JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimancbe Neuyième année. N° 33. 13 Aout 1871.
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JL'8 talie et Ie Pape.
La position que le Saint-Siége a prise, a la
suite de l'occupation de Rome par les ltaliens,
n'est pas si habile qu'on le dit. C'est une comédie
jouée avec un certain savoir-faire, avec persèvé-
rance surtout, mais qui ne fait illusion a personne.
Les ltaliens, en s'emparant de la ville dont ils ont
fait leur capitale, ont compris qu'il fullait laisser
au souverain pontife tout le pouvoir nécessaire
l'exercice de son autorité religieuse. lis y avaient
un intérêt évident, puisque c'était le seul moyen
de retenir le pape a Rome, et de rassurer les
nations étrarigères sur les suites du nouvel état
de choses. Le coup qui mettait fin au pouvoir
temporel avait été porté par surprise il s'agissait
muinteuarit de se faire pardonner cette surprise et
pour cela, il fallait que le pape restèt libre de
toute la liberté compatible avec la perte de sa
souveraineté politique. L'expérience seule, airisi
que Ie disait récemment M. Thiers, peut montrer
si le saint père est, dans sa nouvelle position, en
état de gérer les affaires religieuses du diocèse
universel mais ce qui est certain, c'est que
l'ltalie fera tout ce qu'il faut pour cela la con
servation de la conquète est a ce prix, elle le sait,
et elle agira en conséquence.
L'ltalie a done laissé le pape libre, paree qu'il
était dans sou intérêt que le pape conservèt sa
liberté. Mais le pape, de son cóté, s'est cru in
téressé a ce qu'on le supposêt réduit a l'esclavage.
Sou embarras, au premier moment, a du être con-
sidérable. Fallait-il prendre la fuite ou rester
Prendre la fuite, c'était facile dire, mais
aller Quelle puissance consentirait recevoir eet
héte embarrassant Et comment trainer avec soi,
sous un ciel rigoureux peut-être, une cour de
cardinaux grelottarits Comment soutenir l'exil a
la longue La fuite, d'ailleurs, ne pouvait avoir
pour but que de meltre en quelque sorte I'Europe
catholique en demeure de ramener I'auguste
fugitif chcz lui mais pouvait on attendre une
pareilie intervention de I'Europe On resterait
done, telle fut la décision, mais on jouerait au
martyron chercherait a se faire passer pour pri-
sonnier on s'enfermerait dans le Vatican on se
refuserait jusqu'è un séjour de campagne on
ferait comme 1'enfant qui boude contre son ventre
et qui, n'ayant pas Ie mets qu'il préfère, punit ses
parents en ne mangeant rien du tout.
Le but de cette conduite était clair on se
flattait de passionner les fidèles par le spectacle
des souffrances apparentes d'un pontife vénéré, et
en même temps, on espérait les inquiéter sur les
intéréts de leur foi. II ne paralt pas qu'on y ait
réussi. En vain le cardinal Antonelli a-t-il
employé sa meilleure encre retracer les horreurs
de cette nouvelle captivité de Savooe en vain
les évêques francais lui ont-ils répondu par des
Hots de rhétorique il ne parait pas que I'Europe
ait pris le martyre du pape au sérieux.
Le saint père demeure done ii Rome mais il ne
faut pas croire que les choses en restent lè, et
que la papauté se résigne définitivement au sort
qui lui a été assigné par le royaume d'Italie. 11 est
évident que la mort du présent soaverain-pontife
sera le signal d'une nouvelle crise. On sait que
Pie IX a modifié d'avance les conditions de l'élec-
lion des papes. lln conclave ne saurait se réunir
sous cette domination italienne qui représente la
tyrarmie et l'impiété On aura done recours a
quelque autre mode de nomination. Mais
comment sera retjue cette nouveauté Qui peut
affirmer, dans l'état actuel de l'Eglise, qu'eile ne
deviehdra pas le signal de grandes discussions
Et serait-il téméraire de supposer que les partisans
de ce schisme allemand dont on nous parle tant,
font entrer cette éventualité pour quelque chose
dans leurs desseins
Une comédie politique, assez intéressante a étu-
dier etdout le public pourraitêlre dupe, si on ne lui
en faisail presseutir a temps le dénouement, sejoue,
en ce moment, dans le camp clérical. Une partie de
la pressë épiscopale feint d'être contraire a toute aug
mentation des charges militaires et annonce qu'avant
la session prochaine des Chambres, une réunion aura
lieu a tiruxelles, dans le but de former une ligue mi-
litarisle pour eurayer les projets du ministre de la
guerre.
