L'Économie, de Tournai, croit pouvoir affirmei
que M. Picard, ministro de France a Bruxelles, a
vu M. Malou au nom de M. Thiers et lui a donne
a entendre que le gouvernement de Versailles
considérait la cession projetée comme un acte de
mauvais voisinage et d'liostilité. Actuellement la
France est trop faible pour protester autrement
qu'en paroles, et elle constate avec douleur qu'un
peupie ami profile des malheurs dont elle est ac-
cablée, pour montrer a l'égard de l'Allemagne une
complaisance qui approche de la complicity. Iel
est, sinon le texte, du moins le sens des declara
tions faites par M. Picard,
LES FAISEURS D'AFFAIRES.
Les affaires, a dit Dumas, c'est l'argent
des autres... Si ce n'était que l'argent des auties.
Ce qulon joue a présent dans les affaires, c est la
paix ou la guerre, l'existence ou la mort des na
tions.
Qui pout dire ce qu'il adviendra de la cession
des lignes du Grand-Luxembourg? II adviendra
que de gros financiers mettront quelques millions
de plus en poche, cela, c'est bien certain. II
adviendra peut-être aussi que la Belgique courra
de terribles dangers, - le jour ou la France ta-
cliera de prendre sur 1'Allemagne la revanche
qui lui tient a coeur. II adviendra peut-être aussi
que notre pauvre pays sera foulé aux pieds par
les armëes, qu'on se battra cliez nous et que cette
malheureuse terre de Belgique payera, comme elle
l'a déja fait si souvent, les frais de la guerre.
Mais qu'importe Si la Belgique doit être en-
valiie plus tard, ce sont les pstits seuls qui pati-
ront. Les millionnaires, quand tout sera ici a feu
et a sang, pourront toujours aller manger tran-
quillement leurs rentes ailleurs...
Le principal,c'est qu'en vendant et en ache-
tant des chemins de fer, il y ait de l'argent a
gagner, qu'il y ait d'ici a un an cinquante for
tunes de plus en Belgique, qu'il y ait pour les filles
publiques des rivieres de diamants, qu'il y ait
pour les cpouses legitimes du velours et de la soie,
des équipages, qu'il y ait pour l'innombrable
peupie des pique-assiettes du foie-gras et du
champagne a foison, qu'il y ait des honneurs, des
plaisirs, des jouissances....
Et après les hommes des affaires, la fin du
monde
On leur dit a ceux qui vendeiit, qui achètent,
qui font des affaires, on leur dit
Vos affaires, si elles vaus enrichissent, vont
exposer le pays a des périls sans nombre
lis ont la réponse belle
Qu'est-ce que cela nous fait a nous Nous
sommes des gens d'affaires, nous. Nous faisons
les affaires qui nous paraissent bonnes, et celle-ci
est excellente. Nous sommes véritablement déso-
lés qu'elle compromette la neutralité de la Bel
gique et vous ne sauriez devinez toute la peine
que nous en éprouvons. Mais cela regarde les
hommes politiques, et nous ne pouvons nous
mêler de ces choses-la, n'étant que de simples
hommes d'affaires...
La Belgique n'a eu de pires ennemis, depuis
qu'elle existe, que les faiseurs d'affaires. Les
dangers qu'elle a courus, les crises qu'elle a tra-
versées, elles les leur doit, pour les trois quarts
au moins. Ce sont les faiseurs d'affaires do Lan
grand qui ont failli, il y a un an, amener ici un
soulèvement qui a cotoyé pendant' quelques jours
la revolution. Ce sont les faiseurs d'affaires du
Luxembourg qui remettent de nouveau notre
nationalité en peril aujourd'lmi, quand il y a
trois oil quatre ans déja, a propos de ce mêmo
Luxembourg, d'autres faiseurs d'affaires i'avaient
jetóe déja dans d'autres dangers.
Nous étions maintenant dans une tranquillité
parfaitel'Empire, qui nous avait menacés, s'é-
tait évanoui, la République nous laissait respirer
a l'aise et ne montrait aucune envie de passer par
la trouée d'Entre-Sambre-et-Meuse l'avenir,
quoi qu'en disent les colonels de l'armée, les ca-
pitaines et même les simples lieutenants, semblait
rassurant, nous avions bien un peu peur de
TAllemagne, mais le danger était loin encore....
