JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
DIMANCHE, 24 JllllET 1842.
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INTTÉKIEIIB.
YPRES, le 23 Juillet.
LE PARTI MODÉRÉ.
Le parti clérical se donne très-sérieusement
depuis bientôt une année le titre pompeux et
sonore de Modéré nous trouvonspour notre
part, 1 epithète mal choisie, et pour cause les
faits et gesLesde nos catholiques-politiques sont
là pour attester combien il leur convient peu
de s'affubler d'une qualification qui leur va
qu'on nous permette cette comparaison triviale,
comme on peut supposer qu'allaient au geai de
la fable les plumes du paon.
Quoi de moins modéré en effet que les al
lures de nos clercs ambitieux? Sans leurs in
trigues, la Relgique soustraite aujourd'hui aux
tiraillements inséparables d'une grande secousse
politiqueserait remise de sou agitation les
sources d'irritation seraient tariesles haines
civiles se tairaientet nous pourrions espérer
de voir dans un avenir peu éloigné l'union
étroite de tous les membres de la grande
famille belge.
Mais pourquoi n'en est-il pas ainsi Pour
quoi des haines profondes et peut-être impla
cables divisent-elles les citoyens? Parcequ'il
existe en Relgique une caste dont les intérêts
sont séparés du reste de la société, qui, toujours
privilégiée a toujours soif de privilèges caste
hypocrite, qui sait l'occasion couvrir son in
satiable désir de domination des dehors de la
modération qui, pour parvenir au but de ses
coupables désirsn'hésite pas d'employer les
ressorts vénérés de la religion au risque de
lui porter l'atteinte la plus déplorablede la
déconsidérer.
Tel est en effet le triste tableau que nous
voyons se dérouler devant nous depuis dix ans.
Le clergé, nul n'en peut douter, convoite et
poursuit le monopole de l'enseignement. Pour
parvenir ruiner les établissements qui ne
sont pas sous sa direction ou sous son influence
immédiates, tous les moyens lui sont bons;
des prêtres qui ne devraient faire descendre du
haut de la chaire de vérité que les enseigne-
'ments de la sublime morale du Christ, que des
paroles de paix, d'amour et de charité, que
des consolations pour les souffrances de l'hu
manité ont rempli leurs prônes d'attaques
acerbes et d'infâmes calomnies contre leurs
semblables. Leurs journaux ont retenti des dé
clamations les plus furibondes. Il y a plus, le
tribunal de la pénitence lui-même est devenu
une arène d intrigues inutile d'évoquer des
faits, la Belgique entière a été, et est encore le
théâtre de semblables excès, et, nous autres
Yprois, nous en savons quelque chosepour
notre part.
Nous avons vu la faction s'épuiser en efforts
surhumainspour pousser aux chambres et
dans les administrations les hommes de son
bord. Nous l'avons vue, compromettant la di
gnité même du Sénat, faire de ce corps respec
table un instrument de ses vengeances, pour
renverser un ministère qui n'avait commis
d'autre crime que d'être libéralc'est dire
équitable pour tous, et peu disposé prêter les
mains aux envahissements ultérieurs qu'elle
méditait.
Nous avons vu les chefs mêmes de la faction
lancer des mandements électoraux et les su
balternes transformés en courtiers d'élection
amener la ville et diriger les phalanges
votes, pour obtenir ce que, dans le langage du
parti, ils appellent de bons choix.
Nous avons vu enfin la faction porter récem
ment une main sacrilège sur l une de nos plus
précieuses libertés, sur celle qui garantissait au
peuple le choix de ses magistrats communaux,
et le moment n'est pas éloigné peut-être où la
constitution elle-même ne sera plus respectée;
les organes du parti catholique-politique l'ont
déjà fait pressentir.
Faut-il s'étonner après cela du changement
qui s'opère dans les esprits? Faut-il s'étonner
surtout que les organes de la presse libérale
flétrissent tant d'impudeur et d'extravagances?
Et, pour ne parler que de nous, peut-on, sans
injustice, nous taxer d'exaltation, alors que
nous n'avons cœur que la défense des intérêts
bien entendus de la société Il est vrai que
notre langage est amer, mais nous avons en
cela une tâche pénible remplir, et nous dési
rerions que les accents de réprobation que
nous sommes forcés de faire entendre, ne por
tassent pas sur des hommes que nous voudrions
voir tous respectables et respectés.
Mais tel n'est pas notre lotet ce sont nos
adversaires qui nous l'ont fait ainsi. Ces accu
sations non fondées nous affectent peu. Nous
poursuivrons invariablement notre tâche, heu
reux si nos efforts peuvent accélérer le triomphe
de l'opinion libérale, persuadés d'ailleurs que la
réussite est au bout des efforts de tous les bons
citoyens. Tous lui doivent leur coopération
car le triomphe de nos adversaires, nous don
nerait le calme, oui, mais le calme de l'oppres
sion, et malheur la Belgique, si l'omnipotence
cléricale prévalait.
