JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
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ES, Dj manche
IVeuvicme année. IV0 14.
2 Avril 1871,
PRIX. HES AilS'OICES
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M. Alplionse de Lettemhove.
Notre corresporidant de Bruxelles nous apprend
que la demoiselle Van Biervliet, dont les écrits et
le systèmeont tout récemmentoccupé laChambre.
doit a M. Alphonse Vandenpeereboom la position
qu'elle occupe a la tète de l'école normale de
filles a Thielt.
M. Alph. Vandenpeereboom, surtout depuis
qu'il a quitté Ie ministère, aime a faire parade de
sentiments libéraux. II v a a peine troison quatre
jours, répondant a M. Kervyn de Lettenhove, il
adjurait son successeur de s'arrêler sur une pente
fatale et de résister aux suggestions de ses amis.
Prenez garde, s'écriait-il, le système vers lequel
on vous pousse ferait rétrograder la Belgique
d'un siècle
Notre représentant, chacun suit cela, est un
excellent donneur de conseüs. II est f&cheux seu-
lement qu'un homme si bien avisé mette si rare-
ment ses actes en rapport avec son langage
l'autorité de sa parole et sa réputation de sincé-
rité souffrent également de cette contradiction
perpétuelle, dont les malintentionnés font égale
ment leur profit.
fleaucoup de nos lecteurs, sans doute, ne con-
naissent point M'1" Van Biervliet. Nous allocs
leur procurer eet avautage en mettant sous leurs
yeux le passage du discours de M. Bergé dans
lequel l'honorable représentant de Bruxelles s'est
occupé de cette dame.
a On peut se demandor, a dit M. Bergé, de quelle
faconsedonne l'enseignemeut dans les ecoiesqui ont
l'approbation des membres de la droite, dans des
écoles qui sont patronnees par le c erge el reeom-
mandées trés activeraent par les óvêques. Etfbien,
dans ces écoles on ne donrie pas en lecture les
ceuvres de Molière, on ne fait pas lire aux jeunes
filles les Femmes savantesmais on y donne un ensei-
gnement dent je trouve le reflet tout entier daus un
ouvrage qui a été vivemeut recommandé par l'évêqne
de Bruges et par l'évêqne de Tournai.
Dans eet ouvrage, nous voyons presenter la
royautócomme étant issue de la üivmite; il ue s'agit
plus de royauté oonstitutionnellele roi tient son auto
rité de Dieu;c'est ie droitdivin. On y repudie tout ce
qui sent l'affection, la tendresse, l'amour maternel.
Je citerai quelques passages de ce livre pour
répondre aux citations faites par M. le ministre de
l'intérieur d'un ouvrage auquel je n'ai rien a
reprendre. L'auteur de eet ouvrage d'education ca-
thoiique s'exprirae comme suil
Les caresses sensuelles ne sont pas un bon
moyen de récompenser l'enfant. Ob! combien les
tendres mères se trompent! pourquoi ne com-
prennent-elles pas Ie mal qu'elles font a leurs
petites filles en les tenant constamment suspendues
a leurs lèvres (p. 439). L'auteur n'aime pas
du reste l'affection et empêche parmi nos élèves les
trop grandes intimites Si des élèves s'embrassent,
ridiculisez-les. Un baiser passionne ternit la can-
deur angélique de l'enfance.
L'amitié. eile-même, ne trouve point grêce
devant l'auteur de ce livre. Cette noble et lendre
amitié chantée par les poëtes, que l'illustre Lacépède
appelait cette passion sublime, ce sentiment des
grandes êmes et ce bonheur du mondecette amitié,
que Voltaire disait n'être point faite pour ies coeurs
corrornpus. cette amitié n'est pas tolérée par le catho-
lique auteur du livre que je cite
Gardez-vous bien de l'amitié qui n'a que du
sentiment; conservez intact le trésor de vos affec-
tions. C'est un vase d'albêtre, plein de nard pré-
si paré par votre divin Snuveur(p. 147). Donner son
cceur, c'est le dérober au Seigneur; ce serail plus
s> criminel que de voler les vases sacrés du temple.
L'amitié conduit peu a pen deux jeunes personnes
liées enlre eiles sur une penle dangereuse; el les
arrivent ainsi a n'être plus loin de l'égoul de la
serisualité(p 156). L'amitiéest un exercicedan-
i) gereux et funeste c'est jouer avecle feu (p. 156).