Et voila que tout a coup on vient placer juste
au milieu du chemiu un gros danger, uniquement
pour donner a quelques faiseurs d'affaires/1 occa
sion d'arrondk leur gousset.
Le public s'émeut, et il a cent fois raison c c
s'émouvoir, lui, l'honnête'public qui n'est pour
rien dans les tripotages, et qui se voit exposé a
payer tot ou tard les pots cassés. Eh! que diable,
si les faiseurs d'affaires ne savent pas se conten-
ter des millions qu'ils ont et s'il leur en faut tou
jours d'autres, qu'ils spéculent sur le cafe, sur le
'bitume du Maroc,sur les parapluies de poche, sur
les bottes a doubles semelles, que sais-je lis sont
tous si riches déja, qu'ils pourraient bien negligei
les speculations qui peuvent créer un jour un dan
cer au pays. (Gazette.)
CHEMIN DE FER D'OSTENDE A ARMENTIÈRES.
II vient de se tenir une assemblee générale des
actionnaires de cette société, dans laquelle on a
lu le rapport du Conseil d'administration.
Ce rapport traite deux points principaux d'a-
bord la question financièreensuite celle de l'a-
chèvement du chemin.
Laissant aux journaux spéciaux le soin de dé-
brouiller la question financière de l'Ostende-Ar-
mentières, nous ne nous occupcrons que de celle
se rapportant a, l'achèvemont de la ligne.
Nous espcrons, disent les administrateurs,
que dès le commencement de 1873, la section de
Thourout a Ypies pourra être livrée a l'exploita-
tion. Enfinvoila une promesse écrite que nous
aimons a croire plus val.able que toutes les ver
bales dont, jusqu'ici, on s'est plu a bourrer notre
bon public.
L'année 1873commence: nous netarderons,sans
doute, point a voir exploiter cette section, a la
grande satisfaction des habitants de Boesinghe,
Langhemarcq, Poelcapelle, Roozebeke, etc. Tous
nos vceux visent a ce que ces communes jouissent
le plus tot possible des bienfaits du chemin de fer;
si l'instrument existe, qu'on s'en serve le plus tót,
car tout jour de retard est de la perte d'ar-
gent.
La troisième section, Ypres a Warnêton par
Messines, n'est pas en si bonne voie que la
deuxième.'Loin de la! Le rapport contient au
sujet de cette section, la phrase peu encoura-
geante 4,500 obligations sont réservées a la
section d'Ypres a Warnêton, dont la construction
pour rait dans certaincs conditions devenir inutile.
Si, a bon entendeur demi-mot suffit, la société
d'Ostende-Armentières considère cette section
d'Ypres a Warnêton comme inutile aux popula
tions parsemées entre ces deux villes et, nommé-
ment, aux habitants de Messines; par l'existence
de ccrtaines conditions elle ne la construira pas,
ou plutót, disons la chose, elle est tout a fait dé-
cidée, dès maintenant, d'abandonner l'établisse-
ment du tronqon par Messines. Ces certaincs
conditions dont elle affuble son intention, quand
et comment doivent-elles se présenter Quelles
sont-elles? C'est la ce que Ton chercherait en
vain dans le rapport. Nous avons bien entendu
dire, sans y croire, cependant, tellement pa-
reilles conditions seraient peu sérieuses qu'elles
consistent dans la création de trains directes
d'Armcntières-Comines-Ypres-'Thourout-Ostende,
comme si ces trains directs pouvaient compenser
pour les populations do Messines, Kemmel, Wyt-
schaete, etc., la suppression de leur chemin de
fer
Que la société d'Ostcnde-Armentières soit bien
décidée a ne pas construire la section Ypres-War
nêton, cela ressort de tous los faits présents et
actuels, de la conduite des entrepreneurs, et de
celle de la société vis-a-vis de ceux-ci. En effet,
la construction de toute la ligne Ostende-Armen-
tières a été entreprise a forfait moyennant la re
mise de quatre cents obligations par kilomètre,
les entrepreneurs étant chargés du service des
obligations aussi longtemps que la ligne ne serait
pas complétement achevée. Aujourd'hui ces mê-
mes entrepreneurs se refusent de continuer le ser
vice des obligations, sous la raison que la deuxième
section étant achevée ils sont entièrement dèliés.
