LE SUD DANS LE NORD
Positions Rexistes
Lettre de France
par
José Streel.
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LE SUD, dimanche 29 Novembre 1936
LE BUDGET FRANÇAIS
POUR 1937
ABONNEMENT 18 francs français.1
Dans la préface de son livre Les
problèmes actuels des Finances Publi
ques en France M. Germain Martin,
ancien ministre des finances, écrivait
fort justement La persistance du dés
équilibre budgétaire est le mal dont
nous souffrons dans notre vie publique.
11 a des conséquences fâcheuses pour
notre situation économique et sociale,
l'intérieur de la Nation, et pour notre
force politique et morale dans nos re
lations internationales. A continuer
vivre par le recours l'emprunt, nous
aboutissons une pratique de taux d'in
térêts élevés qui sont une cause sérieuse
de difficultés et pour les entreprises
privées et pour l'économie de la France.
Les épargnants en présence des appels
successifs de l'Etat aux disponibilités
des particuliers, des conditions tou
jours aggravées, redoutent la déprécia
tion des fonds déjà prêtés et nous as
sistons des pratiques de thésaurisa
tion dangereuses
Le livre dont nous venons de citer
un extrait parut en 1933. Depuis lors,
bien des événements sont survenus en
France, dans le domaine politique et
financier, événements dont les deux
principaux sont l'avènement du gouver
nement du Front populaire et la dé
valuation du franc franais. Mais mal
gré tout, les phrases du ministre restent
d'actualité et malgré les événements
que nous venons de signaler, on ferait
bien de s'inspirer des principes qu'il
énumère avant d'établir les budgets.
On connaît, tant par les communi
qués donnés la presse que par un
large exposé fait par M. Vincent Auriol,
les grandes lignes du projet de budget
pour 1937. Il est possible dès mainte
nant d'en dégager les traits principaux.
Disons tout d'abord que malgré tout
ce qui avait été dit, le budget présente
un déficit et un recours l'emprunt.
Pourtant M. Auriol n'en est pas com
plètement responsable. Les réformes,
en matière administrative, sont très len
tes, et on ne pouvait, en quelques mois,
procéder au bouleversement total de
l'appareil financier de France, un des
plus compliqués du monde. Dans ces
conditions il ne faut pas chercher dans
le budget actuel de larges traces de
l'influence socialiste. Pourtant on la re
trouve dans quelques articles, mais dans
l'ensemble le budget présente tous les
caractères d'un budget classique.
Arrivé au Ministère des Finances de
puis quelques mois peine, le Ministre
n'a pas eu la possibilité matérielle de
procéder une révision complète de
tous les chapitres du Budget des dé
penses, pas plus qu'à une refonte de
la fiscalité. Il était également héritier
d'un budget qui, équilibré au départ,
s'avérait alourdi d'un déficit supérieur
6 milliards. Le gouvernement devait
songer avant tout rattraper ce défi
cit, mais il devait tenir compte d'une
opinion publique et extraordinairement
sensible, et de ce fait il dut abandonner
certaines mesures, pourtant légitimes.
Contrairement ce qui s'était passé
ailleurs la suite des dévaluations, le
gouvernement ne put avoir recours
la conversion forcée des rentes, ce qui
aurait cependant contribué largement
assurer l'équilibre du budget. On se
souvient en effet que, jusqu'à 1 5 jours
avant la dévaluation, le gouvernement
émettait encore les bons Auriol, pour
couvrir le fameux emprunt du front
populaire. D'autre part, M. Auriol se
refusa toute suspension de l'amortisse
ment de sorte qu'il proposa un budget
se chiffrant par un déficit total de
3,500 millions, somme peu près équi
valente au montant de l'amortissement
contractuel.
L'annonce du déficit budgétaire pro
voqua en Bourse un effondrement des
valeurs d'Etat, car malgré l'assurance
ministérielle, on estimait dans les mi
lieux financiers, que le déficit véritable
serait de 15 20 milliards. Il ne faut
pas perdre de vue, en effet, que par
un artifice comptable, les dépenses
d'armement n'ont pas été portées au
budget, tandis que, d'un autre côté,
l'Etat français reprend sa charge le
déficit, souvent très considérable, des
compagnies de chemins de fer et de
certaines grandes lignes de navigation.
