JOURNAL D'Y
2e ANNEE. N° 164.
JEUDI, 24 NOVEMBRE 18*2.
On s'abonne Ypres rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT,
ptrf trimestre.
Pour Ypresfr. 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro 0-25
f!"
IXTERIEm. YPRES, 23 Novembre.
La session législative s'est ouverte sous des
auspices peu favorables la Belgique. Nos rela
tions extérieures et commerciales n'ont reçu
qu'une médiocre extension par le traité de com
merce avec l'Espagne. L'union douanière avec
la France vient encore d'être remise une épo
que indéfinie, par suite des réclamations vives
et pressantes de quelques industries françaises
froissées.
Ce qui nous paraît méfiter tju<^É[ne attention,
c'est l'annonce d'un déficit dans le budget des
voies et moyens ppur iDans les conjonc
tures où nous nous trouvons, ce fuit est d'un si
nistre augure pour les contribuables. Les rela
tions commerciales au lieu de s'étendre se
rétrécissent de jour en jour, et cependant l'in
térieur, de nouveaux impôts sont déclarés né
cessaires et devront être votés par les chambres.
Par suite de l'abus que le gouvernement a fait
des voies de l'emprunt, la situation financière
de la Belgique, il faut eu convenir, est loin
d'être brillante.
11 est plus que temps qu'une économie sévère
soit introduite dans les diverses branches de
l'administration, 11 ne suffit point, en décré
tant des améliorations ou des travaux publics
quelconques, de les croire utiles, il faut qu'ils
soient encore indispensables, pour qu'on en or
donne l'exécution.
Alors même les fonds doivent se trouver faits
d'avance pour les exécuter. Quand un pays se
trouve dans une position financière genée, il
faut que ces dépenses n'étendent point encore
les charges du budget et ne jettent point le tré
sor public dans des embarras inextricables.
Nous savons bien que cette manière de voir
n'est pas adoptée par le ministère, et encore
moins par quelques députés qui sont insatia
bles, quand il s'agit de leur localité. Mais un
Tout ce qui concerne la r/-
daclion doit être adressé,francot
l'éditeur du journal, Ypres. -
Le Progrès parait le Dimanche
et le Jeudi de chaque semaine.
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
get de voies et moyens^cl?s du c^a
105 millions de francs,/doit inspire,
de sérieuses réflexions.
Notre émancipation daje peine de d
ans, et déjà nous avonsWrouvé moye. <de
une dette publique qui'réclame une sorcepe
près de 35 millions de/francs, pour le ,enLù'£e
des intérêts. Nous j|»vconvenons volontiers,
^Kames irlandaises, en remplace-
nys, appelé d'autres fonctions.
es personnes qui connaissent M. l'abbé
Charliercomprendront combien ce choix est
heureux.
Par l'aménité de son caractère, par la modé
ration de sa conduitepar son esprit de conci-
immense capital d^PPe pays sert ,es intérêts, /atio" Par ses études paisibles enfin par
n'a pas été dépend totalement en pure perte! Cson taI?nt °^ato,re emPre!nt dune. oactlori
En premier lieu .1 faut en déduire 10 millions V"a!e\d Une douceur ef
de francs d'intérêts, pour la partie de la dette a su s? rend, e dlSne' ent, e tous ses
h«llanHa;«. Nniro mil. rivaux, d obtenir le poste honora
hollandaise mise notre charge. Notre rail-
way national a absorbé un capital de près de
150 millions de francs qui rapporte un intérêt
minime la vérité, mais d'un autre côté, il
augmente le mouvement commercial du pays.
11 est plus que temps pour la Belgique, de
mettre un frein cet esprit désordonné d'entre
prise. Non-seulement cette surexcitation pré
sente des dangers pour les finances de l'état,
mais encore elle réagit sur l'industrie, et les
événements de 1839 ont prouvé dans quelle
perturbation peut être jetté le commerce d'un
pays, par suite d'un esprit de spéculation témé
raire et étendue outre mesure.
11 est donc urgent de refaire les finances
de l'état, par une sage économie et l'abandon de
cette multitude de travaux publics projetés,
mais non encore commencés. Qu'on finisse tous
les travaux qui ont eu un commencement d'exé
cution, et nous en aurons encore pour long
temps.
S* S>^<5)*^~-7r»
Monsieur le général D'Hane de Steenhuyse
inspecteur de la cavalerie, est arrivé en celte
ville mardi dr, 22 de ce mois pour y passer
l'inspection du 1er régiment de cuirassiers.
11 est descendu Y Hôtel de la Tête d'or.
M. Charlier, vicaire de l'église SWacques en
notre villevient d'être nommé directeur du
poste honorable et difficile
qui vient'de lui être confié.
M. Danneels, prelreau séminaire, est nommé
vicaire S'-Jacques Ypres.
Le 17 dr, vers les huit heures du malin la
noùamée Sophie Wayaert, âgée de 10 ans, de
meurant avec ses parents, cabaretiers Beerst,
en allant la messetomba du haut mal dans
un fossé et y périt faute de secours.
