4 Musée de Pesth la Vierge Vienne et la Marche au Calvaire les volets de la collection de Londres le calvaire de Chantilly, et de nombreux tableaux dans les principaux musées du monde, et notamment New-York. Mais me direz-vous. et la Châsse de Sainte-Ursule Evidemment nous ne l'avons pas oubliée, mais c'est dessein que nous n'en parlons qu'à la fin de ce numéro illustré. Nous voudrions, de cet te manière, attirer l'attention de nos lec teurs sur l'œuvre complète et si variée de Memling, et éviter que se pose tou jours l'esprit ce rapprochement entre le nom de Memling, et une de ses œu vres, qui n'est, certes, pas la plus inté ressante. Le grand maître brugeois a réussi un petit chef-d'œuvre qui témoi gne de son art d'enlumineur, et qui a ouvert aux critiques la voie d'innom brables discussions sur l'attribution de belles paqes enluminées Jan Mem ling. La Châsse de Sainte-clrsule figure honorablement dans l'œuvre de Mem ling, mais elle a causé un grand préju dice sa mémoire, en retenant trop l'attention de la masse. Nous voudrions que ce soit le résul tat de l'exposition de Bruges, de fixer l'attention, non seulement de l'élite, mais de la masse sur l'œuvre complète de Jan Memling. En y parvenant elle aura rendu un service considérable l'école brugeoise, en rendant l'admiration due Memling toute l'ampleur qu'elle mé rite. Comment caractériser l'art de> Mem ling, et comment décrire sa manière C'est une tâche aussi ingrate que vaine, laquelle des centaines de critiques se sont déjà livrés. Nous n'allons rien ajouter leur abondante, littérature. Mais afin de permettre nos lecteurs de trouver parmi ces clichés littéraires des formules agréables, qui traduisent aimablement leurs impressions, nous ci tons quelques extraits. Empruntons Michiels un passage qui ne soit pas saturé de romantisme et dont la lecture intéresse Le coloris de Memling n'est pas moins idéal que ses types, ses expressions et ses paysa ges. Il a moins de force que celui du chef de l'école, maie plus de suavité, plus de douceur. Memling cherche avant tout les nuances agréables quoique ses tons locaux soient très vifs.i jamais ils ne se nuisent, et une harmonie souveraine do mine l'ensemble. Après quatre siècles de durée, ils ne sont pas devenus obscurs le temps leur a laissé la fraîcheur qu'ils avaient dans l'atelier du peintre. On voit SIBYLLA SAMBETH. Le portrait énigmatique de cette jeune fille n'a pas achevé d'épuiser la verve des critiques. La pseudo- Sibylle serait-elle une des filles de Moreel Maria L'œuvre date de 1480. On y trouve toute la précision et la sincérité du talent de Memling. Il faut surtout ad mirer l'élégance et la trans parence du voile, ainsi que la finesse des mains aux doigts effilés. de lui au Musée d'Anvers une petite Annonciation les fenêtres de la cham bre sont ouvertes, et l'on distingue un paysage éclairé par les lueurs du soir, qui enveloppent également la colombe du Saint-Esprit on ne peut examiner ces rayons sans transport, car les tein tes en sont d'une beauté merveilleuse et indicible. Les couleurs de Memling pré sentent au reste la plus grande variété. Pour la perspective il l'exécute mieux que van Eyck ses terrains ne semblent pas si escarpés, ses fonds pâlissent da vantage, comme le réclame l'interposi tion de l'air. Il a certainement fait ac complit des progrès la peinture et n'a oas seulement recueilli les nombreux legs de ses devanciers. Dans son traité de la Peinture fla mande A.-J. Wauters écrit La talent de Memling, moins large et moins robuste que celui de Jean van Eyck, est plus sensible, plus tendre et plus élégant. Son coloris est d'un éclat, d'une riches se et d'une résonnance qui ne le cèdent aucun le dessin de ses têtes, de ses belles mains aux doigts effilés, est châ tié, jusque dans ses moindres traits et le modelé tellement serré, qu'il permet peine de définir la facture. Il n'a au cune ficelle de métier, pas de parti pris, pas la moindre préoccupation de l'effet. La vérité simple, la sincérité, la bonne foi caractère des œuvres éternelles. Poète, il a créé un type féminin, incon nu jusqu'à lui, disparu depuis. Ses vier ges, auxquelles des anges en dalmati- que offrent des fleurs ou des fruits, en jouant de la harpe ou du luth ses bel les saintes, aux longues robes de bro cart, jupe traînante, ne sont pas seu lement des copies réelles et mondaines de la femme brugeoise de son temps, ce sont aussi des emblèmes de grâce, de distinction, de recueillement, de virgi nité. Si leur tête blonde, au front bom bé, ne répond plus l'idée que nous nous faisons aujourd'hui de la beauté, voyez leur sentiment quelle candeur céleste quelle béatitude quel charme indicible Personne encore n'avait, en Flandre, vu aussi profondément, peint avec autant de cœur. Après quatre cents années, son œuvre est toujours jeune. Plus on l'écoute, plus on s'y attache, plus on s'en pénètre. C'est une de ces symphonies, qui semblent plus nouvel les mesure que l'oreille les entend da vantage. C'est du grand art dans tou- t<* la fnree du terme. Du Chanoine Duclos Le tempéra ment de Memling est idéaliste, tandis oue celui de Jean van Eyck est réaliste. Comparez les portraits peints par ces deux artistes de premier ordre. Tout en étant très objectifs, les portraits pro duits par Memling font ressortir une psychologie