JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENI ÏPRES, OimaDche Dixième année. i\'° 15. 14 Avril 1872. Le tout payable d'avance. PRIX DES AXVOXCES ET DES RECLAMES 10 Centimesla oelite ligne. Corps du Journal, 30 centimes* PRIX D MSOV\EUE\T POUR LA RELGIQUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour I'Etranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes Laissez dire, laissez-vous blAmer, mais publiez votre pensee On s'abonne a Ypres, j On traite a forfait pour les annonces souvent reproduces. Touies lettres au bureau du Journal, rue d'Elver dinghe, 52. ou envois d'aryent doivent être adressés franco au bureau du journal. YPRES, LE 13 avril 1872. La presse libérale et surtout les journaux doctrinaires se sont beaucoup occupé, ces derniers jours, de la bulle d'excommunica- tion lancée par M. le curé de Saint-Pierre contre M. Iweins, notre procureur du roi. Nous comprenons fort bien l'émotion que cette affaire a causée dans le pays„ct nous sommes loin de blamer ceux de nos confrères qui y ont cherché une nouvelle occasion de faire ressortir l'esprit d'intolé- rance qui caractérise tous les agissements de nos hommes d'église. G'est la première fois, en effet, pensons-nous, qu'un fonctionnaire se voit refuser l'accès du tribunal de la pénitence a raison de ses actes publics et, certes il appartenait a la presse libérale d'éclaircr l'opinion publique sur la gravité d'un tel refus. Nous ne trouvons pas mauvais non plus que M. Iweins en ait appelé a l'autorité supérieure de l'excommunication prononcée contre lui par M. le curé de Saint-Pierre. Après tout, si notre procureur du roi tient a faire ses Paques, il en est bien le maitre, et nous sommes trop partisans de la liberté de conscience pour lui chercher querelle a ce sujet. M. Iweins trouve le moyen de con- cilier ses convictions politiques, qui affir- ment les droits de la liberté, avec les doc trines du Syllabus, qui les dénie. Libre a lui. Ce que nous trouvons plus extraordi naire, ce que nous ne nous expliquons pas du tout, c'est la reculade de l'épiscopat dans cette affaire. Au point de vuc oü M. le curé de St-Pierre s'était placé, l'interdiction dont il avait frappé M. Iweins était on ne peut plus légitime etrationnelle. Comment done? Dans une cause oü les intéréts de notre mère la sainte Eglise sont engagés, un ma- gistrat se permet d'émettre un avis contraire aux prétentions de l'épiscopat. Quoi de plus naturel que l'Eglise frappe ce magistrat en l'excluant de son sein? Si l'Eglise est infail- lible et qui oserait douter qu'elle le soit discuter ses volontés est un acte de re bellion qu'elle a le droit et le devoir de punir. L'épiscopat avait compris ainsi son de voir quand il a dicté a M. le curé de Saint- Pierre sa fameuse lettre. Nous sommes vrai- ment afïligés pour lui qu'il n'ait pas persisté dans sa première résolution. Quelle honte que cette reculadeCar on ne persuadera a personne que ce malheureux vieillard, dont la faiblesse de caractère se décèle si ouver- tement dans sa lettre de retractation, ait jamais osé prendre sur lui de refuser l'ab- solution a M. Iweins. Les journaux cléri- caux auront beau jurer par tous les saints que l'épiscopat n'y est pour rien personne ne le croira. L'épiscopat a reculé. II a eu tort. On est la vérité ou on ne l'est pas, et quand on a la prétention d'être la vérité, il faut avoir le courage dé la dire, et de frapper sans merci quiconque se met en travers de sa volonté souveraine. On peut être odieux, mais on est logique. La Saint-Barthélemy était logique. Sans elle, le protestantisme aurait fait son chemin en France comme il l'a fait en Allemagne. Le garde-champêtre de Ylamertinghe, eondamné pour vol, est toujours en fonc- tions. II y a quinze jours, nous nous sommes quclque peu étonné de voir que l'autorité supérieure mette tan t de lenteur a prendre a, l'égard de eet estimable fonctionnaire la mesure que réclament a la fois la dignité de Ia justice et la sécurité des citoyens. Nous espérons