ET LES AUTRES
Le Voniteur a public, cette semaine, un arrêté
royal tel qu'on en voit rarement dans ses co
lonnes.
Cet arrêté rapporte celui de 22 décembre 1867
conférant la décoration spéciale de 2e classe a Tlr.
Aubry, alors contre-maitre a la manufacture de
rotins de M. VanOye-Van Duerne, a Anvers. Cette
décision est justifióe par une condamnation a
3 mois de prison, prononcée le 26 juiliet dernier
par le tribunal correctionnel de Bruxelles, du chef
de vol domestique.
Nous approuvons cet acte de sévéritémais
nous espérons que le gouvernement ne fera pas
exclusivement preuve d'une semblable rigidité a
l'égard de nos ouvriers et que chaque fois que des
décorés de l'ordre de Leopold commettront des
actes incompatibles avec les lois de l'honneur et
de la probité, le Moniieur annoncera officiellement
leur radiation de l'ordre.
L'arrêté qui nous occupe nous prouve qu'il n'y
avait pas chose réellement étonnante un seul
décoré de l'ordre de Leopold dans la bande lan-
grandiste, si nombreuse cependant. En effet, le
gouvernement qui enlève avec tant de fracas une
décoration a un ouvrier coupable d'un vol domes
tique, ne voudrait certainement pas laisser le
signe de l'honneur sur la poitrine d'individus qui
ont christianisé tous les millions que l'on sait avec
l'aide du tres cher fils et tres habile escroc et faus-
saire Langrand-Dumonceau.
Nous n'avons qu'a nous féli citer do ce que l'or
dre de Leopold ne compte pas un seul langrandiste
au nombre de ses membres.
OHÉ WASSEIGE.
La Meuse de Liége annonce que le tarif Yan-
derstichelen va être de nouveau appliqué sur nos
chemins defer, en ce qui concerne les voyageurs.
Le retour a ce tarif est actuellement chose parfai-
tement décidée, non pas que le ministère ne soit
convaincu que le tarif Wasseige est le meilleur de
tous les tarifs, mais il est obligé de l'abandonner
sans retard c'est ce qu'il va faire sans doute, en
proclamant bien haut que les résultats qu'il avait
produits jusque maintenant étaient riches de pro
messes pour l'avenir.
Mais pourquoi est-on obliger d'abandonner les
tarifs Wasseige C'est la Compagnie des Bassins-
houillers du Hainaut qui l'exige, ace qu'on nous
assure la convention qu'elle a faite avec le gou
vernement, pour la reprise d'une partie de ses
lignes, est basée sur les anciens tarifs. Aux
termes de cette convention, c'est le barème Van-
derstichelen qui doit être appliqué sur les lignes
reprises par l'Etatla Compagnie exigeant aujour-
d'hui l'exécution entière de la convention, le mi
nistère est bien obligé de s'y conformer.
II a essayé cependant de se soustraire a cette
obligation tous les jurisconsultes attachés au
ministère ont été consultés, mais ils ont étó una-
nimes a répondre que si la Compagnie des Bassins
houillers poursuivait l'Ftat en execution de sa
convention, l'Etat perdrait immanquablement.son
procés.
Or, comme l'Etat ne peut avoir qu'un seul
tarif qu'il est obligé d'appliquer sur toutes ses
lignes, force est done au ministre des travaux
publics d'abandonner la trop célèbre róforme do
son prédécesseur.
Le conseil général de la Ligue de l'Enseignement
a décidé que l'assemblée annuelle des membres de
l'Association sera üxée, comme l'année dernière,
au mois d'octobre, l'expérience ayant démoutré
que cette époque était plus favorable a cette sol-
lennité que celle qui coincide avec les fêtes de
septembre.
(Correspondance particuliere de Z'Opinion.)
Nous touchons au dernier jour de nos fêtes de
septembre. Bien que le programme en fut des plus
modestes, elles n'ont pas laissé que de nous ame-
ner un nombre considérable d'étrangers. La foulo
a été grande surtout le premier jour, grace au
soloil, qui s'était fait particulièrement aimable
pour nous aider arecevoir dignementles rifïlemen
qui nous arrivaient des fêtes de Gand.