De la proces avec la sociétéproces soumis a des
arbitres et portant non pas sur ce que les entre
preneurs sont encore tenus parceque toute la ligne
n est pas achevée, mais seulemcnt sur ce point-ci
la 2™ section n'étant pas exploitée le ler janvier
1873, l'entreprise est-elle tenue du paiement du
coupon échéant a cette date? II ne s'agit done pas
de maintenir le contrat avec les entrepreneurs
jusqu'a l'entior achèvement de la ligne, mais seu-
lement jusqu'a la mise en exploitation de la 2me
section. Une fois cette section exploitée, les én-
trepreneurs s'en iront et plus personne de l'Os-
tende-Armentières ne songera a doter Messines
du chemin de fer promis. Du reste, il parait que
les entrepreneurs n'ont pas attendu la mise en
exploitation de la deuxième section pour aban-
donner notre contrée; ils sont, depuis du temps
déja, occupés a construire un chemin de fer du
cóté de la Lorraine.
Que fera le gouvernement devant la conduite de
l'Ostende-Armentières
En maintes circonstances, des sociótés de che
min de fer ont tenu la même conduite que l'Os-
tende-Armentières sans que jamais nos gouver-
nants aient cru devoir sévir contre les réealci-
trants. Dans les liautes spheres administratives
on se montre trés condescendant vis-a-vis de so-
ciétés de chemin de fer n'exécutant pas leurs ca
hiers des charges. Les cas de l'espèce qui nous
occupent sont tellement nombreux que quelques-
uns viennent a la mémoire de tout chacun; dans
la Flandre occidentale seule les concessions de
Lichtervelde' a T'hielt et de Roulers a Dixmude
restent, depuis des années, en souffrance. A la
liste de ces concessions avortées faudra-t-il ajou-
ter la ligne d'Ypres, par Messines, a Warnêton?
C'est a craindrea moins, toutefois, que les po
pulations intéressées ne s'agitent et fassent valoir
leurs besoins et leurs droits. Elles ne gagneront
rien a se plaindre chez elles, a l'ombre, de leur
clocher des démarches, beaucoup de courses fe-
ront bien mieux leur affaire que le développement,
en petits comités, d'un tas de considérations a
pérte de vue. II est grand temps d'agir! Toute
heure passée sans travail est un temps précieux
perdu.
ON DEMANDS UNE JUDITH.
On connait l'histoire lamentable de ce pauvre
Holopherne si méchamment mis a mort par Ju
dith.
Pour Je quart d'heure, il est iortement ques
tion, dans la presse beige, de ces deux person-
nages bibliques.
Voici comme
Dans une allocution adressée récemment au gé-
néral Kanzier, le Rape a rappelé l'exemple de Da
vid terrassant Goliath et de Judith coupant la
tête au général de Nabuchodonosor.
Le Diritto a cru voir dans les paroles du Pon-
tife une excitation au régicide, et 1'lücho du Par
lement a reproduit Partiele du Diritto
Sur ce, colère du Bien public qui s écrie
Nous ignorons si le roi V ictor-Emmannel pai -
tage les terreurs qu'affectent ses défenseurs offi-
cieux et s'il a vraiment peur de voir de nouvelles
Judiths pénétrer dans sa chambre a coucher.
Cette crainte, bien que risible au fond, pourrait
lui être salutaire. Elle amènerait peut-etre ce
trop galant-liomme a fermer ses appartements
privés a des dames qui ne devraient point y etie
admises.
Mais, hien publicmon ami, il nous est avis que
ce n'est pas trés fiatteur pour Judith ce que vous
imprimez la.
L'HIYER 1872-1873.
Nous lisons, dans la plupart des journaux de
Belgique et de France, que partout des phéno-
mènes de végétation se produisent par suite de la
température exceptionnelle de eet hiver.
Les environs de Paris et les jardins de 1 inté
rieur sont pleins d'arbres couverts de feuilles
beaucoup de fleurs du printemps sont épanouies
il n'est personne qui n'ait vu voler des mouclies.
En Brie, on a vu des framboisiers portant dès
fruits a Lar§ay (Indre-et-Loire), un champ d'as
perges est en plein produita Qrléans, un habi
tant du faubourg Saint-Jean a trouvé le lianneton
de rigueur.
Cette température si élevée de l'hiver de 1872
est surprenante, mais elle n'est point un pliéno-
mène extraordinaire et sans exemple.