bien différente chez le maî tre il leur inspire la sérénité de son âme. Memling avait une nature ascéti que et mystique. Il est le plus saint de nos peintres. En même temps il est gra cieux, charmant, plein d'une douce et pieuse émotion son cœur est pénétré de poésie brugeoise. Il a créé entr'au tres, un type féminin et un type angéli- que inconnus avant lui, et que nos pein tres brugeois ont copié longtemps, sans y mettre cependant le tact délicat du maître. Ses Vierges et ses Saintes sont plus que de belles Brugeoises elles ont une grâce, une distraction, un recueille ment et un parfum surnaturel de virgi nité qu'aucun peintre ne sut leur don ner. Et ses anges quelle béatitude, se traduisant par une pointe de bonne hu meur et d'esprit caustique, qu'on ne trouve chez aucun autre artiste flamand. Memling voyait étonnament haut et son cœur ascétique guidait son pinceau. Memling a été V plus grand des pein tres de l'école brugeoise. Dans l'histoire de l'Art, parue sous la direction de Michel, nous lisons Les éléments des paysages de Memling sont de plusieurs genres. Il a des horizons de falaises bleuâtres qui font songer cer tains sites des bords du Rhin des sil houettes de villes imaginaires et des vues de cités authentiques reconnaissa- bles leurs monuments. ainsi Co logne dans la Châsse de Sainte-Ursule des sites franchement agrestes et des bâtisses paysannes, comme cette fer me auprès d'un cours d'eau, l'arrière- plan de la Vierge entre deux anges, de Florence, en regard d'un chateau fort de véritables r>arcs d'aarém^nt. té moin le fond de ce feuillet de diptyque du Louvre où l'on voit, en figuration principale un Donateur avec Saint-Tean- Baptiste. Parfois en des prairies enchan tées arrosées d'eaux vives, parmi des branchages légers tremb'ant aux brises, des animaux paissent, des oiseaux vo lent. Sur des étranas unis comme des miroirs ou ridés peine, et là, dans la perspective, nagent des cygnes blancs. les mêmes oue profile, en des conditions pare'lles, l'attachant Gérard de Saint-Jean, les mêmes que, bien au paravant, avaient si gentiment traduits sur le vélin les enlumineurs du Duc Jean de Berry. Souvent aussi le peintre de Bruges fait surgir au loin, sur quel que chemin vert, un petit cavalier au cheval blanc, interpété par A.-J. Wau ters comme une façon de signature. Mais ce cavalier mystérieux a déjà che vauché au moins dans les tableaux du Maître de Flémalle. et il sera sage de ne pas exagérer le rôle du minuscule passant, si amusant découvrir. Et la conclusion est celle que nous avons fait nôtre A l'heure où la ville des grands ducs d Occident commence perdre son prestige, son fils d'adoption, l'héritier des maîtres qui 1 ont honorée, sauve garde le plus pur de sa gloire. Voici quelques lignes du R. P. Nieuw- barn Le choix de ses tendres et moël- leuses couleurs s'harmonisait parfaite ment... avec son goût pour l'idyllisme. Il avait une vive horreur des contrastes, suscités par les couleurs trop voyantes, nais grâce une patience infinie et une parfaite connaissance de la plus chaude gamme de tons, il atteignait pourtant pleinement son but, en répan dant sur son motif une sérénité difficile décrire. Les teintes vineuses foncées, le suave bleu clair, le doux vert olive lui vinrent singulièrement en aide pour cela. Pour en être convaincu vous ne devez pas seulement fixer les regards sur la châsse de Sainte Ursule, mais en core sur le triptyque de Floreins et le diptyque de Martin Van Nieuwenhove. Les meilleures de ses pages portent vi siblement l'empreinte de son sentiment coloriste des plus sûrs, et prouvent en même temps son génie l'exprimer. Qu'on examine ce point de vue, le mariage mystique de Ste Catherine L'on y verra comment, doué d'un sen timent de finesse des plus tendres, il parvient unir dans une parfaite har monie, les tons les plus contrastants. La teinte en vert nuancé de la robe de Barbe et, sur le volet de droite, de celle de Salomé le rose du manteau de la Vierge, et, chez Catherine et Sa lomé, le rnuqe velouté des manches avec, côté d'elles, un pourpoint velouté l'éclat brillant de la pourpre dans le manteau de Jean Pathmos, et sur le panneau central de la teinte vineuse n'es suave encore de l'Evangéliste tout cela forme une harmonie jusqu'ici de meurée sans égale où l'on voit briller une distinction d'une pureté sans mé lange. VOLETS DU RETABLE FLOREINS. L'intérieur des volets de ce retable, dont le panneau central est reproduit en première page, repré sentent le Nativité et la Présentation au Temple. Rien n'est plus exquis que ces scènes charmantes et Fierens-Gevaert écrit très justement La Présentation au Temple surpasse peut-être la solennité mystique de Roger van der Weyden les petits personnages aux teintes d'aquarelles y ont des airs d'éternité comme les figures héroïques de Jean van Eyck. Le ré table de Jean Floreins est un acte de foi, le plus pur, le plus net, le plus suave que Memling ait formulé. Jésus y est adoré par sa Mère et les Anges, par les Juifs, par les Gentils, et surtout par le peintre, car ici, comme dans la réplique de Madrid, la fin dernière des Memling est la prière. Et tout un enseignement apologétique se dégage résumant l'œu vre divine de la Rédemption.

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Le Sud (1934-1939) | 1938 | | pagina 8