Le Roi visite le Courtraisis et la Flandre Wallonne.
COURTRAI, MOUSCRON, MENIN, SWEVEGHEM ET LES LOCAUTES VOISINES FONT AU SOUVERAIN UN ACCUEIL DEBORDANT D'ENTHOL SIASMj
A COURTRAI
A ESPIERRES
A HERSEAUX
A MOUSCRON
>-
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LE SUD, dimanche 23 1937.
Un Roi parmi son peuple.
L'annonce de la venue de S. M. Léo-
pold 111 dans l arrondissement de Cour-
trai avait comblé de joie notre laborieuse
population. La portée et la signification
d'un tel geste de notre Souverain n'é
chappait personne.
Pendant plus de huit jours, la con
firmation de cette heureuse nouvelle et
la publication des dispositions en vue
du grand jour furent attendues avec la
plus vive impatience.
Enfin, mardi
Le temps maussade et les averses
d'un lamentable mois de mai ne sem
blent pas près de faire trêve... Les ap
préhensions s'accentuent d'heure en
heure... Malgré tout .les rues des cités
et villages où l'on attend le passage de
l'auguste visiteur ont revêtu leurs pa
rures de fête. Allègrement, les couleurs
nationales flottent partout.
Voici midi...
Avec une réelle bonne volonté, le ciel
esquisse un sourire. De temps en temps,
glisse, furtive, et dorée, une caresse de
soleil.
L'optimisme renaît dans les cœurs.
Sans oser le dire trop haut, chacun es
père qu'il fera beau...
Vers 14 heures ,M. Goethals, Com
missaire gouvernemental pour la fron
talière ainsi que M. Mayeur, bourg
mestre de Courtrai entouré du Conseil
échevinal se trouvent la limite de la
ville, porte de Bruges pour accueillir au
nom des habitants, l'hôte royal.
Il est 14 h. 50 lorsque le Souverain,
venant du Zoute, fait stopper sa voi
ture. Il est accompagné du capitaine
barôn Jacques de Dixmude.
Chaleureusement, M. Goethals ex
prime ses souhaits de bienvenue tan
dis que la foule se presse autour du
Roi et lui manifeste joyeusement son
loyalisme et sa reconnaissance.
A peine l'auto royale s'est-elle remise
en route qu'elle s'arrête le Roi ouvre
la portière et reçoit, des mains de char
mantes fillettes, une magnifique gerbe
de fleurs. A chaque instant, au long de
cet inoubliable après-midi, nous verrons
se renouveler ce geste touchant. En cer
tains endroits, les témoignages d'atta
chement de la population envers le Roi
seront empreints d'une telle ferveur que
le service d'ordre aura bien du mal
contenir la foule et frayer le passage.
Aussi est-ce avec un retard sans cesse
accrû que le convoi royal arrivera aux
diverses étapes de sa visite triomphale.
Une foule énorme, entassée sur le
vaste quadrilatère de la Grand Place
de Courtrai fait au Souverain une en
thousiaste ovation, tandis que, par mil
liers. les enfants des écoles ponctuent
leurs vivats cristallins en agitant sans
fin d'innombrables drapelets tricolores.
Les cloches sonnent toute volée. Et
dans le silence impressionnant de la
multitude soudain recueillie, le Roi s ap
proche du monument aux morts de la
guerre, au centre de la Grand Place.
po"r y déposer pieusement les fleurs
qui lui furent offertes sur son passage.
Dans un redoublement d acclamations,
Sa Majesté repart ensuite vers Espier-
res. via Belleghem, où les enfants de
la commune l'acclament et le fleurissent.
Par des routes quelque peu étroites
mais délicieusement champêtres, nous-
approchons d'Espierres. Les pluies
Hoc r "récédents ort
provoqué de-ci. de-là des inondations
assez sérieuses. A certain moment, un
lacet de la route, disparu sous l'eau
oblige les voitures prendre, sous l'égi
de d'un cantonnier botté, un petit bain
de... pneus.
L'entrée Espierres s'effectue sous
de multiples arcs de triomphe de fleurs
et de verdure dont les inscriptions lapi
daires disent mieux que tous les dis
cours le bonheur de la population et
son attachement la Dynastie Dieu
protège notre Roi Nous acclamons
notre Roi bien-aimé, défenseur de l'Or
dre, de la Paix et de la Liberté
A 15 h. 30, le Roi descend de voi
ture aux installations expérimentales
d'épuration des eaux de l'Espierres. On
sait que cette petite rivière qui nous
vient de France, sert pratiquement de
canal d'évacuation toutes les impu
retés et autres des agglomérations in
dustrielles du Nord. Le grave problème
de l'épuration de ces eaux fangeuses
a donné lieu de longs et vaines pa
labres franco-belges. Aucune solution
satisfaisante n'ayant été trouvée, on en
est venu envisager l'épuration de ce
produit complexe et nauséabond qu'il
n'est même pas permis d'appeler eau
C'est ainsi que fut construite, quel
ques kilomètres de la frontière, au bord
de l'Escaut, la station d'épuration que
le Roi est venu visiter. L'importance
d'une telle réalisation n'a pas échappé
au souverain qui s'est attardé pendant
près de trois quarts d'heure écouter
les explications scientifiques du Direc
teur technique de la station d'épuration,
Mr. Frankignoul et Mr. Henry, ingé
nieur-conseil. Malgré la gêne visible
qu'il garde d'un récent accident la
jambe droite, le Roi a fait le tour des
vastes installations, s'arrêtant longue
ment tous les dispositifs techniques
permettant d'enregistrer les diverses
phases d'épuration.
