Nous ne demandons pas que l'on prenne a l'égard
des Piétri, les mesures auxquelles ils ont forcé notre
gouvernement envers leurs adversaires nous ai-
mons assez la liberie pour la vouloir, même au pro-
fit de ceux qui n'ont d'autre ambition que de la dé-
truire. Mais il nous a paru utile de comparer aux
proscrits expulsés par nos minislres, les èmigrés
qu'ils recoivent. Ges passants nons disent clairement
le régime auquel ils appartiennent et celui qui les
repousse l'accueil qui leur est fait par notre gou
vernement, indique assez bien aussi auquel de ces
deux régimes ses sympathies sont acquises.
La lot et les Magistrals.
L'article 15 de notre immortelle Constitution
dit
Nul ne peut êlre contraint de concourir d'une
manière quelcongue aux actes et aux cérémonies d'un
culte.
Cela vous semble limpide, el si l'autorité requé-
rait votre prèsence a un Te Deum, vous lui oppo-
seriez, en toute sécurité, ce texte formel de la loi
fondamentale. Vous plaideriez, au besoin, assurés
d'avoir gain de cause. Vous. auriez tort, parait-
il.
Le 30 juillet dernier, dit VOrgane de Hons,
M. Degouy, notre directeur, était condamné a l'a-
mende et aux frais par le Conseil de discipline de la
garde civique pour avoir refusè d'assister, en sa
qualité de membre de la batterie d'artillerie, au Te
Deum du 21 du même mois.
M. Degouy se pourvut en cassation contre ce
jugement. Mais la Cour suprème, par arrêt en date
du 24 septembre, a rejeté le pourvoi de M. Degouy,
qui avail la bonhomie de croire a i'application pos
sible des dispositions des art. 14 et 15 de la Consti
tution.
Notre confrère ne connait pas encore les termes du
curieux arrêt rendu par la Cour. Nous esperons bien
qu'aussitól qu'il en possédera le texte, il nous le
communiquera, car franchement nous sommes impa
tient d'apprendre par quel procédé l'on peut donner
ainsi de grands coups de pied dans l'Arche sainte,
sans éveiller les susceptibilités doctrinaires.
Le Moniteur publie la note suivante, en tête de sa
partie non-officielle
Le rappel sous les armes de quetques miliciens
des classes de 1866 et de 1867 a éte interprété de di-
verses manières dans quelques journaux. Cette me-
sure n'a d'autre motif que le désir du gouvernement
de réparlir, aulant que possible, la charge du service
militaire impose, par les circonstances, sur tous les
miliciens, en accordant des conges temporaires. Les
miliciens de 1866 et de 1867 rappeles ont joui d'un
congé de 15 jours; leur rentree permei d'accorder la
même faveur a leurs camarades. En résumé, l'efi'ectif
entretenu de l'armée resle celui que le gouvernement
a indiqué aux Chambres lors de leur dernière rêu-
nion. b
Le bruit courait hier, dit VEtoileque le cabinet
de Bruxelles avait regu avis officie!lement que les
armées allemandes se proposent de faire le siege des
places du Nord de la France, et qu'^n consequence
de eet avis, l'autorité militaire se dispose a öiriger
sur la frontière du Midi de nouvelles troupes d'ob-
servation.
Les cartes-correspondances dont une loi votée par
les Chambres, dans la dernière session ordinaire, a
autorisé la création, seront, parait-il, mises en cir
culation d'ici a peu de temps.
On lit dans la correspondance bruxelloise du Pré-
curseur
On attribue a une blessure, réceute ou an-
cienne, je ne sais, la prolongation du séjour du
général Bourbaki a Bruxelles. Cette blessure, dit-on,
lui causait une douleur assez vive pour qu'il lui füt
difficile et pénible, sinon impossible, de se remettre
immédiatement en route.
II parait que daus ses conversations avec plusieurs
personnes de la capitale, résidents francais et Bruxel-
lois pur sang, le général a laissè percer l'impressiou
de profoade stupefaction qui lui est restée de son
entretien avec l'impératrice Eugénie en Angleterre.
