Nous apprenons avec plaisir que le Comité du Denier des
Ecoles laïques d'Ypres vient de décider l'organisation d'un
grand concert de charité au profit des écoles officielles de
la ville.
Nous ne pouvons qu'approuver cette idéé de faire appel
a la générosité des partisans de progrès et d'instruction
officielle.
Le programme, qui promet de rivaliser avec celui d'il y
a deux ans, sera publié incessamment.
Le concert aura lieu le 28 J an vier 1900.
On s'abonne au bureau du journal, rus de Dixmude, 51, Ypres. Pour
les annonces de Belgique (excepté les deux Flandres) s'adresser a 1'Agence
Havas, Bruxelles, rue de la Madeleine, 32 et a Paris, Agence de la
Bourse.
Journal libéral démocratique cT Ypres et de 1'Arrondissement
Le Cartel Anversois
pour le S. U.
Comment
se font les saints.
Samedi, 50 Décembre 1899.
5 centimes le numéro.
6e an néérIV0.9.
M*araisH(int le Sametli.
L UNION FAIT LA FORCE.
PRIX DE L'ABONNEMENT
potje, la yille, Par an francs,
p' la province, Par an f&JS-SO.
ANNONCES
Annonces 10 centimes la ligne.
Réclames25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
Le libéralisme anversois est déoidé-
ment bien inspire. A la réunion der-
nière du comité central du Cartel libé-
ral-socialiste, pas un délégné n'a émis
l'avis qu'il y avait lieu de rompre le
pacte conclu pour l'élection commu
nale.
D'aucuns avaient cru que les libé-
raux, une fois satisfaits de recevoir
leur part grace a ia R. P., s'empresse-
raient de dénoncer le Cartel et d'en-
voyer le S. U. au diable vert.
C'est le contraire qui s'est produit.
Tant que nous n'aurons pas obtenu
le S. U. pur et simple, tant que le pays
ne connaitra pas l'égalité politique,
uous resterons unis pour arracher aux
réactionnaires cléricaux le pouvoir po
litique. n
Telle est la pensée qui animait tous
les membres de la réunion de Samedi
dernier.
On peut se demander quel avantage,
sous le régime nouveau de R. P., le
Cartel peut-il bien procurer.
A Anvers, les libéraux luttantseuls
obtiendraient 4 sièges et une fraction
inutilisée, les socialistes, un siëge plus
une fraction. Par le Cartel, sans parler
de l'efi'et moral produit par 1'union
pour le S. U., les deux fractions inuti-
lisées en cas dé lutte séparée pourront
donner a i'opposition un siège de plus.
Etc'est ce qui arrive. En consultant
les chifires de l'élection dernière on
voit qu'il suffirait de changer 3,030
voix pour obtenir 6 sièges, n'en lais-
sant que 5 aux cléricaux.
Quelle portée n'aurait pas pareil ré-
sultat sur l'avènement prochain du
Suffrage Universel
D'après les probabilités que les jour-
naux out publiées ces jours derniers,
la majorité cléncale ne serait plus que
de quelques voix a la Chambre. Mais
dans ces calculs, on n'a pas tenu comp-
te du terrible attout que I'opposition
aurait dans son jeu en organisant le
Cartel pour le S. U. De sorte que mal-
gré toutes ses finasseries l'existence du
ministère ne tient plus qu'è un fil.
La loi nouvelle offre aux partis d'op-
position d'autres ressources précieuses
dont, espérons-le, on saura profiter.
Supposez un arrondissement oü les
trois partis antigoiivernementaux sont
trop faibles pour espérer arriver a la
répartition des sièges.
Un simple artifice permettrait d'at-
tribuer un siège a celui de ces trois par
tis (socialiste, libéral ou démocrate
chi'étien) qui obtiendrait le plus de
voix des trois.
II suffirait, sans compromission de
principe, sans cartel, rien que par une
simple entente, il suffirait que les trois
partis décidassent de présenter chacun
un candidat mais sur une seule liste,
chaque électeur ne votant qua pour le
candidat de son parti, a cöté du noin de
celui-ci. Chaque vote exprimé de cette
fagon servant en même temps de vote
de liste et les voix des trois partis s'ad-
ditionnant, la liste arriverait a la ré
partition et un candidat de I'opposition
serait élu.
On voit que si le cartel peut être de
quelque utilité dans un grand arron
dissement comme celui d'Anvers, il
peut, sous une forme qui sauvegarde
encore mieux la liberté des partis d'op-
position, rendre d'incontestables ser
vices dans les petits arrondissements.
Aux diverses Fédérations du pays a
examiner la situation a ce point de vue.
M. Terwagne.
Connaissez-vous saintExpédit? Non?
C'est bien dommage, car en ce moment
il est fort en honneur. II accorde a lui
seul plus de graces, et il les accorde
plus vite, que tous ses collègues du
paradis. Antoine de Padoue lui-même
ne lui vient pas a la cheville, du moins
pour certaines spécialités.
On m'avait conté jadis la joyeuse et
trés authentique histoire de ce bien-
heureux de fraiche date et je me pro-
mettais de la dire a mon tour aux lec-
teurs de VExpress. Mais avant toute
chose, il me fallait découvrir et visiter
dans sa demeure mon véritable héros.
Interviewer un saint, c'était trés ten-
dant. vous en conviendrez.
