EXTÉRIEUR.
FRANCE.
Orléans, le 22 janvier. Quelques heures
avant son exécution, Serein a fait diverses
personnes des aveux qui font cesser toute indé
cision sur le sort de ses victimes. Il se serait,
nous assure-t-onavoué le meurtrier de sa
propre nièce, qui, il y a huit ans, disparût le
jour même de sa première communion, et fut
le lendemain trouvée étranglée dans un champ.
11 se serait également reconnu l'auteur de l'en
lèvement de la petite Stakoff, du faubourg
Bannier, et il aurait ajouté qu'après en avoir
abusé, il l'avait jetée minuit du haut du pont
d Orléans dans la Loire. La tète de ce misérable
est, depuis son exécution, la disposition de
nos médecins, qui l étudient et se disposent
la faire mouler pour l'envoyer Paris, afin de
la soumettre aux observations de quelques
phrénologistes renommés. Il paraît que l'orga-
ANGLETERRE.
A l'occasion du traité de commerce avec
la Grèce, le roi Olhon vient d'envoyer M.
Lebeau la grande croix de l'ordre du Sauveur.
M. de Briey a reçu la même croix. M. Veydt a
été nommé chevalier et M. de T'Serclaes officier
du même ordre.
M. le lieutenant-colonel d'artillerie Fré
déric, directeur de la fonderie royale de canons,
vient d'être nommé, par le roi de Bavière, che
valier de l'ordre du Mérite de Saint-Michel, en
récompense de l'excellente exécution des nom
breuses commandes de bouches feu qui a
eu lieu par les soins de cet officier supérieur,
pour le service de l'artillerie bavaroise.
On a vu avec quelle colère M. Guizot a ré
pondu l'opinion unanime de la chambre des
députés qui se prononçait sans détour contre
le droit de visite. H a fait entendre assez clai
rement que quelle que fut l'opinion exprimée
par la chambre, il n'en donnerait pas moins
suite au projet du traité.
C'est qu'il paraît certain en effet que le dit
traité est non-seulement arrêté entre les cinq
puissances, mais qu'il a déjà été ratifié par la
Fiance
Le ministère a cru sans doute qu'il ne relevait
plus une affaire aussi importante du moment
où il n'y avait pas une question d'argent
soumettre l'adoption des députés.
Cependant le vote d'hier paraît avoir pro
duit une vive sensation parmi les membres du
ministère. Il le met évidemment dans un
grand embarras. Le Journal des Débals et la
Pressenous font connaître ce matin sous quel
jour le cabinet veut que ses journaux envisa
gent l'échec qu'il a subi. C'est disent-ils un
avertissement amical adressé au ministère, la
chambre a repoussé l'amendement dç M- Bil-
lault qui aurait été regardé comme un blâme.
Nous admettons que l'amendement adopté
ne soit qu'un avertissement, encore faudrait-il
pouvoir en conclure que le ministère profitera
de l'avis et renoncera son traité. Or, il est po
sitif d'après le langage de M. Guizot, que le
traité aura son plein et entier effet en dépit
des remontrances bienveillantes de la chambre
des députés.
L'affaire Lehon a été appelée aujourd'hui
au tribunal correctionnel. Le réquisitoire de M.
le procureur du roi a occupé toute l'audience,
il a conclu en demandant l'application des art.
403 et 408 du code pénal et l'interdiction des
Je ne désire rien^que de retourner près de ma femme, mur
mura Rifolé.
J'ai fait calmer, depuis ce matin les inquiétudes que lui causait
votre disparation elle sait que vous êtes retenu ici par mes ordres...
Vous ne répondez pas; vous hésitez? Allons, je vois que le mot
police vous fait peur... Et puis, je dévine votre pensée... Oui, vous
avez raison; il vaut mieux que je vous réserve pour les occasions
difficiles.*. Si vous figuriez parmi les employés, vous inspireriez de
la défiance*... Eh bien! tournons nos vues d'un antre côté. Cent
mille francs et toutes les fournitures de ma maisou vous con-
vieunenUils? Je vois daus vos yeux que vous êtes content. Prenez
ce portefeuille, et adieu.
Rifolé revint chez lui avec cent billets de mille francs, serrés au
fond de sa poche, contre sa poitrine. 11 se jeta dans les bras de sa
femme, et se mit pleurer et sangloter sans pouvoir répondre aux
interrogations que lui adressait Agathe. Quand il eut repris un peu
de sang-froid, la questionneuse ne se trouva guère plus avancée.
