Papauté. Ainsi débute le pieux Journaldans un
article conpacré a célébrer les graces attachées a
certain pèlerinage qui a lieu aujourd'hui même
en l'église de Meerbeke-lez-Ninoveet dont
Mgr de Gand a daigné accepter la présidence,
sans doute pour flatter la vanité du bon Dieu,
dont il a besoin pour restaurer le Pape sur son
tröne.
Ce sera, parait-il, extrêmement édifiant, et
nous joignons sincèrement nos instances a celles
du Journal pour engager 110s concitoyens a
pèleriner a Meerbeke-lez-Ninove, ou ils au-
ront l'occasion bien douce de vénérer le tombeau
de Sainte-Berlinde.
A parler francbement, nous n'avons pas l'hon-
neur de connaitre Sainte-Berlinde. Le Journal a
beau nous dire que c'est une parente de Saint-
Amand. Comme ce saint nous est absolument
inconnu, ce renseignement ne nous avance guère
mais Mgr de Gand, qui ne passe pas pour un dé-
mocrate, lui faisant visite, il n'y a pas a clouter
que ce ne soit une sainte de toute première con
dition et fort bien en cour auprès des Trönes et
des Dominations.
Au pis aller, si cela n'avance pas de beaucoup
les affaires du Pape, cela fera toujours celles du
curé de Meerbeke, qui a payé la réclame.
\J Opinion lui en fait une pour rien. Eh bien,-
vous verrez que ce digne curé ne sera pas encore
content. Parole d'honneur! ces gens-la ne sont
pas a contenter.
L'ex-père Hyacinthe se marie.
Le Journal d'Ypres est furieux et accable des
plus noires injures le religieux assez oublieux de
ses devoirs pour prendre femme.
Trés bien.
Mais voila qu'on arrête un petit-frère ou
deux ou trois, pour l'une ou l'autre de ces
ignominies dont eet ordre dégoutant, mais pieux,
semble ambitionner la spécialité.
Aussitót le Journal d'Ypres entre en furie et
déverse des torrents d'injures... sur les honnêtes
gens qui signalent ces Révérends frères porci.ns
au dégout public.
D'ou il convient de tirer cette conclusion, rigou-
reuse quoiqu'attristante, vque si l'ex-père Hya
cinthe, au lieu de prendre une femme, avait pris
un petit gargon, les petits vicaires du Journal
IT Ypres auraient mis a le défendre autant d'ar-
deur qu'ils déploient aujourd'hui a l'attaquer.
UNE EXCURSION SCOLAIRE A LONDRES.
Le Muse'e e'conwiique de Twickenham.
Parmi les établisscments d'instruction que nous
nous promettions de visiter avec le plus desoin, se
trouvait le Musée économique de Twickenham,
du entièrement a l'initiative d'un homme de coeur
et d'un philanthrope éclairé,M. Thomas Twining.
Malheureusement, en arrivant a destination, nous
apprimes, a notre grand regret, qu'un incendie
avait détruit le Musée jusqu'au ras du sol, quel-
ques mois auparavant.
Ce Musée avait été établi en vue de répandre
d'une fa.Qon a la fois scientifique et populaire, les
connaissances usuelles qui sont nécessaires a l'en-
tretien de la santé du peuple. Toutes les classes
de la société, et principalement les plus pauvres,
pouvaient y apprendre comment une maison doit
être construite pour être saine, quelles améliora-
tions on peut apporter a. celles qui ne remplissent
pas toutes les conditions hygiéniques"quels sont
les meilleurs vêtements, les meilleurs aliments et
leur mode de preparation. On y indiquait le moyen
de distinguer les choses qui sont convenables,
saines, substantielles, durables et réellement a
bon marché, de celles qui n'ont ces qualités qu'en
apparence.
