Mais pourquoi Ie cas, qu'il trouve trés naturel quand il s'agit desdits avocats, notaires, méde- eins, etc., prerid-il tout coup Ie caractère d un miracle dés qu'il s'agit du pape? Notre confrère connaitrait-il une loi de la nature qui condamne les papes a ne pas atteindre la 25" annéè de leur papauté? Et s'il n'en connait pas, que trouve-t-il de prodigieux dans Ie fait que Pie IX a pu cé- lébrer son jubilé de 25 ans? Si les jubilés de pape sont infiniment plus rares, par exemple, que ceux des huissiers, cela tient a deux raisons qui n'ont absolument rien de surna- turel la première, c'est qu'il n'y a qu'uri pape et qu'il y a des milliers d'huissiers. La seconde, qu on est généralement nommé huissier de 25 a 30 ans, tandis que, sauf de rares exceptions et préci- sément Pie IX en est une on n'arrive pas a la papauté avant la soixantaine sonnée depuis long- temps au cadran de Saint-Pierre. Quand les Con claves éliront des papes de 30 ans, les jubilés seront aussi communs qu'ils sont rares aujour- d'hui. Qu'en pense le Journal d'Ypres? Que dirons-nous de la fameuse manifestation orga- nisee a Ypres en l'honneur du Saint-Père A'-t-elle èlé vraiment brillante comme ne manqueront pas de l'affirmer les organes du clergè Ce sont la de ces questions auxquelles un homme sensè ne doit guère chercher a trouver de réponse. Qu'il nous suffise de dire que dans cette circonstance l'élèment clérical a remporlé un succes réel en fesant travailler a son profit bon nombre de libéraux qui malheureusement se soucient fort peu de leurs principes politiques en les sacrifiant aux désirs ridicules de leur femme, voire même de leurs servantes. Celte fois, comme toujours, on a dü admirer cette union intime qui existe entre loutes les parties de la machine cléricale Pas la moindre defection t On a dCi admirer l'adresse des embaucheurs et des enróleurs de la sainte milice. Beaucoup de gens affichant des allures libèrales se trouvaient dans leurs rangset combattaient pour la sainte cause. On les comptait, sans peine, ces libéraux con- vaincus qui, metlant de cóté un petit intérêt com mercial, ou repoussant la ridicule fantaisie d'une chère moitie, voulaient rester fidèles a leurs prin cipes et infliger aux valets de la cour de Rome une indifférence cahne et rèsolue. Bien peu de maisons a Ypres sont restées dans l'ombre dinianche soir; bien peu de fenêtres y ètaient vierges de drapeaux pon- tificaux. Les bouges du Zaelhof et les bistringues de la rue de la Bouche el des environs n'avaient pas voulu même rester étrangers a la sainte manifesta tion. Pour ces derniers, nous comprenons jusqu'a un certain point leur devouement a la gent noire. Nous comprenons que pour ces parias de la société, Vintérêt soit une allèchante amorce. Devoirs et droits du citoyen, droits politiques, convictions, conscience, vains mots, leltre morte pour ces malheureux 1 Et puis ces drapeaux et ces oriflainmes ne leur coütaient pasun sou.Et le curé avail tout donné, tout jusqu'aux chandelles, ces' chandelles sorties peut-être d'une sacristie, placées ensuite sur la fenêtredans un bou- chon, allumées par la main d'une Yénus impudique, et retirees quelques temps après paria mamai- tresse de la maison pour servir a éctairer un com merce abject. Mais ce que nous ne comprenons pas, ceque necomprendra aucun homme ayant seulement une ombre de dignité, c'est que dans cette fanatique et triste comèdie de dimanche passé, des libéraux indépendants el haut placés ontjoué un certain rêle. Ah t si chez ces hommes faibles et inconséquents tout sentiment de pudeur n'est pas éteint, ils ont bien dü rougir enentendant rue de Menin, vis-a-vis du collége episcopal, des prêtres avinés pousser des cris de vic- tbire pour Ier catholiques el hurler des chansons impossibles en l'hónnéur de Pie! Allez, messieurs les libéraux, vous avez la fait rudement l'affaire de l'eteignoir on vous en tiendra comple, n'en doulez pas. Essayez done une manifestation dans un but reellemcnt liberal, et si un seul calhoiique, mais un seul, v prend part, nous n'hésiterons pasun instant