Lettre de France.
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LE SUD DANS LE
ABONNEMENT 18 francs français.1
LE MAIN D'ŒUVRE
ETRANGERE
C'est très juste titre que le problè
me démographique commence préoc
cuper de plus en plus sérieusement les
Français de toutes les classes sociales.
Sans doute ce problème n'est-il pas
neuf, et n'aurait-il jamais atteint la gra
vité actuelle, si des mesures, d'ordre mo
ral principalement, avaient été prises
depuis très longtemps. Mais on connaît
l'insouciance traditionelle des Français
pour les questions concernant la nata
lité, et ce n'est que depuis que le
problème se réduit une équation mi
litaire qu'ils semblent le prendre au sé
rieux. En effet, l'Annuaire militaire al
lemand vient de publier le chiffre des
contingents que le Illme Reich pourra
appeler en 1940. D'après cette publi
cation, il résulte qu'à cette époque les
réserves allemandes représenteront deux
fois celles de la France. En cas de mo
bilisation, en 1940, le Reich pourra ré
unir 13 millions d hommes contre sept
millions en France. Disons également
titre d'indication que l'Angleterre
pourrait appeler sous les armes 9 mil
lions de soldats.
Le problème de la natalité n'exerce
pas seulement son influence sur les
questions militaires. En fait, la guerre
n'est jamais qu'une période exception
nelle, tandis que l'économie générale du
pays, et ses nécessités sont permanen
tes.
Avant même que se dessinât la crise
économique, qui d'ailleurs s'atténue pro
gressivement depuis quelques mois, la
question de la main d'œuvre étrangère
préoccupait juste titre le monde du
travail. Des esprits clairvoyants annon
çaient que l'afflux ouvrier rendu néces
saire par l'intense activité économique
risquait de rendre une situation diffi
cile pour tous les salariés dès que cette
activité commencerait diminuer. C'était
avoir une vision claire de la situation.
En fait, l'année 1935 ce point de vue
est essentiellement caractérisé par une
augmentation sensible de départs. En
effet, pour protéger la main d'œuvre
nationale, le gouvernement s'est vu obli
gé de prendre des mesures très éner
giques de contingentement de main
d'œuvre étrangère et d'autre part il a
taché de faciliter le rapatriement des
ouvriers étrangers désireux de regagner
leur pays d'origine.
Lorsque l'on jette un coup d'œil sur
les statistiques d'immigration en France,
on constate, depuis 1919. un mouvement
intense de régression.
En 1929 on notait l'entrée 221.619
travailleurs étrangers. On n'en como-
tait plus que 102.267 en 1930. En 1932
on tombe 69.000 enfin, en 1935 après
une légère recrudescence d'entrées en
1934 on n'en comptait plus que 56.506,
se répartissant comme suite 9.939 tra
vailleurs pour l'industrie et 46.517 pour
l'agriculture.
Sur les 9.989 travailleurs introduits
de l'étranoer dans les industries fran
çaises. 8.585. c'est-à-dire 85 o.c.. n'oit,
été introduits oue pour des travaux dé
terminés, l'expiration desquels ils
étaient tenus de regagner leur pays d o-
n"p;ne.
Sur les 46.517 travailleurs étrangers
introduits dans l'anriculture franche,
les saisonniers représentent 40.134 tra
vailleurs soit 86 p. c. de 1 ensemble.
Le nombre des entrées réelles s-nrb'e
comr" toute assez réduit oremière
pv. En réal'té cependant il est plus
élev* ou'il n'ann^rait en premier lieu
=»ux c*at«'«;fi-"v*s. En e^fet. ne h'^uront
officiels oart'culier
T-«r «Jt-a-n"-s oui se dé<~1nr"->t comme
non travailleurs, soit qu ils dissimulent
leur qualité de travailleurs au moment'
de leur passage la frontière soit qu'ils
n'aient réellement pas l'intention de res
ter en France pour y exercer un em
ploi. Les agents consulaires de France
ont reçu des instructions pour ne viser
les passeports des travailleurs que si
ceux-ci présentent un contrat portant dé
jà le visa du ministère compétent (Tra
vail ou Agriculture).
Le chiffre des entrées doit nécessai
rement se comparer celui des sorties
si l'on veut avoir une idée assez exacte
de la situation. La comparaison entre le
chiffre des sorties contrôlées durant ces
quatorze dernières années montre que le
maximum a été atteint en 1932 et que,
s il y eu une très sensible diminution
des départs au cours des années 1933
et 1934, ils ont de nouveau augmenté
en 1935. C'est ainsi que l'on notait
92.916 départs en 1931 100.513 en
1932, 49.047 en 1933; 40.004 en 1934
et 67.215 en 1935. Ce dernier chiffre
s'explique par les mesures spéciales pri
ses par le gouvernement français, mesu
res dont nous avons parlé plus haut.