Le 21 de ce mois, un horrible attentat vient
de mettre toute notre ville en émoi Une jeune
et jolie fille d'Anvers, depuis longtemps domi
ciliée Bruges, et qui venait de prendre, depuis
un mois seulement, une petite boutique de
merceries et nouveautés dans la i ue Longue
Maison des trois Tilleulsprès du pont Moulin,
a été victime d'un accès de jalousie de la part
d'un caporal d'infanteriequi l'a frappé de
plusieurs coups de sabre et lui a fait de nom
breuses blessures la tête, au cou, et aux mains
dont tous les doigts sont mutilés. Les cris
poussés par celte infortunée ayant été entendus
par le tambour-major et un sous-officier de
gendarmerie qui se trouvaient la Maison des
Bateliersils sont arrivés temps pour arrêter
l'assassin qui a été conduit sur-le-champ la
gendarmerie.
FEUILLETON.
L'INVENTAIRE DU PLANTEUR. {Suite.)
Je me sens plus de courage, dit Jenny, et je crois qu'il y a aussi
quelque joie préparer soi-même sou avenir.
Ainsi, répondit Jackson, vous vous exposerez toutes les chan
ces de la fortune, et vous suivrez M. Cokeril Boston
Pourquoi non
Vous ne connaissez pas les états du Nord, miss Mackcnsie. Ce
que vos noirs sont ici, vous le serez là-bas car chez nos frères abo-
litionistes le riche est maître, le pauvre esclave, et la femme du
pauvre est Lesclave d'un esclave. Là on n'acquiert point la fortune avec
les liras des autres, mais avec les siens; il faut suer l'or qu'on gagne.
Et prenant les blanches mains de la jeune fille avec un air railleur:
Voulez-vous voir, continua-t-il. ces doigts occupés jusqu'à pré
sent parfumer vos cheveux blonds, s'érailler sur la toile d'embal
lage ou gagner des angelures peser des épices? vous avez toujours
mené la vie douce de nos femmes de 1 Alabama, miss; ne vous con
damnez point de viles occupations qu'on abandonne ici aux esclaves.
Jenny tressaillit élevée sous l'empire despréjugésdu sud, où tout
travail est regardé comme un malheur et presque comme une honte
pour la femme, elle fat émue un instant du tableau que lui présen
tait M. Jackson mais celte impression fut rapide et elle répondit
presque aussitôt
Je me soumettrai aux habitudesdu pays que j'habiterai, monsieur.
Le planteur fit un geste impétueux qu'il réprima sur-le-champ.
Prenez garde, miss Mackensie, reprit-il d'un ton retenu et plein
d'une douceur menaçante réfléchissez avant d'agir ;v il ne s'agit point
seulement ici de vous, mais de votre père.
La jeune fille le regarda avec étonneraient.
M. Mackensie a fait comme tous les colons lorsqu'il s'est établi
ici, il a emprunté la somme nécessaire pour commencer sa plantation.
Je sais qu'il vous doit beaucoup, interrompit Jenny.
-h Tout lui a, jusqu'à présent, assez mal réussi et, si je ne me
trompe, l'impossibilité de faire honneur ses engagements entre
pour une bonne part dans la maladie qui le tue.
Ah! je le sais, je le sais s'écria la jeune fille en pleurant; mais
que puis-je faire, mon Dieu
Renoncer M. Cokeril.
Que dites-vous?
Et donner M. Mackensie un gendre assez riche pour le tirer
d'embarras.
Ah jamais, s'écria Jenny, qui s'éloigna du planteur avec un
brusque mouvement de répugnance.
Au fait, dit celui-ci d'un accent amer, miss Mackensie est libre
de préférer son goût la vie de sou père.
Oli monsieur
Du reste, rien ne presse; c'est suelement dans quinze jours qu'é
choit la première obligation souscrite par M. Mackensie j'aurai
l'honneur de me présenter alors l'habitation.
Et saluant la jeune fille, il la quitta froidement.
Restée seule Jenny réfléchit avec effroi ce qui venait de se pas
ser. Elle ne pouvait plusdonter des intentious du planteur, et cepen
dant elle avait encore peine y croire. La position de M. Jacksou
semblait, eu effet, justifier cet élonnemeut.
Lorsque quinze anuées auparavant, il était devenu propriétaire de
l'habitation qu'il occupait, il y avait établi, comme la plupart des
colons, une femme de couleur, fort belle, dont il avait fait d'abord sa
maîtresse, mais qui, insensiblement, avait pris chez lui l'autorité
d'une épouse. Cette femme l'avait rendu père de deux fils déjà
grands, qu'il avait fait élever avec soin, et, dans l'Alabama, où l'on
était accoutumé ces sortes de mariages de la main gauche, on lui
donnait généralement le nom de M,n« Jackson. L'habitude avait
enfin tellement légitimé cette union irrégulière, que miss Mackensie,
quoique-sachant la vérité, avait toujours regardé le planteur de la
Blanche-Couronne comme un homme marié. On comprendra donc
combien ses propositions durent la saisir et la surprendre. Du reste,
lors même que son affection sincère pour Jones ne lui eût pa& rendra
toute autre union odieuse, l'idée de chasser ainsi une femme du lit
de M Jackson pour y prendre sa place, lui eût fait horreur et dégoût.
Cependant elle s'épouvanta en songeant combien les passions de
cet homme étaient redoutables. Comprenant qu'il n'avait procuré un