Lettre de France.
Léon Grillet
LE SUD, dimanche 16 mai 1937.
l'experience française
une annee de
front populaire
une plaoue a ete apposee A
paris sur la maison
qu'habita le
cardinal mercier
"l? Dentiste A. BOUCKAERT"
Téléphone No 588
4
LE SUD DANS LE NORD
L'expérience française reste actuelle
ment un sujet de discussions non seule
ment en France, mais dans tous les pays
étrangers. Les avis les plus divers sont
émis avec une légèreté parfois déconcer
tante. Rares sont ceux qui sont impar
tiaux un peu par la faute de la poli
tique française elle-même qui a net
tement prouvé, plusieurs reprises, que
le problème économique, qui devrait ê-
tre le seul faire l'objet de l'expérience,
avait souvent dévié dans le domaine
politique, faussant ainsi les données
d'une expérience qui méritait d'être sui
vie, au même titre que celles qui se
.déroulent actuellement dans d'autres
pays.
Monsieur Harold Butler, directeur du
Bureau International du Travail, qui
possède une incontestable compétence et
une grande autorité, vient d examiner
avec le plus grand soin cette expérien
ce. Ses conclusions ont été reprises par
divers journaux, et méritent d'être re
produites, constituant, dans la polémi
que, une base solide, mais partiale.
L'auteur pense que l'ampleur et l'im
portance de l'expérience française ris
queraient de passer inaperçus parce que
cette expérience ne s'est pas déroulée
selon un plan préconçu et qu'elle ne se
réclame pas d'une idéologie particulière.
Elle offre une image composite, faite
d'une série de mesures fragmentaires
plutôt qu'elle ne présente une ordonnan
ce symétrique et logique. Elle répond
un réveil profond du sentiment na
tional qui a engendré l'impulsion néces
saire pour mener bonne fin, en quel
ques mois, un ensemble de réformes de
grande portée.
Malgré l'autorité dont jouit l'auteur,
on est quelque peu surpris de voir la
naïveté avec laquelle il traite la ques
tion. Croire que l'expérience française
passerait inaperçue parce qu'elle n'est
pas conduite suivant un plan nettement
défini est le fait d'un aveugle. Il suffit
de lire le premier journal qui tombe
sous la main pour se rendre compte que
l'expérience française préoccupe tous les
esprits. Les revues économiques même
s'inquiètent précisément de cette absen
ce de plan initial. D'aucuns vont même
jusqu'à attribuer ce manque de direc
tives nettement fixées l'avance l'échec
de la dévaluation du franc, et prévoient
que l'expérience elle-même ne réussira
pas, par suite de son manque de conti
nuité.
Il est incontestable, comme le fait re
marquer M .Butler, que la Chambre
française a accompli, en 1936, un vaste
programme législatif qui a eu peu de
précédents dans les annales parlemen
taires françaises. On a tant bien que
mal rétabli l'équilibre financier, réfor
mé les statuts de la Banque de France,
en y faisant entrer Jouhaux, institué des
travaux publics, consenti des prêts tem
poraires aux agriculteurs, aux exporta
teurs, aux petits industriels et commer
çants on a étudié l'organisation scien
tifique du travail dans l'industrie créé
l'Office National du Blé réglementé le
marché du charbon réprimé la hausse
illicite des prix tandis qu'une action
Concertée entre les coopératives de la
production et celles de la consomation
tâchait de réduire le coût de la vie.
Dans le domaine social, on a eu les
40 heures, les congés payés, etc. On a
augmenté la scolàrité, consacré d'une
manière légale les conventions collec
tives, et institué l'arbitrage obligatoire.
On a taché de rehausser le niveau so
cial des travailleurs, et d'améliorer les
conditions de travail dans l'empire co-
BONNEMENT 1S
lonial.
Ce que l'auteur ne dit pas, involon
tairement, nous le supposons, c'est que
tout cela n'a pas changé grand'chose
la situation. La réforme de la Banque de
France n'a pu empêcher la dévaluation,
rapatrier les capitaux, entraver la sortie
de l'or. L'Office du Blé n'a pu encore
fonctionner normalement, puisque la ré
colte n'a pas encore eu lieu depuis les
grèves ont paralysé l'industrie et le
commerce, réduisant, dans une large
mesure, les exportations françaises.
