JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
2e ANNÉE. N° 143.
DIMANCHE, 11 SEPTEMBRE 1842.
FEUILLETON.
On s'abonne Ypres, rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
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IATÉ EUR.
YPRESle 10 Septembre.
La discussion du projet de loi relatif
l'empruntest commencée la chambre des
représentants. Tous les députés se plaignent
vivement de devoir consacrer des sommes aussi
énormes l'achèvement des chemins de fer, et
émettent l'opinion qu'ils craignent que cet em
prunt ne soit pas le dernier.
Mais parmi ceux qui blâment le plus Yivement
les ingénieurs pour la légèreté avec laquelle ils
ont fait les devis estimatifs se trouvent les in
capacités les plus notoires de la chambre. Nous
ne savons trop si le corps des ingénieurs verra
de bon œil, le blâme acrimonieux jeté sur leurs
opérations, par les représentants les moins ca
pables de les apprécier.
Quelques députés, parmi lesquels nousavons
remarqué M. Eloy de Burdinne, se refusent
voler l'emprunt. Ils préféreraient laisser le che
min de fer inachevé que de voler encore des
ressources, pour le parfaire.
Malgré les doléances des représentants sur
la situation financière de la Belgique tous pa
raissent convaincus qu'il faut contracter le
nouvel emprunt. Nous saisirons celte occasion
pour recommander nos représentants, d'ap
peler la sollicitude du ministère sur l'arrondis
sement d'Y près. Nos intérêts dans l'établissement
du chemin de fer, ont été sacrifiés ceux de
Tournay, et quoique nous ayons contribué pour
notre part dans les frais de cette entreprise gi
gantesque, son influence si bienfaisante pour
d'autres localitésn'a point été sensible pour
notre district.
O i
Le journal Le Progrès la Feuille de la
Grand'place son amie la façon de Barbari.
Madame
Permettez lin de vos amis quid'après le prin
cipe, les extrêmes se touchentest uni vous par les
liens les plus étroits, de vous adresser une petite
lettre confidentielle et de vous faire quelques obser
vations dont vous profiterez, il faut l'espérer. Ces
observations seront fort respectueuses, car vous êtes
mon aînée et je respecterai toujours vos droits d'aî-
se. [Note pour l'imprimeur Ne pas oublier l'î du
t aînesse.) j
me garderai, madame, de vous demander des
nouvelles de votre santé, car jp sais ainsi que Le pu- -
blic, Due depuis dix-huit moii bientôt, voussouffrez
horriMement d'une maladie qlieUse, quyparaît être
devenue chronique et incuralfe, bien que vous dé-
çhargieï votre bile deux fois'par semaine et cela
d'une façon fort inquiétante pour .votre santé. Je
n'ignore pas non plus que voijs êtes sujette, de ter
ribles accêj de colère, des attaques nerveuses et
spasmodiqùes et mille autrfes infirntités, dont le
détail serait èrop long. Mais consolez-vous, ma bonne
dame, songetf. que tous ces, maux .sont une .consé
quence nécessaire de votre grand âge et que les per
sonnes de votre sexe naissent en général, avec de
tristes prédispositions aux maladies dont vous souf
frez. -w
Consolez-vous Encore en apprenant que votre ami,
le Progrès, se porte merveille, qu'il est. plein de
vie, de jeunesse et de vigueiir, qu'il marohe grands
pas, qu'il se rapproche chaque jour du but qu'il dé
sire atteindre, en un mot qci'iljustifie pleinement le
nom que ses parrainslui outdonné le jour de sa nais
sance.
Vous ne m'aimez pas beaucoup, madame, je le
conçois. Une personne intéresséene peut voir do
bon œil un rival qui vientljuste point, pour lui
enlever une partie de son avoir. Mais je crois devoir
vous le dire franchement, vous avez été maladroite
dans l'expression de votre mécontentement, je dirais
même de votre dépit, si je ne craignais de vous
offenser. En effet, en venant au monde, je n'étais
connu de personne vos attaques m'ont fait con
naître; on s'est demandé: quel est donc ce mauvais
journal? On a voulu le lire, on l'a lu, et le public
qui protège le calomnié contre le calomniateur, m'a
pris sous sa sauvegarde. Voilà pourquoi, car toute
chose a un pourquoi en ce monde, voilà pourquoi,
je me suis gardé de vous répondre, malgré les con
seils de plusieurs des miens. J'eusse craint de vous
arrêter dans la bonne voie où vous vous étiez placée,
et de vous empêcher de me rendre le service signalé
dont je crois pouvoir vous remercier hautement
aujourd'hui. D'ailleurs vos coups portaient faux,
ils ne pouvaient me blesser en rien, c'étaient des
coups d'épée dans l'eau, et le public, ce bon juge,
riait de vos efforts désespérés, il se rappelait les
exploits de l'illustre chevalier de la Manche! Le
ridiculetue, madame, mais on est fort, quand on a les
rieurs pour soi; avouez donc que j'avais mille fois
raison de ne pas vous répondre.
Et puis vous avez, je le jure, le talent de vous
énoncer d'une façon si bizarre, si originale, vous,
(pardonnez l'expression), que le public a dû créer
un mot tout lait neuf, une métaphore tout lait
pittoresque, pour qualifier vos discours; ce mot je
n'oserais l'écrire, si le laisser aller, le sans gêne
n'était permis entre amis... eh bien savez-vous quel
nom on donne généralement vos articles?... On
appelle cela des tartes! Quand on se rencontre et
que l'on ne sait que se dire, on se demande: que nous
a servi la bonne vieille de la Grand'place une
tarte la crème répond un voisinquand l'article
a été doucereux; mais si vous avez eu par malheur
une attaque de maladie bilieuse,il se hâte de répon
dre: une tarte la moutardeet de bien mauvais
goût encore, etc., etc., etc.; et puis ou parle de la
pluie et du beau temps et tout est dit.
