AL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Bi manche
Bixième année. lV° 51
8 Décembrc 1872,
Le tout payable d'avancr.
PRIK R'ABOISllEMEIST
POUR LA BELGIQUE
francs par an; 4 fr. 50 par sernestre.
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YPRES, LE 7 Décembre 1872.
Depuis quarante ans et plus, Pon entend
dire que la Bolgique est un pays neutre,
partant inviolable et jusqu'ici l'événement
n'a point démenti le mot. La neutralité n'a
pas trop mal servi la nationalité. Settlement,
on a voulu une neutralité arméc et il ne
manque pas de gens qui s'imaginent qu'il
y a longtemps que nous serions passés de
vie a trépas si elle n'avait été hérisséc de
baïonnettes, comme un collier de chien de
garde planté de pointes d'acier. Ce sont les
mèmes qui prétendent aujourd'hui que lc
collier militaire est trop faible, et qu'il le
faut renf'orcer a tout prix. Semer un collier
de nouvelles pointes, ce n'est pas une affaire
le tont, c'est de le passer au cou du pays.
On ne sait comment s'y prendre. Depuis
deux ans on essaie de toutes les manières,
et l'on ne parle que tie cela. II n'y a pas au
monde de grande puissance, vouée de toute
éternité au dien des armées, qui ait cu,
pendant cesderniers temps, plus de preoccu
pations dece genre,et oü le mot «militaire»
a été prononcé plus souvent que dans notre
petit coin de terre neutre. Mais on n'aboutit
a rien. On a lancé toutes sortes de ballons
d'essai. On anommé de grandes et de petites
commissions, chargécs d'examiner la chose
et de donncr leur avis. On a fait de petites
et de grandes brochures pour vanter les
bienfaits du collier obligatoire. Lc pays
laisse dire et laissc fairemais on voit bien
a son air qu'il n'y prend aucun goüt, et que,
s'il lui faut devenir soldat, il ne sera jamais
un engagé volontaire.
Avant d'aller plus loin, je crois bon de
faire une déclaration. Cc que je dis du col
lier militaire, semé de clous sur tout son
pourtour, se trouvera certaincment en con
tradiction avec ce que bcaucoup d'autres en
ont dit avant moi. Los logicians tout d'une
pièce et les journaux a genou devant la
déessc Unité de manqueront pas de se scan-
daliser. II faut savoir en outre, et surtout,
que si votre serviteur, en visant des questions
qui le dépassent de cent coudées, tire a cote
ou ne fait que des ratés, c'est qu'il n'a en
main qu'une arme de fantaisie et des car
touches a l'avenant.
Je dis done qu'a mon avis le pays n'a pas
l'air de tenir bcaucoup au collier personnel
et obligatoire, et que ceux qui l'ont mis en
avant en sont aujourd'hui fort cmbarrassés.
A ce point que le ministre de la guerre lui-
même laisse pour compte a la commission
celui qu'elle était parvenue a lui fabriquer
après deux ans d'un travail assidu.
Ce n'est nas la ce que je vous avais
demandé, lui dit le général Guillaume et
vous avez trés mal compris la besogne qui
vous était confiée. Aussi l'avez-vous faitc
toute de travers. Qui diable vous avait com-
mandé un projet complet de reorganisation
du collier? Qui vous avait chargé de dire s'il
serait personnel et obligatoire Pas moi,
assurément. Reprenez-moi cela et, pour
votre punition, vous garderez les arrets
indéfinmient.
Cettc mercuriale s'adressait a la petite
commission qui, confuse comme un projet
de loi obligé de rentrer dans le portefeuille
minislérM, alia raconter Pavcnturc a sa
grande soeur.
Ah c'est comme cela dit celle-ci. Eh
bien, moi aussi, je cesse dès a présent de
m'occuper de l'aff'aire; et,tantque le général
ne se sera pas expliqué ncttement la-dessus,
je ne donne plus signe de vie.
