alors qu'il va parler. Tous les journaux ont
reproduit ses paroles il remercie la nation, tous
ceux qui Faicclament et rappellc, enquelques mots
énergiques, le souvenir du Taciturne et desGueux
de mer.
Le roi se tait, on accueille tres chaleureuse-
ment son discoursmais tout a coup, reculant de
quelques pas, le roi se découvre et s'écrie
N'ayons amjourd'hui qu'un cri Yive la Patrie
un frémissement court dans la foule, l'enthou-
siasme se traduit par de longues acclamations. Il
y avait la quelque chose de grand trois siècles
s'étaient écroulés depuis la prise de la Brielle
après avoir gouté les joies de la liberté, la IIol-
lande avait fini par connaitre, elle aussi, les mi
sères de la servitudeelle n'avait point échappé a
l'ambition eH'rénée de Napoléon.
Dans cetifce puissanté clameur, il y avait plus
qu'un sentiment de legitime fierté pour un passé
glorieux, il y avait comme un engagement nou
veau de la nation et du prince de maintenir l'in-
dépendance de la patrie. Avant" et pendant la
guerre de 1870, tan dis que la Belgique devinait
les odieusea convoitises de Napoléon III et l'an-
nexion qu'il méditait contre elle, la Hollande était
obsédée d'irne autre crainte elle redoutait les
convoitises de la Prusse. La Hollande affirmait a
la Brielle ce que la Belgique affirmait a l'avéne-
ment de Léopold II, sa volonté de rester lihre.
Nous n'avons perdu aucune des paroles du roi
sa voix sonne comme un clairon. J'ai l'honneur de
connaitre le grand artiste qqi lui a donné des
legons de cliant; il lui a, par ma foi, appris a
poser la voix et a lancer la note de la belle fagon.
Le roi remonte sur l'estrade, M. De Yries re-
prend son discours. Chacun recoit alors son petit
compliment r les organisateurs de la fête, ceux qui
y ont pris part, le roi, que dans son affection le
peuple ne sépare pas de la patrie. L'orateur in-
voque le Taciturne 11 qui est demeuré fidéle au
pays jusqu'a la mortet finit par ces paroles
Renouvelons dans cette fête de la patrie,
notre union, qui est notre forcemettons de cótó
tout intérêt personnel, toutes mesquines jalousies,
toutes vaines divisions. Arrière toute tiédeur
pour ce qui pouche le droit et la consciencemais,
avant tout, assez de ce fanatisme funeste, qui
déshonore par la haine la religion d'un Dieu
d'amour. En gageons notre foi d'bommes a consa-
crer a la pafirie, selon l'exemple que nous avons
regu de Guillaume d'Orange et de nos ancêtres,
toutes les forces, toutes les facultés de notre être
et alors, avec cette volonté au coeur, en frères, la
main dans la, main, levons les yeux au ciel et que
toutes nos émotions se fondent en cette prière que
répétaient nos pères que Dieu soit avec nous
Une cantate succède a ce discours, c'est la troi-
sième la cérémonie est terminée.
On avait réservé a la presse deux tentes spé-
ciales les jomrnaux bollandais, beiges et anglais
y ont leurs correspondants, leurs reporters et
leurs dessinaAeurs. La-Belgique est largement re-
prósentée a la fête Voila les députations d'An-
■vers et de ©and, voila tout un contingent de
BruxelloisNous sommes quatreenfants d'Ypresj>
La-bas sont lés Liégeoisils n'ontpas oublié qu'ils
comptent des Gueux de mer parïni leurs ancêtres.
Mais ou sont clone les Tournaisiens Ne se seraient-
ils point souvenus de Nicolas Bernard et d'Antoine
de Fervacques, leurs concitoyens, qui ont versé
leur sang pour l'indépendance batave? Je fre-
donne leur elaarmant refrain Les Tournaisiens
sont la. n Pexids-toi, Delmée, les Tournaisiens ne
sont pas la
Le roi parti, la foule se répand de tous les
cótés nous quittons le Maarlandsplein, auquel
notre vieux poëte flamand a attaché son nom, et
nous cbercho-ns a voir le cortége, den optocht.
Nous n'y parvenons pas. Je me conten e de la lec
ture du programme qui donne une description de
chacun des eliars et jusqu'aux noms de ceux qui
les montent. C'est ainsi que parmi les hommes
d'équique d'un navire roulant, je rencontre un de
Valois a cóté d'un Schaap et d'un Bortslap.
