MOUSCRO
Sécurité et parole donnée
LE SUD, dimanche 1er janvier 1939
REMI COGHE
Une manifestation commémorant le
grand artiste mouscronnois, grand prix
de Rome, s'est déroulée dimanche der
nier. Au Rue du Froid Champ a eu lieu
l'inauguration d'une plaque commémo
ra tive.
Auparavant avait eu lieu l'Hôtel de
Ville devant de nombreuses personna
lités une séance académique durant la
quelle furent prononcés des discours par
le heuicrostre Monsieur Vandevelde
et par le dévoué vice-président du co
mité des Beaux-Arts, Monsieur L. C.
Graulich qui nous fit connaître les prin
cipaux passages de la vie artistique de
notre compatriote.
Félicitons le comité des Beaux-Arts
pour son heureux initiative et la muni
cipalité pour son appui généreux. Le
souvenir est une fleur qu'il faut savoir
cultiver, surtout dans le patrimoine lo
cal, c'est l'exemple montrer, nécessaire
aux jeunes générations pour leur mar
che vers le beau et le bien les vertus
et les qualités de nos concitoyens sont
utiles connaître et Mouscron peut être
fière de Remi Coghe qui par son talent
a participé au relèvement artistique et
au prestige moral de notre cité.
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SEUL LE TEMPS DEMONTRE
Un vieux Mouscronnois du bois Fi
chai; x, flâneur et observateur me ren
contrait hier cent mètres de la maison
de notre maïeur et après échange de sa
lutations l'entretien roula sur la ques
tion du jour La guerre... et la... Paix
Parlant de la dernière (de 14-18) de
puis ce temps on a tout fait, me dit
Théodore Reconstruire, moderniser,
amasser des trésors, embellir les demeu
res, s'adonner aux plaisirs, fêtes de tous
les genres, danses, cinéma, voyages, etc.
etc. Des guerres lointaines ont vu le
jour, même en Europe, où des milliers
d'individus tombent sous les feux meur
triers des ennemis. Ennemis que dirais-
je des frères d'un même pays, ayant
des mêmes intérêts, intérêts sacrés qui
ne changeront pas... même après les
hostilités Les pays ne s'entendent plus,
s'acaparent de ceux de leurs voisins. Les
gens d'un même pays ne peuvent plus
s'entendre.
La politique détruit tout. L'amour, l'a
mitié disparaissent, les voisins entre eux
se jalousent, l'ouvrier hait son semblable
l'usine, l'atelier, partout. Que dis-je
mais les frères et soeurs ne se suppor
tent plus
L'entr'aide mutuelle n'existe plus, la
haine fait place l'amitié (la haine en
gendre la haine) et on parle de paix, on
la prêche, on veut la paix et on ne peut
s'entendre et les plus grands prêcheurs,
sont les provocateurs, les excitateurs
au troubles en général... haïssent.
Connaissez-vous le palliatif ce mal
progressif du XXe siècle, époque de
civilisation rebours) lui dis-je après
l'avoir écouté sans interruption la belle
narration
Qu'est-ce qui a donc manqué l'hom
me pour faire mieux
Et Théodore, de me dire tout bas
l'oreille: l'Intelligence, mon ami!
Le Flâneur.
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LA CURIOSITE
La curiosité, dans le monde, est commu-
[ne
Certaines gens, partout, demeurent en
éveil
Chacun semble épier ce que fait son
[pareil
Et, quand je dis chacun, je dis surtout
[chacune.
Du matin jusqu'au jour, ils arpentent la
[rue.
Inspectant, en tous sens, chaque direc
tion.
Au moindre événement ils font atten
tion.
Sur toute chose enfin ils dirigent leur
[vue.
Leur ardeur, sur ce point, me semble
[sans égale
Ils veulent tout savoir, sans jamais rien
[payer.
Affaire de connaître, histoire d'égayer
Leur esprit, en ce genre, l'envie se
[signale.
Il arrive pourtant qu'ils ne peuvent rien
[dire.
Ils n'ont vu que du bien vont-ils le
[trouver mal
Ce que l'on dira juste, est pour eux...
[anormal
Et la vertu d'autrui provoque leur sou
tire.
Cette mentalité ne parut fort étrange.
Quand je les vois ainsi dénigrer leur
[voisin.
Le louer quelquefois, pour l'abîmer enfin
Je songe l'animal qui se vautre en la
[fange.
