III. Ses pböneurs.
A ceux qui nient encore que le clérica-
lisme soit en progrès dans notre arrondisse
ment, nons ne demandons qu'une chose
c'est de nous dire s'ils croient, en leur urne
et conscience, qu'un journal aussi manifes-
tement réactionnaire que le Journal d'Ypres
cut été possible a Ypres, il y avingt ans.
Le cléricalisme a toujours eu des organes
dans notre arrondissement. Mais quelle
difïérence des journaux d'alors avec le
journal des petits vicaires Autant ceux-la
affectaient de modération et de réserve,
autant celui-ci affiche de morgue et d'inso-
lence.
Et cette insolence ne s'attaque pas seule-
ment a la personne de ses adversaires elle
s'en prend a nos plus chères libertés, qu'elle
bafoue chaque jour sans vergogne au profit
du Syllabus et dc cette incommensurable
imbécillité qui s'appelle l'infaillibilité du
pape.
Les petits vicaires usent dc leur droit. Qui
le conteste Instilués pour crétiniser le
monde, ils s'acquittent consciencieusement
de la mission qu'ils ont recue de Rome.
C'est fort bien. Mais jamais, au grand
jamais, les petits vicaires d'il y a vingt ans
n'auraient osé écrire ce qu'écrivent ceux
d'aujourd'hui les catholiques les plus
sincères, les plus convaincus, auraient jeté
les hauts cris, tandis qu'aujourd'hui ils
acceptent, sans faire la moindre grimace,
les monstruosité du Journal d'Ypres.
II y a la une situation sur laquelle nous
appelons l'attenlion la plus sérieuse des
libéraux de notre arrondissement. Ne
jugeons pas de l'état de l'opinion par les
élections seulement. Les élections peuvent
nous être contraires ou favorables dans un
arrondissement sans que l'on puisse en con-
clure avec certitude que, dans cet arrondis
sement, le libéralisme retrograde ou pro-
gresse. Mais lorsque l'on voit un journal tel
que le Journal d'Ypres s'implanter au
milieu d'une population et y acquérir un
certain degré d'autoritéon peut affirmer,
avec certitude, que le cléricalisme y est en
progrès et qu'a moins d'une énergique
réaction il ne tardera pas a régrter en
maitre.
candidal au constil communal, il nffectait alors un
libéralisme ardent, exalte même, el line grande indé
pendance d'allures vis-a-vis de la e iterie. A peine
installe duns son siége communal, son horizon so
rnodifie. Piroueltant sur sa base, il fait prestement
volte-face a ceux qu'il a combatlns la veille, lance He
douces oeillades aux puissants du jour bref, il de
viant, en un tour de main, sans transition cornme
sans pudeur, aussi humble, aussi servile, aussi ram
pant qu'il avait paru, avanl son élection, indèpen-
dant et digne.
Elle est raide Ia penle des palinodies. On y glisse
vile une fois engage. M. Beaucourl ne fut mème pas
longlernps liberal a la fncon des meneurs. II suffit de
la première occasion pour qu'il a git comrne un ca
tholique.... un catholique affublé d'un masque doc
trinaire. Successivement il illumina pour le '25e anhi-
versaire du pape, arbora les couleurs pontificates; il
fit plus il relira ses fils de notre établissement com
munal pour les placer chez les Jesuites. Et cet
homme, Ie comité de I'Association ose Ie pröposer
aux suffrages de la libérale ville d'Ypres! G'est une
insulie pour les électeurs et une fletrissure pour les
libéraux sincères dont Ie nom figure a cóté de ce ca-
meléon politique.
Et quelles raisons pour maiutemr ia candidature
de cel ètre amphibie? Aucune i|ui supporte I'exa-
men.
Sa popularité rachète-l-elle sa versatihte? Sa po-
pularité, cornme sa géiurosité, est Irop connne pour
insister. A qui ce maiheureux candidal a-t-rl jimais
rendu Ie plus petit service
Ses lalenlsdu moins lui tiennent-i's lieu de popu
larité'? Mais vit on jamais un ètre róunissant des
prétentions plus sottes, une suffisance plus ridicule a
une nullité plus compléte et a une plus crasse igno
rance?
