i La Vie Bruxelloise
La grande Muraille
Grand hôtel Moderne
billet bruxellois
franckinade.
jjUD, dimanche 5 septembre 1937.
fdonseur Louis Franck, gouverneur
Je la Banque Nationale est incontesta
blement en vedette. L'anecdote suivante
est authentique.
En 1920, Mr. Franck faisait une tour
née, dites d'inspection, au Congo Bel
ge. titre de Ministre des Colonies. Il
s'arrêta deux jours Luebo, dans la
province du Kasaï.
Déjà, alors, la question de la Colo-
jsation en Afrique préoccupait de nom
breux Belges, et même des étrangers
plusieurs d'entr'eux s'étaient risqués
tenter l'aventure leurs risques et pé
rils. Les résultats pouvaient être bril
lants, le climat du Kasaï étant des plus
Jéments et l'approvisionnement en vi-
rres frais étant abondant. Hélas, faute
je l'administration et de la justice de
irotéger efficacement les droits et la
propriété des colons, ceux-ci subissaient
Jes pertes énormes, soit cause de la
alveillance des indigènes, soit de par
goût prononcé de ces derniers pour
la rapine. Aussi, dès l'annonce du pas-
de Mr. Franck Luebo, un co
mité de colons se forma et décida d'ex
poser au Ministre un minium de do
léances. Le Comité était présidé par un
:olon italien, ancien administrateur ter
ritorial, qui avait réalisé une œuvre co
lonisatrice splendide, de l'avis même de
Mr. Franck, qui visita ses installations
fermières).
Audience fut accordée, et la fin
d'une belle après-midi, le Comité des
Colons fut reçu par le ministre sur la
terrasse de la résidence du Commissaire
de District. Long exposé des plaintes
et proposition des remèdes, très simples
apporter la situation existante.
Le Ministre semblait convaincu. Il se
leva, passa la main dans sa belle barbe
et parla
Mes amis, dit-il, vous êtes des gens
heureux. Quel climat Et quel plaisir
de vivre dans un pays où il y a de
si magnifiques couchers de soleil Ad
mirez cela Messieurs, je vous salue
Et Mr. Louis Franck se dirigea tran
quillement vers un autre groupe de sol
liciteurs, laissant nos colons tout éber
lués
Cette anecdote nous revient l'es
prit, en ces jours où Mr. Louis Franck
est aux prises avec de graves difficultés.
Elle nous amène nous demander, si
comme gouverneur de la B. N. il n'a
pas assuré la gestion des affaires en
admirant les beaux couchers de soleil,
et les beaux clairs de lune. Ceci expli
querait bien des choses.
P. L. T.
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BRUXELLES III
L'ARTISTE DEVANT
L'EGLISE
L'Eglise professe que dans l'échelle
la Spiritualité l'Artiste vient immé-
iatement après le Saint.
Quoi d'étonnant dès lors qu'au cours
t deux millénaires, Elle se soit mon
te la protectrice sagace et généreuse
Jes Arts. Non seulement protectrice sa
lace et généreuse, mais, encore et sur
tout, inspiratrice et conservatrice des
ef-d'oeuvres du passé.
Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des
uvres qui font l'orgueil de nos musées,
t nos églises, de nos collections parti-
ulières ne sont parvenues jusqu'à nous
"c grâce l'Esprit de suite de l'Eglise,
'a compréhension de ses prêtres,
Art patient et désintéressé des moines
tstaurateurs qui peuplaient nos ab-
ayes.
Le couvent et l'Eglise, premiers abris
Wélaires de nos ancêtres ont su pro-
SfUtr envers et contre tous, contre
Homme, contre les éléments, au milieu
'es guerres et des révolutions le patri-
°ine d'Art qu'ils avaient cœur de
constituer.
Inspiratirice des Arts 1 Eglise a con-
"tué par le mélange de Divin et d Hu-
®ain qui est sa substance, une source
tepuisable où les Maîtres de la pein-
™re et de la sculpture n'eurent qu'à
Puiser
Elle, que les esprits forts se plaisent
'considérer comme singulièrement «dé-
®°dée» s'est trouvée en matière d'Art
'avant-garde du progrès, et a fait de
ut temps figure de révolutionnaire.
Elle, si posée et si prudente, est en
matière d'Art d'une audace inouïe et
qui n'a d'égale que son entêtement
vouloir réaliser dans le durable, ce qui
apparaissait alors comme des hérésies
techniques.