Par la ville, en passant, je fuis et les
[évite,
Je veux leur interdire jamais ma mai-
[son
On est toujours sali, pensé-je avec rai-
[son.
Par qui brasse la boue et sans cesse
[1' gite
Ne leur prêtons jamais une oreille at
tentive.
Que dis-je fuyons-les, car, les plus
[vertueux
Ont été bien souvent vilipendés par eux
Ils noirciraient la neige et troubleraient
[l'eau vive.
Que ce soient nos amis, nos bienfaiteurs,
qu'importe
Aimons-les de tout coeur, venons leur
[secours
Aux calomniateurs, aux médisants, tou-
jours,
Disons bonjour, peine, et fermons no
tre porte.
Louis-C. de St Barthélémy.
ECOLE INDUSTRIELLE.
L'école industrielle aura bientôt be
soin d'un directeur ira-t-on chercher
l'étranger ce nouveau dirigeant
Mouscron possède encore des compé
tences aptes gouverner ce genre d'in
stitut. Nous avons l'espoir que la nou
velle administration, ne montrera pas
d'étroitesse de vue, ni de démolition
ECHOS
Lors d'une visite l'atelier de Mon
sieur Ernest Cracco, le vice-président
du comité des Beaux-Arts Mr L.-C.
Graulich a lu une lettre émanant du
Ministère de l'Instruction Publique et
stipulant Je suis heureux de vous ac-
Suite de la Ire page
comme pour ses voisins. La neutralité
d avant 1914 avait été imposée la
Belgique par les puissances et était ga
rantie par elles. Elie pouvait même, au
sens des juristes et des théoriciens, être
plus ou moins désarmée. Tandis que
1 indépendance de 1936 a été réclamée
par la Belgique. Elle est volontaire. Elle
doit être armée et impartiale, sous peine
de ne- pas être. En déclarant sa politique
indépendante, la Belgique doit avoir la
détermination de la soutenir dans l'in
térêt de la paix et de la sécurité occi
dentale par des armements personnels
appropriés et par une attitude d'une
correction scrupuleusement égale l'é
gard des trois puissances voisines.
Bref, la parole donnée doit être te
nue sur toutes les frontières. Il s'agit
de ne pas apporter au monde un chif
fon de papier de plus.
Déjà il peut en coûter un puissant
de manquer sa parole, mais pour un
faible ce serait un désastre.
En ouvrant par complaisance, et non
la suite d'une agression non provoquée
qui légitimerait une aide, sa frontière
aux armées d'un de ses voisins, pour
lui permettre de marcher sur un des trois
peuples vis-à-vis de qui elle a contracté
d'égales obligations, pris les mêmes en
gagements de bon voisinage, la Belgique
renierait sa parole. Elle deviendrait in
digne de la Belgique de 1914 qui fut
l'incomparable et pure victime de la pa
role tenue.
Sans doute l'exécution de l'engage
ment dépend-elle aussi de la correction
des grandes puissances intéressées. El
les aussi ont donné leur parole la
Belgique qu'elles ne feront rien pour
prendre vaine et périlleuse sa politique
d'indépendance.
Les exemples d'engagements interna
tionaux qui dégénèrent en chiffons de
papier ne manquent pas.
En août 1914, l'Allemagne attaque la
Belgique qu'elle garantissait.
En 1936, la Société des Nations aban
donne l'Ethiopie qu'elle garantissait et
qu'elle avait excitée contre l'Italie.
En septembre 1938, la France et
l'U.R.S.S. abandonnent la Tchécoslo
vaquie laquelle un pacte les liait et
qui avait mobilisé contre l'Allemagne
dans l'espoir que le pacte jouerait en
sa faveur.
Il est certain que si l'Ethiopie et la
Tchécoslovaquie avaient négocié
temps avec leurs puissants adversaires
sans se leurrer de l'attente de secours
qui ne vinrent pas, elles auraient obtenu
des conditions moins défavorables que
celles où leur vaine bravade les jeta.
Ces exemples donnent réfléchir. Ils
montrent ce que vaut, en maintes cir
constances, la parole donnée. Ils ensei
gnent qu'il faut avant tout compter sur
soi-même, éviter l'excessive confiance,
se comporter avec circonspection l'é
gard de tous ses voisins, pratiquer en
vers tous une égale correction et, ap
puyé sur son droit et sa force, éviter
tout emportement, tqute imprudence, ne
jamais oublier que la politique est l'art
du possible, que la vie n'est qu'une cote
mal taillée, et qu'un compromis vaut
mieux qu'un procès grands fracas.