Que fait-on'valoir en faveur de celte candidature?
Qu'a la veille des élections il est Irop tard pour cher-
cher un autre candidal, qu'il faut voter pour toute la
liste, crainte de voir un catholique entrer au con-
seil. Ce raisonnernent est une hypocrisie a laquelle
aucun électeur ne se laissera prendre. Car les aver-
tissemeuts n'ont pas manqué aux membres du comité
avanl la convocation de I'Association on leur a dit
de toutes parts l'impopularité générale de leur can
didal. Maiseux, ils n'ont voulu entendre a rieri A
mesure que des candidatures nouvelles se produi-
saient, jls provoquaient la retraite d'un conseiller
sortant, et c'est ainsi que la bonne foi des membres
tie I'Association a été surprise jusqu'au moment oü
l'on vint présenter en bloc la liste compléte, sans
discussion, sans choix, sans division de scrutin.
Alors on vit, mais trop tard, comme toujours, qu'oti
était joué.
Pourtant les bons candidats pour remplacer M.
Beaucourt ne rnanquent pas. On les Irouverait encore,
si on le voulait sincèreirrent.
Et ne serait-ce pas le plus sur moyen d'empêchfr
l'avériement d'un catholique? CommentI Messieurs
les meneurs, vous failes tout ce qui est possible pour
méconteriter une notable fraction de vos concitoyens
et, quand est faite la scission que vos allures despo-
tiques ont provoquée, vous vous plaignez
Vous criez au voleur et e'est vous qu'on prend la
main dans Ie sac! Eh soyez done sérieux
Crovez-vous que les électeurs intelligents se paie-
ront de vos distinctions... casuistiques? Quelle diffe
rence enlre M. Beaucourt el un cler ical
M. Beaucourt illumine en l'honneur du pape, non
le pape, chef spiriluel de la religion catholique, mais
le pape-roi. Un clerical agit-il nutrement
M. Beaucourt arbore le drapeau pontifical jaune et
blanc et, a cóté de ce sinistro symbole du plus abject
absolutisme qui fut jamais, lui liberal, lui Üelge, il
proslilue le drapeau tricolore, notre glorieux éten-
dard de 1830, emblema de notre independence et de
notre liberie. Les clericaux n'ont-ils pas fait comrne
lui
M. Beaucourt, nous l'avons dit, retire ses fils du
collége communal. Lui le candidal de l'Asssocialion
libérale, le conseiller de la co.,mune, oblige ace
double litre de protéger de toutes ses forces nos èta-
hiissernents Ibiques, ii décerne a notre collége uno
des plus belles institutions de la vrlle un brevet
d'ipcapacitè. II iufiige, autant qu'il Ie peut, a cel éta
blissement tnodéle, une marque publique de defiance,
et cela pourquoi Pour livrer ses enfants a Educa
tion des Jésuites, c'esl-a dire pour leur inculquer des
principes qui sent l'antithèse des principes libéraux.
Encore une fois, ou est la difference entre la con
duite de M. Beaucourt et celles des cléricaux les plus
fanatiques
I! cede, dit-on, en agissant ainsi, a des considera
tions personnel les, a une pression de familie. Ridicule
excuse! Le public ne doit pas se próoccuper de sem-
blables considerations. Celui qui brigue l'honneur
d'un mandat a des devoirs a remplir, devoir s aux-
quels nnl prétexte ne peut le souslraire. Si M. Beau
court ne peut pas concilier ses devoirs publics avec
les exigences de ses proches, qu'il centre dans la vie
privée personne n'aura plus a s'enquérir alors de
ses fails et gestes. Mais il serail, ma foi. par trop
commode de jouir des avantages et des honneurs de
la vie publique, sans en accepter, en métne temps,
les inconvénients et les charges.
D'autres tentalives se frnt^ encore pour juslifier
M. Beaucourt, aussi ridicules que les précódentes. II
s'en produit méme quelques-unes d'une nature si
mesquine que nous dédaignons de les enumérer, ne
voulant pas humilier davantage notre adversaire aux
yeux de ses concitoyens.
