J0URIAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
3® ANNÉE. N° 254.
JEUDI3 OCTOBRE 1843.
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YPRES, le 4 Octobre.
Un petit journal de la province, rétrograde
de la pire espèce et qui a le privilège d'imiter
les gens d'esprit, comme l'âne de la fable imi
tait le petit chien a laissé imprimer dernière
ment un article en trois colonnes, destiné sans
doute, nous porter un coup terrible.
Le Nouvelliste de Bruges qui prend notre
égard des airs qu'un chanoine ne se permettrait
pas même de prendre vis-à-vis d'un modeste
vicaire de village, et qui pourtant n'a que notre
taille el paye comme nous au fisc la modeste
somme de trois centimes par feuille, le Nou-
veUistedisons-nous, ne peut nous pardonner
une phrase d'un de nos articles. v
On lit dans celte feuille
Il (c'est-à-dire le Progrès) avait soupçonné le
collège (de l'évéque sans doute)de faire de
très-bons chrétiens, c estainsi qu'il s'exprime, et
il l'a supprimé pour en maintenir un, qu'il ne
fut plus permis personne de soupçonner de
faire de très-bons chrétiens.
D'abord le Progrès n'existait pas l'époque
où le conseil communalpour des motifs Jrës-
connus, jugea ponvenable de retirer le subside
accordé durantyquelques années au collège de
l'évéque.
Et puis, veuillez remarquer comme l'argu
mentation du Nouvelliste est serrée Combien
les conséquences qu il en tire, sont justes. Voyez
plutôt: Nousavousdit Vous êtes soupçonnés
j\lM. dit clergéde faire de très-bons chrétiens
mais nullement des hommes instruits et capa
bles. Donc, dit le Nouvelliste, on maintient un
collège où il n'est plus permis de faire de bons
chrétiens. L'ergo fut-il jamais suivi d'une coût
clusion plus boiteuse.... Doclor revérendissime
claudicat argumentatio Et vous le savez de
reste, raisonneurs de mauvaise foi, vous n'igno*
rezpas que l'on cherche faire au collège com
munal, tout la fois, des hommes instruits et de
bons catholiques. Demandez-le plutôt au digne
professeur de doctrine chrétienne, que l'évéque
du diocèse avait chargé de donner l'instruction
religieuse au collège communalet qui a été
arraché des fonctions qu'il remplissait avec
zèle et bonheur, pour être exilé loin de notre
ville, loin de ceux dont il avait mérité l'estime
et la considération.
Si aujourd'hui aucun ministre de l'évangile
ne fait entendre la parole sainte dans l'établis
sement communal, c'est qu'il vous a plu de re
fuser vos jeunes concitoyens le bienfait que
vous accordez aux Indiens et aux sauvages de
l'Amérique
Malgré vos refus injustes et incompréhensi
bles, l'étude de la religion n'y est pas négligée,
vods ne l'ignorez pas.
\oilà pour le chrétien.
Quant aux hommes instruits, où sont-ils?
nous dites-vous. Ils sont.revêlus de la robe du
magistrat, assis au conseil de la cité, ils çont
chargés de défendre la veuve et l'orphelin, ils
sont professeurs ils servent le Roi et le Pays,
ils sont même parmi vous, et vous ne pouvez le
nier, ces prêtres-là ne sont pas moins instruits
que ceux qui furent élevés dans vos écoles.
Et. parmi les élèves formés au collège com
munal d'Ypres, n'en est-il pas un grand nom
bre qui se sont distingués aux universités du
royaume. D'autres ne sont-ils pas entrés avec
distinction l'école militaire
Vos petits séminaires peuvent avoir formé
d'excellents vicaires qui plus tard seront de bons
curés... nous'aimons le croire, puisque vous
le dites et bien que jusqu'ici vous soyez seuls
juges de ce que vous affirmez.
Notre collège communal a tenu jusqu'ici
Fépoque des concours, un rang honorable par
mi les établissements d'instruction moyenne.
t'Aucua de nos élèves n'a, i4 est vrai, remporté la
palme. Mais, il 'vous sied mal de nous faire ce
reproche, vous qui n'avez pas eu, jusqu'à ce
jour le courage d'oser combattre.
Nous passons sous silence une colonne et de
mie de phrases verbeuses, brillantes d'un gali
matias sans pareilpar pitié pour l'habile écri
vain qui les a communiqués au Nouvelliste.
Cette feuille nous reproche encore d'être nés
50 ans trop tard. Cher confrère, vous avez ou
blié la parabole de l'évangile. Vous croyez voir
une paille dans notre œil, et vous n'apercevez
pas la poutre qui est dans le vôtre. N'est-ce pas
vous qui êtes d'un autre siècle, et qui désirez
intérieurementmalgré vos dehors modernes
nous faire revenir au bon vieux temps de la
dîme, de la censure, de la main morte, etc.