La visite terminée, le Roi et les Mi
nistres qui l'accompagnaient s'en furent,
travers les champs verdoyants de
trèfle et de seigle, vers les voitures et
la foule campagnarde massée tout au
long de la route. Il est 16 h. 10 lors
que, parmi des vivats assourdissants,
l'auto royale se dégage avec peine de
la foule, certes plus dense et plus en
thousiaste que ne l'ont prévu les auto
rités locales.
A 16 h. 20, voici Dottignies où le
Roi ne fait que passer... La population
de la charmante commune wallonne
possède un naturel remarquablement
exéburant son enthousiasme d'aujour
d'hui est quelque chose d'inouï
Autour de la gare d'Herseaux, assez
éloignée du centre de la commune, s'est
formé une importante agglomération,
récemment érigée en paroisse par l'évê-
ché de Bruges. Le dévouement inlas
sable et l'esprit réalisateur de Mr. l'Ab
bé Hocepied ont abouti en moins de
3 ans, doter cette populeuse paroisse
d'une superbe église. La tour est pres
que achevée. A quelques mètres du ter
ritoire français, en bordure de la chaus
sée qui sert de frontière, elle s'élève,
droite comme un cierge et radieuse.
La foule franco-belge, accourue pour
acclamer le Roi. est massée de part et
d'autre de la grand'route. Les policiers
et gendarmes belges et français assu
ment. chacun de leur côté, un important
service d'ordre.
Des grappes humaines sont accro
chées aux véhicules laissés sur place nar
l'entrepreneur de constructions Nous
voyons du monde partout... sur les to,:ts
des maisons voisines, sur les pylônes
du tramway, dans les arbres Les cou
leurs françaises et belges se marient
aux fenêtres...
De la chaussée l'église, les grou
pements patriotiques et d'anciens com
battants des deux pays font une double
haie d'honneur. Les mêmes acclamations
émouvantes qui accueillent partout le
Roi, s'élèvent au pied de l'église du
Christ-Roi. Comme partout aussi, les
enfants agitent un flot de drapelets.
C'est M. Beaucarne, bourgmestre
d'Herseaux qui reçoit le souverain sa
descente de voiture. Accompagné des
autorités religieuses et civiles, le Roi
visite les chantiers.
A sa sortie, une supplique lui est re
mise par Mr. Grimonprez, concernant
les inondations dont le quartier herseau-
tois Les Ballons est périodiquement
affligé.
Le Souverain déclare Mr Grimon
prez qu'il prend la requête en considé
ration et lui accordera toute son atten
tion.
Sur-le-champ, Mr. Bollingier, chef de
Cabinet du Ministre des Travaux pu
blics se rend d'ailleurs au quartier des
Ballons pour juger de la situation.
L'impatience était particulièrement
vive, Mouscron, d'accueillir le Roi des
Belges. Car c'est la première fois qu'un
tel honneur échoit la populeuse cité.
La seule occasion qui fût donnée aux
autorités locales de saluer au territoire
mouscronnois un souverain belge, se
place en 1867, lors d'un passage de
Léopold 1er et de la Reine Marie-Hen
riette, en chemin de fer, par ia gare de
Mouscron.
Le Roi Léopold III arrive aujour
d'hui!... Inutile de dire que ce simple
geste vaut au jeune Souverain, un re
gain d'affectueuse popularité. Déjà, no
tre regrettée Reine Astrid avait conquis
le cœur de tous les Mouscronnois lors
de la visite qu'elle fit, en 1935, aux fa
milles les plus déshéritées de la ville.
R| Jne part de l'émotion qui se lit d'ail-
leurs, ici comme dans toute la région,
sur les visages au passage du Roi, prend
sa source n'en pas douter, au sou
venir de ce sourire royal d'une douceur
inexprimable qu'ils ont entrevu alors et
qu'ils auraient eu tant de bonheur re
trouver aujourd'hui. Hélas, la Reine
n'est plus Le Roi vient seul on l'aime
doublement
A peine franchi le Pont Ste-Thérèse
qui donne accès vers Mouscron. le Roi
est accueilli, avant même de l'être par les
autorités, par une adorable fillette qui
le fleurit abondamment. A partir de ce
moment et pendant plus de trois quarts
d'heure les acclamations d'une foule
comme jamais Mouscron n'en connut,
feront au Souverain une émouvante
escorte.
