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fe
Un rêve et mieux qu'un rêve, la
realisation d'un rêve
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Journal libéral démocratique d'Ypres et de 1'Arrondissement
OiroBiiffue locale»
Incidents
a la Garde civique.
5 centimes le numéro
La chute de öupuy.
L'HOrEL-lïlUSÉE MERGHELYNCK
A YPRES.
i^araissani Se Htnnedi,
L UNION FAIT LA FORCE.
PRIX DE L'ABONNEMENT
pour la villePar an 2 francs,
pr LA province, Par an fr. 2-50.
M. Dupuy avait, pour la journée de Di-
manche, mis sur pied une veritable armee
de policiers. Ce formidable dëploiement de
forces des l'abord, parut absurde. Et, de
fait, l'évènement a prouvé que la population
se serait fort bien chargée de défendre elle
même la République contre les émules de
Christiniani. Pas n'était besoin a eet effet de
mobiliser au grand complet les troupes de
la Prefecture.
Celles-ci en tout cas n'ont pas voulu,
faut-il croire, être dérangées pour rien. Et
n'ayant pas a donner contre les rnonarehis-
tes, elles se sont payé la satisfaction
éminemment douce pour elles de bruta-
liser les republicans.
Car ce n'est un secret pour personne
la police parisienne, oü les traditions de
l'empire se sont perpétuées, est loin d'etre
attachée au régime actuel. Par contre, la
boulange naguère, le nationalisme aujour-
d'hui, ont trouvé dans ses rangs des parti
sans enthousiastes et prêts a tout.
La journée du Grand Prix l'a montrée
toujours animée du même esprit et rnalme-
nant avec un entrain incomparable les ma-
nifestants coupables de crier Vive la Ré
publique C'est sur quoi le député socia-
liste Vaillant est venu hier interpeller le
gouvernement.
Les explications de M. Dupuy n'ont pas
satisfait la Chambre, et, en refusant de
voter l'ordre du jour auquel se ralliait le
ministre, elle a contraint celui-ci a se reti-
rer.
Certes, dans les ei ruims tanefes présentes,
l'attit.ude de la police doit être surveil.iée de
pres. Mais malgré ('importance de la ques
tion, il est visible que celle ci a été plutöt
le prétexte du vote hostile devant lequel
vient de succomber le cabinet.
Le motif vrai pour lequel la majorité s'est
debarrassée de Dupuy c'est que, a force de
changer' son fusil d'épauie avec une désinvol-
ture sans pareille, le ministre a fini par
n'inspirer plus la moindre confiance
Or, une tache ardue et grave s'impose
aujourd'hui au gouvernement francais il
lui faut liquider I'affaire Dreyfus en dormant
a la revision sa conclusion logique, qui est
le chatiment des faussaires et des conspira-
teurs.
Comment compter sur un Dupuy pour une
besogne pareille.
Même en ne tenant pas compte de ce que
le personnage se trouvait a la tête du cabi
net de 1894. n'est ce pas lui qui fit voter
cette infame loi de dessaisissement qui, dans
la pensée de ses promoteurs, devait river a
jamais la chaihe de l'infortuné condarnné, et
assurer du même coup l'irrémédiable dé-
sastre de ses défenseurs
Non, ce n'est pas aux mains d'un tel hom-
me que pouvait être laissée la grande oeuvre
de reparation.
Trop longtemps la bande immonde pos-
séda des complices jusque dans l'Elysée
même.
Aujourd hui qu a l'Elysée on trouve un
Loubet, il ne faut plus qu'au ministère on
trouve un Dupuy.
La loyauté partout II n'est que
temps
Cc que coulc la nouvelle loi sur les
aleools.
Le XXe Siècle assure que par suite
de Tétablissement de nouvelles distil
leries ct de l'augmentation du person
nel qui en est résulté, la dépense pour
les traitements du personnel est accrue
de 165,000 francs par an.
Le joli est l'ame du xviu0 siècle.
de Goncodrt.
Une envolée en ce délicieux xvme
siècle si délicat, si aimablement agréa-
bleune résurrectiou de ces styles
Louis XV et Louis XVI si finemeiR
subtils, tout en dehors, chantant aux
sens la joliesse et l'amour du plaisir,
allongeant voluptueusement la rnièvre
nonchalance de leurs lignes cambrées
et fleuries, semant la vie de guirlandes,
de banderoles, de fioritures, de baga
telles, jetant a profusion et partout,
sur les portes, plafonds, guéridons,
consoles et panneaux, l'infinie variété
des tons impossibles, des nuances tou
jours nouvelle3, prodiguant les dessins
gracieux, les adorables meubies ador-
nós de mille fantaisies plus irréelles les
unes que les autres, élevant le bibelot
rare a la hauteur d'une institution
d'état, rêvant tout haut, et réalisant
partout les visions les plus extraordi-
naires, sous les formes les plus distin-
guées, sans jamais tomberdans le gro
tesque ou l'onginaliló ridicule, restant
toujours en les limites si finement élas-
tiques de ce bon goüt francais, apanage
du siècle passé et arbitre de l'Europe
entière.