A trois heiircs, on offre au roi un déjeuné di-
natoire. Je n'en connais guère de détails; on
racontait le lendemain que le roi y avait montré
une grande cordialité et y avait pris la parole a
plusieurs reprises. Ce n'est pas lui qu'on sur-
nommera de cwyger, a fait obseryer a ce propos
quelqu'un qui ne respecte rien. II y avait cin-
quante couverts. M. Motley assistait au banquet
et le roi lui avait porté un toast en anglais on
avait remis a l'illustre historiën le diplome de
docteur de l'Université de Leyden. On remarquait
aussi parmi les convives un descendant de Blois
de Treslong. Quatre Beiges avaient été invités, le
roi avait bu fort galamment a la Belgique et aux
Gueux d'Anvers et de Gand qu'ils représentaient.
11 parait que l'on avait jugé bon de rédiger en
frangais le menu de ce déjeuné dinatoire.
Croyez bien que je ne m'en scandalise pason
pourrait cependants'étonner de la tendance qu'ont
les Hollandais a mêler des mots francais a leur
langue ce n'est point chose nouvelleil en était
déja ainsi du temps de la prise de la Brielle. Bayle
dit a propos d'une oeuvre de Marnix II se pi-
qua de ne se servir que de mots flamands et il
prit le contrepié des autres poëtes de sa nation qui
fourraient dans leurs ouvrages une infinité de
termes pris du francais, n Le pis est qu'on mal
traité parfois le frangais a plaisir de Koude heer
Smits s'est rnoqué de cette manie dans une char
mante nouvelle, qui a pour titre Clémentinedont
je m'étonne fort qu'il n'existe point de traduc
tion.
Pendant le banquet, il y avait des jeux pour le
populaire, comme on disait jadis. J'aime en gé-
néral assez médiocrement cette fagon de divertir
le peuple qu'il s'amuse, c'est parfaitpour cela
il ne faut point le rabaisser par la plupart de ces
jeux, que l'on nomme populaires, on n'obtient le
plus souvent que ce résultat. J'ignore quelle im
pression m'eussent faite les jeux populaires de la
Brielle, je m'y suis dérobé; le programme en an
nonce sept, parmi lesquels l'un d'eux, pap eten
m'intrigue. Pap eten, manger de la bouillie, cela
peut être un agrément, mais cela ne me parait
point, a proprement parler, un jeu. Je me fais
expliqueur ce qu'est ce divertissement deux in-
dividus s'installent aevant une terrine de pap.
On leur bande les yeux et on les arme chacun
d'une cuiller. Ahcertes il mangeront tres bien
les yeux ban dés! Mais voici le difficile l'un doit
donner a manger a l'autrevous imaginez l'em-
barras et puis les rires. J'ai négligé de me faire
renseigner sur un point a qui appartient la vic-
toire dans ce combat singulier A celui qui mange
le plus ou a celui qui traite le mieux son part
ner?
Nous renongons a tout espoir d'arriver jusqu'au
cortége et nous nous décidons a retourner a Rot
terdam, ou l'on nous promet monts et merveilles.
Trouvons d'abord un bateau a vapeur qui nous y
mène les bateaux ne partent point encore. Une
société de cliant d'ensemble de Rotterdam nous
offre l'hospitalité sur un petit remorqueur mis a
sa disposition exclusive et nous profitons de son
obligeance. Mallieureusement notre bateau n'a
point une marche bien rapide, et quand nous dé-
barquons a Rotterdam il est cinq lieures du soir
Blus de cortége! Mais quelle compensation ne
trouvons-nous point dans le spectacle, que nous
donne la ville en fêteNon, on n'imagine pas a
quel degré de délire le Hollandais' si placide peut
se monteren le voyant si calme, si mesuré, se
douterait-on de ce qu'il cache sous sonflegme. Vous
voyez la un baril cela a l'air bien innocentc'est
un baril de poudre cependant. II ne saute qu'une
fois, mais quel vacarme alorsC'est vers la Hoog
straat que se porte la föule ce sont des flots hu-
mains qui se poussenton s'y jette a corps perdu,
c'est a la grace de Dieu, on ne s'appartient plus.
Laissons-nous entrainer. Les drapeaux et les
fleurs décorent les maisons de haut en bas, c'est
une vraie profusionde loin en loin quelque fa-
gade non pavoisée affiche 1'abstention d'un catho-
liquela foule ne s'en émeut point Vive la li
berté L'enthousiasme poëtique s'en est donné a
coeur joieil s'est épanché dans de longues pan-
cartes que l'on découvre a chaque pasle senti
ment national se traduit de toutes les fagons ici
on a peint la mort d'Egmont et de Hornesplus
loin, j'apergois dans sa niche un Espaguol, Spi-
nola, qui fait la plus piteuse mine du monde sous
la couche de couleur orange dont on l'a badi-
geonné. On débite des bonbons patriotiques et des
voix infatigables recommandent le vrijheid peper-
ment aux couleurs nationales.
