JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
3e ANNÉE. N° 243.
DIMANCHE, 3 SEPTEMBRE 1843.
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YPRES, le 2 Septembre.
LES AFFAIRES DE LA SUISSE.
En examinant avec attention la situation po
litique de l'Europe, il est un fait qui ne peut?
passer inaperçu. C'est la tendance du clergé
catholique ressaisir partout sa splendeur pas
sée et son influence temporelle sur les peuples
catholiques.
Il ne .s'agit plus des dogmps, ni de ces subti
lités iponacales qui autrefois fanatisaient les
populations. Le but poursuivi avec une rare
persévérapce par le clergé catholique, est plus
matériel. D'ailleurs les disputes scola'stiques
sont devenues inutiles, car il semble qu'en fait
de dogmes, tout le monde soit d'accord. -
Par la civilisation et le progrès des lumières,
)e clergé des pays catholiques a perdu Avec sep
possessions territoriales^ la .direction exclusive
de la société. Les peuples les plus éclairés, tout
en se montrant très-soumis au prêtre catholi
que en matière religieuse, acceptent^àvec ré
pugnance son intervention en nià,tière politique
et souvent la récusent..
Rien ne paraîl'elre plus dura supporter, que
la position actuelle faite au clergé par les con
stitutions des états libres. Du moins il faut le
croire, quand on voit de ses membres faire les
efforts les plus inouïs pour s'ingérer des choses
où ils n'ont que faire. L'esprit du siècle est tourné
vers la liberté. Pour conserver leur influence sur
la société, ils se sont faits les fougueux apôtres
de la liberté. Quitte après revenir sur leurs
pas, quand le vent paraît changé. Car il faut au
moins accorder la cour de Rome une qualité
qui fait réussir, c'est celle d'être immuable dans
ses desseins et on peut répéter avec le poëte;
que quand elle embrasse un ennemi, c'est pour
l'étoufFer.
La Suisse offre un exemple de cet esprit re
muant et dominateur du prêtre catholique. Le
canton d'Argovie avait décidé que l'abbaye de_
Rluripuissante par ses richesses et $ps, posses
sions territoriales et quelques autres_ couvents
seraient supprimés. L'abbé de Mûri était con
vaincu d'avoir conspiré contre l'ordre établi
dans le canton et même il y avait eu un com
mencement d'exécution. Ces communautés fu
rent donc dissoutes par la force et leurs richesses
employées par le gouvernement du canton
d'Argovie, des œuvres de bienfaisance.
A peine ce fait exécrable aux yeux du clergé,
mais très-juste, très-nécessaire et unanimement
approuvé par le canton d'Argovie, ful-il connu,
que tous les oints du Seigneur, se mirent
crier la profanation. Invoquant I article 12
du pacte fédéral qui paraissait susceptible d'une
interprétation jésuitique quelques cantons où
la compagnie de Jésus (nouveau style,) exer
çait une influence prépondérante, voulurent
soumettre celte question au conseil général des
càntons Sùisses et demandèrent le rétablisse-
.menl des couvents supprinȎs.
Après des discussions àsièz vives, aucune dé
cision ne put intervenir, parce qu'aucune pro-.
position ne réunit la majorité des suffrages. Les
séances du conseil se tenaient alors Zurich
mais les rétrogrades crurent être plus heureux
quand elles auraient lieu, Lucerne, canton
dont lé directoire paraît être entièrement sous
la main des jésuiLes.
Heureusement l'espoir de la faction rétrograde
a été déçu. La question des couvents s'est pré
sentée pour la quatrième fois celte année, devant
le conseil fédéralet le canton d'Argovie a gagné
sa cause. Les communautés supprimées reste
ront dissoutes et ces honnêtes conspirateurs en
capuchon se verront forcés de se tenir coi dé
sormais.
Qu'on ne suppose point que cette affaire dans
laquelle les intérêts temporels du clergé catholi
que se trouvaientsi vivement enjeu, ail été vidée,
sans que les cantons les plus éclairés n'aient dû
faire preuve d'éiSer'gie. Deux d'entre eux ceux
dit Te'ssin et de S'oleure, dont les populations
sont entièrement catholiques, ont déclaré ne pas
vouloir favoriser de leur vote, des prétentions
illicites qui se cachaient sous un masque reli
gieux, tandis que les cantons sous l'influence
FEIILIXTÔNT
des jésuites ne parlaient de rien moins que de
briser le pacte fédéral s'énonçant comme tou
jours, au nom des catholiques pour ne pas dire
du clergé, l'instigateur de ces troubles.
Quoique le canton d'Argovie ait obtenu gain
de cause, il n'est point espérer que lirri-
talion se calme de sitôt. Le clergé catholique
trouvera bientôt des nouveaux sujets de plainte.