L'arbitrage obligatoire n'a servi rien
chaque sentence arbitrale étant remise
en question la première occasion, ou
même rejetée tout simplement, dès qu'el
le était prononcée. Quant au niveau so
cial des travailleurs, on a vaguement
institué un Ministère des Loisirs, pré
sidé par Léo Lagrange, et qui n'a rien
aménagé du tout. Il a créé quelques au
berges de jeunesse, dans lesquelles on
rencontre, toute occasion l'insigne
communiste, et qui, en fait, sont réser
vées aux Faucons rouges et aux jeunes
ses communistes. Enfin, et le grand re
proche qu'il faut faire au gouvernement
Blum c'est de n'avoir pas réalisé la paix
sociale. Sans celle-ci il n'y a rien faire
l'intérieur du pays.
L'auteur se félicite de voir s'accroître
en France le syndicalisme. Il n'y a rien
d'étonnant cela, et c'est le contraire
qui devrait attirer l'attention. Les effec
tifs de la C.G.T. passent de 1.165.265
membres en avril 4.314.170 membres
en décembre. C'est un progrès incon
testable. Les moyens employés pour ar
river ce résultat sont en fait peu relui
sants. Une pression formidable a été
faite sur les travailleurs. L'exemple de
l'Exposition le prouve. Pour pouvoir em
baucher des ouvriers les employeurs de
vaient s'adresser la Bourse du Tra
vail, s'ils ne voulaient pas voir la grève
éclater chaque instant sur leurs chan
tiers. Or, pour avoir accès la Bourse
du Travail, il fallait être affilié la C.
G. T. Que signifie, dans ces conditions
le recrutement d'un nombre imposant de
membres Tout simplement le désir des
ouvriers, même hostiles l'expérience en
cours, de ne pas mourir de faim. Ce
n'est sans doute pas très courageux
mais, dans les circonstances dans les
quelles la France vit actuellement cette
situation est explicable.
En fait, on sent très bien que le Di
recteur du Bureau International du Tra
vail a vu les choses d'un point de vue
étroit. On sait d'ailleurs que cette in-
sitution est gangrenée de socialisme. Ses
avis sont incontestablement exacts. La
France a mis au point une très impor
tante législation. Ses réformes sont con
sidérables mais, ce qui est pernicieux,
c'est l'esprit dans lequel tout cela s'est
accompli. On y sent la haine, la lutte
des classes, la volonté de tenir la gor
ge, cette fois, le patron pour l'é
trangler sous l'étreinte de lois sociales
qu'il ne sera plus même de supporter.
La vieille théorie de Marx s'est adaptée
aux circonstances modernes.
(Suite de la Ire page)
F. L.
Agent de change correspondant
près de la Bourse de Bruxelles.
31, RUE DE MENIN. Y P R E S
Téléph. 144
BOURSE TITRES
COUPONS CHANGE
Bureau ouvert le dimanche
pendant la saison.
La liberté de conscience et d'ensei
gnement a été, elle aussi, violée. Une
circulaire ministérielle du 10 octobre
1936 met l'Alsace en face de ce dilem-
ne au accepter la prolongation de la
scolarité de 14 15 ans, ou accepter la
législation scolaire de l'intérieur lettre
insolente du Président du Conseil
Mgr Ruch circulaire scandaleuse du
ministre de la Santé Publique et de
Mme Lacorre contre les œuvres de bien
faisance catholiques (octobre 1936)
circulaires de Jean Zay qui, en outre,
a déclaré faire siennes les motions anti
cléricales du congrès du front laïque
(27 septembre 1937).
Le projet Blum, voté par la majorité
du front populaire en décembre 1936),
correctionnalisant les délits de presse
en matière politique, est une atteinte
directe la liberté de la presse.
Le mouchardage a été organisé dans
différents services. Un exemple une
circulaire n° 30.567 L/c.-4.135-3.096 du
14 octobre 1936 prescrit aux comptables
du trésor de signaler l'administration
sans restriction ni réserve, les dispari
tés choquantes qui peuvent exister en
tre le train de vie de certains contri
buables et les sommes acquittées par
eux au rôle de l'impôt général
Un décret du 5 novembre 1936 a por
té une grave atteinte l'indépendance
de la magistrature, en supprimant l'obli
gation pour le ministre de la Justice,
en cas de révocation, de rétrogadation
et de déplacement d'office d'un magis
trat, de déférer son dossier une com
mission consultative composée de magis
trats et présidé par le procureur gé
néral près la Cour de Cassation.
LA FAILLITE FINANCIERE
Les chiffres officiels constituent le
meilleur réquisitoire.
1. La chute du franc. Le front
populaire avait promis qu'il ne ferait
jamais la dévaluation parce que celle-
ci ne profiterait qu'aux spéculateurs et
ruinerait les humbles.
Or la livre cotait 95 quand il prit
le pouvoir. La dévaluation fut faite, le
1er octobre, sur la base de la livre
105. Aujourd'hui, la livre cote près de
112, c est-à-dire le plus bas niveau de
dévaluation fixé par la loi.