Or, le général ne demandant pas mieux
de son cöté que de faire le mort le plus
longtemps possible, voila tont le monde
rentré dans sa coquille, et le collier du ser
vice personnel, après avoir fait plus de
bruit que celui de la reine, enterré sans les
honneurs militaires.
On aura toujours, il est vrai, celui du
statu quo, et cela peut déja compter. Mais
rien ne dit que la reculade actuelie n'est pas
lc signe de la reaction compléte contre les
idéés militaristes, et qu'après avoir mis
quarante ans et dépensé je ne sais combien
de milliards a cuirasser la neutralieé, l'on ne
reconnaitra pas enfin, qu'elle tiendrait aussi
bien sans cela et qui sait si, après avoir
délivré le sol des servitudes militaires, comme
il est en train de l'essayer, M. Malou lie nous
rachètera pas nous-mêmes de la servitude
corporelle et de l'impót du sang
Vous me direz qu'eu fait de fantaisies, ce
projet-la vaut bien les miennes, qu'il n'abo-
lit rien du tout, et qu'il n'indemnise guère.
Comme si le gouvernement nous avail
jamais gates sous ce rapport! Indemniser
n'est pas son fort, on le sait du reste. Le
dien Etat, comme les administrateurs des
Sociétés anonymes, aime a n'être responsa-
blc de rien. Voycz ce qui se passé danste
département oü trónc le successeur du déli-
cieux Wasseige. Est-ce que la clientèle de
nos chcmins, voyageurs et expéditeurs, n'y
est pas mise en coupe régléc? On y vole
journcllement des colis de tout genre les
rend-on, ou en paye-t-on la valour aux
intéressés On a bien remis intégralement,
cette semaine, a une dame, le manchon ou
blié par elle dans une voiture de Melasse.
C'est lil un acte de pure galanterie do
M. Moncheur en vers le beau sexe, et le beau
scxe huppé encore. Car, si une femme du
peuplc perdait son cabas, du diable si l'on
s'en inquièterait autrement. Mais pour un
manchon de retrouvé, que de colis natio-
naux et internationaux disparus a jamais,
sans laisser trace d'indemnité
Lors done qu'un ministre semblc vouloir
entrer, si pas de plein pied, au moins sur la
pointe du pied, dans la voie de la réparation
des dommages causes par l'idole aux doigts
crochus, n'allez done pas l'arrèter au seuil
de l'honnêteté. Et ne venez pas me dire que
ce qu'il en fait n'est que par égoïsme pur;
que l'indemnité, en lait de servitudes mili
taires, est basoe, non sur l'équité, mais sur
lecalcul politique; qu'on s'en fera, dans le
passé et dans l'avenir, une arme de corrup
tion électorale qu'on indemnisera ceux-ci
et pas ceux-la, selon la couleur des opinions
ou les promesses de conversion et que I'au-
teur du projet de loi l'avouc implicitement,
en s'en réservant a lui-même l'application
ou a un comité nommé par lui.
Mon Dieus'il fallait toujours aller au
fond des choses, et chicaner sur le plus ou
sur le moins, l'on deviendrait sceptique des
pieds a la tête, et l'on n'accepterait plus rien
du tout. Les enfants eux-mêmes n'oseraieht
plus toucher a leurs jouets de Saint-Nicolas,
s'imaginant que les f'usils sont chargés avec
des cartouches du gouvernement, et que le
cheval de la Foire de Leipsig recèle dans ses
flancs toute une légion de grecs perfides.
Ne mettons done pas toujours comme
cela les choses au pis, et gardons-nous de
voir tons les chcmins de la politique semés
d'embüches et de piéges a loups.
LA GRANDE COMMISSION MILITAIRE.
La grande commission militaire s'est réunie de
nouveau, mercredi dernier, au département de la
guerre.
lopinion
ïJC 5jC
LA DERNIÈRE SÉANCE.