LE SUD DANS LE NOR
La Marine Marchande Belge.
'ABONNEMENT s lt
LE SUD, dimanche 20 juin I937
VIOLATION DES LOIS
ET GASPILLAGES
Le Groupement des Entrepreneurs de
l'Exposition a adressé M. Léon Blum
une lettre qui est le résumé fidèle de
toutes les erreurs politiques et sociales
commises dans les chantiers de l'Expo
sition.
Elle commence ainsi
M. le Président du Conseil,
Dans sa séance du 7 mai, la Cham
bre des députés a sanctionné l'institu
tion d'une période que vous avez ap
pelée la pause, étant entendu que vous
assureriez l'application des lois et des
libertés républicaines.
Nous assumerions la plus grave des
responsabilités devant notre pays si nous
ne lui faisions paS connaître avec toute
la solennité nécessaire, comme il nous
est donné de le constater sur les chan
tiers de LExposition, que non seulement
ces lois fondamentales continuent y
être violées mais qu'encore cette viola
tion s'accompagne d'un gaspillage des
deniers publics.
La lettre cite plusieurs cas, En voici
un r
Sur le chantier des artistes-décora
teurs, 50 ouvriers renvoyés pour grève
perlée, faite sans motif, ainsi qu'il a
été reconnu par une enauête dv com
missaire général, ont occupé le chantier
du 27 avril au 22 mai et ont été payés
par le budget, en présence de 100 au
tres ouvriers qui continuaient travail
ler dans des condtions normales, se dé
solidarisant ainsi pleinement de 1 atti
tude des ouvriers renvoyés.
Citons encore de courts extraits de
cette lettre
L'exemple de l'Exposition nous con
duit constater la destruction des va
leurs morales les plus hautes. Tout a
été détruit. Tout a été avili.
1 Tout a été détruit
a) La liberté et, par-dessus tout, la
plus sacrée des libertés, celle du tra
vail...
On peut dire, suivant la parole d'un
parlementaire éminent, que la civilisa
tion de notre pays reculerait ainsi de
trois siècles
b) La justice, parce que, l'occasion
des travaux de l'Exposition, la loi d'ar
bitrage a fonctionné... pour détruire no
tre Constitution et nos lois imprescrip
tibles.
2) Tout a été avili
a) Les ouvriers, qu'on essaie d'enré
gimenter dans une organisation d'éga
lité outrance.
b) Les patrons... obligés de se sou
mettre aux capitulations humiliantes.
c) Les fonctionnaires... auparavant
une part de la souveraineté nationale
et auxquels ont été imposés les délé
gués cégétistes comme des maîtres...
d) Le Parlement et l'opinion, trompés
par les engagements et les promesses
vaines...
c) Le Pays, auquel a été infligé
l'occasion de l'Exposition, et suivant
l'expression cinglante de certains par
lementaires et non des moindres, une
humiliation nationale.
Et la lettre se termine par cet ap
pel vigoureux
Ne savez-vous donc pas, Monsieur
le Président du Conseil, que les entre
preneurs de l'Exposition appartiennent
au moyen et au petit patronat, que
ce moyen et ce petit patronat est soli
daire de leur action et QUE SES SUF
FRAGES, dans leur immense majorité,
VOUS ONT PERMIS D'ACCEDER
AU POUVOIR.
C'est ce titre également qu'ils vous
disent qu'eux aussi ont été trompés,
qu'ils réclament impérieusement, comme
c'est leur droit et leur devoir, l'applica
tion des lois, dont l'oubli nous conduit
la ruine.
™p""NO?™TSS«ÂT!RÏotËS™™™
PATISSENT GRAVEMENT
DE LA GREVE AGRICOLE
EN FRANCE
La grève agricole qui règne dans tou
te l'Ile-de-France s'est étendue dix
nouvelles communes de la région de
Meaux.
Les fermières belges installés dans
ces régions souffrent particulièrement
de la situation. Récemment, un ouvrier
belge non gréviste, père de six enfants,
a été l'objet de sévices graves de la
part des grévistes.