Rifolé ignorait le motif de son arrestation, et savait encore moins
pourquoi le ministre l'avait si richement récompensé au nom de
l'empereur. Les reproches du malheureux Anglais, les questions du
général, le conseil de guerre, restaient pour lui autant de problèmes
résoudre, et qui semblaient plutôt les résultats d'un cauchemar
que de la réalité.
Agathe acheva de le jeter dans l'étonnement, en lui apprenant
que leur hôte, le beau jeune homme blond qui avait loué la petite
chambre dépendant de leur appartement, n'avait point reparu
depuis deux jours.
Cette absence s'étant prolongée pendant un mois, les époux visi
tèrent la chambre de l'étranger. Ils y trouvèrent beaucoup de
papiers, dont Rifolé fit un paquet qu'il porta son protecteur, le
duc d'Otrante, espérant par là obtenir quelques renseignements
sur son locataire.
droits civils. Le président a demandé M. Le
hon s'il persistait dans son silence et s il n'avait
rien dire pour sa défense. L'accusé a répon
du d'une voix très-émue qu'il était hors d'état,
vu la faiblesse où il se trouvait, de répondre
l'accusation portée contre lui. L'avocat du pré
venu a déclaré être en mesure de défendre son
client, si ce dernier y consentait. M. Lehon l'y
ayant autorisé, il y a eu suspension d'audience
et la plaidoirie commençait au départ du cour
rier.
Le commerce comrçe l indusUie a pris
depuis un demi siècle un développ^iqent con
sidérable; on en jugera en rapprochait ces
deux chiffres: en 1791le nombre des paten
tables était de 639,712 pour toute la France;
aujourd'hui il est d'à peu près 1,300,001).
On écrit de Lille22 janvier
Louis Alardassassin de la veuve Desrous-
seauxde Roncq, condamné mort* pàr la
cour d'assises de Douaien novembre dernier,
a été exécuté aujourd'hui midi. Comme la
dernière fois l'instrument de supplice avait été
dressé sur la Plaine. Un concours nombreux
de population assistait ce triste spectacleet
comme toujoursles femmes se trouvaient en
majorité. Alard avait reçu avec foi les consola
tions de la religion et il a marché au supplice
avec calme et résignation. Un léger frisson l'a
saisi lorsque la charrette s'est arrêtée mais ce
mouvement naturel a été comprimé aussitôt.
Alard a embrassé son confesseur et quelques
personnes charitables qui l'entouraientet une
minute après la justice humaine était satisfaite.
M. l'aumonier de la maison de justice de
Douai a accompagné le patientqui n'était
arrivé Lille que ce matin vers neuf heures.
Quel diable d homme es-tu s'écria le ministre dès qu'il eut
jeté les yeux sur les papiers. Voici deux mois que nous sommes la
pisle de ces pièces, enlevées du cabinet de l'empereur, et c'est toi qui
me les rapporte!
Rifolé raconta son histoire et celle de son hôte disparu.
Le duc d'Otrante l'écouta en silence. Quand le tailleur eut fini
Allons, dit l'homme d'état, je vois que le hasard seul mené
toute cette alTaire. Je t'avais pris pour un garçon d'esprit, et tu n'es
qu'un imbécile. Dire que je n'ai point pensé te questionner sur la
manière dont tu le trouvais en possession de cette mesure dé papier
qui m'a révélé la trahison de l'espion! Je pensais que tu les avais
enlevés adroitement de chez lui. Tiens, voici encore quelques billets
de banque. Mais si jamais tu ouvres la bouche de tout ceci, souviens-
toi de Vincennes.
Rifolé, riche et paisible, borna là ses relations avec l'ancien élève
du père I-ombois, fit d'excellentes affaires, devint un des tailleurs
les plus renommés de Paris, et possède aujourd'hui de riches pro
priétés en Lorraine, où il tranche du grand seigneur.
Maintenant, pour rendre tout fait intelligible cette histoire,
encore quelque peu confuse, des explications deviennent nécessaires
les voici
L'empereur avait toujours près de lui un certain nombre de se
crétaires attachés sa personne, et qui travaillaient dans un cabinet
voisin du sien. A l'époque de l'aventure qu'on vient de lire, le
baron Mounier, le baron Fain, et plusieurs autres personnes fai
saient partie de ce service.
Or, parmi les traducteurs chargés de mettre sous les yeux de
Napoléon des extraits des journaux étrangers, se trouvait un jeune
homme blond, dont les manières distinguées et la douceur officieuse
avaient gagné la bienveillance de tous ses collègues.
