JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
2e ANNÉE. N° 186.
JEUDI, 9 FÉVRIER 1843.
INTERIEUR.
FEUILLETON.
®SÏ2 saatîsa &53®sîïï£a2.
On s'abonde Ypres, rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
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YPRES, le 8 Février.
Les élections prochaines du deuxième mardi
du mois de juin commencent déjà occuper
l'opinion publique. Quatre mois nous séparent
encore de cette époque, mais il n'y a plus
trop de temps au gré de nos adversaires, pour
dresser leur plan de campagne. L'exemple donné
par le parti clérical, doit être suivi par l'opposi
tion libérale. Elle aussi doit s'émouvoir et com
mencer les préparatifs de cette lutte décisive.
Elle sera décisive qu'on ne s'y trompe
point. Tous les efforts des libéraux doivent se
porter sur cette élection, et si le succès les cou
ronne nos ennemis politiques auront cessé
d'exister l'état de majorité fictive, due l'intri
gue et la confusion du pouvoir spirituel et du
temporel. Leur rq|£®e minorité commencerait.
La représentation nationaleserait l'expression de
l'opinion de la majorité de la nation. Toute lutte
entre elle et l'opinion publique viendrait cesser.
Mais pour arriver ce résultat il faut de
I'Union. Tous les libéraux qui estiment l'intrusion
du pouvoir ecclésiastique dans nos affaires po
litiques, un danger et leur influence prépondé
rante, une honte, doivent se tenir unis et com
battre comme un seul homme, s'ils désirent
la victoire.
Nos adversairesquoique ayant perdu im
mensément dans l'opinion publique, sont encore
redoutables. Ils disposent encore d'armes puis
santes, que leur situation de majorité leur met
entre les mains. Ils ne sont nullement disposés
quitter la partie et leur conduite prouve, que
si les moyens honnêtes ne peuvent les faire
réussir, le Dol et la Fraude sont appelés leur
gicle. Leur conscience, quoiqu'ils se prétendent
moraux et religieux par excellence, leur per
met l'immoralité et la corruption politiques.
Si les libéraux veulent remporter les palmes
de la lutte, il faut de la modération. Prenons
pour bannière la Constitution de 1830, et rien
que la Constitution. Elle suffit nos vœux, ga
rantit les libertés les plus larges et que nous
méritons de posséder par la conduite sage et
calme du pays.
Prenons pour nous, libéraux, le titre de con
servateurs, nous le méritons mieux que nos ad
versaires, car que prétendent-ils conserver? La
Religion Elle n'est pas attaquée. La Constitu
tion? Eux-mêmes en veulent la modification.
Que prétendent donc conserver nos ennemis
politiques? Leur prépondérance, leur domina
tion soufiFerte avec impatience par la nation hu
miliée et quise réveillera pour signifier au clergé
que la faveur publique ne lui est acquise, que
pour autant qu'il reste dans les limites de ses
devoirs spirituels.
Les nouvelles arrivées de France sont de la
plus haute gravité. Le minisière français paraît
avoir reçu deux notes très-irritantes de la part
durégent d Espagne, contenant refus net de toute
réparation l'endroit des affaires de Barcelone.
On annonçait même la nouvelle de l'assassinat
de M. De Lesseps, mais cette nouvelle est dé
mentie.
Quoiqu'il en soit, ces démêlés entre M. Guizot
et Espartero peuvent susciter les complications
diplomatiques les plus dangereuses pour la paix
de l'Europe.
La satisfaction demandée par l'ambassadeur
français nous paraît due et il ne doit pas
être permis un soldat heureux, d'insulter Ta
France.
Dans le n° 168 du journal, nous arvons fait
connaître nos lecteurs^de quelle maaière M.
Declerck, aubergiste autl Trois Rois, Ypres,'
avait été victime d'un voteur qui était parvenu
a emporter son préjudice, ua sac contenant
quatre cents francs en espèces. V«Vv
Cet individu qui n'avait pas été découvert de
suite, a été arrêté, il y a quelques jôursj Wou-
men, lieu de son domicile.Il se iiomoie'Vànneste:
Hier il a comparu devant le tribunal de pre
mière instance siégeant correctionnellement.
Convaincu d'avoir commis ce volle nommé
Yanneste a été condamné deux années de pri
son, quatre années de surveillance et trois cents
francs d'amende.
Dans la nuit du 6 au 7 du courant, le feu
s'est manifesté dans l'intérieur de la maison
publique occupée par Pierre Biesbrouck rue
Notre-Dame, vis-à-vis le magasin d'habillement
du régiment des Cuirassiers, en celte ville. La
police s'est desuite rendue sur les lieux, et, aidée
par quelques voisins et surtout par l'empresse
ment et le courage du lieutenant Haisdu 5e
régiment de ligne ici en garnisonelle est
parvenue maîtriser le feu, qui avait déjà
consumé le bois de lit, litteries, et une partie
du plancher de la chambre et du grenier.
On attribue cet incendie l'imprudence des
femmes qui toutes étaient dans un état complet
d'ivresse.