Le général aurait trouvé l'impératrice extrêmement
irritée contre son auguste époux, manifestant son ir
ritation en des termes que ne désavouerait pas le
comte Alfred de Laguéronniere, auteur de la bro
chure l'IJomme de Sédan, temoignant pour son
caraclère, d'une médiocre estime, pour ne pas dire
plus, et allant jusqu'a déclarer qu'elle ne se soucie
pas de le revoir.
On assure que le général Bourbaki a dècidément
quitté Bruxelles. Mme Bourbaki, sa femme, est en
core a Bruxelles.
La Gazette de Cologne dement formellement la nou
velle annoncée par le Journal de Bruxelles, et d'a-
près laquelle la Prusse serail d'aocord avec l'empe-
reur Napoléon pour restaurer l'empire francais et le
pouvoir temporel du Pape.
Lyon.
On commence a se ressentir grandement a Lyon
du mauvaisétat des affaires. Lesfabriques d'horlogerie
chóment génèralement et l'on voit se former sur la
plaine de Plainpalais ces ateliers uationaux et en mi
niature auxquels toutes les crises commerciales
redonnent la vie et dont les ouvriers remuent d'une
bêche municipale et familière ce vieux gazon, eler-
nelle victime des malaises sociaux.
Strasbourg.
On écrit de Strasbourg, Ie 6 octobre.au Francfur-
ter Journal
La ville se débarrasse peu a peu de ses ruines, les
décombres devant les maisonsdisparaissent, on répare
les fenêtres détruites, et les curieux affluent des villes
et des campagnes. Toute la ville est remplie de
monde.
En général, nos soldals se conduisent de facon a
contribuer pour beaucoup a calmer l'état des esprits.
Ils se concilient l'estime des habitants, et bien que ces
derniers leur disent en face qu'ils les lueraient encore
aujourd'hui s'ils le pouvaient, ilséchangentcependant
des poignées de mains avec les soldats individuelle-
ment et sont heureux de n'avoir pas de soldats fran
cais a héberger.
C'est surtout parmi les zouaves que l'indiscipline
était grande.
Dans la maison du docteur G..., tous les vêtements
et tout le linge avaient disparus après le bombarde
ment.
Un capitaine francais, atteinl de pneumonie, qui
logeait au premier, enlendit la nuit du bruit dans
l'escalier. Sou garde-malade n'était pas la; il se léve
et voit des soldats francais quitter la maison avec des
paquets et s'enfuir rapidement en eutendant ia voix
du capitaine.
Un des membres du conseil municipal m'a dit qu'il
y avait dans la ville 20,000 personnes ayant besoin
de l'assislance publique et que la caisse communale
ne renfermait plus que 80,000 fr. II s'agit d'aider
promptement. D'après les renseignements fournis
jusqu'a présent les perles totales s'elèvent a 150 mil
lions de francs.
Correspondance particuliere de I'W'ÏSIOÏ.
Bruxelles, 15 0clobre 18/0.
La situation n'a pas sensiblement changé depuis
une huitaine de jours. Paris persisie dans son ine-
branlable resolution de se defendre jusqu'a la der
nière extrémité et, d'un autre cóte, il ne parait pas
que les Prussiens sóient le moins du monde disposés
a lêcher prise. Au contraire, les formidables engins
qu'ils ont fait venir d'AHemagne ne prouvent que
trop qu'ils sont décides a ne reculer devant aucuue
des nécessités du siège.
J'entends dire parfois que les Prussiens n'oseraient
pas accepter devant l'Europe la responsabilitè du
bombardement de Paris et que tous leurs prèparatifs
n'ont pour but que d'amener les assiègés a composi
tion.
C'est connaltre bien mal les deux ennemis en prè
sence que de raisonner ainsi au point oü les choses
en sont arrivées, il n'esl pas plus possible aux Prus
siens de ne pas bombarder Paris qu'aux Parisiens de
se rendre pour éviter un bombardement.
