le parquet a eu des égards pour nous. II eüt pu nous frapper sans formalité, sans délai et saus appel. II nous a condamné sans appel, maïs non sans formalité ni délai nous avons été rappelé trois fois, et ce n'est qu'après plusieurs jours de patience, lorsque le juge destruction se fut bien assuré qu'il n'y avait rien a obtenir de nous, qu'il s'est déterminé a prononcer la condamna- tion. Nous paierons nos cent francs pour ne pas aller en prison, trop heureux d'avoir a ce prix éclairé le parquet sur les fraudes qui se commet- tent. Quand de véritables falsificateurs seront atteints, quand nous les verrons devant les tri- bunaux et qu'ils seront frapp^s par la justice, nous aurons l'occasion de rappeler la condamna- tion qui nous atteint aujourd'hui, et nous établi- rons alors que c'est a nos révélations qu'a été due l'intervention du parquet. En attendant, nous nous bornons a faire cette simple constatation Les falsificateurs vulgaires, quand on les prend, sont condamnés a 10 fr. d'amende. i, Et les journalistes qui dénoncent les falsifi cations, a 100 francs... ou 2 mois de prison Mais la presse est libre; c'est une consola tion! n La Gazette dit C'est Ja troisième condamnation prononcée contre notre confrère dans des circonstances ana logues. Comment se fait-il que la justice, qui a tant de respect pour la discretion du prctre, du médecin et de cent autres personnes, punisse la discrétion du journaliste? Quel but poursuit-on? Espère-t-on, en frap pant les journalistes d'amende, obtenir qu'ils manquent a une parole donnóe et trabissent un engagement d'honneur? Nous aimons a croire que l'on n'y pense pas. Eranchement, si l'on ne craignait d'etre injuste envers la justice, on pourrait supposer qu'elle n'a d'autre but que d'empêcber la presse de signaler les abus que les particuliers n'osent signaler eux-mêmes. FALSIFICATION DES DENRÉES ALIMENTAIRES. L'Écho du Parlement publie une lettre signée d'un pnarmacien cliimiste, M. Achille Pasquier, a Fleurus, qui affirme que jamais, a aucune époque, la falsification des denrées alimentaires n'a été pratiquée sur une aussi vaste échelle qu'aujour- d'hui Tout est sophistiqué, dit-il, farine, café, clii- corée, vin, bière, liqueurs... Toutes les substances qui entrent pour une large part dans l'alimenta- tion de l'ouvrier sont pour certains industriels avides l'objet des falsifications les plus diverses, les plus éliontées. Et ce sont principalement les substances nécessaires a notre besoin journalier qui sont actuellement soumises a des apprêts avant d'être livrées au commerce. II m'est arrivé d'analyser un écliantillon de beurre qui contenait 36 p. c. d'eau, tandis que le bon beurre n'en donne que 14,12 et souvent 10 p. c. Un autre écliantillon était frelaté par une dissolution de colle de géla- tine et a un tel degré que par la chaleur ce beurre se réduisait en une sorte de gelee. La plupart de nos bières sont adultérées, et il ne serait pas difficile de constater la présence de la picrotixine. En effet, la coque du Levant n'est employee ni dans la médecineni dans J'industrie. Cependant on en importe d'énormes quantitós. The Lancetde Londres, afiirme qu'en une seule année plus de 25,000 kilogr., quantité snffisante pour 120,000 tonneaux de bière, ont été laissés en Angleterre. Les brasseurs de St-Péters- bourg employèrent leTement cette substance que le conseil d'Etat dut s'en occuper spécialement. Au lieu de chicorée, on nous délivre un amalgame de tourbe, de glands de chêne, de cossettes de betteraves, de féveroles, de briques pulvérisées. I e tourteau ou residu des amandes est employé a falsifier le chocolat conjointement avec des fécules ou farines diverses. On va jusqu'a préparer le chocolat tout d'une piece avec du cacao dont on a extrait le beurre que l'on rem- place par des graisses communes. ij Vous croyez prendre