Le premier a la besogne, il ne quittait jamais le cabinet qu'après
les autres. L'empereur aimait la manière concise et claire avec
nisation de cette tête est en effet remarquable.
Le cervelet y occupe uu espace bien plus con
sidérable que dans l'organisation normale.
On écrit de Gireenwlchle 22 janvier
A 2 heures et demie, le bateau vapeur Fi-
rebrand a.été signalé en vue de la pointe des
escaliers de l'hôpital. Aussitôt des salves d'artil
lerie ont été tirées et S. lît le roi de Prusse a
débarqué. S. A. R. le prince Albert, l'amiral sir
Robert Stopfprd, leduc de Wellington, le comte
Delawar, lè'nïarquis d'Exeter, sir G. Murray
le lieutenant-général de Montmorency étaient
la porte de l'hôpital prêts recevoir l'illustre
voyageur.
Quand le roi a monté les marches,'le peuple
a applaudi bruyamment.
Le roi a été reçu par le prince Albert avec
beaucoup de cordialité. Il a présenté S. M. sir
Robert Stopford, le héros du siège d'Acre. L en
trevue du duc de Wellington et de S. M. prus
sienne a été très-touchante. Ils ont échangé très-
cordialement des poignées de main. Le roi a
par^Jichanté de trouver que sa grâce était ve-
nue-â-u-devant de lui.
Aussitôt après le débarquement, ces person-
nages*îlluslres se sont rendus l'hôtel de sir R.
Stopford et après y être restés vingt minutes
ils sont partis pour Windsor.
Le roi de Prusse paraissait très-bien portant.
Il a salué très-gracieusement avant de monter
en voiture. Rien de plus flatteur que l'accueil
fait S. M. ,'lobe
On écrit de Londresle 24 janvier
Le roi de Prusse est arrivé au château de
Windsor, accompagné du prince Albert, samedi
soir vers 7 heures. S. M. a été reçue la grande
entrée du château par S. M. la reine, la duchesse
de Kent, le lord Steward, le milord chambellan
et d'autres dignitaires et a été conduit immé
diatement dans la grande salle de réception.
Après avoir passé quelques instants avec
S. M. et le prince Albert, le roi de Prusse est
entré daus les beaux appartements de l'aîle du
Nordqui avaient été préparés pour elle.
A 8 heures S. M. est venu réjoindre la société
royale pour prendre le dîner.
Hier, vers 4 heures, le duc régnant de Saxe-
Cobourg père du prince Albert; le duc Fer
dinand de Saxe-Cobourg, frère de S. A. R., ont
débarqué Wolwich et se sont rendus immé
diatement au château de Windsor. La visite du
duc Ferdinand était attendue, mais non celle
de son auguste père.
laquelle ce jeune homme, d'origine britaunique, traduisait et résu
mait les journaux anglais. Plusieurs fois il lui en avait exprimé sa
satisfaction.
Or, un malin, les secrétaires de Napoléon virent avec surprise
la place de l'étranger rester inoccupée; ils plaisantèrent entre eux
sur le retard, sans précédent, que commettait pour la première fois,
mademoiselle John, comme ils l'appelaient entre eux.
La journée s'écoula sans que l'anglais parut. Le lendemain sa
place demeura encore vide.
Pleins d'inquiétude, les jeunes gensse rendirent rue de l'Université
chez lear camarade* Il n'était point rentré chez lui depuis deux jours.
Un d'eux courut chez le ministre de la police, il lui fit part des
inquiétudes que causait une disparition si étrange.
Monsieur, dit le duc d Otrante, ne vous occupez point d'avan
tage de cette aflaire. L'Anglais auquel vous vous intéressez si
vivement était un misérable.
Un misérable
Oui. Espion aux gages de l'Angleterre, non-seulement il abu
sait de la confiance de l'empereur et falsifiait les passages des
journaux qu il traduisait pour sa majesté, mais encore il volait les
secrets du cabinet et les vendait aux plus mortels ennemis de
la France.
Si nous ajoutons que pour dérouter les soupçons et ne laisser
chez lui aucun papier daugereux, l'espion anglais avait loue, sous
lendtn supposé de Dubois, la petite chambre dépendant de 1 appar
tement de Rifolé; si nous disons encore que la femme de ce dernier
en lui jetant parla fenêtre, pour faire une mesure de tailleur, la
première feuille de papier qui lui était tombée sous la main, avait
pris une des preuves les plus flagrantes de la trahison de John, tout
s'expliquera de soi-même
Et le lecteur comprendra, nous l'espérons, ce que Rifolé n a
jamais pu s'expliquer parfaitement. s. henry berthoud.