Far trois fois la cathédrale de Bour
ges s'effondre parce que son architecte
voulait lancer vers le ciel, en ex-voto
titanesque et gracieux, de voûtes la
fois trop légères et trop lourdes, et ce
pendant l'Eglise persévère.
Que durent être les hurlements des
architectes du temps quand l'un d'entre
eux s'avisa de construire la première
ogive
Notre époque moderne s'empresse
rait d'interner celui qui tenterait de nos
jours une révolution proportionnelle
ment aussi osée, l'Eglise au contraire
apporte au novateur désespéré par
i l'échec, l'appui do ses deniers et le ré
confort de ses prières.
Si Michel-Ange, éternel créateur
d'ieuvres inachevées parce que d'une
grandeur au-dessus de l'Humain, avait
vécu en notre époque si évoluée, du
moins le croyons-nous, nul doute qu'il
aurait été considéré comme un dange
reux déséquilibré.
Généreuse, prodigue de ses deniers
l'Eglise fut en matière d'Art une grande
tolérante.
Nos vieilles églises sont pleines
d'oeuvres d'inspiration payenne et la vi
rilité des nus qui ornent les galeries du
Vatican feraient mourir de mâle lage
les séïdes du Dr Wibo.
Nous avons vu l'Eglise dans son tri-
Suite de la 1ère page)
Mur Corinthien, ni celui que défendit,
tant bien que mal. les trésors de la
Grande Babylone, pas plus que la Mu
raille de Trajan, le Mur-aux-trois-cent-
tours d'Adrien, ou la crête fortifiée de
130 kilomètres, maçonnée par les sujets
de Septime Sévère nul rempart, la
face des cieux, n'éclipsa la gloire de
Wan Li Tchang Tcheng, la Grande
Muraille
Les travaux se produisirent pendant
plusieurs années, occupant gratuitement
un bon tiers dit-on de la popu
lation chinoise. Et dire que certains
journalistes réservent aux seuls Egyp
tiens le monopole des œuvres titanes-
ques... Kéops le Bâtisseur n'aurait pas
fait mieux, dans le genre, que cette ai
mable fripouille de Tche Houan Ti
L'entreprise, dès lé début, s'avéra hé
rissée de difficultés. L'interminable rem
part devait épouser tous les reliefs d'un
sol accidenté souhait, escalader des
montagnes abruptes, surplomber des
abimes. enjamber des torrents.
Bref, les travaux s'éternisaient. Vint
le jour, ou un oracle annonça que les
dépouilles de dix mille hommes enter
rés vivants dans les fondations suffi
raient consolider le mur cyclopéen.
Faute de quoi, comme la Tour de Ba
bel, Wan Li Tchang Tcheng demeur-
rait perpétuellement inachevée. Le sieur
Tche Houan Ti hésita. Ce qui tendrait
prouver que ce Fils du Ciel n'était
point si mauvais diable que les lettres
nous le font croire... Né rusé, comme
tous ceux de sa race, le vieux forban
tourna la difficulté il se contenta d'en
terrer tout vif un pauvre bougre dont
le nom contenait, pour son malheur, le
mot wan qui veut dire dix mille.
Roulés et satisfaits, les dieux ne s'oppo
sèrent plus l'achèvement des travaux.
Et la Grande Muraille serpenta par
monts et par vaux, de Tchang Kai Hou
an, sur le golf de Li Hao Toung( jus
que dans la province de Kansou. aux
frontières du Thibet. Les Chinois, mar
seillais d'Extrême-Orient, évaluaient sa
longueur dix mille lis. plus de 5.000
kilomètres. Williams réduit ce chiffre
2.500, et Chauvelot le ramène 2.400
pie rôle d'inspiratirice, de protectrice et
de conservatrice de l'Art.
Pourquoi l'Eglise a-t-elle joué ce
rôle
Pour les siècles révolus le sceptique
nous répondra que l'Eglise ayant alors
le monopole du savoir, il était normal
qu'elle ait monopolisé l'Art.
Mais notre époque l'Art chrétien
après s'être confondu avec l'art tout
court durant un siècle renaît avec une
vitalité, avec un caractère qui lui sont
propres.
En littérature, de Brunetière Croc-
teau, ce ne sont que conversions tapa
geuses ou discrètes. Chrétiens de vieille
souche ou convertis de fraîche date,
proclament avec une ardeur mystique
ieur Foi.
Jusqu'au Théâtre, si longtemps ré
prouvé, qui s'oriente vers l'Eglise avec
Henri Ghéon et Jacques Copeau.
Les architectes d'Église ont asservi
le ciment armé des fins spirituelles.