Le gramme d'or, qui valait 16,96 le
1er mai 1936, vaut 25 francs aujour
d'hui, soit une dévaluation du franc-pa
pier de 36 par rapport l'or.
2) Les prix. Le front populaire
avait promis 1 augmentation du pouvoir
d'achat des masses Il a cru y par
venir en imposant des lois hâtives qui
se sont révélées illusoires pour ceux-là
même qu'elles prétendaient avantager.
Voici les indices du coût de la vie, en
prenant pour base la dépense d'une fa
mille ouvrière de quatre personnes
1935
1 er trimestre 494
2' 490
3e 469
4e - 478
1936
1er trimestre 486
2e 497
3e 504
4e 540
1937
1er trimestre 58
La hausse est donc de plus de 20
deouis un an.
3e Le cours des rentes
Le 29 avril '°36 3 fr3nr5:
Poinra»-* 4 '4 1932 (A). 72.30
francs-Poincaré.
I." 26 avril 1937 3 64.20 (francs
Blum) 4 1932 (A), 69.15 (fr.
Blum).
4e Les emprunts. Le front popu.
laire avait promis l'assainissement fj.
nancier et la fin de l'endettement.
Or, il a fait des opérations contrai-
res aux intérêts de l'épargne et de l'g.
tat lui-même
a) Emprunt dit des «bons Auriol»
d'environ 4 milliards, émis avec pro.
messe qu'il n'y aurait pas de dévalua-
tion.
b) Emprunt l'étranger 40 millions
de livres Londres, soit, au cours ac
tuel, 4 milliards 440 millions de francs,
alors que M. Blum avait déclaré Les
emprunts extérieurs nous les repous-
sons.
c) L'emprunt dit de la Sécurité na
tionale d'un montant total de 10 mil-
liards, dont deux tranches furent émises
pour un montant nominal de 7 milliards
et demi. Cet emprunt a été émis avec
garantie de change quatre mois
après la dévaluation, ce qui n'est pas
un signe excessif de confiance dans la
monnaie. Il a été très difficile placer.
Le Gouvernement a refusé de laisser
contrôler l'emploi des fonds. L'emprunt
émis 98, est introduit en Bourse
95.75. Il cote, le 26 avril. 94.30.
d) L'emprunt la Banque de Fran
ce, qui est la pire forme d'inflation.
5e L'inflation. Péril mortel di
sait M. Blum.
Or. le 24 avril, au bilan de la Ban-'
que de France, les avances occultes
l'Etat, sous le ministère Sarraut, s'éle
vaient environ 7 milliards.
Aujourd'hui (bilan du 16 avril) les
avances régularisées et augmentées dé
passent 20 milliards.
6e La chute de l'encaisse-or. L'en
caisse-or est la seule garantie de la
solidité du franc.
Le 24 avril 1936: Encaisse-or (en
millions de francs-Poincaré)61.937.
Le 16 avril 1937 Encaisse-or (en
millions de francs-Blum)57.349.
Evaluée en francs Poincaré, l'encai"
se n'est plus que 37.240 millions. s~
une diminution de 24.697 millions.
7e Le commerce extérieur.
Déficit (en millions de francs). -
Premier trimestre 1936 2.345 premi"
trimestre 1937 4.495. Il a doublé.
Et M. Blum avait dit. dans l'expo"'
de la loi monétaire L'ajustement d:
la monnaie doit provoquer, tout d'abor
une reprise du commerce d'exporta
tion.
8e Le chômage. Maloré les pr"
messes faites et la loi de 40 heures. If
nombre des chômeurs n'a que fort pai
diminué.
Il s'élève encore, dans un pays au"
équilibré que la France, envir
.388 000 chômeurs comolets
Le cardinal Mercier, dont une
parisienne porte déjà le nom, a re<&
mardi matin, un nouvel hommage
la municipalité parisienne.
En présence du Cardinal Baudrilla'1,
qui présidait la cérémonie; du nepréseiH
tant de l'ambassadeur de Belgique. <-'J
président du Conseil municipal, de 1*H
Georges Goyau, de l'Académie fr^1'
çaise et de nombreuses personnalité8,
une plaque a été apposée rue Notff
Dame-des-Champs sur la ma;son qu °a'
Lita. p" 1887. l'illustre prélat.
agréé de Chemins de fer Belge?
du min'rtè-e der PorterTé'êgratkt'
f 7VM - t*one1
Tient ses consultations du MAR~
au SAMEDI de 8 1? et de 14 H*
Autres jours et heures sur demanue'
74, Rue de Lille YPR#