En Seine-et-Marne notamment, la
situation est particulièrement grave. Les
patrons belges, qui ne sont admis au
cune délibération, doivent se soumettre
toutes les décisions prises. Ne faisant
pas partie des organisations agricoles de
secours mutuels ni même des syndicats,
ils ne parviennent pas se faire in
demniser des dommages qu'ils ont su
bis. Sous la menace dont ils sont l'ob
jet, leurs ouvriers les plus fidèles finj
sent par les abandonner. Trois fermier
cultivant ensemble 750 hectares, d0
195 de betteraves, ont demandé IV
bassade de Belgique d'intervenir aupr
des autorités françaises pour qUu-
protection leur soit assurée et pour p0
voir obtenir l'autorisation d'engager d
ouvriers étrangers au moins en att
dant que les ouvriers français conse
tent reprendre le travail.
A l'intervention de l'ambassade
Belgique, le ministre de l'Intérieur
pris des mesures pour assurer la pt
tection des trois fermiers, mais la qu
tion de la main-d'oeuvre tarde re
voir une solution et les trois fermi
belges en question voient leur réco
de betteraves compromise sans espoi
la perte qu'ils subiront ainsi se chiff
ra, dans son ensemble, plusieurs ce!
taines de milliers de francs.
de la Libre Belgique)J
Léo n Griilet
Agent de change correspondant
prè& de la Bourse de Bruxelles.
31, RUE DE MENIN, Y P R ES
Téléph. 144
BOURSE TITRES
COUPONS CHANGE
Bureau ouvert le dimanche
pendant la saison.
(Suite)
UTILITE OU NECESSITE
D'UNE MARINE MARCHANDE
La question de l'utilité ou de la néces
sité d'une marine marchande peut être
examinée plusieurs points de vue po
litique .colonial, commercial, économi
que, par exemple dans la question du
protectionisme et du libre-échange, ne
valent pas par elles-mêmes tandis que
le faisceau des arguments réduit au si
lence les adversaires de l'une ou de !au-
tre thèse. Il n'y a nullement lieu d'en
déduire une faiblesse dans les conclu
sions auxquelles on aboutit.
LE POINT DE VUE
POLITIQUE
Lorsqu'on examine la question de 1 u-
tilité ou de la nécessité d'une marine
marchande, au point de vue politique,
il importe de faire une séparation très
nette entre le temps de paix, et le temps
de guerre.
Si le rôle que la marine marchande
joue, en temps de paix, au point de
vue politique, ne se traduit pas par des
avantages matériels, il convient cepen
dant de ne pas sous-estimer son action.
M. Runciman, au cours d'une confé
rence donnée Anvers, le 5 juillet
1930 l'Exoosition Internationale, al
lait jusau dire Ce n'est pas la po
litique du gouvernement qui créa la ma
rine marchande britannique. Son rôle est
dû l'impulsion donnée par l'industrie
et le commerce, lesquels ne furent pas
inspirés et furent peine compris par
nos rois et nés ministres. Il serait beau
coup plus correct de dire oue c est la
marine marchande qu' a fa;t l'Emoire.
«nie de prétendre que c'est l'empire qui
a fait la marine marchande
Sans doute ne faut-il pas prendre la
déclaration la lettre malgré l'autorité
incontestée dont jouit M. Runciman
dans les milieux économiques, il suffit
d'en déduire que de hautes personna
lités reconnaissent l'influence que peut
avoir la marine marchande sur le dé
veloppement du pays.
La marine marchande peut également
jouer un très grand rôle dans le do
maine psychologique. L'exemple de nos
voisins nous montre combien il im
porte. en politique, de ne pas négliger
ces facteurs.
Nous avons trop l'habitude de croire
que les préoccupations mondiales gravi
tent autour de notre activité. Pourtant,
nous n'avons qu'à lire les récits des
grands voyageurs, ou même, simple
ment, de jeter un coup d'oeil sur les
rapports économiques que dressent, tous
les ans, nos consuls, pour voir qu'il
existe encore des pays qui nous igno
rent. Sans doute connaît-on peu près
partout le port d'Anvers, mais en gé
néral on ignore, sauf dans de petits cer
cles intéressés, peu près tout de notre
structure économique et de nos possi
bilités commerciales. Un de nos meil
leurs consuls, dont l'activité s'était exer
cée aux Indes, déclarait lors d'une con
férence faite l'Ecole des Hautes-Etu
des de Gand. qu'il existait, aux Indes,
de nombreuses firmes qui ignoraient
jusqu'à la langue que l'on parlait chez
nous.