a confesser nos torts. Et on oserait encore, après cela, venir nous dire que la Belgique afilrme de plus en plus ses tendances libèrales. Allons done! Lorsqu'il s'agira de doctrina- risme les hommes ne manqueront pas mais ou n'en trouvera pas beaucoup le jour oü il faudra défendre les grands, les vrais principes du libéralisme. E.a manifestation dn ts. Que la manifestation des papaleux a l'occasion du 25me anniversaire de Pie IX, ait été une manifestation politique, nul ne saurait le contesler. Tout, au con traire, le prouve Iqs déclarations des journaux clé- ricaux, les toasts des orateurs, les inscriptions et les invocations au Pontife-Roi, les drapeaux et les ori- flammes jaune et blanc qui sont, qu'on le sache bien, les couleurs du souverain temporel, celles du Ponlife étant deux clés entrecroisées, surmontées de la tiare. Et c'est paree que cette manifestation est un acte po litique que nous nous en occupons. Ce qu'ont voulu les ciéricaux, ennemis de toute li- berté, c'est protester contre la souverainetè du peuple romain qui a congédié son roi tout con*ne les ciéri caux beiges congédièrent Guillaume de Hollande en 1830, Comprend-on cette protestation de leur part? S'imagine-t-on comment, ce qui était licite et louable en 1830 peut devenir un crime abominable en 1871"? Dans les deux cas, c'est l'indépendance d'un pays qui est on jeu, c'est le droit qu'a tout peuple de chasser un mauvais gouvérnement. Comment les ciéricaux beiges osent denier au peuple romain le droit de s'af- franchir d'un régime odieux, eux qui ont fait la re volution de 1830; comment ils osent afficher la pre tention de rétablir Pie IX sur son tróne, même par la force, après avoir precipité du sien Guillaume I", c'est ce qu'on expliquerait difficilement, si I'on ne sa- vait que ces hommes ne se piquent point de logique quand leurs intéréts sont en jeu. Aussi n'est-ce pas pour eux que nous écriVons ceci. Mais que dire des libéraux qui prennent part, pour des motifs variés mais égalemeut inavouables, a pareilles manifesta tions et viennent, reniant leur passé, faire chorus avec leurs éternels ennemis. Eux, dont Ie principe fondamental est Ia souverainetè du peuple, ils ré- clament, avec les ciéricaux, ennemis iurés de toute liberté, la restauration du pouvoir théocratique Eux, les apótres du libre examen, ils exaltent l'au- teur de I'Encyclique et du Syllabus! Eux, qui ne devraient avoir d'autre guide que la raison, ils brülent des chandelles a l'inventeur do lTmmaculée Conception I Et ce sont les plus en vue, les hommes marquants du parti qui se conduisent de la sorle Les conseillers communaux, collége en lête, élus d'une cité libérale, lous, a part trois louables excep tions, décorent leurs maisons de loques et se livrent a de folies dépenses de suif et de pélrole, expression de leur lumineuse piété! M. le bourgmeslre, qui avail si courageusement re- fusé le concours officiel de l'administration, croit-il que sa dignité personnelle aurait perdu a une absten tion absolue, a l'exemple des magistrals de Bruxelles, de Gand, de Liége, de Bruges et de lant d'aulres villes? Combien de votes ciéricaux rapportera leur pusil- lanimilé a tous ces conseillers communaux Au cun. M. le baron Mazeman, le sénateur calholico-doctri- naire, illnminant pour le pape après avoir payé jadis la patente pour le couventde Lamotte, voila qui est du moiDS conséquent! M. Gustave de Stuers, un ex-échevin, naguère en core l'espoir de la coterie doctrinaire et qui, dans son zèle moins éclairé que son habitation, décore une maison inoccupée! Ah! M. le chevalier, soyez sans inquiélude sur voire salut. Les béalitudes qui sont les paroles de Dieu même nous en sont un sür ga rant. Bienheureux les pauvresVous savez le reste, M. le chevalier. Parmi les maisons les plus splendidement illu- miuées, une des pips splendides était celle de M. Jules hveins. L'intelligent et adroit chef de parquet, dont l imparlialité el la courtoisie si appréciées le désignent tót ou lard pour d'aulres siéges et dont le libéralisme se gendarmait si aisément autrefois, sym