Mais les jours suivants, la pluie s'est mise de la
partie, et je n'ai pas besoin de vous dire que la
pluie est un triste boute-en-train. Les étrangers
qui encombraient nos hotels, ne sachant plus que
devenir, ont pris le parti de rentrer chez eux, et
quant aux rifïlemen, ils se sont décidés a camper
dans les cafés des environs de la Monuaie, ou ils
mènent joyeuse vie, en dépit de la pluie qui tombe
et de la bise qui souffle.
Les rifflemen n'auront pas eu a se plaindre de
notre politesse. Nous leji avons regus trés conve-
nablement. Mais aussi notre réception, il faut
bien le dire, n'a pas dépassé ce qu'exigeait rigou-
reusement la politesse. D'enthousiasmepas
l'ombre la mode en est passée.
Non pas que nos sympathies pour la libre Angle-
terre ne soient plus ce qu'elles étaient quand ses
volontaires sont venus, pour la première fois,
fraterniser avec'nous. Ces sympathies n'ont pu,
au contraire, que s'accroitre depuis la guerre
franco-allemande, qui a fourni au gouvernement
anglais l'occasion de donner a la Belgique des
gages si manifestes de sa bienveillance.
Seulement, ces fêtes internationales offraient, la
première fois, un attrait de nouveauté qu'elles de-
vaient nécessairement perdre par la suite. Bien
ne s'use vite comme l'enthousiasme. Les Bruxel-
lois et les rifflemen qui ont gardé le souvenir des
fêtes internationales d'il y a cinq ans, s'en seront
bien vite apergu cette année.
Une lutte importante se prépare en ce moment
au sein de notre Association libérale a l'occasion
de la réélection du comité, qui appartient actuel
lement, pour une forte majorité, aux libéraux
progressistes. Les doctrinaires, naturellement,
sont peu satisfaits de cette prépondérance, et
pour la ravir a leurs adversaires, ils viennent de
faire recevoir a l'Association prés de 300 mem
bres nouveaux appartenant a la nuance de leur
opinion.
Les progressistes, de leur cöté, ne sont pas
restés inactifs et, en moins d'une dizaine de jours,
ils ont réuni une liste d'adhérents non moins
nombreuse que celle des doctrinaires.
De sorte que, pour le moment, la situation
respective des uns et des autres ne sera pas modi-
fiée.
Mais les doctrinaires n'en resteront pas la, et
les progressistes les suivront jusqu'au bout.
Comment cela finira-t-il? Hélas! je le crains
bien par une scission.
L'argent ne fait pas le bonheur, dit un vieux
pröverbe. La direction du theatre de la Monnaie
a eu plus d'une occasion, depuis un mois, d'appré-
ciër la vérité de cette maxime. Bien que le roi et
l'administration communale de Bruxelles aient
mis a sa disposition un subside considérable et
qu'elle n'ait reculé devant aucun sacrifice pour
remettre l'opéra sur un pied digne d'une capitale,
le public murmure et commence a trouver qu'on
ne lui en donne pas suffisamment pour son
argent.
La direction, je le répète, fait tout ce qu'elle
peut et nul plus que moi n'est convaincu qu'elle
dit vrai lorsqu'elle affirme que si elle n'a pas une
troupe mcilleure, c'est que cette troupe meilleure
n'existe pas.
Mais le public refuse d'entendre de cette oreille
la. II veut ;des chanteurs, il veut des chanteuses,
et si on ne lui en donne pas, il se regimbe et finit
par ne plus mettre les pieds au théatre.
La question des subsides sera, l'année prochaine,
une des grosses questions que l'administration
communale aura a résoudre.
CHRONIQUE AGRICOLE.
Chaque année, a cette époque, les journaux
publient des appréciations sur la récolte qui vient
d'être faite, et bien qu'il ne s'agisse pas d'une
question politique, on remarque dans ces appré
ciations les plus grandes divergences. C'est sur
tout en France, peuple fantaisiste entoute chose,
que les opinions sont le plus partagées. On n'y
connait pas encore d'une manièro bien certaine,
après tant d'années de discussion, le produit
moyen des terres de nos voisins du Midi. Un spé-
cialistel'évaluait dernièrement a 36 millions d'hec-
tolitresun autre a 100 millions. Entre ces deux
chifïres, il y a pjace pour quelques autres, mais
notre but n'est pas de trancher la question. Nous
voulons, par une recapitulation des renseigne-
ments que nous possédons, établir autant que
possible le produit de la récolte en Europe.
