JOURNAL D'YPRES IT DE L'ARRONDISSEMENT.
FEUILLETON.
V ANNÉE. N° 100.
On s'abonne Ypaes, rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT,
par tri mettre.
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JEUDI, 14 AVRIL 1842.
Tout ce qui concerne la ré
daction doit être adressé, franco.'
l'éditeur du journal, Ypres. -
Le Progrès parait le Dimanche
et le Jeudi de chaque semaine.
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligue.
INTEIIIEI'R.
YPRES, le 13 Avril.
Les adresses des communes doivent avoir
piqué au vif le ministère et ses alliés, puisque
leurs organes se donnent tant de peine pour
en prouver l'illégalité. Quand on a voulu
montrer aux grandes puissances que le traité
des 24 articles excitait une répulsion unanime
en Belgiqueles adresses des conseils com
munaux étaient approuvées: maintenant on
use du même droit pour repousser les atteintes
portées la constitution et aux lois par le
parti clérical et ce qui est accordé tout
citoyen, est dénié aux magistrats communaux;
tant il est vrai que 1 (^principes de uos adver
saires changent au gré de leurs intérêts du
moment
L'article 24 de la constitution donne chacun
le droit d'adresser aux autorités des pétitions
signées pas une ou plusieurs personnes. Les
autorités constituées ont seules le droit d'adres
ser des pétitions en nom collectif En présence
de cet article si clair, si concluant, comment
est-il possible de prétendre que les adresses des
communes sont illégales. Le droit de pétition
le plus large se trouve inscrit dans notre con
stitution. mais l'usage qu'on en fait déplaitau
parti clérical qui aspire dominer avec le
moins de bruit de possible. On ne peut rayer
cet article de notre pacte fondamental, mais on
désire l'annihiler; c'est le secret des efforts faits
par les organes du clergé et du ministère pour
prouver que ce sont là des actes inconstituti
onnels.
Pour prouver l'incompétence de nos magis
trats, nos adversaires citent la loi fondamentale
qui ne permettait le pétilionnement en nom col
lectif, aux corps légalement constitués, que pour
des objets qui rentraient dans leurs attributions
directes. (Art. 161.)Mais le congrès en refusant
d'ajouter ce paragraphe l'article de la con
stitution, a certainement prouvé qu'il voulait une
jouissance pleine et entière clu droit de pétition
pour les autorités constituées comme pour les
citoyens. Celte assemblée' n'y a mis aucune
restriction; ainsi, sur toute matière, il est per
mis aux corps communaux d'énoncer leurs
opinions et d'exposer les vœux de ceux dont ils
sont les représentants immédiats.
Nous ne nions point que les autorités com
munales n'aient pourmission spéciale de gérer
les affaires de la commune et de défendre ses
intérêts. Mais s'en suit-il qu'elle ne puisse
émettre des vœux sur des intérêts généraux?;
Les communes ne font-elles point parties de
l'état? Quand il s'est agi de conclure le traité
des 24 articles, le gouvernement voyait de bon
œil le pétilionnement des communes et cepen
dant c'était une question d'un palpitant intérêt
pour la Belgique entière.
Les grandes villes qui ont voté des adresses
contre les projets de loi attentatoires aux libertés
des communes, n'ont blessé en rien la constitu
tion d'ailleurs, dans l'espèce, il s'agit bien
évidemment d'un objet d'intérêt communal et
qui rentre dans les attributions spéciales des
communes. En effet c'est leur oppression qu'on
prépare. Celles qui sont assez éclairées pour
sentir que le parti clérical veut leur entier as-
sujétissementne sont-elles point parties en
cause? N'est-il point d'un intérêt communal de
repousser la prétention que veut s'arroger le
parti catholique politique, d'imposer pour chefs
aux cités des commissaires dont la mission sera
de faire prévaloir les volontés du gouvernement
sur ceux delà commune? N'est-il point oppres
sif de prétendre au droit de frapper des impo
sitions communales sans le recours des autorités
qui seules peuvent les consentir?
Ces projets ne tendent-ils point dépouiller
les communes de toutes les franchises conquises
depuis des siècles? On veut les opprimer parce
qu'elles sont les foyers du libéralisme c'est le
but du ministère et du parti qui le soutient.
Leurs organes en tâchant de démontrer l'iq-
compéténce des conseils communaux, font voir
combien ce parti est intolérant et ennemi de
toute liberté. Non-seulement il prétend la
domination mais il est encore disposé refuser
le droit de signaler ses projets d'envahissement.
11 parait qu'une feuille d'annonces de cette
ville intitulée le Propagateur., continue glisser
parmi ses.extraits d'affiches certains articulets
contenant de sales insinuations contre les per
sonnes les plus respectables de la ville. Les
dames mêmesdit-on ne sont pas épargnées.
Quand on refusera partout de recevoir, même
gratis, une feuille qui se déshonore de la sorte,
comment le Propagateur s'y prendra-t-il?pour
propager ses affiches et ses élucubrations? Il
est temps d'y songer,.
Monsieur Auguste Maertensmédecin et at
taché la légation belge Constanlinople en
qualité d'élève-drogmanest décédé Andri-
nople le 25 février dr.