Mais bientót la ville tout entière s'allume l'il-
lumination est magnifique ce ne sont point de
modestes chandelles d'un sou, fichées dans la
glaise, ni même quelques verres coloriés placés a
distance sur le rebord d'une fenêtreles murs
disparaissent sous les guirlandes de feu depuis le
premier étage jusqu'a la cornichede distance en
distance des feux de Bengale jettent leurs lumières
éclatantesdu milieu même de la foule s'élèvent
des fusées, qui retombent dans les groupes sans
que personne s'en émeuve.
Le mouvement s'accentue d'abord des bandes
d'enfants, revêtus de costumes oranges, sillonnent
la loule en chantanta leur tour, jeunes gens et
jeunes hlles, se donnent le bras, tantót s'avancent
'en dansant, tantót s arrêtent pour former des
rondes. La foule se bouscule et s'agite, c'est une
vraie fièvre. Je songe encore a ce bon type hollan
dais si tranquille d'ordinaire et je me dis que bien
certainement, puisqu'on saute mieux quand on a
pris son élan, le Hollandais passe sa vie a prendre
le sien mais, tudieu comme il saute Une
paysanne trépigne sur place avec une sorte de
frénésie, je m'arrête stupéfait devant eet étonnant
échantillon de gaieté champêtre, sans songer a la
bouedont ellem'éclaboussejoyeusement. M. Emile
de Laveleye, dans ses remarquables études sur
1'óconomie rurale de la Hollande, rappelle qu'au
moyen-age, après le battagé, un banquet rustique
réunissait les travailleurs et qu'a ce banquet suc-
cédait un bal étrange oh les couples, au lieu de
tourner envdansant comme dans la valse, tour-
naient en se roulant a terre je ne peux m'em-
pêclier de penser que dans 1'effervescence de cette
foule, il y a un legs du passé et une tradition en
core vivante de ces jeux tumultueux.
Au milieu des cris de tout genre, une chanson
de circonstance revient sans cesse nous en sai-
sissops quelques mots
Cela se chante sur un air assez entrainant, mais
que la foule, qui ne parait point avoir un instinct
musical bien sur, arrange d'une singuliere fagon.
Nous allons toujours,poussés et secoués, et quand
nous rentrons vers minuit a l'hötel, la sarabande
se poursuit.
Le lendemain nous prenons place sur un stoom
boot le temps est splendide, le soleil tamise a
travers la vapeur du matin une blanche lumière,
le fleuvë a des reflets d'argent et notre navire file
rapidement sur la Meuse, tandis que la musique
beige que nous avons a bord répond a la dernière
acclamation qui nous saluè sur la rive.
ENTENDIJ DANS LA TRIBUNE DE LA
CHAMBRE.
Un provincial a un habitué bruxellois Vou-
driez-vous me dire, Monsieur, qui est ce représen
tant a tête vénérable, avec sa majestueuse cheve-
lure blanche
Le Bruxellois. C'est M représentant
de
Le provincial. Quel air intelligent il a
Le Bruxellois. Belle tête, mais de cervelle
point.
Le provincial. AhMonsieur. Combien do
députés sont bustes a ce point.
JEUait® clivex*®.
Arrestations a Bruxelles. Une triple arresta-
tion a eu lieu, a Bruxelles, avant-hier, dans les
circonstances suivantes Dans la matinée de ven-
dredi, deux jeunes gens, assez convenablement
mis, se présentaient chez M. Geber, bijoutier,
établi au Passage, et lui offraient en vente une
bague, disant que si un prix convenablè leur était
donné, ils auraient a vendre d'autres bijoux.
M. Geber offritpourla bague sa valeur, 100 francs,
que les jeunes gens acceptèrent sans faire la
moindre observation.
- Quelques lieures après, ils se représentèrent,
en effet, offrant cette fois plusieurs bijoux ornés
de diamants. Cette nouvelle démarche, succédant
si promptement a la première, parut suspecte a
M. Geber, qui pourmettre les vendeurs al'épreuve,
leur offrit le tiers de la valeur des bijoux. Cette
De Watergeuz kwam in den Briel
Leve de Watergeuz
De Spanniard kreeg daar op zien'ziel.
Leve de Watergeuz