Au sujet des départs, il en est de
même que pour les arrivées, les chif
fres officiels ne reflètent pas la situa
tion réelle. En réalité, les sorties sont
plus nombreuses que ne le montrent les
chiffres.: le nombre des travailleurs in
troduits peut être approximativement
établi en raison de la vérification des
pièces d'identité et des contrats de tra
vail, mais il n'en est pas de même pour
les travailleurs sortis qui ne sont gé
néralement pas l'objet de semblable vé
rification. On estime, dans les milieux
officiels, sans cependant donner les ba
ses de cette estimation, que les sorties
contrôlées représentent environ le tiers
des sorties réelles.
La question représente cependant un
problème de toute première importance
pour l'avenir de la France. C'est ainsi
que l'Alliance nationale pour l'accroisse
ment de la population française, dans un
dernier communiqué faisait remarquer
que durant les 5 dernières années,
260.000 naturalisations d'étrangers a-
vaient été prononcées. Il semble donc
que les travailleurs qui viennent s'in
staller en France se laissent assez rapi
dement assimiler. Il n'est pas douteux
qu'il n'entre dans cette décision de na
turalisation aucun amour véritable de la
France. Devant les menaces d'expulsion,
les renvois, parfois massifs, les travail
leurs étrangers demandent la naturali
sation. Durant toute la durée de l'en
quête, ils résident en France. Une fois
la naturalisation obtenue, et cela est re
lativement aisé grâce une procédure
assez simple, ils continuent résider
tranquillement en France, quitte con
server leur nationalité d'origine, dans
les pays d'où ils viennent et qui n'ad
mettent pas la perte de la nationalité.
Sans doute ne convient-il pas de gé
néraliser, mais on peut cependant faire
remarquer que, sauf pour les Belges, les
immigrants en France ne représentent,
pour la plupart du temps, que des élé
ments assez peu intéressants. Dans ces
conditions, leur assimilation ne peut être
considérée comme un bien. Officielle
ment, la France a honte de ces natura
lisations massives qu'elle acepte cepen
dant pour parer aur déficiences de na
talité de la population française, et c'est
ainsi qu'un projet de loi a été introduit
récemment visant rendre obligatoire,
la francisation du nom du naturalisé.
D'ici une génération, on ne s'arercvrait
plus de l'origine étrangère de l'individu.
Enfin, il importe de signaler "ue 'es
questions de main d'œuvre étrangère
sont car-ses de bien des frictions avec
dicférents états, et cù'eHes cor—"t~-t.
pou-h'-e Tciiis-
sement de l'amitié franco-beV-
F. L.
LA LOI DES 40 HEURES.
La Commission du Commerce a dis
cuté les conséquences de l'application
de la loi de 40 h. Après avoir entendu
les membres de la commission représen
tant les diverses régions trançaiscs, elle
a demandé aux Ministres du Travail,
de l'Economie nationale et du Com
merce
1) D'appliquer la loi de 40 h. avec
toute la souplesse désirable en faisant
jouer les délais prévus par décrets
2) De permettre dans les industries
saisonnières la répartition des 2,000 h.
de travail annuelles sur une base qui ne
devra en aucun cas dépasser 48 h. par
semaine.
La commission a appelé instamment
l'attention du gouvernement sur la situa
tion spéciale de la moyenne de la petite
industrie plus particulièrement éprouvée.
Elle a demandé également que le gou
vernement poursuive les conversations
internationales afin que l'application de
la semaine de 40 h. soit généralisée dans
toutes les nations exportatrices.
LE RENOUVELLEMENT
DES CARTES AUX ETRANGERS.
Il est rappelé aux détenteurs de car
tes d'identité périmées, ou de récépis
sés délivrés avant le 1er avril 1935,
qu ils doivent en demander le renouvel
lement entre le 5 janvier et le 31 mars
1937, Roubaix.
A cet effet, ils devront se présenter
la mairie Service des étrangers) munis
des pièces ci-après carte ou récépissé
périmés, quatre photographies récentes,
de face, sans coiffure livret de famille,
passeport, extrait d'immatriculation.
En outre, les travailleurs dont la carte
a reçu une validité de deux ans en une
seule fois et qui exercent toujours la
même profession que celle indiquée sur
la carte, présenteront un seul certificat
de travail indiquant nom, prénoms et
adresse de l'ouvrier profession exacte
et salaire payé salaire normal de la
profession).