Mettons-nous a la place des armées prussiennes .-
L'hi ver approche, les m^yens de ravitaillement vont
devenir de plus en plus difficiles. Que n'ont-elles pas
a craindre si elles doivent attendre que la famine
oblige Paris a capiluler? Car Paris, c'est une chose
cerlaine, a des vivres au moins pour deux mois....
Dans ces conditions, est-il it supposer que le roi
Guiflaume hésite a ordonner le bombardement par
crainte du qu'en dira-t-on Cel t me semble
tout a fail inadmissible.
Ce qui n'est pas plus a supposer, c'est que les as-
siégés capilulent pour éviter Ie bombardement. Paris
est monté maintenant a un ton d'exaltation qui rend
cette supposition absolumenl inadmissible....
4
Paris sera done trés certainemenl bombardé, a
moins que... a moins que quoi? On n'en sait rien,
mais cette idéé est tellement épouvantable qu'on ne
peut se faire a la pensee qu'elle se réalise et qu'on a
besoin tie croire a un miracle.
4
Le miracle, ce serait la paix. Des journaux anglais
parlent de nouvelles tenlalives de mediation. Si
grand désir qu'on ait de les voir aboutir, ou ne peut
guère se faire illusion sur leurs chances de succès.
Espère-t-on que la Prusse renoncera a ses preten
tions sur la Lorraine et l'Alsace? Ce serait folie.
Peut-on concevoir d'avantage que la France sou-
scrive a ces prètentions avant d'avoir épuisè ses der-
nières ressources? Bien certainemenl non. Alors,
que pourrait-on attendre de sérieux de nouvelles
tentatives de médiatién
Un de mes amis qui revient d'AHemagne, et notez
que mon anti est Beige, me dit qu'on ne peut se faire
une idéé de l'enthousiasme qui règne dans les par
ti es de ce pays qu'il a parcourues. C'est plus que de
l'exaltation, plus que du delire, c'est de l'aberration,
de la folie... Les enfants, les vieillards, reclament des
armes et demandenl a marcher a la frontière... Ne
croyez pas, ajoute-t-il, que l'Allemagne soit epuisée
d'hommes. Avant un mois, si la guerre continue, il
y aura plus d'un million de soldats allemands en
France.
II nous est arrivé, depuis quelques jours, un assez
grand nombre de blesses, la plupart allemands.
Parmi ces malheureux, beaucoup sont trés griève-
rnent blesses. On les répartis dans diverses ambu
lances, oü ils recoivent tous les soins que reclame
leur ètat. Mats toutes les ambulances ne sont pas
également favorisees. A cöte d'ambulances regor-
geaut de superflu, on en cite d'autres oü l'on a peine
a pourvoir au nécessaire.
On aurait dü, semble-t-il, songer a centraliser les
dons de la charilé privée de facon a pouvoir les ré
parlir entre toutes les ambulances suivant les be-
soins de chacune d'eiles.
Un fait vous donnera une idéé de l'aflluence des
Francais a Bruxelles. A l'ouverlure des cours de l'A-
thénée, plus de soixanle èleves, sortant presqao tous
des lycees de Paris, se soul fait inscrire dans les dif-
fereutes classes.
Les ménagères cominencent aussi a se ressentir de
la guerre. Le beurre, les ueuls, Ia volaille, les le
gumes commenceut a monter, i) monterOn
prevoit qu'ils atteindront bieutót des prix fabu-
leux.
L'assemblée générale des cathoiiques, annoncée
avec un si grand lapage, a passe fort inapergue. On
savait, du resle, d'avance de quoi il serait question.
L'Eglise ne s'occupe plus, depuis longtemps, que de
soutirer de l'argeut aux fidèles. Cela n'a pas raté.
Les orateurs qui se sont succédés a la tribune n'ont
pas fait autro chose que de solliciter la charité des
bonnes êems en faveur du Père commun des fidèles,