Vous avezencoreun autre défaut,machère dame;
maison vousle pardonne, en considération de votre
âge et de votre sexe. Vous vous tracassez pour une
foule de petites choses qui, eri vérité, ne vous regar
dent pas par exemple, vous paraissez fort curieuse
de savoir quels sont mes revenus, mes moyens d exis
tence. Tantôt c'est la loge que je vais puiser quel
ques pièces de 5 francs; tantôt quelques prétendus
libérauxquelques ambitieux de bas etage sont,
d'après vous, mes banquiers... et vous vous inquiétez
fort pour Une chose qui est, on ne peut plus simple,
puisque mes abonnés sont mes bailleurs de fonds.
Mais là n'est pas la seule cause de vos soucis, vous
avez grande envie de connaître mes tuteurs mes
parrains, mes rédacteurs enfin.Tantôt vous désignez
Monsieur un tel.... puis, vous ravisant, vous en in
diquez un autre. Dernièrement, vous prétendiez a voir
découvert qu'un professeur du collège communal
était mon rédacteur en chef et vous vous trompiez
encore, madame, car ce professeur, je vous le dis en
vérité, n'est ni mon rédacteur en chef, ni meme
mon rédacteur d'aucune façon. Si vous aviez deviné
juste, je ne me permettrais pas de vous donner un
démenti formel. Je suppose du reste que votrefièvre
bilieuse vous a faitdireen cettecirconstance,(comme
eu mainte autre), des choses que vous ne croyiez pas
le moins du monde. Mais en cherchant a frapper le
professeur, vous avez voulu frapper 1 établissement
MEURTRE DU MARECHAL D'ANCRE.
I.
iî Tout dormait au Louvre. Une seule chambre, dont les hautes
croisées donnaient sur la rivière, était éclairée c'était celle du jeune
Louis XIII, du fils de Hcnri-le-Grand, qui s'exerçait gouverner
son royaume en jouant avec des pies-grièches, tristes et babillards
oiseaux que son favori, d'Albert de Luynes, lui dressait pour char
mer ses loisirs ou pour tromper ses ennuis.
Le jeune roi, malgré l'espèce d'attention quil accordait aux pies
qui voletaient sur la table, semblait pourtant inquiet et préoccupé.
Tantôt il se levait avec précipitation pour aller regarder la fenêtre
entr ouverte, tantôt il prêtait l'oreille comme pour saisir le bruit de
pas éloignés.
EuGn, an léger cliquetis d'armes et d'éperons se Gt entendre, et
bientôt la riche portière de brocard d'or qui séparait la salle des
gardes de la chambre coucher du roi, fut soulevée avec précaution
et donna entréeà deuxhommesdonl les splendides vêtements étaient
cachés par d'amples manteaux noirs.
Ah vous voilà, d'Albert, dit le jeune roi en faisant un geste
de satisfaction, je croyais que vous aviez oublié votre promesse.
On n'oublie pas ainsi les ordres de Votre Majesté, répondit
d'Albert de Luyues en s'ineliuaut profondément devant Louis; j'ai
attendu que M. Vitry eût terminé toutes sesdispositions voilà,sire,
le seul motif de mon retard.
Eh bien Vitry, reprit le roi en se retournant vivement du côté
du capitaine des gardesarez-vous fait choix des gens qu'il vous
faut
Oui, sire, répondit Vitry douze hommes d'une valeur éprou
vée, sous les ordres rie deux gentilshommes intrépides, du Hallier
et Perray, seront demain la pointe du jour sous le porche deSaint-
Thomas-du-Louvre. Sur l'avis que je leur transmettrai, ils entre
ront sur le pont-levis tout prêts me faire main-forte.
Luynes doit vous avoir expliqué mes intentions, Vitry, reprit
le roi; je veux faire arrêter et cunduireà la Bastille M. le maréchal
d'Aucre cependant s'il osait faire un geste, pousser un cri...
Il faudrait le tuer sur la place, ajouta Luynes.
Louis Gt un signe d'assentiment.
Sire, répondit Vilry, je ne dissimulerai pas VolreMajestéque
je joue ma tête dans celle circonstance. Si maigre toutes mes pré
cautions, toute ma prudence, Concini parvint s eohapper de mes
mains, il fera payer cher aux Gdèlcs sujets de Votre Majesté le toi t
de n'avoir pas réussi.
Ne suis-je pas le maître, Vitry
Oui sans doute, sire, répondit Vitry; mais la reine votre mère
aocorde une confiance illimitée Léonorc Galigaï, digne 'épouse de
Conoiui les larmes de cette femme attendriront votre auguste mère,
et la reine, peut-être, exigera de votre tendresse et de votre respect
pour elle l'arrêt de mort de ceux qui auront voulu vous servir.
Je sais que ma mère est ensorcelée par ces deux misérables, ré
pondit Louis d'une voix que la colère rendait chevrotante, mais jo
m'arrangerai de manière rompre le charme. Au surplus, itry, lu
bâton de maréchal de France est un appât assez magnityque pour
qu on puisse risquer quelque chose 1 effet de 1 obtenir.
Comment, sire! Gt Vitry.
L'arrestation ou la mort de Concini est une victoire pour la cou.
ronne, répondit Louis, et celui qui la gagne, celte victoire, est digne
d'arriver la plus hautodigiiilé de l'armée. Oui, Vitry, le bâton do
maréchal qui tombera des mains de Concini sera pour vous, vous