C'est en ce délicat style Louis XVI,
discrètement souligné par l'élégance
des décors Louis XV, qu'en 1774 mes-
sire I'écuyer Frangois- Merghelynck
construisit son hötel de la rue de Lille,
a Ypres. En 1892 l'hótel rentra dans le
patrimonie familial de messire Arthur
Merghelynck, et en 1894 il revient tout
entier dans lasplendeur ancestrale et
depuis lors, dans le silence sacré de la
vieille ville morte, l'antique maison
patricienne dort, telle une marquise
en toilette de cour, dans le caressant
rêve de ses vieux souvenirs, ie doux
bruissement des pendules et les.discre
tes sonneries des graudes horloges de
chêne.
Un vieux domestique, le portier-
conservateur de céans, nous mtrodüi-
sit.
Par l'antichambre sobrement déco-
rée de boisenes Louis XVI et d'un
dessus de porte représentant Les ven
danges par un peintre yprois du
siècle dernier, Charles Fourmer, nous
pénétrons dans le bureau, ou le clerc
de messire Frangois-lgnace-Joseph
Merghelynck, conseiller-trésoner héré
ditaire de la vilie-d'Ypres et grand
bailli de la ville et du comté de Messi-
nes, percevait le payement des tailles
et impositions.
Les archives familiales encombrent
et tapissent les murs de la petite cham
bre, et sur le bureau, en face du gui-
chet, le registre ouvert, les besides
déposées sur la table, font songer que
l'employé vient de quitter son siège,
et a chaque instant on s'attend a le
voir rentrer. J'allais oublier dans l'an
tichambre le buste en terre cuite
d'Henri IV, non qu'il s'y attache qüel-
que grand intérêt artistique, maïs on
ne le peut passer sous silence, paree
qu'il nous révèle un état d'ame parti
culier a nos ancètres ce nous est un
document psychologiqne fort curieux.
L'hótel proprement dit s'étend tout
entier adroite du corridor d'entrée, et
nous débuterons l'entilade des pièces
par le petit boudoir de la trés noble et
trés haute dame Amélie-Anne-Louise
Merghelynck née Strabant de Furnes.
Ce boudoir est vraiment d'une grace
touchante, et tout, depuis les petits
meubies incrustés de bois rares et mul-
ticolores, les fleurs jouant et s'enrou-
lant autour des portes et fenêtres, les
petites chaises aux courbes gracieuses,
tout, la glacé étroite et fluette, le lustre
irradié des mille feux du prisme se
lutinant de cristal en crista!, le grand
fauteuil étalant ses moelleux coussins
de riche soie jaune dans l'encoignure
de la fenêtre, tout, jusqu'aux espiègles
amours de la mignonne pendule, jus
qu'aux vieux livres laissés sur le gué-
ndon bas, tout dégage un charme
exquis, une alanguissante nonchalance
qui vous fait songer aux douces héroï-
nes de Greuze et aux légendaires senti-
y/jyiD'Uss de Rousseau.
Le boudoir donne acces directement
a la grande salie a manger, d'un style
simple et sobre.
Elle étale au-devant de nous une
ravissante harmonie d'un bleu de tur
quoise noyant tous les panneaux, dis
crètement tachée des sourires briliants
des chenêts, des ondoyantes girando
les, des encadrements dorés, et percée
des éclats des cristaux et des longues
glacés fendues. Quelques remarqua-
bles gravures, coliectionnées avec un
soin jaloux, attirent l'attention La
Saison des amours de Schall et des
Vidal sont surtout a tirer hors pair.
Les bibelots, la folie et les amours
du xvme siècle, sourient sur les petits
meubies richement incrustés les por-
celaines de Chme inaugurent leurs
amusantes tonalités du vieux Saxe,
des statuettes en buis merveilleusement
sculptées, datant de l'école italienne
de Michel-Ange, trois petits pastels
d'ancêtres, des bijoux anciens, un car
tel vert et or battant doucement la
seconde, le tout forme un ensemble
charmeur, digne antichambre du grand
salon.
Voici le grand salon sonnant clair
dans les buccins triomphants le goüt
pur et élevé de sa trés haute et trés
noble seigneurio, en une altière fanfare
de riches tonalités rouges-grenats bril-
lant sous le soleil, rehaussées des filets
d'or, courant par toutes les sveltes
nervures les encadrements ondoyants
des portes et des glacés, et du miroite-
ment satiné des jaunes dossiers des
chaises.
II présente un ravissant mélange des
deux styles de l'hötel ils jouent et
s'entremêlent a plaisir pour la décora-
tion des portes déroulant des guirlan
des Louis XVI dans de voluptueux
encadrements Louis XV.
Une rampe Louis XV en orme, sculp-
tée par Charles Bernard, d'Ypres, nous
escorta jusqu'au premier étage, ac-
compaguée des teint.es rubéniennes de
deux toiles de Van Talden:La Vanité
des choses de ce monde n et Les cinq
sens des samovars rouges, un cartel
et des gravures suivaient également et
nous menèrent aux appartements pri-
vés de la familie Merghelynck.