bolise aujourd'hdf ses croyances dans plusieurs rangées de ciergessacerdotaux. Mais si le symbole est emollient, les convictions restenl fermes. Souhaitons que Ie ministère de la Visitation se souvieune un jour de ces pieuses chandelles. N'oublions pas non plus dans nos felicitations le vice-président de l'Association libéraleHélas Après le triste et le lamentable, voici venir main- tenant les dröleries. Un monsieur qui cumule agréablernent l'enseigne- ment de la jeunesse avec l'aunage des calicots, avait fait disparaitre sa facade sous les lampions, a l'excep- tion toutefois de l'enseigoe de sa boutique. Miscuil utile dulci. C'est ce monsieur qui, ne trouvant pas notre libéralisme a la hauteur du sien, nous appela un jour les phutres de VOpinion. Un second qui, aux élections dernières, voulait, disait-il, avaler un calotin (sic), avait enguirlandé sa maison jusqu'aux combles de draperies papalines. Au centre apparaissait une gigantesque carotle. Une allégorie peut-être? Un troisième un conseiller communal, celui-la avait flanqué notre drapeau national de deux bannières qu'il avait recues avec injonclion de les arborer. Jaune et blanc, couleur de serin I Enfin, jl n'est pas jusqu'au conservateur des ar chives, le bibliothéeaire communal, qui n'eüt emboité le pas. II est des gens predestines a encenser des infaillibles. Après l'homme d'Etat, le Pape. Autres temps, aulres fétiohes. Et pourtant le coq n'a pas encore chanté! Ah! qu'il avait raison Ie modeste savant du Progrès lorsqu'il s'écriait dans son langage pitlo- resque Dans quel siècle vivons-nous Que ne voit-on pas tout dans ce monde? K. S. V. P. II est généralement admis que lorsqu'une manifes tation, une fête est projetée. ceux h qui cette mani festation, cette fête doit rapporter plaisir, honneur ou profit contribuent par tous les moyens en leur pou voir a sa compléte réussite. Pourtant dimanche der nier rillumination n'était pas encore générale lorsque les nuages s'umoncelèrentil plut et, avec la pluie, un vent violent souffla toutes les chandelles. Une des maisons les mieux décorés, habitée par un des plus chauds partisans du Pape Roi, prit feu dans Ia soirée. Un malheureux qui allumait avec le plus grand zèle les lampions de son voisinage, tomba d'une échelle et se cassa Ie pied. Comment expliquer tout cela Le bon Dieu verrait-il de manvaisoeil lout le bruit qui se fait autour de son vicaire, ou bien. découragé par toutes les sottises humaines, se serail-il démis de son einploi de gouverneur de la Terre Nous avons soumis ce cas épineux a plusieurs pro fonds Ihéologiens. Trois rious ont répondu trés grave- ment qu'un fidéle, tombant d'une échelle, ne se casse la jambe que pour autant que cela est utile au salut de son óme. Cette réponsp, a la vérité, ne nous a pas satisfaits et nous ne comprenons pas trés bien jus- qu'ici quel bien peut faire a l'ême une jambe brisée même, enlrainés par un raisonnement impie, nous nous sommes dit que, quant a nous, nous préférerions être un peu moins fidèles et conserver nos jambes in- tactes. Afin de sortir de la perplexité dans laquelle nous laissent les événements de dimanche soir, nous avons recours aux lumières de la savanle rédaction du Journal d'Ypres en correspondence directe avec le ciel, elle est mieux que tout autre en état de nous éclairer. Mais, pour l'amour de Dieu, qu'elle se dé pêche car notre foi chancelante court les plus grands dangers. Nous lisons dans un journal de Bruxelles i les bons voisins.Le Bien public a des naïvetés charmantés... Voici ce qu'on lit dans le compte-rendu qu'il donne des illuminations de Gand Les quelques facades restées veuves d'oriflam- mes, a cause de l'abseuce des propriétaires, étaient rehaussées par des lampions qu'on avail demandé aux voisins d'y placcr. Ces bons voisins qui viennent, a la demande qu'on leur a fait, placer des lampions aux fenêtres des maisons non illuminées, sont ravissants... Iluminer les maisons, l'insu des habitants, et peut-être malgré eux I

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1871 | | pagina 2