fermement que l'opinion publique recevra trés prochainement, a eet égard, les satisfactions qu'elle a le droit de ré- clamer. UN PÈLERINAGE A LA BRIELLE. Le ler avril, la Hollande était en fêteelle célé- brait le 300e anniversaire de la prise de la Brielle par les gueux de mer. Pour bien se rendre compte de l'importance de cette manifestation nationale, il faut se rappeler l'état dans lequel se trouvait le pays, quand le ler avril 1572, les gueux de mer abordèrent a la Brielle. Les Pays-Bas étaient courbés sous le genou du due d'Albe, l'Inquisition faisait, son oeuvre et Philippe II méritait la bénédiction qu'il n'avait reijue de Charles-Quint qu'a la condition d'exter- miner l'hérésie. La tache pourtant n'était point facilela liberté de conscience avait gagné déja bien du terrainle fer, le feu, la fosse étaient les seuls moyens d'arrêter la contagion, Philippe les employait. Les raffinements ne manquaient même point aux gupplices C'est ainsi que pour empê- cher les condamnés de confesser leur foi en mar- chant a la mort, on leur pergait d'abord la langue avec un fer rougi a blanc. En 1858, on a trouvé dans les archives d'Ypres une sentence, portant l'ordre de percer la langue d'un hérétique, écrite et signée par le due d'Albe lui-même. Vers l'épo- que oü la Brielle fut prise, notre ville était un foyer d'hérésiequelques années plus tard, quand, après un long siége, Ypres se vit de nouveau sou- mise aux Espagnols, l'évêque qui y fut installé se mit tout d'abord a purifier son diocèse; pour cela, il fit déterrer les cadavres des hérétiques et les fit pendre au vent. En 1572, les Pays-Bas semblaient réduits a merciles tentatives du prince d'Orange avaient échoué, le due d'Albe triomphait il se préparait a aller se reposer en Espagne sur ses lauriers san- glants. C'est alors que quelques centaines de Gueux de mer, repoussés d'Angleterre par Elisa beth, sont jetés par l'orage a l'embouchure de la Meuseils s'emparent de la Brielle.- Comme l'a dit un historiën Le grain porté par l'orage est tombé sur le rocher et s'enracine. L'arbre qui va- naitre de ce germe étendra ses branches jusqu'aux Indes orientales. La prise de la Brielle, c'est le signal de la liberté pour la Hollande a partir du ler avril 1572, l'ceuvre libératrice se continue jus- qu'au jour oü, affranchie par le génie du Taci- turne. les provinces hollandaises se constituent en république fédérative. Quant a nos provinces, après avoir entrevu un instant leur indépendance, après avoir énergiquement lutté, elles retom- baient, hélaspour plus de deux cents ans, sous le joug de l'étranger. La prise de la Briglle avait été l'aurore de la liberté pour la Belgique comme pour la Hollandepour la Belgique aussi eet an niversaire devait être une fête. Je quitte Anvers avec quelques amis dans l'après-diner du samedi 30 marsle soir, nous arrivons a Bréda. Les quatre cinquièmes de la population y sont catholiques. II était intéressant de comparer la physionomie de la ville a celle des villes protestantes. Tout est tranquille a Bréda; on n'y remarque aucun préparatif de fête, ni sa- pins, ni drapeaux, ni verres de couleur pour l'il- lumination sur la Grand'place seule s'élèvent quelques arcs de verdurel'un deux est surmonté d'un transparent allégorique la liberté s'élan- gant des eaux de la mer et brisant des chaines un autre transparent porte un lion qui met en pièces le drapeau espagnol. J'apergois aussi, au bout de la Grand'place, une sorte de kiosque, oü je suppose qu'une musique militaire se fera en tendre; on m'a conté depuis qu'une musique beige, la musique de Malines, y a donné un con cert. C'est la toute la décorationon nous montre encore, a l'extrémité de la Grand'place, un arbre trois fois séculaire, planté par les gueux, nous dit-onj'aime a croire que le lundi on l'aura pavoisé;j'ai lieu d'en douter cepcndant, car le dimanche l'enthousiasme paraissait mince. J'ai lu

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L’Opinion (1863-1873) | 1872 | | pagina 1