Le Nouvelliste finit ainsi son faclum
L'autorité oivile qu'a-t-elle donc craindre de l'instruction
religieuse? sout-ce les générations ainsi formées qui renversent
les trônes, transgressent les lois, embarrassent les administrations
des provinces, arrêtent les municipalités dans l'exercice de leurs
t« fonctionsj>
Nonsans doutel'autorité civile n'a rien
craindre de l'éducation religieuse, au contraire,
elle doit désirer que les enfants soient élevés
dans les principes de la religion. Elle le désire
el ne néglige rien pour atteindre ce but. Mais
elle veut aussi que l'instruction soit en harmonie
avec les besoins de l'époque et les progrès du
siècle, car l'expérience lui a démontré, que des
générations fanatisées et élevées d'après les prin
cipes d'un temps, qui est déjà loin de nous
causent, soit par elles-mêmes, soit par les pré
tentions exorbitantes qu'elles affichent, la chute
des trônes: qu'elles faussent les institutions po
litiques modernes comme votre parti cherche
sans cesse fausser notre constitution èt nos lois
organiques, enfin qu'elles arrêtent dans l'exer
cice de leurs fonctions les municipalités qu'elles
ne peuvent maîtriser, comme vous el les vôtres
cherchez molester l'administration qui nous
régit, et lasser les hommes qui la composent.
Du reste, les attaques que I on prodigue, du-
FEUILLETON.
aa a©saasï© aaâaa,
Minuit venait de sonner* tonte la population de Gand s'était mise
en mouvement pour un but commun, le plaisir; il -s'agissait de fêter
dignement le jeudi gras, l'un des quatre derniers jours du carnaval.
jeune officier allemand, nommé Gustave de Valberg, avait
quitté machinalement -son Jtôlel, et, suivant le torrent, venait d'en
trer dans la grande salle de la Redoute. Mais,.comme il n'était
connu de personne dans une ville où il se trouvait seulement depuis
huit jours, les masques circulaient autour de lui, le coudoyaient, le
heurtaient, sans lui adresser aucun de ces propos frivoles, aucune de
ces agaceries qui font tout l'agrément d'un bal.
Fatigué d'errer depuis une. heure au milieu de cette joyeuse
cohue, dont la gaîté l'importunait plutôt qu'elle ne parvenait le
distraire, il se demandait si c'était là un divertissement, et il se
disposait sortir au moment où deux dames masquées que l'on
n'avait pas encore vues, parurent l'entrée de la salle. Elles avaient
toutes deux une taille élancée, beaucoup de noblesse dans la démar
chent leut costume éta^t aussi riche qu'élégant un seul cavalier les
accotnpaguait. A peine^suiurcnt-elles montrées, qu'un murmure
flatteur s'éleva autour d'elles; des groupes de masques Jes suivirent»
essayant, par de fines plaisanteries et par des mots spirituels, de les
/'intriguer et de les faire parler."
Quelques phrases allemandes échangées entre les deux dames
éveillèrent lout-à-coup l'attention de Gustave.
Des coût patriotes s'écria-t-il.
Et, renonçant au projet de se retirer, il se jette de nouveau dans
ce pêle-mêle, tout l'heure importun, qui semble lui offrir main
tenant tous les éléments du plaisir et du bonheur.
Dans ce moment, plusieurs masques, dont l'originalité avait attiré
un grand nombre de curieux, vinrent la rencontre de la foule, et
il se fit une telle confusion que, l'une des deux dames qui parais
sait la plus jeune, et portait un domino blanc noué par une agrafe
d'un grand prix, se trouva tout-à-coup séparée de sa société.
Fendant que ses regards se portaient de tous côtés avec inquiétude,
Gustave, remarquant son embarras, s'approcha d'elle avec respect et
lui offrit ses services; elle parut L'examiuer attentivement puis, se
penchant vers lui, et prenant sou bras ayee un air de confiance dout
un fat aurait pu s'enorgueillir
Oserai-je vous prier, lui dit-elle vivement, de m'aider cher
cher les personnes dont j'ai été si brusquement séparée.
Commandez, beau masque, el confiez-vous entièrement moi;
je suis y os ordres.
Mais toutes leurs recherches furent inutiles; fatigués d'être cou
doyés et ballojlés, ils sortirent enfin de la grande sàlleîet passèrent
dans un des salons voisins, afin de trouver un peu d'air respirer.
Gustave ofTrit sa compagne de s'asseoir sur un sopha, et dt%uuicla
quelques rafraîchissements. Elle s'assit, -ruais ne voulut ri
dre, assurant qu'elle se prouvait mieux et qu'elle était pi
leuse de la frayeur qu'elle avait laissé paraître.
-h Permettez, dit Gustave, que je m'en félicite
nement heureux pour moi, puisque c'est celte t,
le plaisir de vous accompagner.
Je crains, monsieur, d'abuser de votre
tant je voudrais vous prier de ne pas me
j'aurai retrouvé ma société. Retourner
cher encore une fois.
Eh quoi sitôt dit Gustave d'unT
vous si, pour toute récompense, je vous
moments
-h Soit, pour vous récompenser, répondit-elle
Pardonnez, si j'ose me permettre
heureux amis qt.^ous cherchez? XJV
aussi peu
Dieu mercit
-snl mariée