Une spacieuse chambre a coucher,
sobrement décorée de boiseries Louis
XVI un peu gnindées, ouvre, en un
blanc trop bleu, un blen trop pale
line de ces indéfinissables nuances pour
lesquelles l'ancien régime inventait des
épithètes qui faisaient les délices de
tous les bureaux d'esprit sa vaste
alcove mystérieuse, oü un jour gai et
aouriant fait discrètement miroiter les
riches broderies dn couvre-liten vieille
soie et le gilet a hears du petit mai-
tre qu'attendent de petits souliers a
boucles et a talons rouges.
Deux cabinets de toilette, dont l'un
renferme un remarquable prie-Dieu
Louis XV pièce des plus rares
complètentla chambre a coucher.
La seconde chambre, d'un sépia sé-
vère et haut en couleur, est encombrée
de peintures un tableau de Van Rijn,
élève de Van Dijck, et un Gaarwijn, de
Bruges, insuffisamment éclairés l'un et
l'autre elle mène a un petit salon d'un
ton général vied or et d'aspect riche,
oü tröne un superbe portrait au pastel
de Joseph-Glément. deBavière, priDce-
évêque de Liége. Un pupitre a cylin-
dre, une splendide commode incrustée
et un énorme buffet Louis XV regor-
geant de porcelames de Chine et de
verres de choix, complètent l'ameu-
blement. La décoration, trés luxueuse,
présente au-dessu3 des portes les mé
daillons en stuc de Henri IV, Louis
XIV, Louis XV et Marie Leczinska.
ANNONCES
Annonces 10 centimes la ligne.
Réclames25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
Attenante a ce salon, la traditionnel-
le chambrette a poudrer, oü les dames
passaient aux mains du maitre coiffeur
pour faire donner le fini a leur edifice
capillaire. Nous y avons rencontré un
curieux cofiret recouvert d'une tapis
serie a l'aiguille et d'intéressants por
traits du siecle dernier, ex-votos pro-
venant de l'église Saint-Pierre.
Suit une chambre servant de fu-
moir a admirer un bel écran, un
meuble Louis XV a triple cintre et
deux toiles de Matthieu De Visch
(1702-1765), directeur de l'académie de
Bruges, représentant Mme de Hooge de
la Gaugerie et son fiis Jean-Baptiste,
capitaine au régiment de Los Bios, au
service de la Iiongrie.
La grande chambre a coucher, oü le
soleil se joue en pleine clarté, étale en
une délicate teinte beige, relevée de
mmces filets d'or, un style Louis XV
des plus purs et des plus riches.
L'immense alcöve fermée par une
porte a deux battants ne récèle encore
qu'un beau meuble en attendant le lit.
En sortant, toute l'enfilade du palier
ensoleillé nous montre ses trois grandes
armoires en chêne, chefs-d'oeuvre de
la menuiserie liégeoise et parisienne,
bourrées de plats d'étain, de vieux
Chine et Japon, du Tournay, et, au
fond, sur le blanc de la chambre a
coucher, fiamboie un samovar en
cuivre rouge dans l'encadrement du
canapé vert et des veinules bleues des
carreanx de la cheminée.
A l'entresol les vitrines renferment
une piécieuse collection de dessins, de
compositions, de projets de décoration
des peintres yprois du siècle dernier
Desrameaux, Fournier, Dubois, Beke,
Valette on y admire également un
Boucher et trois Erasme Quellin.
Des dessins, des gravures, des sculp
tures sur bois, des ferrures et des cui-
vres emplissent le second étage et les
combles.
II me reste un devoir a remplir, de
voir bien doux et bien agréable pour
moi c'est d'exprimer ici ma sincere
reconnaissance a M. Arthur Merghe
lynck, qui daigna nous faire lui-même
les honneurs de son hotel, et nous fut
un cicerone charmant, si finement et
pleinement entendu en tous ces chers
objets.
M. Merghelynck, que divers pays
étrangers ont cravatté de leur ordre,
en ne s'épargnant ni peines, ni recher
ches, ni argent, en réunissant, comme
il le dit trop modestementbeaucoup
de patience a un peu de bonne volonté»
pour la poursuite de son rêve et l'achè-
vemenb de son oeuvre, M. Merghelynck
a bien mérité de l'Artet nous tous,
pauvres dilettanti, amoureux du Beau,
nous lui devons des louanges d'avoir
planté, en pleine terre flamande, cette
délicieuse oasis de la grace du xvme
siècle, ce joli bijou sans égal et mal-
heureusement trop inconnu en notre
pays un ensemble parfait de construc
tion, d'architecture, de décoration et
d'ameublementun hotel de la transi
tion Louis XV-Louis XVI, meublé pour
un petit maitre et une gente marquise
de l'ancien régime, et qui attend cha
que jour, avec l'espoir de la bergère
e8comptant son fils de roi, l'arrivée des
hauts talons rouges et des grands pa-
niers a falbalas.
Ceorg. Moulaert.
Voici cc que nous lisons ce sujet
dans le Progrès d'Ypres, n° du 15
Juin dernier
A propos des derniers incidents sur-
venus a la Garde civique, nous som-
r
A Charles Weber
Sympathiquement