du kirsch et vous n'avez que du trois-six plus ou moins p.ur mélange avec un peu d'essence d'amendes arnères ou d'eau distillée de laurier-cerise. v La même chose pour le rhum, Ie cognac Je ne parlerai pas des vins sujets a des falsifica tions si nombreuses, ainsi que du vinaigre ep d'une foule d'autres denrées alimentaires dont le détail serait trop long. ii II n'est pas jusqu'au sel, dont le prix est si bas, qui ne soit adultéré soit par le platre, soit par de l'alun ou du sulfate sodique. Le même cliimiste a analysé a Fleurus même plusieurs échantillons de farine, et il n'y a pas trouvé de barite sulfatée, ce qui lui fait supposer que cette substance inorganique n'a pas encore été mélangée a nos farines. Ily auraitun moyen bien simple de s'en assurer. Les fabricants sont faciles a trouver, et ceux qui fabriquent le sulfate provenant d'Allemagne, le plus blanc de tous et le plus propre a la falsifica tion des farines, doivent attirer les premiers 1'at tention qu'on ouvre leurs livres, et l'on verra ou vont leurs produits. Le parquet nous saura gré sans doute de lui donner cette indication. Un pharmacien de Nivelle, M. Emile Bary, nous écrit qu'il a été appele a analyser le sulfate de baryte, et qu'il y a reconnu des propriétéstoxiques telles qu'il y a danger a l'employor pour sophisti- quer la farine. II nous signale un aurie agent de falsification, l'argile blanche (kaolin) qui coüte moins clior encore que le sulfate de baryte, est plus blanche, plus douce au toucher et forme pate avec l'eau. Notre correspondant, lui, "s'en prend au Code pénal lui-même qui condamne quiconque aura vendu ou débité des produits falsifiés, mais ne dit rien relativement au détenteur d'une marchan- dise falsifiée, ne contient aucune peine applicable a celui qui va trouver le marchand pour lui offrir, a prix d'argent, des produits propres a frauder ses marchandisesqui propose de lui vendre un secret pour tromper le public. Par suite de eet oubli dans la législation, dit-il, les alimentsles boissons, les condiments destinés a soutenir l'exis- tence de l'homme, les drogues qui doivent le sou lager dans ses nombreuses maladies, les produits nécessaires dans les ménagestels que les sa vons, etc., sont altérés, denatures. Et encore, a supposer que la loi fut complétée selon ces indications, faudrait-il qu'on la fit exécuter en se mettant en mesure, non-seulement de constater les falsifications, maisdelesréprimer. NOS CIIEMINS DE FER. Les bonnes traditions Wasseigiennes se pérpé- tuent et jamais 1 administration des chemins de fer n'a mieux mérité le nom de Ministère des Déraillements Publics. On a pu se moquer du dossier du Nasipède,mais aujourd'hui il ne s'agit plus de rire, car ce dossier s'est considérablement augmenté et chaque jour de terribles accidents viennent encore le grossir. Nous négligeons les soustractions, les retards, le peu de respect pour toutes les coincidences de trains qui fait que l'on manque toujours, faute de cinq minutes, la cor- respondance, et qu'on doit attendre de grandes heures dans des stationsmais ce qui effraie tout le monde, c'est la frequence des déraillements. On en signale quotidiennement, parfois même deux par jour. Sur la ligne de Pépinster a Gouvy, trois hommes ont été tués. Lundi, deux accidents, avec mort d'hommes, ont eu lieu sur la ligne du Luxembourg. Tristes étrennes pour l'exploitation de 1 EtatToujours ce sont de malheureux em ployés, des chauffeurs, mal payés, qui sont les victimes de ces catastrophes. M. Le Hardy de Beaulieu a interpellé hier a la Lhambre, le ministre des travaux publics sur ces accidents, dit le Journal de Bruges. M. Moncheur n'a pu oontester la vérité des iaits. Ila ordonnédes enquêtes. Est-ce qu'une enquête a jamais rien fait découvrir, ni rien em- peché? Cependant M'. Ie ministre croit avoir couvé le grand coupable, c'est