JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
2e ANNÉE. - N° 199.
DIMANCHE, 2G MARS 1843.
INTERIEUR.
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\PBES, le 25 Mar*.
LE DISCOURS DE M. DE MÉRODE.
La réaction ne vient encore que de commencer,
si nous devons en croire M. Eloydit de
Burdinne et surtout 1 honorable comte de
Mérode. Le premier nous a annoncé que la
représentation naliouale sera toujours une fic
tion. aussi longtemps qu'on n'appliquera pas la
mesure du fractionnement aux élections pour la
représentation nationale. Alors toute la Belgique
serait représentée comme le district de Wa-
remrae. qui a eu l'heui1 de découvrir l'honorable
M. Eloy, pour en faire son mandataire. Voyez
donc comme la Belgique pourrait être fière
d'avoir beaucoup de députés semblables M.
Eloy, l'ennemi des chemins de fer, mais grand
admirateur des pommes de terre et des carottes,
qtril a prises sotts-sa protection spéciale.^
Celle nouvelle mesure réactionnaire pour
être provoquée par M. Eloy, n'en est pas moins
dans les idées de nos ennemis politiques. Et
qu'on l'observe bien nul député ni feuille
cléricale n'ont désavoué les opinions émises par
lhonorable député de Waremme.
Mais nous avons hâte d'arriver la confuse
harangue de M. de Mérode. C'est là le modèle,
le beau idéal de l'éloquence cléricale. Le pauvre
homme n'y va pas de main-morte. Il s'attaque
corps corps avec la presse et le jury, qu'il
trouve impossible avec la domination cléricale.
Aussi a-t-il laissé échapper l'ardent désir qui
anime son parti, de voir ces deux boulevard de
nos libertés rayés fie la constitution. Enfin pour
satisfaire l'honorable gentilhomme il faudrait de
nouvelles commotions politiques, car de toutes
les conquêtes accomplies depuis cinquante ans,
aucune ne trouve grâce ses yeux. Avec le pape,
il trouve la liberté de conscience une sourcéin-
fecte d'indifférentisme et la liberté de la presse,
une liberté funeste et dont on ne peut avoir
assez d horreur
Ce n'est point là une opinion isolée ou peu
grave. L'honorable comte de Mérode est un des
députés catholiques les plus influents, et en
s'exprimanl ainsi, il laisse échapper les secrets
désirs de son parti. D'un ton colère, il a atta
qué dans son discours, l'honorable M. Devaux,
qui il ne peut pardonner sa séparation d'avec
le parti clérical et surtout sa coopération la
Revue Nationale.
Après ce discours, la chambre a été égayée
par un incident burlesque, où le comte de Mé
rode, le roi manqué de la Belgique, s'est donné
en spectacle et a réussi se faire voir sous un
jour, on ne peut plus ridicule.
Etourdi par ces attaques contre la presse et
le jury, M. Nolbomb s'est levé et en a pris la
défense. Quoiqu'il ait demandé pardon l'ho
norable comte de la liberté grande qu'il se per
mettait, celui-ci n'en a pas moins ressenti un
violent dépit et a fini pâr dire M. Nolbomb,
en forme de réponse Allez au diable. Et ce
disant, M. De Mérode est allé exhaler sa colère,
en se promenant grands pas, dans la galerie
qui se trouve derrière les députés.
Nous n'avons pas besoin de dire, que la mau
vaise humeur du champion du clergé a été ac
cueillie par un rire homérique de la part de ses
collègues. On se demandait, si IeDon Quichotte
de l'opinion cléricale n'avait pas le transport au
cerveau. Mais heureusement M. Du mortier, au
tre conservateur aussi modéré que M. de Mé
rode, est parvenu le calmer.
Pour nous, nous devons de remercîments
l honorable gentilhomme pour avoir dévoilé avec
'tant de franchise, les désirs et le but de nos
ennemis politiques. La Belgique, en voyant ces
conservateurs si modérés et en découvrant leurs
projels, saura quoi s'en tenir sur leur respect
pour la constitution et leur amour pour les li
bertés. Elle vient d'apprendre par l'organe de
M. de Mérdde, que le leloiir de l'ancien régime
peut seul satisfaire l'opinion cléricale, que c'est
là où tendent nos adversaires. C'est la majorité
éclajrée du pays légal, rendre ces tentatives
vaines et avec de 1 union et de la modération,
elle y parviendra.
Les journaux nous ont annoncé la nomina
tion du Sr Vandenbogaerde notaire Merckem
une place de notaire Poperinghe, vacanle
par le décès de M. Fraeys.
Mais aucun journal n'a pu nous donner les
motifs de cette promotion si rapide. Le Sr Van
denbogaerde agent d'affaires Walou et bourg
mestre de celte commune, avait été nommé
depuis peu de temps notaire Merckem. II avait
déjà réussi dans cette commune, s'attirer l'ini
mitié d'une partie notable des habitants, et
jeter la division enlr'eux.
Nous ne connaissons point personnellement
le Sr Vandenbogaerde, mais nous avons tout
lieu de croire, que d'autres titres que ceux du
mérite ou du talentont plaidé pour lui faire
obtenir ces faveurs.
