers et les filles rendaient Tinne quelques instants après. Gand venait de perdre sept de ses meilleurs défen- seurs, mais Bruges était débarrassé de ses ennemis les plus acharnés.

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1870 | | pagina 2