On m'avait dit qu'il habitait quelque
part dans la rue de Sèvres c'est a
Paris la rue des Convents. Mes recher
ches se limitèrent, en conséquence, a
la rangée desfagades vulgaires derrière
lesquelles se tiennent blotties, honteu-
86s (dirait-on) ou peureuses, les cha-
pelles de révérendes et de révérends.
La découverte ne se lit pas attendre.
Je vais la préciser a l'intention des
dévots qui voudraient pèleriner par la
qu'ils sachent que le sanctuaire se
trouve, si j'ai bonne mémoire, au n°
27, non loin du Bon Marché et tout
prés des Jésuites.
J'avise, a cet endroit, une porte co-
ohère légèrement entrebaillée. A sa
vétusté, je la reconnais pour ecclésias-
tique. Je pousse discrètement.Me voici
en face d'une manière de cage vitrée
oii s'ébattent saintement une demi-
douzaine de portières en voile blanc.
Ma sceur, est-ce bien ici la cha-
pelle des Soeurs de Saint-Thomas de
Villeneuve.
-- Oui, m'a répondu grincheuse la
plus vieille, abaissant a demi un pan-
neau de son vitrage.
Saint Expédit réside, non dans la
chapelle même, mais dans un vestibule
auquel on accède par un bref corridor
tapissé de plaques de marbre racon-
tant ses nombreux bienfaits. C'est
en statue, bien entendu un tout pe
tit homme a figure jeunette, coquette-
ment troussé dans la courte tunique de
légionnaire romain. Sa main gauche
tient une palme. Sa main droite, qui
élève vers le ciel nne croix, semble se
dégager avec peine du Hot des coeurs
dorés et autres ex-votos qui lui recou-
vrent toute la poitrine pas d'ambas-
sadeur ni de prince qui soit si décoré.
A ses pieds, entre ses jambes, on a
déposé des objets divers. II y a, d'ail-
leurs, bien en vue une boite aux lettres
pour sa correspondance. Enfin, si vous
voulez compléter le tableau, imaginez,
tout a cöté, un grand saint Michel
brandissant son sabre dans le coin
une petite sainte au tablier plein de
roses des cierges autour de tout
puis des gens qui vont, viennent, se
prosternent et prient.
Or,devant cette dévotion florissante,
le souvenir m'obséda de l'histoire en-
tendue naguère au sujet de la fagon
dont elle naquit.
En ce temps-la, les religieuses de
saint Thomas furent prises d'un ardent
désir de posséder un corps saint. De
menues reliques,elles en avaientmais
tout un 8queletto! Ce serait une gloire,
un triomphe.
On écrivit a Borne. Les catacombes
sont un magasin inépuisable. II est
convenu que tous ceux qui furent en-
terrés la étaient des chrétiens d'élite
on peut done en confiance, prendre
dans le tas. Dès qu'une commande ar
rive, pourvu qu'elle offre des garan
ties de solvabiiité, car il y a un tarif
un prélat descend, ouvre un tom-
beau, en retire les ossements, puis les
expédie düment enrubannés, cachetés,
ficelós. Comme la plupart sont- anony-
me8, on leur donne, avant le départ,
un nom quelconque an gré de l'en-
voyeur.
C'est dans ces conditions que parvint
a Paris la caisse contenant les restes
d'Expedilus martyr. II y eut grande joie
au couveut. Une chose manquait pour-
tantles papiers, bien en règle quant
au reste, ne contenaient (et pour cause)
aucun détail biographique sur le saint
arrivant. II en fallait a tout prix: com
ment sans ceia savoir ce que le bien-
heureux pouvait faire Comment le
prêcher aux fidèles? Sous quelle figure
le représenter
La supérieure, femme de ressources,
ne se laissa pas troubler longtemps
Nous avons, pensa-t-elle, le père
X... qui dit la messe chez nous. Celui-
Ja connait tous les saints du ciel. II me
tirera d'affaire.
Le lendemain, tandis que, sa messe
linie, le Père dégustait le déjeuner fin
qui l'attendait chaque jour, la supé
rieure entra et fit sa plus belle révé
rence
Mon père, nous avons eu le grand
bonheur de recevoir de Rome, avec la
bénédiction du Souverain Pontife, Ie
corps entier d'un saint.
Félicitations, révérende Mère.
Peut-on savoir quel est ce saint
Mais, mon père, ce sera plutöt a
vous de nous le dire. Les documents
venus de Rome sont d'un laconisme
désespérant. Tenez, les voici. lis nous
apprennent le nom, tout juste. Heureu-
sement, continua la sceur en minau-
dant, nous avons a notre portée le puits
de science que vous êtes.
Ma mère, interrompt le religieus
uu peu agacé du compliment, que vou-
lez-vous que je vous dise On vous a
envoyé un corps des Catacombes c'est
tout. II y a bien dans le martyrologe
un saint Expeditus qui était soldat ro
main et qui fut martyrisé en Phrygie.
Ce n'e8t certainement pas le vötre,
puisque le vötre vient de Rome. Celui-
ci est également martyr, du moins ces
papiers vous l'affirment. Enfin, il porte
un nom de bonne augure expeditus,
expéditifil exaucera sans doute trés
vite les prières qu'on lui adressera.
Et sur cette réfiexion qui ressem-
blait légèrement a nne railierie, le sa
vant jésuite prit congé.
Des renseignements donnés, la supé
rieure n'avait voulu entendre que ce
qui convenait a ses pieux desseins
soldat romain... martyr... exaugant
trés vite. Un sculpteur fut aussitöt
mandé.
MsL
CHARITÊ.