^'oublions point qu'en 1841, lors de l'élection
de nos deux produits du cens campagnard
la représentation nationale, le S1 Vandenbo
gaerde s'est fait courtier électoral en sous ordre
et est arrivé en ville avec sa cohorte d'électeurs
de Walou. Même après l'élection, n'avons-nous
pas vu le Sr Vandenbogaerde, enivré aar le succès
et peut être par suite de copieuses libations en
l'honneur desélus, insullerau partrHbéral etpro
férer desinjures contre les libéraux. Un dévoue
ment aussi bruyant et aussi spontané au parti
clérical, ne pouvait être récompensé avec trop de
magnificence.
Aussi passe-t-ii sur lecorpsà plusde dix notai
res qui avaient plus de droit que lui obtenir le
poste de Poperinge. V homme d'affaires <\u clergé
M. Nolbomb, sur les instances probablement des
honorables représentants qui doivent quelque
reconnaissance l'ex-agent d'affaires, l'a nommé
contre l'avis de la chambre des notaires, du mi
nistère public et du procureur-général. Nous
ne pouvons pas trop blâmer nos deux honorables
députés (l'avoir réintégré le Sr Vandenbogaerde
dans un poste de notaire de l'arrondissement
LE VOCABULAIRE DES FEMMES.
Le dictionnaire est le grand seigneur de la librairie-moderne lui
seul, au milieu des rabais littéraires, a conservé la dignité de son
chiffre commercial et l'embonpoint de son format primitif.
Il y a des dictionnaires pour les savants, les artistes, les menui
siers, les vaudevillistes, les teinturiers; les majins ont leur diction
naire et Vidocq a fait le lexirou des voleurs. Mais n'est-il pas encore
un dictionnaire lancer dans la publicité
J'ai souvent rêvé un dictionnaire vaporeux qui serait coup sûr
line des meilleures entreprises de la librairie moderne; car il serait
tiré autant d'exemplaires, qu'il y a de cœurs en Europe. 11 s'adap
terait aux deux sexes; grande innovation parmi les dictionnaires qui
out en général porté la culotte. Il est certain que les femmes ont
leur langage, leur grammaire elles, comme les hommes ont leur
idiome. Honneur' 1 Jiotaimc qui saurait réunir les racines, les mille
désinences de cette langue féminine qui coûte souvent si cher ap
prendre, langue Ta fois traîtresse et charmante, qui échappe toutes
les lois de la syntaxe,, cl s affranchissant de l ortograpl\c par la petite
poste, vous saisit, vous séduit, vous enlace.
Voilà un dictionnaire vraiment utije. Merveilleux, petits maîtres,
Lovelaces, Jocondes, écrivez donc le dictionnaire des femmes!
Que d'existences déformées, que de provinciaux, que de jeunes
Anglais et de jeunes Russes maudissent Paris et ses plaisirs du fond
de leur cœur et de leur bourse, pour n'avoir pas connu les règles, les
conjonctions, les interjections et la valeur des épithèles de ce perfide
dictionnaire? Il y aurait donc de la philantropie dans l'œuvre que
je propose, et son autour pourrait juste titre concourir pour le prix
Mouthyon.
Ilyauue différence entre la chaussure, le boùrnous ou le mantelet
des femmes des différents quartiers; de même aussi le. langage des
femmes change complètementen changeant d'arrondissement.
Ainsi, prenez celle simple expression: Mon ange, Ans la rue Royale,
la porte de Namur, au Faubourg de Flandre, vous verrez qu'elle a
un sens tout opposé eu raison du changement des lieux. Icimon
ange est une expression très-dispendieuse", elle représente mille francs
par mois un cqupé; là, mon ange a une pipe et une casquette rouge,
plus loin encore, mon ange aura un tablier de cuir et un bonnet grec
il répondra ynà biche, ma poulema cocotte cl autres locutions qui
devront être consignées, avec leur valeur instriusèque et alphabéti
que, dans le dictionnaire des femmes.
Voici diverses significations que je donne comme extraites par an
ticipation du dictionnaire faire:
Je t'aime. Simple partie Ixelles et cavalcade âne Boilsfort.
Mon chéri. Capote bien simple en percale, point de fleurs, quel
ques rubans, une douzaiue de gants glacés.
Mon amour. Chapeau de paille d'Italie, bagne en turquoise, une
robe en mousseline des Indes.
Mon idole. Tout ce quil y a de plus distingué en fait de velours,
de fourrures, de satin, mais point de diamants, voyage Anvers pour
voir la Rritish-Queen.
Je t1 adore. Voyage Spa, chaise de poste, robes d'été, manteau,
de voyage; huit jours de félicité
Mon tout. Un hôtel dans la rue Royale avec des petits chevaux
ayant des rosettes sur l'oreille, loge au parc.
Je suis*à toi pour la vie. Terme incendiaire. Hôtel, équipages,
groom café au laitloge au théâtre de la Monnaie, argenterie reti
rer du mont-de-piété, meubles, porcelaines, bijilauts. Un trimestre
de fidélité.