Tout n'est pas mauvais dans ce bud
get. Pour plus de sûreté il n'a été tenu
aucun compte du supplément de re
cettes que peut produire la reprise de
l'activité économique, mais cela consti
tue une mesure de prudence, car on
peut dire que la France, par l'accrois
sement des diverses charges sociales, a
mangé l'avance les avantages de la
dévaluation. D'un autre côté toutes les
dépenses obligatoires ont été inscrites
pour leur montant véritable, dé telle
sorte que théoriquement le péril des cré
dits supplémentaires se trouve autant
que possible écarté. Nous avons dit
théoriquement car, chaque con
flit social, le gouvernement prend sa
charge une partie du supplément de
dépenses imposé aux patrons.
Mais le budget contient de terribles
dangers. Tout d'abord, dans le but de
rendre l'impôt plus démociatique on a
supprimé des impôts indirects tandis
que des impôts directs étaient créées ou
augmentés.
Ainsi seront complètement exonérés
de l'impôt sur le chiffre d'affaires, les
produits de consommation de première
nécessité, et ainsi encore est supprimé
l'impôt sur les transports des produits
agricoles. L'impôt sur les valeurs mobi
lières est réduit de 24 18 p.c. Quant
au prélèvement de 10 p. c. sur les ren
tes. il est, dans certaines conditions
qu'il appartient aux contribuables de
réaliser, supprimé. Mais le taux de l'im
pôt général est augmenté sur les reve
nus supérieurs 75.000 francs. L'im
pôt sur les successions, mesure essen
tiellement socialiste, est augmenté prin
cipalement en ligne colatérale. Le so
cialisme, qui ne manque pas d'emprun
ter au fascisme, ses méthodes de ma
nifestations extérieures, aime également
reprendre son compte, certains de
ses procédés financiers. Et c'est ainsi,
par exemple, que la Francecrée actuel
lement un impôt sur les réserves de»
Sociétés anonymes et les bénéfices non
distribués.
Cependant, tous ces remaniements
ne suffiraient pas eux seuls faire
face aux 6 ou 7 milliards de dépenses
supplémentaires que prévoit le projet
de budget de 1 937 par rapport au bud
get de 1 936.
Un peu naïvement, le ministre comp
te surtout, pour obtenir le supplément
de recettes nécessaires, sur le fait que
l'activité économique reprenant son es
sor, les contribuables pourront plus aisé
ment payer les arriérés dont ils sont
redevables envers le trésor, et seront
moins portés dissimuler au Fisc, soit
le chiffre de leurs affaires, soit celui
de leurs revenus.
II faut également mentionner que le
gouvernement présentera au Parlement
en dehors du budget ordinaire, un bud
get additionnel où seront inscrites les
dépenses extraordinaires nécessitées par
les besoins de la défense nationale et
par l'exécution de grands travaux. Ces
dépenses qui s'élèveront 1 2 milliards
seront couvertes en partie par l'émis
sion d'un emprunt de la défense natio
nale et en partie par les emprunts des
collectivités locales pour le financement
de leurs travaux. Comme on le com
prend tout dépend des souscripteurs, et
ici il faut avant tout rétablir la con
fiance et l'ordre afin d'inciter les fonds
investir en valeurs d'Etat.
Nous venons d'exposer, un peu lon
guement, les lignes principales du bud
get de M. Auriol. On remarque sa
lecture, que tout ce qu'avait dit M. Ger
main Martin avant la dévaluation, vaut
encore actellement. L'emprunt, la thé
saurisation, le manque de confiance,
tout s'y retrouve. Et alors, on peut se
demander, comme on l'a déjà dit, en
craignant pour la réponse. La France
sera-t-elle le seul pays, où la dévalua
tion n'aura pas réussi.
F. L.
dllllfllIIIIIIIWtlIIIIIIIIIIIIHIHIIIIHIIIIIIIIIIIIUWW
(Suite)
C'est autour de l'idée d'entreprise
qu'il faut agencer une théorie écono
mique et sociale réaliste. L'entreprise
est la cellule économique comme la fa
mille est cellule sociale. L'entreprise est
un groupe d'hommes qui travaillent en
semble produire des biens utiles et
trouvent dans cette production un cer
tain bénéfice qui les paie de leur tra
vail. Chacun des collaborateurs a sa
fonction propre, mais tous travaillent
la même œuvre.