En Belgique, la récolte est tres bonne, en ce
sens surtout que toutes les céréales donnent un
produit excellent. Un fait assez remarquable, c'est
que la nourriture des bêtes est cette année au
moins aussi abondante que celle des hommes.
Qu'on nous pardonne ce rapprochement, mais il
est assez important pour être noté dans les annales
de l'agriculture, car bien des cultivatgurs, et des
plus vieux, lie pourraient peut-être se rappeler
une coincidence aussi parfaite. Nous aurons done
du bon pain, pas trop cher, et de la bonne viande...
tres chère.
Ici il y a une anomalie apparente, mais quelques
mots la feront disparaitre. Pourquoi, se demande
le lecteur, la viande est-elle chère quand l'éleveur
de bestiaux peut se procurer a bon marché de la
nourriture pour les bêtes qu'il engraisse? Voici
il n'est pas un cultivateur, un fermier, qui, ayant
fait une bonne récolte de fourrage, ne garnisse
ses étables en proportion de la nourriture que lui
ont fourni ses terres, il va done au marché,1 son
voisin y va également et ainsi de suite il est tout
naturel que la marchandise devenant rare, elle
augmente de prix. Demandez aux bouchers, ils
vous diront qu'ils doivent donner une centaine de
francs de plus pour un bceuf et que c'est pour cette
raison qu'ils prélèvent une rangon de deux cents
francs de plus sur leurs clients.
II y a la question des pommes de terre, que l'on
récolte en ce moment. II y a abondance, mais
quant a la qualité, nous ne pouvons encore l'ap-
précier d'une manière générale. Tout ce que nous
pouvons dire, c'est que les cas de maladie sont
rares.
Nous n'avons pas encore eu l'occasion de parler
de la récolte du lin, qui a été excellente. Nous
conseillons aux ménagères de s'approvisionner de
toile filée avec les produits de cette année, elles
s'en trouveront bien, tant pour le prix que pour
la qualité.
II reste encore en terre un produit trés impor
tant, car il alimente une industrie qui a pris une
large place dans notre pays. Nous voulons parler
de la betterave a sucre.
L'année dernière la récolte a été abondante,
mais peu riche en matière saccharine cette
année on peut espérer l'abondance et la qualité.
Notre égoïsme nous entraine a parler de notre
pays plus que nous n'en auons l'intention. Nous
clirons done pour nous résumer que la récolte en
Belgique est aussi bonne qu'on pouvait la souhai*
ter en restant dans les bornes de la modération.
La France pourra exporter quelques millions
d'hectolitres de froment et de seigle formant le
surplus de sa consommation. En Angleterre, ou
l'on a eu les craintes les plus graves pour le fro
ment et l'avoine, compromis par l'abondance des
pluies, la récolte s'est faite, en definitive, dans
d'assez bonnes conditions, grace surtout a l'em-
ploi des machines, qui ont fourni un travail rapide
tout en étant moins couteux que la main-d'oeuvre.
Les pommee de terre y sont atteintes de la ma
ladie, et dès maintenant les marchands anglais
parcourent nos campagnes pour y acheter de
grandes quantités de ces tubercules.
En Allemagne, la récolte des céréales est satis-
faisante en ce sens qu'on peut la classer comme
tres bonne moyenne. Les pommes de terre y ont
parfaitement réussi. En Autriche, le produit gé
néral dépasse également la moyenne, et il en est
de même en Hongrie, malgré tous les bruits que
l'on avait prématurément fait courir que la séche-
resse, puis les inondations avaient causé de grands
dégats cela est vrai pour certaines localités, mais
ce qui est plus vrai encore, c'est que le pays pourra
encore exporter des quantités assez considérables
Bruxelles, 27 septembre 1872.