Pour le surplus, évidemment, la poli
tique d'indépendance ne signifie pas
neutralité, ni effacement, ni isolement.
Le premier citoyen du pays l'a dit. Mais
sortir de l'isolement peut signifier bien
corder la permission de copier le tableau
du 1er Grand Prix de Rome 1880 feu
Mr Remi Coghe. Vous pouvez faire ce
travail Anvers l'Académie, votre
convenance.etc.
Ce tableau représente les Aduati-
ques vendues l'encan Sous peu nous
en reparlerons.
plus rechercher ce qui rapprochera nos:
grands voisins et fondera la paix et la
sécurité que ce qui les désunira et en
fantera la guerre. Et cela, le Roi Léo-
pold III l'a déclaré ausei. avec courage,
avec élévation, devant la France qui
l'écoutart l'inauguration du monument
du Roi Albert, le 12 octobre 1938,
Paris.
Relisons cette paraphrase du statut
des relations extérieures de la Belgique:
Sans doute le Roi Albert a-t-il rem-
pli le rôle que la destinée lui avait
marqué pour servir son pays, et lui
garantir l'indépendance avec l'hon-
neur. Mais ce n'est point altérer la
physionomie que l'Hitsoire gardera de
lui. si j'affirme que la préoccupation
dominante et essentielle de mon père.
la haute culture intellectuelle qui était
la sienne, la compréhension qu'il avait
de son devoir de chef d'Etat, le souci
du bien de ses compatriotes, son
amour pour les humbles et les faibles.
orientait son esprit faire régner la
concorde et la paix.
Chaque homme a ses devoirs. Cha-
que peuple a sa mission. La mission
de la Belgique, située au carrefour de
l'Europe occidentale, est toute de paix
et de médiation, tâche lourde et dif-
ficile, mais combien noble et digne
des efforts les plus persévérants.
Un destin cruel avait, hélas dé-
tourné mon pays de cette mission en
faisant trop souvent de son territoire
un vaste champ de bataille, au lieu
d'une terre hospitalière sur laquelle
les peuples auraient pu se rencontrer
pour résoudre dans la paix l'objet de
leurs discordes.
Pour accomplir sa véritable mission
dans toute sa grandeur et sa fécondité.
le peuple belge doit affirmer et garder
une indépendance complète et respec-
tée, qui soit le signe de son impartia-
lité et le gage de la confiance qu'il
entend inspirer.
Une politique d'indépendance n'est
pas une politique d'effacement et d'iso-
lement. Elle ne désavoue ni le souve-
nir glorieux d'un passé récent, ni celui
des épreuves courageusement suppor-
tées en commun. Elle implique et
c'est la volonté de la Belgique le
respect des engagements pris dans la
limite de ses forces, la fidélité la pa-
rôle donnée, la loyauté et la franchise
vis-à-vis de tous, comme elle s'identifie
l'idéal de paix qui répond aux as-
pirations profondes de tous ses habî-
tants.
Non, certes, la Belgique ne regrette
pas son geste de 1914, ni la grandeur
douloureuse, ni les amitiés qu'elle en
fanta. Mais elle a dépouillé la haine.
Elle veut s'employer la paix européen
ne.
Pour tenir sa parole, elle consolidera
ses armements et sa force morale et
donnera ainsi aux nations de l'Europe
occidentale la sécurité sur les frontières
qu'elles ont avec elle. Pour tenir sa pa
role encore, elle dénoncera avec tristesse
le désordre économique sans précé
dent qui oppose et divise les peuples,
développe les égoïsmes et provoque tou
tes les haines et elle s'efforcera de
faire prévaloir la vérité économique
inspirée par la confiance réciproque
des peuples et appliquée par leur col
laboration active et persévérante Et si
par malheur cet idéal de fraternité de
vait sombrer, la Belgique n'oubliera pas
davantage sa mission et elle saura fa
rouchement monter la garde sur ses
frontières, pour que le monstre de la
guerre ne les franchisse pas et que la.
terre historique des invasions, des tu
multes et des carnages, reste une oasis
de paix et de bonheur offerte en exem
ple aux derniers hommes de bonne vo
lonté.
Louis HABRAN.