Nousaurons d'ailleurs a revenir sur la personna-
lité de M. Beaucourt. Pour Ie moment nous avon«
voulu peindre le personnago a larges traits. Le profil
plus détaillé et les grimaces viendront après. Ce qua
nous venons d'en dire sufiit, du reste, deja pour
mettre l'électeur en garde contra les manoeuvres et
les embCtches dont le circonviendront les meneurs
grands et petits, dans Ié hut de surprëndre sa bonne
foi, de le tromper, quitte n rire de sa simplicite lors-
qoe le tour sera joué et quo M. Beaucourt, le Bru-
geois, sera de nouveau nommé conseiller communal
de la ville d'Ypres.
Nous apprenons de source certaine que l'adop-
tion de la candidature de M. Beaucourt a provo-
qué diverses demissions a I'Association. Les dé-
missionnaires, ne voulant' a aucun prix de cette
candidature, ont préféré se retirer de la Societé.
Voila un début qui ne promet rien de bon pour
les meneurs.
CORDE DE PENDU.
On lit dans le Progrès
Nous reviendrons sur chacun des candidats
et nous déclarons dès a présent que c'est pour leur
donner notre sympatbique appui.
Ces lignes nous remettent en mémoire les
élections legislatives de 1863 et 1864, lorsque
M. Désiré Vandenboogaerde de Poperinghe était le
troisième candidat libéral pour la Chambre. Alors
aussi le Progrès promettaitson plus sympathique
appui, n M. Alplx. Vandenpeereboom conjurait
ses amis de ne pas séparer son nom de celui de
M. Désiré Vandenboogaerde; tandis que, de son
cóté, M. Henri Carton, alors commissaire d'ar-
rondissement, ne recommandait même pas la can
didature de M. Vandenboogaerde dans ses tournees
électorales.
Le Progrès serait-il revenu aujourd'hui a de
meilleurs sentiments La raison a-t-il pris, chez
ses patrons, la place de la rancune? C'est possible.
Toutefois
Ce bloc enfaiiné ne niedit rien qui vaille,
et nous engageons vivement tous ceux qui ont
a coeur de voir 1'élément progressiste entrer au
conseil, a se souvenir
que la méfiance
Est mère dó la süreté.
Compère Progrèsil est maladroit de parler de
corde dans la maison d'unpendu.
Encore une légende qui disparait Celle de
la captivité du pape au Vatican.
II faudra désormais que les journaux ultramon-
tains trouvent une autre balangoire que celle de
la paille humide oü ils s'amusaient a faire pourrir
l'auguste et saint vieillard. Le pape est libre.
C'est lui-même qui le déclare, dans une lettre que
son secrétaire d'Etat, le cardinal Antonelli, a
adressée a tons les membres du corps diploma
tique accrédité pres le souverain pontife catho
lique.
S'il se déclare libre, l'auguste et saint vieillard,
c'est qu'il l'est apparemment, et l'on ne nous dira
pas qu'il peut se tromper la-dessus. C'est un cas
sur lequel son infailliRilité est a coup sur plus in-
faillible que sur aucun autre.
II est vrai que l'auguste et saint vieillard se
plaint en même temps de n'être point indépen-
dant. Nous ne comprenons pas trop en quoi son
indépendance est plus gênée que sa liberté, puis-
qu'il peut faire, sans controle et sans entraves,
tout ce qu'il lui plait pour le gouvernement de sou
Eglise. Ajoutez-y un petit revenu de trois mil
lions deux cent vingt et quelques mille francs,
garanti et régulièrement servi par trimestre, et
dites, lecteurs, ce qu'on peut rêver de plus pour
se trouver en possession d'une parfaite et honnête
indépendance
Entre nous, si l'auguste et saint vieillard a cru
devoir parler de son manque d'indépendance, ce
ne nous semble être que pour garder un prétexte
de convaincre le monde, comme il dit encore dans
la même lettre, du triste sortréservé a l'Église
et au pape par le changement d'une situation pro-
videntiellement ordonnée par Dieu. Une plainte,
entre parentheses, qui a une forte senteur d'héré-
sieetde révolte. Car enfin, si Dieu avait ordonné
la situation que regrette tant son représentant sur
la terre, comment les hommes auraient-ils pu
changer cette oeuvre providentielle, malgré la vo-