Le but de cette prétendue opposition est facile a
deviner L'opinion publique est hostile a un état mi
litaire qui absorberait les forces vives de la nation en
hommes et en argent. II faut temporiser, contenir le
zèle de M. Guillaume pendant quelque temps, car
l'abnée prochaine sera rude. Elle nous donnera des
élections a lous les degrés, des élections partout dans
les neuf provinces, et dans nos 2,500 communes, dé-
puis Bruxelles jusqu'a Zoutenay; le ministère veut
faire maison nette et promener le balai clérical dans
tous les recoins deda machine administrative pour en
chasser ce qu'il pourrait encore y avoir de libéraux
au Parlement, dans les Conseils provinciaux et com-
munaux. II s'agit d'induire le pays en erreur, de lui
faire croire a un retour vers l'amoindrissement des
forces militaires comme on le prêcbait dans les mee-
tings, avant d avoir escaladé le pouvoir. Puis, t<>utes
les électionsfaifes, on aura le champ libre et on pourra
se hvrer sans entraves a la prussificalion de la Bel-
gique.
II n'est pas mal que ce dénouement de la comédie
soit con nu d avance du public, qui doit le payer de sa
personne et de ses écus.
he replulrage.
La circulaire suivante a été adressés aux membres
de l'Association doctrinaire agouisante on dirait
I Extréme Onction administrée par les grands prêtres
de la Doctrine.
Union libérale et constilulionnelle de l'arrondissement
d' Ypres.
Ypres, Ie 51 Juillel 1871.
MM.
La loi du 12 Juin 1871, a apporté des modifica
tions si profondes a notre système électoral, qu'il
semble difficile de ne pas apporter quelques change-
ments a nos statuts.
Dauires modifications paraissent être aussi dans
les vceux de quelques personnes comme les pre
mières, elle seront soumises a l'assemblée générale.
Nous avons done l'honneur de vous convoquer
pour cetobjet a une réunion qui aura lieu 1 'Aigle
dorle samedi, 12 aout prochain, a trois heures de
relevée.
Si, Messieurs, parmi vos amis, vous connaissiez
des personnes disposées a travailler avec nous au
triomphe nes principes libéraux et constitutionnels
qui forment le programme de notre Association,
nous serions heureux de les voir assister a la séance,
et d obtenir leur coopèration pour donner de
nouvelles forces a uné institution qui a rendu
d'incontestables services au libéralisme.
Pour le Comité
P. BEKE.
Cette circulaire a été en outre adressée, acccom-
pagnée d une seconde que nous reproduisons égale-
ment, a un certain nombre de personnes qui ne^font
pas partie de l'Association. Voici cette seconde cir
culaire
Union libérale et conslitutionnelle de l'arrondissement
d' Ypres.
Monsieur,
Nous avons l'honneur de vous donner communica
tion de la lettre de convocation adressée a tous les
membres de ('Association libérale de la ville et de
l'arrondissement.
Nous vous prions, M., de vouloir assister a cette
réunion afin de coopérer, ainsi qu'il est dit dans le
final de cette convocation, a une réforme qui soit de
nature it réunir dans un faisceau toutes les forces du
libéralisme et a assurer son triomphe dans l'avenir.
Le Vice-President de VAssociation,
P. BEKE.
Ypres, le 31 Juillet 1871.
Ces deux documents portent en eux-mêmes leur
commentaire et, pour peu qu'on sache lire entre les
lignes, il est manifeste pour quiconque ne ferme pas
volontairement les yeux a la lumière, que la coterie
u'a pas renonce a ses idéés de domination. Nous n'in-
LE VICE-PRÉSIDENT,