le même qui a ieté le fameux banc de sable dans le canal de Bruges et de Gand; et, horreur ce coupable est du genre féminin. C'est? C'est la pluie II parait que le chemin de fer est comme une longue tartine de pain trempé et qu'il n'off're plus aucune resistance. S'il en est ainsi, il fallait le faire examiner et défendre la circulation sur les remblais. Mais, d'un autre cótéon parle de malveillance, d'obstacles places sur la voie. D'autres affirment que les routes ferrées sont mal entretenues, le matériel mauvais. Nous ne déciderons pas laquelle de ces causes est la vraie, ou si toutes concourent a la fois a rendre la locomotion excessivement dangereuse mais nous dirons que l'on est chef d'un départe ment ministeriel pour quelque chose. Nous rap pellerons aussi combien l'ordre était grand, la sécurité des voyageurs complete, les accidents rares, quand le railway était dirigé par l'admi- nistration libérale, et alors que l'on venait étudier de l'étranger son admirable organisation. II est vrai que les voyages nous coutent plus cher aujourd'hui qu'alors, si chers même, qu'ils coutent parfois la vie. UNE EXPLICATION NÉCESSAIRE. C'est mardi prochain que M. Frère interpellera le gouvernement au sujet d'une démarche que la députation des catholiques beiges a faite, a Rome, auprès de M. le baron Pycke, représentant la Belgique auprès du saint Père, et surtout des pa roles que leur a adressées eet agent diplomatique du gouvernement beige. Comme nous n'avons pas encore entretenu nos lecteurs de eet incident, nous reproduisons le compte-rendu de la dé marche publié par le Bien public et qui est cause de Interpellation. Les députés beiges se sont rendus en corps a l'hótel de l'ambassade, et la, au nom de ses collè- gues, M. Joseph de Hemptinne, président dupèle- rinage, a adressé a M. le baron Pycke l'allocution suivante Monsieur le ministre, Nous sommes venus a Rome pour renouveler, li aux pieds du Souverain Pontife, nos protestations ii contre tous les attentats sacrileges qui ont été ii accomplis ou qui se préparent encore contre la ii Souveraineté temporelle du Pape et contre les ii droits de l'Eglise. II nous a paru, monsieur le ministre, que s'il ii est bon de réitérer ces protestations, il est bon ii aussi de témoigner notre vivo gratitude a ceux ii qui par leurs actes et par la Constance de leurs ii dévouements, soutiennent le Souverain Pon- tife. ii C'est a ce titre que nous venons vons remer- n cier, monsieur le ministre, de ce qu'au milieu i, des difficultés et des déboires inseparables K aujourd'hui de cette charge, vous n'hésitez pas O a demeurer au poste d'honneur qui tous est confié, et a représenter au Vatican la Belgique catholique, toujours fidéle a la plus juste et a n la plus sainte des causes. Mle baron Pycke a répondu qu'il était tres sensible a ce témoignage de gratitude. II a déclaré qu'en dépit de toutes les difficultés, il demeurerait a son poste jusqu'au jour de ce grand Te Deum dont le pressentiment est dans tous les coeurs. En signalant ce compte-rendu, la presse libé rale a posé la question que voiciLe gouverne ment beige qui a reconnu le royaumed'Italie, et qui est tenu de se conformer aux devoirs d'une stricte neutralité, peut-il fermer les yeux sur la conduite inexplicable de son représentant auprès du Saint-Siége, et laisser croire que la Belgique entretient dans la capitale de l'Italie un foyer de conspiration contre une puissance régulièrement établie L'interpellation a été fixée a mardi, afin de per- mettre au gouvernement de se procurer dans l'in- tervalle des renseignements exacts. CHRONIQUE RELIGIEUSE. Voici, a Rome, un moine faussaire. II ne man- quait plus que cette branche d'industrie pour compléter la collection des crimes commis par

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L’Opinion (1863-1873) | 1873 | | pagina 2