Et pourtant l'Eglise ne monopolise
plus le Savoir
Si les artistes se tournent ainsi vers
l'Eglise, de nos jours comme durant 19
siècles, c'est parce que celle-ci a com
pris et proclame que l'Art était la réa
lisation du Beau ou du moins une ten
tative. Et Elle a de tous temps consi
déré l'exaltation du Beau comme le plus
bel hommage que l'on puisse rendre
Dieu.
C'est Dour cela que l'Eqlise n'a pas
oublié l'Artiste dans ses Béatitudes
Charles FFRSEZ.
kilomètres. Le grand Larousse, lui. ne
se contente pas moins de 3.000 km.
Haute de 5 10 mètres, la Grande
Muraille est large d'une dizaine de mè
tres sa base et de 5 6 m. au som
met. Construite en terre battue et en
gros cailloux, elle est revêtue sa par
tie inférieure de pierres massives et, au
sommet, d'une carapace de briques sé-
chées au soleil. Bordée de parapets cré
nelés, la crête du rempart fabuleux est
parcourue, d'un bout l'autre, par une
large route carrossable. Deux charriots
peuvent s'y croiser sans difficulté.
Le rempart est renforcé sur toute sa
longueur par des donjons carrés régu
lièrement espacés, et, par des massives
citadelles juchées sur les sommets mon
tagneux. Comme le fait remarquer un
vieil auteur ces divers ouvrages ne
sont éloignés les uns des autres que de
deux traits d'arbalète, afin qu'aucun
point de la muraille ne deméure hors
de la portée des défenseurs.
Wan Li Tchang Tcheng joua on
s'en doute un rôle capital dans l'his
toire guerrière de la Chine. Pendant des
siècles, elle parvint contenir les en
vahisseurs venus du Nord. Mais au
XlIIe siècle, sous la dynastie mongole
des Younen, l'unification de l'Asie fit
perdre la Grande Muraille son im
portance stratégique. Ce fut le commen
cement de sa fin... Cependant, les em
pereurs Ming de souche chinoise, ayant
chassés les intrus la fin du XIVe siè
cle, remirent le rempart séculaire en état
de défense. Peu après, ils élevèrent une
nouvelle muraille, au Sud de celle de
Tche Houan T, et, 60 km. au Nord
de Péiping jadis Pékin.
Trois siècles plus tard, les conqué
rants mandchous franchirent allègre
ment les deux murailles, et s'emparèrent
de la Chine sans coup férir. Leurs em
pereurs les Tsing, qui régnèrent jus
qu'à la révolution de 1912 eurent
d'autres chats fouetter que de veiller
la conservation de la vénérable Wan
Li Tchang Tcheng
La Grande Muraille s'écroula, lente
ment, pesamment, comme un colosse
vaincu... A l'heure actuelle, elle n'exis
te plus qu'à l'état de ruines informes...
Un pan de mùr, de-ci, delà, émerge
des décombres comme pour nous rap
peler l'existence, il y a' vingt-trois siè
cles, du reitre couronné Tche-Houan-
Ti, le persécuteur...
Quand la Muraille Intérieure du
XlVe siècle, elle subsiste, presque in
tacte, dans la province de Pe Tche Ll.
et, en moins bon état, dans le Chan Si.
Il y a belle lurette que les Chinois ont
renoncé défendre ce vestige d un au
tre âge qui s'éffondrerait comme un châ
teau de cartes sous le feu des canons
japonais.
Jusqu'ici, cependant, 1 invasion nipon*
ne avait respecté le vieux rempart. En
hardis par la faiblesse de la Céleste Ré
publique, les armées du Mikado vien
nent enfin de passer outre, déferlant
sur Péiping comme une lame de fond...
L'héroïque et vaine défense du col
de Nankéou, par les soldats de Chang
Ka Chek, auréole de gloire pour la
dernière fois, peut-être Wan Ll
Tchang Tcheg et sa sœur cadette la
Muraille Intérieure...
Gérard Des Marez.
Institut Supérieur d'Histoire de
l'Art et d'Archéologie, E. H. E. de
Gand).
P. S. Pour enrayer l'avance japo
naise, les Chinois viennent d'édifier une
Grande Muraille, nouveau style. Con
struite en ciment armé, flanquée de
blokhaus et de fortins abondamment
pourvus d'artillerie et d'armes automa
tiques. la ligne Hindenburg comme
on l'appelle là-bas serait imprenable.
Du moins les observateurs étrangers le
prétendent. Qui vivra verra...
G. D. M.