Dans la cour de la nouvelle école
moyenne, en construction rue du beau-
chêne, Mr. Vandevelde, bourgmestre,
entouré des autorités civiles, souhaite la
bienvenue au Souverain. La visite des
vastes bâtiments scolaires s'effectue
sous la conduite de Mr. Geldhof, con
ducteur communal des Travaux. Ensuite
le Roi se dirige vers la Grand'Place, où
les Anciens Combattants et Invalides
de la guerre l'attendent, au pied du
monument ^levé la mémoire de leurs
glorieux frères d'armes et des civils
mo'-ts nour la Be'giaue.
Après avoir fleuri le mémorial et
s'être recueilli pendant quelques in
stants, le Roi s'entretient familièrement
avec Mr. Baudouin Moerman, Prési
dent provincial des Invalides de guerre.
Par une faveur dont la foule comprend
toute la signification. Sa Majesté mani
feste la visible satisfaction qu'Elle res
sent de se trouver Mouscron. Au lieu
de remonter en voiture et de quitter im-
médiatement la Grand'Place, le Souve
rain accepte de faire pied le parcours
ez long cependant, du monumen,
l'Hôtel de ville. Kegrettons, en passant,
que l'Administration communale n'ait
pas eu la présence d'esprit de ménager,
en prévision de ce geste du Roi, un
couloir direct parmi la foule massée sur
la Grand'Place. Le Roi dut faire un
assez long détour et le service d'ordre
vit sa tâche extrêmement compliquée.
Les acclamations qui accueillent le
Souverain lorsqu'il a gravi les marches
du perron de l'Hôtel de Ville sont vé
ritablement frénétiques. Le Roi salue
longuement. L'ovation redouble. Plus de
10.000 personnes sont là qui acclament
follement. Et l'on sent passer dans cette
foule quelque chose de plus émouvant
que le loyalisme inné du Belge envers
la Monarchie. Il y a là, sur ces visages
épanouis et comme transfigurés, l'ex
pression exaspérée d'une grande, d'une
invincible espérance Maintenant quU
est, enfin, venu chez nous. Il va mieux
us connaître et donc mieux défendre
nos foyers contre la misère qui les ronge
ou qui les guette Voilà ce qu'on pou
vait lire, comme en un livre, sur ces
fronts soudainement déridés et dans
l'immense frémissement des milliers de'
mains tendues. Au pied du perron, face
au Roi, leur Chef, les Mouscronnois,
off<>iers de réserve en uniforme, saluent.
Se tournai:* v ers I.Ir. Vandevelde, le
Roi dit simnlement Bourgmestre, je
suis vraiment ému
Le Roi s'en va, comme regret...
L'enthousiasme de la foule touche au
paroxysme. Aussi la voiture royale met
plusieurs minutes se dégager de i é-
treinte populaire. Et lorsqu'elle a réussi
démarrer, elle laisse après elle, noyées
dans le flot humain la plupart des per
sonnalités ministérielles et autres dont
les voitures sont là-bas, quelque part,
bloquées par la marée...
Nous retrouvons ainsi, quelque peu
désorientés parmi la foule, les ministres
De Man et Van Isacker ainsi que M. k
Gouverneur Baels il leur faudra atten
dre Menin avant de reioindre le Roi
E-itretemps aura lieu la visite au parc
public et celle particulièrement tou
chante, la cité pour vieux ménages
construite au «Nouveau-Monde». Cette
cité, formée de maisonnettes sans étage,
entoure presque complètement le châ
teau d'eau récemment construit, lu*
aussi.
Le Roi y descend, au milieu d'une
cohue essentiellement populaire dont
l'enthousiasme ne le cède en rien celui
des foules précédentes. Dans le ciel,
une escadrille d'avions évolue en 1 hon
neur du Souverain.
Il est prévu que le Roi visitera, dans
la cité, la maisonnette portant le n«'
méro 24. Pour y parvenir, l'auto royak
doit faire le tour du parterre qui
trouve au centre de la Cité. Mais k
voiture s'embourbe et le Roi, arrêté le
vant le no 4. y entre sans façon. aU
ravissement bien compréhensible
bons vieillards. Mr. et Mme Alnho"?2
Wulens. oui étai^ot loin de s'att^eT" I
un tel honneur T.a bra-"» '''T
lens, alerte malgré ses 68 ans, nf
perd nullement son sang-froid e"f
ouvre une armoire et en sort les tasses-
pour le café Le Roi sourit, visiblemV