«=S»Cgî«&»
ÉLECTION DE M. DECHAMPS.
M. Dechamps vient d'être élu représentant
de l'arrondissement d'Ath, une majorité de
cinq voix. Le ministère et le clergé s'étaient
coalisés pour faire réussir l'élection de ce mem
bre, l'un des plus habiles du parti clérical. Une
majorité de cinq voix seulement a été le fruit
des efforts des adversaires de l'opinion libérale.
Encore M. Dechamps ne doit-il cette majorité
qu'au canton qui touche les Flandres. Dans
tous les autres, le candidat des libéraux a eu 93
voix de plus que lui.
Ainsi nous pouvons dire avec vérité que M.
Dechamps n'est point l'élu de ses concitoyens,
mais celui du clergé. Nous croyonsqu'il ressort
de cette lutte électorale, un utile enseignement
pour le parti ennemi de nos libertés. L'homme
qui aux dernières élections réunissait la pres
que totalité des suffrages, n'est élu qu'à une
majorité insignifiante, depuis qu'il a porté la
main sur les libertés les plus sacrées du pays.
Feuilleton (In Progrès»
l'NE CHASSE DANS L'HIMALAYA.
L'Himalaya combien ce nom me rappelle de souvenirs agréa
bles combien de jours de danger il retrace ma mémoire Car la
chasse dans ces montagnes n'est pas un jeu d'enfant. Làil faut
braver le lion dans son antre j afFronteret tuer l'éléphant au milieu
des forêts poursuivre le chamois au-dessus de précipices au fond
desquels l'on ose peine jeter la vue.
L'eu n'a généralement aucune idée en Europe des scènes de ma
jesté sublime qu'offre l'aspect de ces montagnes, chef-d'œuvre de la
nature.
L Himalaya forme les limites du Thibet, et s'étend depuis Caboul,
situé au nord de l'Indostan, jusqu'en Chine.
Cette suite non interrompue de montagnes, s'élève sous un ciel
toujours azuré.
L'aspect de ces chaînes thihétaines dont ni le temps ni la dis
tance ne peut eflacer le souvenir, est d'une beauté indescriptible, et
récompense amplement le chasseur hardi qui se hasarde les
gravir.
Le silence de ces lieux uniquement peuplés d'animaux féroces, n'est
interrompu que par le bruissement des cataractes, auquel se mêlent
les rugissements des tigres etdes lions, les airs perçauts de 1 éléphant
et le bruit continuel que fait le faisan argus dans son vol.
Un long séjour sous le ciel brûlant de flude avait considérable
ment altéré la santé de quatre ofliciers au service de sa majesté, au
nombre desquels je me trouvais. L'air des moutagues nous parut le
meilleur remède employer. Notre colonel ne comprenait rien aux
sensations et aux plaisirs de la chasse il n'était pas facile de lui
persuader qu'il serait plus salutaire pour notre santé, de chasser les
tigres et les lions, que d'assister cinq heures de parade par jour et
des séances tabla se prolongeant ordinairement jusqu'à deux
heures de la nuit.
Le docteur de notre régiment était également peu disposé nous
accorder le certificat nécessaire, pour obtenir cette faveur. Il était
persuadé qu'aucun de nous n'avait enfreint le régime prescrit, con
sistant boire deux bouleilles de bierre par jour et un très-petit
verre d'eau-de-vie mêlé d'eau il ne pouvait donc attribuer l'altéra
tion de notre santé une vie déréglée. Tels sont les obstacles et bien
d'autres encorequi s'opposent ordinairement ce qu'un militaire
puisse espérer de pénétrer dans les plaines de l'Himalaya. Mais
quand il les a tous surmontés, il peut se mettre l'ouvrageapprovi
sionner ses tentes de vivres et de munitions, avec la perspective de
passer un bien heureux mois au moins sous le ciel des tropiques.
Les résidents des Indes* ont généralement l'habitude de décrier
ce pays, je n'agirai pas ainsi. L'Inde n'est certainement pas une con
trée qu'un homme riche doive choisir pour y fixer sa résidence
mais le jeune sporlsman y trouve des jouissances qu'il ne peut es
pérer f=e procurer chez lui. De faibles appointements lui suflisent
pour y vivre aussi bien qu'en Angleterre aveo dix fois plus d'argent
le plus mince employé de la compagnie possède plusieurs chevaux.
Le gibier de différentes espèces s'y trouve eu abondance, et par des
sus tout, les moulagnes de l'Himalaya offrent un vaste champ où
le chasseur éprouve les plus douces émotions.
Ces montagnes présentent un contraste tout particulier côté des
plaines basses et sablonneuses de l'Indostan.
La température qui y règne, rappelle celle des régions occiden
tales.
Le soleil ne vous empêche pascomme dans d'autres parties de
l'Inde, de poursuivre le gibier depuis cinq heures du matin jusipi