Il en créera au besoin car la caste cléricale ne
se lient jamais pour battue et si elle doit quit
ter la partie, c'est pour revenir bientôt la
charge, dès qu'elle croira découvrir une chance
favorable la réussite de ses projets.
AU NOUVELLISTE DE BRUGES.
Nous n'avons pas I habilude de faire ce qu'on
appelle de la polémique de journaux, et il a
fallu que nous nous vissions l'objet d'absurdes
attaques de la part du Nouvelliste de Bruges,
pour nous faire dévier de la voie que nous nous
clions tracée; nous tre répondrons plus que
quelques mots la Gazette officielle de l'évêché.
Quel est donc ce journal qui s'efforce d'im
primer un sceau de réprobation au Progrès?
C'est le Nouvelliste qui naguères s est consti
tué l'apologiste des fraudes électorales.
Le Nouvelliste qui n'a pas craint d'assimiler
le respectable abbé Beeckman êt d'autres hom
mes honorables Libri Bagnano.
Le Nouvelliste qui, une époque électorale,
a sali dans ses colonnes, la réputation des hom
mes les plus haut placés dans l'estime de leurs
concitoyens. -
Le Nouvelliste qui discrédite chaque jour
davantage la faction qu'il croit servir.
Le Nouvelliste enfui, que l'opinion publique
a attaché depuis longtemps au pilori.
Que notre antagoniste le sache bien, si nous
avions ses antécédents, nous briserions nos
presses, car nous aurions démérité de la noble
cause du libéralisme.
Le Progrès a stigmatisé souventil est vrai,
les tendances ambitieuses du clergé, mais il est
faux qu'il se soit jamais montré hostile la re
ligion; le Nouvelliste le dit, il ne saurait le
prouver.
A
7Vf
LA FIAKÇEE DE MADRID.
(Suite,)
v vni. -
EN, PLEINE COUR.
t u r- «-.v1 p -
La chambre d'audierfôc venait d'êrfe ouverte aux courtisans, et
Ton attendait dans urr respectueux "silencé-, Tapparilion de Philippe
III. Deux gentilshommes;du palais, don Éurique de Guzman et don
François dejlibera.se tenaient ^de chaque côté du siégé royal, auquel
on arrivait en mofilant Trois degrés couverts d'une riche tapisserie,
toute brodée de soie et d'or;
Au bout de quelqifes minutes, un hérault annonça
Le roi,. .V
Et l'on vit paraître Philippe "III, précédé du garde-major du pa
lais qui, la tête de quelques hallebardiers, ouvrait le cortège et fai
sait faire place. A la droite du roi était 'Uzéda, fils du duc de Lerme,
qui avait succédé son père dans la faveur du maître. A sa gauche,
marchait don Roderic Caldcroifé.
Le roi prit place, et l'on procéda l'admission de l'ambassadeur
de.Charles Emmanuel, duc de Savoie, qui apportait de la part de
son maître la ratification d'un traité de paix récemment sigué. Dé
filèrent ensuite successivement l'amiral de Castille et l'archevêque
de Grenade, dont la station devant le roi ne fut pas de longue durée.
Tout-à-coup, et sans qu'on sût comment il avait pu s'introduire
et paraù il était entré, ou aperçut,au milieu de la salle de réception,
un homme masqué, debout, les bras croisés et regardant fixement
le roi.
Uzéda et Roderic, dont la rivalité se trahissait en toute circon
stance, voulurent tous deux faire preuve de zèle en se disposant
courir sa rencontre mais Philippe les arrêta en leur disant
Laissez cet homme, je veux l'interroger moi-même.
Il se fit dans la foule un mouvement de curiosité.
Votre nom demanda le roi.
Je ne le puis dire.
Pourquoi cacher votre visage
Parce qu il me suffira de dire un mot, sire, pour que vous sa
chiez qui je suis et ce que je veux.
Que demandez-vous doue
Justice!
Pour qui
Pour Diego deSoria.
Contre qui
Contre vous-même, sire.
Roderio et Uzéda firent encore un pas en avant. Po
fois, Philippe les retint eu murmurant
Voyons jusqu'où ira son audace. Pui», reprena
pliquez-vous, dit-il. \V
Sire, une jeune fille vivait MadriRJeous ij
mère, sous la sainte protection de la mémdre d't
meut au service d'Espagne. Sa vie était^iurc et's^
Uu infâme a voulu les tenir et vous k counaiftczl" t
Je ne sais de qui vous voulez parler, difrroidéR
Uu jour, on donna cette jeune filk Ml époùj
Diego de Soria. Ce nom vaut celui^'OvéJa, et la gloiu
vait sudisammeut protéger celle de l'autre.Il uVnYut
La noble enfant ne fut pas mariée toût un jour;...
fête, don Diégo fut ravi son épouse, ibôtihal
événement, sire, quevousne devez pa^igaorer, puil
tei, sous vos yeux, et par voire ordre... sans doute
y**--•