Le Jeu du /aint - /sng L'enseignement
colonial en Belgique.
LE SUD, dimanche 6 août 1939 2
Quand les organisateurs du Jeu du
Saint-Sang affirment que toute la vie
de la Ville de Bruges est polarisée
par cette grande manifestation d'art re
ligieux, ils n'exagèrent pas. En effet
l'encombrement seul du podium, de
l'énorme scène, de l'estrade sur laquelle
se place l'orchestre, du pont sur lequel
défilera le cortège de Thierry d'Alsa
ce, tout cet ensemble occupe la Grand -
Place de Bruges au point que les trams
ne peuvent plus y circuler, que le Mar
ché est déplacé, et que les Brugeois
préoccupés par le succès du Jeu ne se
plaignent pas des multiples petits in
convénients qu'il occasionne.
Grande manifestation d'art chrétien,
le Jeu du Saint-Sang a été conçu et
composé par des Flamands. Il n'est heu
reusement pas diminué par cet esprit
étroit de régionalisme, et témoigne du
caractère universel et largement humain
que le christianisme donne aux œuvres
qu'il inspire.
La première version a été sensible
ment modifiée. Le Jeu est plus étoffé
le nombre des figurants est encore en
augmentation. Le diffusion et l'éclairage
ont fait l'objet d'une étude minutieuse
et les nécessités techniques ont obligé
les organisateurs édifier deux- tours
aux côtés du monument des commu-
niers. Le podium a été surélevé et at
teint une hauteur de 14 mètres. Sur le
Beffroi un Christ crucifié de 9 mètres,
œuvre du sculpteur De Wispelaere, fait
une forte impression.
LE SUD souhaite aux organisateurs
un total succès, et est heureux d'avoir
contribué, par un numéro spécial, l'an
dernier, au succès des premières repré
sentations, un moment où tous ne vo
laient pas encore au secours de la vic
toire Surtout que les vannes célestes
daignent rester closes les jours des re
présentations
Quoique les dates soient connues,
nous les redonnons afin qu'il n'y ait
pas de confusion possible. Le jeu sera
exécuté les
SAMEDI 5 AOUT.
DIMANCHE 6 AOUT
JEUDI 10 AOUT,
SAMEDI 12 AOUT.
DIMANCHE 13 AOUT, chaque fois
2 1 heures. i
De nombreux trains spéciaux ont été
commandés pour ces représentations,
car il est bon de signaler que la plu
part des autocars de la région ne sont
pas disponibles, étant retenus le premier
de ces deux week-end par les touristes
anglais du bank-holiday. Par consé
quent nous conseillons vivement aux
lecteurs de s'adresser immédiatement et
non pas la dernière minute leur au
tocariste habituel, pour se renseigner sur
ses possibilités, et retenir, le cas
échéant, leur place dans un train spé
cial.
Le prix des places assises et numéro
tées est de 25-15-10 francs. Des réduc
tions sont consenties pour les comman
des de 20 billets et plus. Quoique de
très nombreuses demandes soient parve
nues au Comité, surtout de provenance
hollandaise, pour les 5 et 6 août, le nom
bre des places assises étant de 10.000,
il y a encore moyen de trouver des pla
ces en arrivant Bruges quelques heu
res avant la représentation.
Pour retenir les places par écrit ou
par téléphone, il faut s'adresser au Ser
vice du Tourisme, Grand-Place, Bruges,
Tél. 328.12.
L'AVRO d'Amsterdam a lancé il y a
quelques jours un appel ses auditeurs
pour qu'ils assistent au Jeu du St Sang
en ces termes Le Jeu du St Sang
auquel des milliers d'acteurs participe
ront et qui sera représenté plusieurs fois
en plein air, promet d'être un de ces
témoignages rayonnants de foi et de
bonne volonté, une leçon pour tous ceux
qui n'ont plus confiance dans les hom
mes et dans leurs actes.
Espérons que des milliers et des mil
liers de nos compatriotes auront enten
du ces paroles de nos voisins du Nord.
N.B. Nous pouvons encore annon
cer qu'à l'occasion du Jeu du St Sang,
la basilique sera ouverte au public et la
sainte relique exposée la vénération
des fidèles, tous les jours des représen
tations, de 10 12 h. et de 15 17 h.
Nous n'avons pas eu l'occasion de
continuer dans les suppléments du SUD
nos articles sur la question coloniale,
mais nous comptons regagner le temps
perdu dans la seconde série de nos sup
pléments grâce la précieuse collabo
ration de M. l'Avocat Muylle.
Cependant de nombreuses personnes
nous avaient demandé des détails sur les
études coloniales et les diverses carriè
res qui pouvaient s'ouvrir aux universi
taires. Nous cherchions les documen
ter. quand nous avons lu avec le plus
vif plaisir un article très complet, de no
tre confrère et ami Marcel Lobet dans
1' Indépendance belge Nous ne
pouvons mieux répondre aux vœux de
nos lecteurs qu'en reproduisant cet in
terview pris M. De Jonghe par Mar
cel Lobet. Voici en quels termes.
4
Parmi les multiples questions d'ensei
gnement qui se posent en Belgique, celle
de la formation coloniale n'est pas la
moins importante Elle a fait l'objet de
controverses nombreuses et, récemment
encore, le sénateur De Bruyne préco
nisait une série de réformes touchant
l'enseignement colonial, auxquelles M.