Ce Musée servait en quelque sorte de magasin
pour fournir des objets de démonstration a une
série de conférences composées par M, Twining
et destinées a être lues devant un auditoire d'ou-
vrierselles comprennent d'abord une introduc
tion explicative du but et de Timportance de l'éco-
nomie domestique, puis l'exposé élémentaire des
sciences qui servent de base a l'hygièneensuite
viennent la démonstration des propriétés physi
ques des corps, des lois mécaniques dans leurs
applicatiops a la vie journalière, quelques notions
pratiques d'aéro^tatique, d'hydrostatique et d'ac-
coustique, sur la lumière et la chaleur, et en der
nier lieu des éléments de chimie inorganique et
organique, desélémentsd'histoirenaturelle, d'ana-
tomie et- de physioiogie humaineces legons si
utiles seront suivies d'une deuxième série de,lec
tures sur l'économie domestique, auxquelles
M. Twining tiavaillait lors de notre visite.
Malgré les infirmités qui retiennent M. Twining
dans sont cabinet1 de travail, il est peu d'hommes
qui déploient une activité plus constante et plus
utile en faveur de Finstruction populaireil con-
sacre a celle-ci son temps et sa fortuneil a cons-
tamment chez lui'un secrétaire, un dessinateur,
un aide-préparateur et un charpentier qui prépa -
rent sous sa direction les .objets et les appareils
qui doivent servir a illustrer ses legons, etil
s'engage en outre a faire donner celles-ci a ses
frais, dans Londres et les faubourgs, h la seule
condition que le public soit admis gratuitement
aux séances.
Ne pouvant donner lui-même la legon, M. Twi
ning a partagé la tache entre un professeur,
M. Ellis, qui lit la conférence, et un démonstra-
teur M. Hudson, qui fait passer les objets sous les
yieux du public et exécute les expériences indi-
quées par le professeur. Au premier abord, cette
division du travail peut sembler singuliere, mais
en réalité il parait qu'elle produit d'excellents ré-
sultatsle professeur n'est pas troublé par la né-
cessité de veiller aux expériences, le démoristra-
teur n'est pas préoccupé de retrouver le fil de son
discours'.
Nous avons vu dans le laboratoire de M. Twi
ning quelques-uns des appareils qui servent a ses
lecturesles planches sont largement dessinées,
avec des couleurs voyantes et choisies de telle
sorte qu'elles matérialisent autant que possible les
propriétés ou les fonctions des corps ou des orga-
nes qu'elles recouvrent; chaque fois qu'un objeta
été montré a l'auditoire, le démonstrateur place
a cóté une large étiquette afin que le nom s'im-
prime dans la mémoire des assistantsdes ta
bleaux synoptiques résument les divisions scien-
tifiques et donnent d'excellentes vues d'ensemble
tout enfin dans eet enseignement vraiment popu
laire, est combiné en vue du degré de culture des
intelligences auxquelles il s'adresse; on a cher-
ché a frapper vivement les yeux par des images
caractóristiques, susceptibles de pénétrer profon-
dément dans des cerveaux que l'éducation n'a pas
rendus plastiques. Nous sommes revenus enthou-
siasmés de ce charmant cottage de Twickenham,
oü M. Twining prépare, avec une sollicitude pa-
ternelle, un enseignement populaire que tous ceux
qui s'occupent de l'éducation du peuple devraient
prendre pour modèle.
{Discussion)
VARIÉTÉS.
Appel comme d'abus.Bef us de sépulture. Com
petence. Delimitation entre la juridiction civile
et la juridiction eccle'siastique. Mceurs judi-'
ciaires canadiennes.
X. Doctrine plaidde au nom de la Fabrique.
II ne faut point que l'attention que nous avons
donnée a l'originalité de ce débat, nous fasse
perdre de vue la théorie développée par M. Trudel
avec un rare talent et une presence d'esprit qui
lui font toujours trouver la meilleure réponse aux
objections dujuge. Voici textuellement la théorie
qu'il a développée et qu'il a drmandé au juge civil
de cofisacrer
II faut toujours arriver a la démarcation
qui divise le domaine civil du domaine spirituel.
Or, je dis qu'en vertu des principes que je viens
d'énoncer, l'Eglise ne saurait être restreinte dans
son action par les gouvernements humains, car
c'est a Elle a fixer cette ligne de division. Lors
done qu'Elle juge qu'une question est de son res
sort, il faut accepter sa décision comme venant de
Dieu lui-même. Vous dites qu'il y a des bornes
queWEglise na doit pas franchir? Eh bien soit
Mals ces bornes, qui doit les indiquer? Sera-ce
aux gouvernements de la terre a établir cette
ligne de démarcation J'ai peine a croire qu'on
puisse le prétendre sérieusement. Ils sont trop
faibles, et passagers. L'Eglise seule a regu de Dieu
la promesse de l'infaillibilitéc'est-a-dire la
garantie qu'elle ne peut se tromper. Bar consé
quent la raison nous dit que, si l'un des deux pou-
voirs a droit d'indiquer la limite precise de
l'étendue réciproque des deux pouvoirs, c'est a
l'Eglise qu'appartient ce droit non-seulement
paree que' la société des ames est supérieure a
celle qui regie les intéréts matériels, mais encore
paree qu'elle seule est capable d'établir cette
division avec la certitude de ne pas se tromper.