L'auteur continue et il dit
Préservez votre maison de ces doctrines nébu-
leuses qui nous viennent de 11 Allemagneprotestante.»
(Vous voyez qu'il n'est pas de i'avis de M. le ministre
de l'intérieur, qui semble disposé a accepter ce qui
vientde cecöté.) Etudiez les vies des saints, il en
sort un parfum embaurnè; ie miel que vous y re-
cueillerez nourrira vos affections, fortifiera votre
intelligence, et que ie cptéchisme soit votre manuel
de tous les jours.
L'auteur condamne aussi bien le chagrin que
l'affection dire que ce pauvre coeur humain a parfois
de ia douleurquel blaspheme! De l'indifference,
voila qui est orthodoxe, voila de la piété! Dire que
o les quatre cinquièmes des hommes meurent de
chagrin quelle folie (p. 126.)
li u'y a que du froid, de l'ègoïsme clans ce livre;
faire de l'elève un être inerte, souple, sans affection
ni sentiment, voila le but. Quanfl l'elève deviendra
epouse, on lui recommandera de ne pas trop aimer
son epoux, paree qu'avant d'être unie a son mari elle
doil se souvenir qu'elle est unie au Seigneur et
qu'elle doit obeir aux ordres qu'il llonne par ('inter
médiaire des rninistres du culte. Voila les principes
inoraux deTéducation catholique! s>
Nous nous abstenons d'apprécier un système
d'éducation basé sur de pareilles idéés. II n'y
pas une honnête femme dont le cceur ne se sou-
lève de dégout a Ia lecture des passages cités par
M. Bergé. Mais que penser d'un ministre soi-di-
sant libéral et qui appel le l'auteur d'un tel livre a
la tête d'un établissement destiné a former des
institutrices et qui erapoisonne ainsi les souices
de ('instruction publique en les infectant du virus
d'un cléricalisme tout espagnol Que penser
quand ce ministre, tombé du pouvoir, ose accuser
ceux qui ont pris sa place de vouloir cléricali—
ser l'enseignement et de pousser la Belgique
dans les voies de Ia réaction?
M. Vandenpeereboom est trés habile, extrê-
mement habile sous ses airs de bonhomme. Mais
ses habiletés sont usées et laissent apercevoir le
fil. Personae ne s'y laisse plus prendre. II aura
beau protester de ses sentiments libéraux, redou-
bler ses attaques contre le cabinet actuel pour
faire oublier son passé et donner le change
I'opinion publique. Le temps ou ces habiletés
pouvaient réussir est passé et notre représentant
peut en faire son deuil ce temps-la ne revien-
dra plus.
M. Wasseige est catholique.
Excellent catholique, dit-on, et fort soumis
aux préceptes de son église.
Or, ces préceptes de la religion catholique,
apostolique et romaine, c'est Ia base même de la
morale, s'ii faut en croire les gazettes du clergé.
Qui les repudie perd instantanément le sentiment
du bien et du mal les combattre, c'est travail
Ier détruire tout instinct de moralité dans le
peuple.
Hors de l'église, point de morale.
Qu'auriez-vous dit, cependant, de la moralité
du ministère qui nous gouvernait, si, a l'époque
des crimes de Pantin, vous aviez lu dans les
journaux que le monstre, auteur de ces forfaits,
échappé de la France, avait été félicité a son
entrée en Belgique, et avait vu mettre a sa dispo
sition par Ie gouvernement, un corivoi spécial,
une berline princière? Qu'en auriez-vous dit
encore, si, après l'assassinat de Victor Noir par le
prince Pierre Bonaparte, celui ci, forcé de fuir,
avait trouvé a nos frontières des personnages
officiels pour le complimenter et lui faire les
honneurs de notre honnête petit pays
Vous n'auriez pas manqué de vous récrier, en
lisant cela vous auriez conclu fort légitiraement
que le conseiller de la courönne qui traitait ainsi
de pareils criminels, ne pouvait avoir aucun sen
timent d honnêteté, de justice, de moralité, et
que les préceptes religieux qui permettent de
rendre hommage aux assassins et de les récom
penser par des témoignages d'estime, font une
bien misérable base a la morale.
Eh! bien, M. Wasseige, le ministre trés catho
lique et non moins apostolique, inspire par
l'esprit de moralité profonde qui nait de ses con
victions religieuses, a fait mieux que de fèter le
prince Pierre ou cetautre assassin vulgaire, le héros
I.aissez dire, laissez-vous blamer, mais publiez votre pensee