On a tout lieu de croire que M. Maertens est
mort de la fièvre jaune ou du moins d'une ma
ladie contagieuse. La lettre qui a apporté cette
triste nouvelle Ypres était entièrement cou
pée et passée au chlore.
Dans la nuit du 25 au 26 mars, le nommé
Jean Pelten condamné 12 ans de travaux
forcés pour des vols nombreux commis dans
l'arrondissement de Dunkerques'était évadé
de la prison de Cassel. Le 27 mars, la gendar
merie belge arrêtaient Fumes un individu
prévenu de vol avec effraction qui se donnait
lenomdeThiriaux, et qui, trois jours après, fut
reconnu pour être le forçat évadé de Cassel.
Le 5 avril courant on a retiré d'un fossé près
de la commune de Wulveringhem le cadavre
LA. DISTINCTION DE RACE. [Suite et fin.)
Ces sentiuiens étaient singuliers chez un marquis émigré
mais M. de Lassay avait vu l'étranger, et il aimait sa patrie la
France avait déjà obtenu de telles avantagesqu'on se faisait
gloire d'être un de ses enfants. Les places de Landrecies, du
Quesuoy, de Valenciennes, de Condé, perdues dans la campagne
précédente, venaient d'être reprises Pichegru avait passé la Meuse;
nous occupions toute la ligne du Rhin, et enfin on savait qu'un
plan d'invasion, habilement imaginé par le jeune Bonaparte, et qui
consistait réunir les deux armées des Alpes et d'Italie dans la
vallée de Stura, pour envahir le Piémont, avait été communiqué
quelques mois auparavant, au comité de salut publio par Robespierre
le jeune tout s'agitait, tout annonçait des succès nouveaux, et le
marquis, bien inspiré, voulait en avoir sa part.Cependant les pleurs
de Madelaine ne tarissaient pas.
J'espère, continua M. de Lassay, j'espère, Madelaine, que tu n'es
pas blessée de mes paroles.
Au contraire, répondit Madelaine, tu ne pouvais pas me faire
plus de plaisir qu'en me parlant comme tu l'as fait j'aime Horaoe
plus que tu ne crois, et dqpuis son absence il n'est pas de joui aïù je
n'aie prié Dieu de me le renvoyer... Ah si j'avais pu prévoir ton
départ, il ne t'aurait pas accompagné en Angleterre, il ne m'aurait
jamais quittée et si les anglais n'étaient pas des ennemis si acharnés
de mon pays si, sans se rendre coupable de trahison, mou mari
avait pu réjoindre Horace, il serait parti sans doute pour le rameuer
en France.
Je te remercie de celte amitié, dit le marquis mais Horace
n'aurait pas quitté son gère.
L'ancienne fermière se jeta aux genoux du marquis, et, oubliant
le langage et l'égalité du moment, elle baisa sa main avec la sou
mission respectueuse d'une vassale d'autrefois.
Monsieur le marquis, lui dit-elle, je vous ai trompé.... Ah!
acceptez plus d'argent qu'il n'eu faut pour racheter votre terre de
Lassay, acoeptez nos maisons de Paris, demandez-nous l'argent que
vous voudrez, rendez-uous notre fils.
Votre fils! Madelaine; que voulez-vous dire?
Écoutez-vous, monsieur le marquis; vous vous souvenez de
la naissance de votre fils Horace, il y a vingt ans passés
Eh bien! dit le marquis...
J etais jeune alors, j'avais peine dix-sept ans, et le jour même
de l'accouchement de la marquise je mis au moude mon fils Jérôme.
Mes couches furent aussi heureuses que devaient l'être celles d'une
paysanne jeune et robuste, qui jusqu'au dernier moment s'est livrée
aux travaux de la ferme; la marquise, au contraire, subit la loi des
grandes dames, elle accoucha difficilement, ses rclevailles furent
tardives, sa convalescence lougue et maladive; elle ne put pas
nourrir son enfant; j'avais du lait pour deux, on me l'apporta.
Cependant 1 état de la marquise empirant, vous la files transporter
Paris et vous ne tardâtes pas l'y suivre.
Un an se passa sans apporter aucune amélioration sa santé.
L'enfant fut négligé, et parce que l'état de la marquise empêchait
qu'on ne songeât lui et parce qu'on regardait cette pauvre créature
comme la cause de la mort prochaine de sa mère. Nous l'élcvions
comme notre enfant, peut-être même, comme il était plusdélicat que
Jérôme, lui donnions-nous plus de soins mais notre amour était tout
entier pour notre fils. Jérôme était notre espoir et notre orgueil il
était beau, fort, intelligent, et si, comme vous le dites le ciel a
marqué au front les raoes privilégiées. Jérôme était le fils dt» mar
quis, Horace celui du fermier.
Quel dommage, disions-nous, lo beau, l'habile, le généreux, ne
sera rien dans le monde que le fils d'un paysan; vingt ans un
recruteur s'en emparera, il prendra le mousquet et il ira mourir sur
quelque champ de bataille pour la gloire d'un autre taudis que le