Ceux qui ont obtenu une validité de
deux ans en plusieurs fois, et ceux qui
ont changé de profession, doivent se
présenter préalablement l'Office pu
blic de placement du lieu de leur travail,
munis de deux certificats de travail lé
galisés par le maire et mentionnant les
indications ci-dessus.
Les étrangers mariées devront présen
ter la carte d'identité de leur conjoint.
Ceux dont la femme est française de
vront en apporter la preuve.
LE DISCOURS DE M. PIERRE COT
M. Pierre Cot prononça l'éloge fu
nèbre des cinq disparus de la Croix-
du-Sud
Le ministre de l'Air évoqua la car
rière de Pichodou, Ezan. Cruveilher et
Lavidalie et leur fin dramatique avec
leur chef, Jean Mermoz.
Est-ce goût de la discipline, ce désir
intense de se dévouer, ce dégoût de la
médiocrité de notre temps, l'inclinait
vers certaines formes de la politique, je
ne sais. Mais je veux m'incliner très bas
devant la droiture de ses intentions. la
noblesse de ses sentiments et le dés
intéressement de ses actes.
On sait assez ce qui nous séparait sur
ce plan. On sait peut-être moins que ci
divorce intellectuel, loin de nous tenir
éloignés, nous rapprochait oarfcF. Mes
sieurs. pardonne--moi. j'ai de sa part
un message posthume vous adresser.
Oui. notre dernier entetien remonte
plusieurs semaines. Il éta t venu rr.s
trouver. Il étîr> me trouver
peu après la mort de Génin.
Mermoz était hanté par une grande
crainte. Il ne voyait pas sans terreur
les divisions politiques s approfondir au
sein de cette aviation qu il aimait. 11
voulait m'en parler. Il souhaitait un rap
prochement entre lui et d'autres élé
ments, bien différents de lui. 11 venait
me prier de présider ce rapproche
ment.
mntendez-moi bien. 11 ne reniait rien
de ses idées et de ses convictions. Il
entendait rester tous ses postes. Et il
ne demandait aucun d'entre nous de
renoncer ses idées ou ses amitiés.
Il voulait simplement que, dans la gran
de famille de l'aviation française, des
hommes, différents d'opinion, mais sou
mis aux mêmes périls, essayent de se
mieux comprendre et n'en viennent pas
se détester ou se suspecter. 11 ne
voulait pas que la France fût divisée
en deux camps et que d'aucuns s'arro
gent le droit de traiter les autres de
mauvais Français. Il pensait que la tolé
rance, le respect de toutes les opinions,
la dignité de tous les hommes valent
mieux que la haine et la colère.
J'imagine la dernière navigation de
Mermoz. Dans la cabine de La Croix
du-Sud C'est un peu l'image de la
France Les hommes qui sont là sont
de tous les bords politiques. Le chef
des Croix de feu voisine avec le mili
tant syndicaliste.
Ils sont montés sur le même appareiL
Ils ont été courbés sous le même des
tin. Ils ont lutté côte côte et du même
courage, et leur valeur fut identique.
Leur agonie a-t-elle duré quelques se
condes S'est-elle prolongée pendant
de longs moments Nous n'en savons
rien. Nous savons seulemnt que tout ont
fait leur devoir juqu'au bout. Ils ont
conformé leur action cette belle pa
role de La Bruyère et qu'on pourrait
appliquer toute l'aviation française
La mort est poux eux un inconvé
nient dans 1-e métier et jamais un ob
stacle
Méditons cette leçon et cet exem- i
pie. La France est semblable ce grand
navire aérien qui partit le 7 décembre,
au matin, pour une grande entreprise.
Nous sommes tous embarqués
comme dirait Pascal. Des dangers nous
menacent dont il serait vain de r.ier f
la gravité et l'imminence. N'attendons
pas que des dangers soient plus pro
ches de nous pour mettre un terme
nos querelles. Cessons de -nous haïr,
puisque, demain peut-être, il faudra
travailler tous ensemble, côte côte,
cœur cœur, pour éviter de plus grands
malheurs.
Je vous dis cela, cause de lui. Je
vous dis cela parce qu il me 1 avait dit
et parce qu'il eût souhaité que je vous
le dise. Je vous dis cela parce que que
sa grande ombre est là, planant au-
dessus de nos têtes, dans cette cour
des Invalides où retentit sa voix, un
npV- 'litre ""and oilote °tait mort
son noste en faisant son devoir.
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