De cette conception, qui est la con
ception réelle, découlent nombre de
conséquences dont la principale est sans
doute la nécessité d'une cogestion de
l'entreprise. Il est normal que tous ceux
qui travaillent aient, concurrence du
travail fourni et du risque couru, un
droit de regard sur les destinées de l'en
treprise et sa gestion. L'entreprise de
vra ensuite s'intégrer dans la commu
nauté populaire par la voie de l'orga
nisation corporative elle doit d'abord
avoir une constitution interne qui as
sure toutes les forces de travail une
juste influence.
L'économie libérale ou classique se
flatte quelquefois d'être la seule réa
liste, la seule soumise aux faits, et elle
considère les mythes socialistes avec un
certain mépris. Reste voir si son réa
lisme purement économique et mécani
que, méconnaissant l'élément humain,
est vraiment réaliste. L'homme, l'hom
me tout entier, est un agent économi
que et même dans son activité éco
nomique il reste soumis aux mille re
lations qui l'unissent aux autres hom
mes et en font un homme social mem
bre d'une famille, d'un Etat, d'une con
fession religieuse, d'un milieu social,
etc.
C'est nous qui, considérant chaque
instant l'homme réel dans l'ensemble
de ses activités et rejetant toutes les
vues priori, sommes les vrais réalistes.
LES CADRES REELS.
stitutions de manière en obtenir le
meilleur rendement matériel et surtout
moral, c'est réaliser dans le concret la
révolution que tous sentent nécessaire.
FAMILLE.
Pour contribuer efficacement au bon
heur des hommes qui doit être le
but dernier de toute politique il im
porte de prendre les hommes où ils
vivent réellement, quotidiennement et
d'amener au maximum possible de per-,
fection structurelle et fonctionnelle les
institutions naturelles dans le cadre des
quelles ils développent leur existence.
L'effort doit donc porter principale
ment sur la famille, sur la profession
et sur l'Etat. Transformer ces trois in
stitutions naturelles dans le cadre des
quelles ils développent leur existence.
L'effort doit donc porter principale
ment sur la famille, sur la profession
et sur l'Etat. Transformer ces trois in
Nous n'avons pas énumérer ici les
nombreuses réformes politiques, juridi
ques, sociales et morales que Rex veut
réaliser pour assurer la famille la so
lidité requise pour qu'elle reste fidèle
sa fonction sociale. Toutes visent ren
forcer l'institution familiale et lui ren
dre dans l'organisation sociale la place
de premier plan qui lui revient par na
ture. Indiquons seulement pour carac
tériser la conception rexiste du rôle so
cial de la famille que, selon nous, la
protection de la famille doit être une
préoccupation constante accidentelle et
accessoire. On croit avoir assez fait
envers la famille lorsqu'on a accordé
quelques aumônes aux familles nom
breuses.
La législation sociale est basée sur
l'individu elle pense, elle agit, elle
répartit par individus. Il faut que, par
un changement radical d'orientation, le
législateur en vienne penser par fa
milles, calculer par familles. Il faut
que chaque fois qu'une mesure sociale
est proposée, le gouvernement se pose,
par '-Te sorte de réflexe, la question
préalable Quelle sera l'influence de
cette mesure sur l'institution familiale.
Quelles modalités lui donner pour qu'el
le renforce la famille L'essentiel
n'est pas, pour nous, d'aligner des réa
lisations bien précises c'est d'intro
duire dans le gouvernement de la cité
un esprits nouveau, qui, dans chaque cas
concret aura l'occasion de se manifes
ter. Il peut arriver qu'aux réformes les
plus chères, les plus longuement médi
tées, les circonstances présentent un ob
stacle imprévu mais un esprit, s'il est
vraiment conforme au réel, ne peut être
arrêté.
Il use des circonstances pour se ma
nifester. Ainsi le souci de protection
de la famille, s'il était constamment
présent et agissant chez ceux qui gou
vernent et traduirait par mille mesures
efficaces dont l'ensemble tendrait re
faire de la famille ce qu'elle n'aurait
jamais dû cesser d'être la cellule de
la société.
L'action familiale doit être un des
thèmes directeurs de toute activité po
litique elle doit s'insinuer partout, im
biber en quelque sorte la législation
tout entière de manière que le pays
apparaisse dans ses lois et ses institu
tions ce qu'il est dans la réalité, non
plus une juxtaposition d'individus, mais
une communauté de familles.
(A suivre