De Vleeschauwer, ministre des Colo
nies, réserva un accueil plutôt favora
ble.
C'est M. De Jonghe, directeur gé
néral au ministère des Colonies, que
nous avons demandé de nous éclairer
sur l'ensemble du problème
Voulez-vous nous dire, tout d'a
bord, M. le directeur général, quelles
sont les grandes lignes de l'enseigne
ment colonial en Belgique
Pour plus de clarté, il faudra, si
vous le voulez bien, que nous passions
en revue les diverses professions appe
lées s'exercer dans la colonie.
Les médecins.
Les médecins, tout d'abord.
Ceux qui veulent faire carrière au
Congo doivent, en sortant de l'Univer
sité, passer six mois l'Ecole de Méde
cine Tropicale, appelée l'Institut Prince
Léopold, Anvers, quelle que soit la
formation coloniale qu'ils auraient re
çue préalablement.
Pour les infirmiers et infirmières ou
les agents sanitaires la formation
est également de six mois la section
inférieure de l'Ecole de Médecine Tro
picale.
Les candidats sont-ils nombreux
A l'heure actuelle, on peut affir
mer que le recrutement des médecins
belges est suffisant. Mais passons aux
magistrats
Les magistrats.
Ici aussi intervient une formation su
pra-universitaire. Le doctorat en droit
doit être complété par des cours de droit
colonial qui durent six mois, la sec
tion supérieure de l'Ecole Coloniale de
Bruxelles. A la suite d'une réforme ré
cente, cette formation juridique spécia
le n'est donnée aux magistrats qu'après
un stage de trois ans dans le service
territorial.
Les agronomes coloniaux.
En ce qui concerne la formation des
agronomes coloniaux, l'enseignement se
donne Gembloux pour les candidats
d'expression française,Louvain dans
les deux langues nationales, et Gand
pour les candidats d'expression flaman
de.
Mais la catégorie de candidats colo
niaux la plus importante est celle des
administrateurs territoriaux parce que
ceux-ci constituent véritablement l'ossa
ture de la colonie.
Les administrateurs coloniaux.
Ici le rôle de l'Université Coloniale
d'Anvers est prépondérant. C'est tort
que cet établissement porte le nom d'U
niversité, car il est bien plutôt une école
professionnelle supérieure. Pour y en
trer, il faut produire un certificat d'hu
manités complètes et subir un examen
de maturité. Après un an, on procède
une épreuve éliminatoire, car le nombre
de candidats doit être limité au nombre
des places vacantes au Congo. Le cycle
des études est de quatre ans et il com
porte, côté de l'enseignement colonial
proprement dit, une série de cours ana
logues ceux de la candidature en phi
losophie et lettres et de la candidature
en sciences. Il s'agit, en effet, de donner
aux élèves une formation universitaire,
et ce sens critique que ne peuvent don
ner les humanités les plus complètes.
Qu'entendez-vous par la forma
tion coloniale proprement dite
La partie du programme consa
crée l'histoire des colonies, au droit
public colonial, l'ethnographie, la
politique indigène, aux langues congo
laises, etc.
Quel est le nombre approximatif
de candidats admis l'Université d'An
vers
Une soixantaine au total, ce qui
donne heureusement des classes peu
nombreuses (de 10 15 élèves), et ce
qui permet de leur donner une formation
plus complète.
Une intéressante
expérience linguistique.
A ce propos, je dois vous signaler une
expérience d'ordre linguistique d'autant
plus intéressante qu'elle pourrait éven
tuellement être appliquée dans d'autres
établissements, l'Ecole Militaire, par
exemple. Voici de quoi il s'agit.
Lors de l'examen de maturité qui a
lieu au seuil des études, le candidat
choisit la langue qui a ses préférences,
mais, dès la première année, il est sou
mis de nombreux exercices dans d'au
tres langues, et même invité suivre
certains cours dans les deux langues
nationales. L'expérience se poursuit et
s'accentue durant la deuxième année, si
bien que pour les deux dernières an
nées (le cycle étant de quatre ans), on
en arrive une manière d'équivalence
du français et du flamand. Certains
cours sont donnés en français, certains
autres en flamand. Au sortir des étu
des, l'élève passe ses examens indiffé
remment dans l'une ou l'autre langue,
quelle que soit sa langue maternelle.
Les résultats sont très encourageants
jusqu'ici.
La Fondation Bunge.
Ceci est évidemment très curieux
et doit faciliter bien des choses dans
l'administration de la Colonie. Peut-on
savoir, par ailleurs, ce que deviennent
les candidats malheureux, évincés aux
épreuves éliminatoires, mais qui ont dé
jà un commencement de formation co
loniale
Il y a, pour eux, la Fondation
Bunae qui prépare les jeunes gens aux
carrières commerciales, par un ensei
gnement pratique s'appliquant aux prin
cipales carrières privées de la Colonie.
Pour les Universitaires.
Quelles études doivent faire les
universitaires qui se destinent l'admi
nistration territoriale
En sortant de l'Université, ils doi
vent passée six mois l'Ecole Colo
niale de Bruxelles, même s'ils ont suivi
des cours coloniaux en marge de leurs
études de droit, par exemple. A l'Ecole
Coloniale, l'enseignement est donné par
des coloniaux ou par des fonctionnaires,
ce qui, quoi qu'on dise, donne de bons
résultats.
(Voir suite page 4)