JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRËS, Dioianche
Dixième aimée. J\° 48,
17 JYovembre 1872,
PRIX D'ABOISEMEIT
POUR LA BELGIQUE
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Les hommes d'ordre.
La JPatrie, de Bruges, et la Paix de M. Coo-
mans, ont publié tout récemment quelques tar-
tines sur l'absentéisme parlementaire.
Le Uien public profite de l'occasion pour s'oc-
cuper de l'état du podagre. Le podagre,
c'est le régime parlementaire, tres malade s'il faut
en croire le gothique organe de l'évêché de Gand.
Pour prouver la chose, Arthur Bien public pond
un article d'une colonne et demie dans lequel il
declare tout net que Messieurs les mandataires du
pays, cléricaux et libéraux, qu'ils ne sont qu'un
tas de saltimhanques politiques.
Les orateurs les plus bruyants de la halle par
lementaires'écrie la sainte feuille, ne parlent pas
pour leurs collègues ils se mettent en quelque
sorte a la fenêtre et pérorent pour les badauds de
la rue. Quoi d'étonnant dès lors que les membres
de la Chambre, ennuyés, harasses, excédés de
cette comédie toujours renouvelée, s'en aillent
promener au Pare on retournent chez eux vaquer
a leurs affaires
Une fois lancé, le Bien public s'en donne a cceur-
joie. Ecoutez ce journal folichon
La véritable cause de l'absentéisme parle
mentaire, c'est, nous le répétons, le défaut de
sérieux et d'esprit pratique dans la Chambre elle-
mème. On y vit de fictions, on s'y paie mutuelle-
ment en monnaie de singq, on y joue la comédie.
JLzEa, lïaiis! e tc; «Irs. XMaJble.
II était deux heures de l'après-midi, et Mme de
Latour, plongée dans un fauteuil, les yeux fixes,
les sourcils froncés, semblait en proie a une vio
lente preoccupation,
Non, non, nonse disait-elle intérieure-
ment, je n'irai pas a ce... rendez-vous. Ah quel
horrible motCelui de maitresse vient après, et
jamais on ne dira de moi... Eh! qu'ai-je besoin
de m'affirmer a moi-même que je suis incapable
de faillirEst-ce que je n'en suis pas convaincue?
Simais alors pourquoi avoir eu la coupable fai-
blesse de promettre a M. de Maucor d'aller chez
lui... seule, pour voir je ne sais quelles chinoise
ries achetées nouvellement Beau prétexte en vé-
ritéII sera furieux de ce manque de parole...
Tant mieuxil subira le contre-coup de l'ennui
qu'il me cause, des angoisses odieuses dont il est
l'auteur... Je lui dirai que j'ai changé d'avis,
qu'il m'a été impossible de sortir, que sais-je la
première raison venue suflira. Allons n'y pensons
plus.
M1,e Justine entrant chez sa maitresse vint faire
un instant diversion aux pensées qui l'obsédaient.
Que me voulez-vous, Justine, je n'ai pas
sonné?
A gauche comme a droite, on ne se fait aucune
illusion sur la portée réelle des discussions politi
ques les plus retentissantes, des arguments pro-
duits avec le plus d'éclat, et les membres des deux
camps sont les premiers a se l'avouer... a la fin
delareprésentation. Eh bien! nous ne nous sen
tons pas la force de blamer les hommes que ce jeu
finit par lasser.