- On écrit de Staeden Aujourd'hui, 3 fé
vrier, vers les six heures du soir, un orage vio
lent accompagné de tonnerre et de grêle a éclaté
ici. La foudre est tombée dans le clocher de
"l'église. Le feu y pris l'instant, et s'est com-
'thuniqué d'abord au plafond des nefs et ensuite
la charpente de la toiture. Mais grâce aux efforts
héroïques des habitants qui ont porté secours
au péril de leur vie, l'église a été arrachée la
fureur des flammes. On évalue le dommage
uu millier de francs. L édifice était assuré contre
l'incendie depuis trois semaines.
A' voir tomber la neige si perpendiculairement
pendant toute la journée d'hier, on se serait
difficilement fait une idée du terrible ouragan
qui avait assailli notre ville la nuit précédente.
Durant dix heures le vent a soufflé par rafales
avec une impétuosité extraordinaire, et a chassé
les vagues au-dessus de fà digue de mer. Une
partie de celle-ci, au bout de l'embarcadère des
{Suite.)
II.
une maitresse.
La première partie de l'histoire que nous venons de raconter n'eu
est, pour ainsi dire, que l'avaut-scène. II faut donc nons reporter
quelque temps en arrière pour faire- connaître au lecteur les princi
paux acteurs qui figurent dans ce récit: et d'ahôrd nous introdui
rons dans une maison de la rue de Furstemberg, au fond' du quartier
le plus retiré du Faubourg-Saint-Germaiu. L'appartement du second
étage n'était ni riche ni somptueux -, on n'y voyait ni meubles de
luxe, ni draperies éclatantesni bagatelles précieuses. Une seule
glace dans le salon, des rideaux de mousseline aux croisées, quelques
fauteûils, mais point de divan j un plafond nu et uu simple tapis
vert comme le fond du papier de tenture. La seule pièce de l'ameu-
hlement qui parût avoir beaucoup de prix était \m piano de la forme
la plus moderne, et près duquel étaient amoncelés des cahiers de
musique et des partitions entières. Mais, malgré la modeste valeur
des différents objets qui ornaient cette principale chambre, le bon
-y MC- "f.
goût qui avait présidé l'harmonie de l'ensemble," .dqnhâif ià'soni*aïs- Marianne s'approcha d'un air capable, mit ses lunettes et fut
pect-une sorte •d'élégance, èLÏ'on devinait que cet âpparïemènt si frappée-'de la vivacité des couleurs ainsi que de l'art infini qui les
propre et si bien tenu était occupé jfcrrme femme. -
En effet, près de lq crojsee, devint un métier tapisserie/une
jeune personne assiseachevait la-hâte un charmant ouvrage.* Elle
était vêtue de hianc, pl ia simplicité de sa toilette était d'accord aveo
celle du lieu qu'elle habitait. Ses longues paupières brunes, abaissées
sur son travail, ne se relevaient que par intervalle, et àlorsses beaux
yeux noirs se portaient Sur la pendule, dont l'aiguille son gré sem
blait marcher trop vite. Ses mains, d'une blancheur admirable, au
raient mérité de servir de modèle un peintre de portraits de
femmes, si l'extrémité des doigts avait été plus effilée. Son cou était
d'une forme et d'une beauté accomplies et donnait de la grâce et de
la soupleSse tous ses mouvements de tête.
Il vint un moment où la jeune femme considéra la pendule aveo
satisfaction et arrêta le dernier fil de sa tapisserie. Elle se leva en
jetant un coûp-d'œil sur l'ensemble de l'ouvrage et sonna. Une vieille
bonne parut.
Marianne lui dit-elle avec une joie naïve qui pprçait dans ses
regarda et dans le son de sa voix, j'ai terminé ce ""nouvel ouvrage.
Comment le trouves-tu ù»**- - t
avait nuancées.
C'est un vrai chef-d'œuvre! s'écria-t-ellej si Tous voulez me
laisser faire, vous, en aurez un bien meilleur prix que tous les autres.
Tu sais bien, interrompit la jeune personne, que tout est vendu
d'avance la même maison èt pour, le même prix.
Des juifs! grommela la vieille.
C'est mal, Mariant! de traiter ainsi les braves gens qui m'ont
procuré une ressource toujours sûre et qui suffit mes besoins.
Eh !%ftn!^?!ï)ieuvous pourriez vous passer d'eux. Si vous aviez
voulu...
IJn regard sévère arrêta tcfut-à-coup les paroles de Marianne, qui
détourna les^yeux et reprit avec un peu d'embarras
C'est de votre talent sur le piano que je voulais parler. Il n'y a
pas beaucoup de virtuoses de votre force, et quand vous donniez des
leçons dix francs le Cachet...
Cela déplaisait M. Jules.
C'est vrai, répondit la vieille depuis ce temps-là vous ne-faites
plus de musique que pour lui. A vrai dire, j'aime mieux cela que
votre ancienne manière de vivre toujours en ville et toute seul