(p. 16.)
Et plus loin, il precise encore davantage
8 Je dis done qu'en voulant faire régler les
limites du religieux et du civil par l'Etat, après
avoir épuisé toutes les juridictions, on n'est pas
plus avancé, au lieu qu'en la faisant déterminer
par l'Eglise, j'arrive a un point ou je suis certain
d'être dans le vrai, par conséquent a une ligne de
démarcation que tout catholique devra admettre
sous peine de n'être plus catholique. Ce système
est done le seul bon, et c'est le principe catho
lique que le tribunal doit admettre, vu qu'il s'agit
des rapports d'un catholique avec son Eglise.
Enfin en se résumant il dit au sujet du Pape.
Je crois avoir établi d'une manière satisfai-
sante pour le tribunal, que la forme du gouverne
ment de l'Eglise est telle, que le Pape y jouit
d'une suprème autorité, aussi étendue que celle
d'un monarque absolu il peut faire des lois et les
faire observer ;il peut changer les lois de l'Eglise
quelques auteurs vont même jusqq'a dire qu'il
peut modifier les lois divines, tant est grande
l'autorité qu'on lui reconnait. (p. 22.)
Lejuge J'ai toujours compris que Dieu lui-
même ne pouvait changer ses propres lois paree
qu'elles sont immuables. Le Pape serait done plus
puissant que Dieu?
M. Trudel Je n'érige pas cette opinion en
proposition...
XI. Réplique. L'un des avocats de la de-
manderesse réplique a l'audience du 2 avril 1870.
M. Doutre signale ce fait curieux, que les avocats
de la défense ont cité plusieurs livres de droit qui
sont a l'index, et ont invité le juge a les lire; ce
qui doit placer le juge sous l'effet de l'excommuni-
cation latce sentencicetout comme l'était le défunt
Guibord. L'évêque a d'ailleurs, a la page 7 de son
mandement de 1858, enseigné en propres termes
que le Pape seul a le droit de permettre la lecture
d'un livre a l'index. Aucune permission du Pape
n'a été produite.
Une dernière citation fera connaitre le ton de
cette vive réplique. On m'a reproehé, dit
M. Doutre, d'avoir félicité les sauvages du Canada
d'avoir voulu chasser de leur sol les jésuites
c'était, disait-on, non-seulement les absoudre des
tortures qu'ils avaient fait subir a des mission-
naires, mais encore les en louer... Quand j'ai
parlé de la! suppression des jésuites par les sau
vages, je n'ai pas recherché si les sauvages au
raient du. opérer cette élimination au moyen d'une
bulle comme le Pape, ou par des décrets d'expul
sion comme les princes. Tous et chacun exécutent
cette ceuvre par le mode reconnu par leurs gou
vernements et leurs mceurs respectifs
On ne peut contester l'originalité de cette ar
gumentation Les relations, ajoute l'avocat, des
jésuites n'ont garde d'expliquer ce que c'étaient
que leurs martyrs c'étaient des martyrs politi-
quesallies des Hurons auxquels ils fournissaient
des armes contre les Iroquois, dans la terrible
guerre que se firent ces deux peuples, les jésuites
surpris dans les villages hurons étaient traités en
ennemis... II leur est arrivé d'être tués, dit
M. Doutre, lorsqu'ils avaient tout préparé pour
tuer les autres, Ils ont été traités selon la loi de
Moïse ceil pour ceil, dent pour dent.
Nous voila bien loin du cimetière non bénit de
Montreal et des restes de Guibord qui attendant
une sépulture.
Les défendeurs ne répliquent point, soit que la
loi ne permette pas de répliques de leur cóté, soit
qu'ils y aient renoncé, et la cause est tenue en dé-
libéré jusqu'au 2 mai.
COUR SUPÉRIEURE D€ MONTREAL (CANADA).
(SUITE.)
(la Ve GUIBORD C. LA FABRIQUE DE MONTREAL.)