i) Nous admettons qu'ils aillent chercher un
spectacle plus instructif et plus intéressant
l'Aquarium du Jardin Zoologique, par exemple,
est bien plus curieux a voir qu'une séance parle
mentaire ou l'on discute a perte de vue sur le
maitre d'école de Cherscamp, sur le garde-cham-
pêtre Balthazar, sur la perte d'un colis, sur la
main-morte de Merckem ou ia question Van
de Casserie. Toutes les évoiutions parlementaires
ne valent pas les bizarres manoeuvres des anguilles
marines, des épinoches, des langoustes et des cre-
vettes. Non, nous ne blamons pas le représentant
qui, au lieu d'écouter une diatribe de Bara, s'en
va étudier le grand crabe de l'Aquarium!... Fran-
chement nous ferions de même, et jamais école
buissonnière ne nous parut plus excusable. A
tous les Aristarques disposés a censurer le dé
serteur, nous dirons hardiment Que celui
d'entre vous qui ne lerait pas comme lui, lui jette
la première pierre
Voila ce qui peut s'appeler jeter son goupillon
par-dessus les moulins, et nous aurions bien voulu
voir la mine que M. Malou et ses Eon or allies col-
Non, madame, mais l'heure d'habiller ma
dame est venue, et je pensais...
M'habiller, pourquoi
Madame m'a dit ce matin qu'elle sortirait a
trois heures.
Sortir... par un temps pareil?
Mais il fait trés beauil y a un monde fou
dehors.
N'importe... d'ailleurs j'attends des visites
aujourd'hui.
- Ce n'est pourtant pas le jour de madame.
Qu'est-ce que cela faitEst-ce que je n'ai
plus le droit de recevoir qui bon me semble le jour
que je veux
Si, madame.
C'est heureux.
Alors madame reste en robe de chambre
Oui... oui... Allez.
Justine se dirigea lentement vers la porte,
quelque chose lui disait qu'on allait lui ordonner
de rester.
Justine, attendez... Vous avez raison, je ne
puis pas recevoir de visites fagotée comme je
suis... Habillez-moi.
Quelle robe madame veut-elle mettre
La première venue... une noire... montante.
Avec le corset neuf?
lègues ont du faire, en apprenant, par l'organe le
plus autorisé du jésuitisme beige, qu'ils ne sont
que des comédiens et des farceurs.
Admirons en passant la sagesse et la profon-
deur de vues des polémistes qui défendent ce
qu'on est convenu d'appeler le grand parti con-
servateur.
Depuis quelques années, il n'est pas une insti
tution qu'ils n'aient insultée et bafouée.
La royauté a été attaquée par eux avec la der-
nière violence dans la personne de Léopold Ie"
d'abord, de Léopold II ensuiteet l'on se rap-
pelle les plaisanteries de baut goüt publiées par
les journaux pieux sur le prestige du bicorne
royal.
Les gouverneurs, qui représentent le roi dans
nos provinces, ont été appelés des bipèdes plus
ou moins chamarrés.
La magistrature a été vilipendée, trainee dans
la boue. On lui a contesté cent fois son impartia-
lité et son honneur. On a fait des ovations scan-
daleuses a des hommes qu'avaient frappés ses
arrêts.
L'armée a été représentée comme un ramassis
de fainéants et de soudards dans des meetings oii
cléricaux et communeux fraternisaient a outrance
et dont la bonne presse rendait compte avec un
enthousiasme délirant.
Et voici maintenant que la Chambre est com-
parée a une halle ou l'on joue la comédie.
Non, l'ancien.
Ah! quel dommage II va si bien a ma
dame, le nouveau.
Mme de Latour sourit.
Folie! est-ce que je vais recevoir mes visites
en corset?
Non; mais il est toujours agréable de se
dire...
Quoi
Dame... qu'on est tres jolie en dessous.
Soit, mettez-moi ce corset.
La femme de chambre s'empressa d'exécuter
l'ordre qu'elle avait sollicité. En un instant la fine
taille de sa maitresse fut emprisonnée dans une
élégante cuirasse de satin.
Vous trouvez qu'il me va bien ce corset?
Ahmadame, vous êtes belle ainsi a damner
tous les saints du paradis Jamais madame n'a
été a son avantage comme aujourd'hui.
C'est bon, passez-moi ma robe.
La bleue... décolletée?
Non, je vous ai dit la noire, montante.
Ce fut d'un air de mauvaise humeur que la ca-
mériste alia chercher la robe désignée.
C'est bien la peine d'être si galamment
ajustée en dessous, fit-elle, pour l'être si mal en
dessus.
Mais ce corsage va trés bien.
L'OFINIOni