On ne dira jamais assez en Belni-
pue. écrit le Bulletin des Armateurs,
combien nous avons besoin de nous faire
connaître au dehors. d'apprendre une
grande partie du monde oui l'ignore,
qu'il existe .entre les rrrandes -étions
un état industrieux, éclairé .ac^'f. pos
sédant une nersonnalité nro" n^pp
qui des relations utiles et
peuvent êrre nouées Ff
c La meiïïettre représentation m»sa
laire est limitée dans son action, là où
le pavillon national ne se montre pas.
Le prestige, et par là, l'efficacité de
la représentation consulaire s'amplifient
au contraire lorsqu'il peut s'appuyer sur
la puissance de propagande que le pa
villon représente On le remarque spé
cialement chez nous, en ce qui con
cerne l'influence allemande au port
d'Anvers.
Nos consuls le remarquent d'ailleurs
personnellement et les commentaires
dont nombre d'entre eux entourent les
constatations relatives au manque de re
lations maritimes, sous pavillon natio
nal, entre la Belgique et leur circon
scription confirment le bien fondé de
cette théorie.
Les cargos, qui composent la majo
rité de notre flotte n'exercent cependant
qu'une influence assez restreinte. On
aurait tort de la négliger, Mais que dire
des paquebots de luxe, surtout depu;s
qu'ils entreprennent des croisières de
vacances, dont l'influence est si consi
dérable l'étranger.
M. Gratien Candace dans son livre
La Marine Marchande Française
n'a-t-il pas été jusqu'à dire Le pa
quebot, c'est un peu d'air du pays qui
passe C'est un peu le messager... c'est
l'ambassadeur qui passe D'ailleurs
pour décider les Chambres voter la
convention du 24 juin 1920, intervenue
entre le gouvernement français et la
compagnie de Navigation Sud Atlanti
que n'a-t-on pas présenté les arguments
suivants Le service rapide et de luxe
constituent un moven puissant d'action
polit-'oue. Par l'éclat qu'il jette sur le
pavillon. contribue puissamment dé-
ve!oo"<>r t':~ rh<n-r& national" et main
tenir le svm*^atb;ee -fît- T-
7 m"r'.-ffp dri Sud.
T e 'e de r?viefon consf;''-~ vé-
r**t-L' -> ça*"'tVo r' f - f ot - d n f
l'existence importe surtout l'Etat
La Belgique se trouve dans l'imp
sibilité de développer son profit
telles thèses. Toutefois, on constae
1 influence belge pénètre beaucoup
facilement dans les ports touchés
notre ligne maritime vers le Cong
qu'elle est moindre, pour ne pas
nulle dans certains ports où nous n
Ions jamais.
Et que l'on vienne pas nous rép
ce qu'écrivait un personnage angl
que l'excédent du tonnage flot,
voquant la crise maritime, était dû
quement aux ambitions désordonn
de certaines petites nstionç qui veu!
absolument voir leur pavillon nati
flotter de plus en plus sur toutes
mers et dans tous les ports du glob
Rien n'est plus légitime que l'ambi
des pays industriels et exportate
ayant des ports de mer, et des po
d'accès sur les océans, d'avoir une
rine marchande propre, et indép
dante de l'étranger.
Au reste la Eelgique ne désire nu
ment posséder une marine marcha
pour le simple plaisir de voir flotter
pavillon national dans des mers <J
fréquente Deu. Ce qu'elle veut en
tière maritime a été lumineusement
fini par M. J. de Bruvn, il y a 0
ques années déjà Nous ne désir
pas éclipser une quelconque puissa
maritime, mats simnlement connu
par un effort avisé et progrp^s1^
place qui, eu égard notre corn®
extérieur, nous revient légitime®
dans le concert des peuples navi
teurs Elle s'est toujours tenue jusu
présent, cette thèse, qui corresp1
ses véritables intérêts.
F. I
Reproduction interdite
i A suivre.