4e ANNEE. - N° 383.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
MERCREDI, V JANVIER 1843.
Feuilleton.
«s*
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daction doit être adressé,/ranca,
l'éditeur du journal, Ypres.
Le Progrès paraît le Dimanche
et le Jeudi de chaque semaine.
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
YPRES, le 31 Décembre 1844.
A HOS LECTEURS.
Depuis la création du Progrès, tous les ans
pareille époque, nous nous sommes adressés
nos lecteurs et nous leur avons exposé le but
et la tendance de notre feuille qui Ypres, re
présente l'opinion libérale parmi les organes de
la presse. Nosexpliealions étaient accompagnées
des vœux et des souhaits dont nous espérions
la réalisation l'année suivante.
A la première partie de notre tâche, nous
croyons qu'il est inutile d'y revenir. Les opi
nions du Progrès ne peuvent plus être mises en
doute. Franchement libérale, attaquant les abus
de quelque part qu'ils viennent, notre feuille a
poursuivi sa marche avec fermclémais avec
modération. Le plus souvent elle n'a blâmé la
mauvaise foi de ses adversaires que par son
silence, et si elle trouvait utile de répondre,
c'était par des arguments et non par des in
sinuations, ni par des attaques personnelles.
Elle n'a pas eu se plaindre d'avoir adopté
celle ligne de conduite. L'estime de la grande
majorité des habitants de la ville lui est acquise
et ce journal qui son apparition a soulevé les
colères et les clameurs de certain parti, a con
quis le droit de cité parmi nous.
Le Progrès a été souvent accusé de ne s'oc
cuper que de questions politiques et de négliger
la défense de nos intérêts matériels.Nous croyons
celle accusation injuste. Toutes les questions
qui ont été traitées par les chambres et dans
lesquelles l'intérêt de notre ville pouvait être
froissé, ont été commentées par nous. Nous
avons été le fidèle écho de l'opinion des inté
ressés dans la question du sel, dans l'arrêté sur
le transit des bestiaux, etc. Actuellement ne
sommes-nous pas des premiers qui ont demandé
un chemin de fer pour la ville d Ypres et son
arrondissement? N'avons-nous pas démontré
que c'était un déni dejusliceque de nous laisser
séparés du rail-way de l'état, tandis que la ville
d'Ypres et son arrondissement ont amplement
contribué de leurs deniers dans^ces construc
tions gigantesques
Mais venons aux vœux que nous espérons
voir se réaliser en 11145. Avant tout, pour le
bonheur de la Belgique, nous désirons que
l'année 11145 voie la fin de ce ministère mixte,
mensonge incarné et qui n'a de mixte que les
coups fourrés que M-. Nothomb, le chef du ca
binet porte ses maîtres, aussi bien qu'à ses
adversaires. Jamais ministère plus fatal n'a pesé
,sur la Belgique/Dirigeant les affaires l'aide
des plus misérables expédients, le cabinet se
fait surtout remarquer par une absence tolale
defranchi.se dans les affaires intérieures, comme
dans les relations extérieures. Nous faisons des
vœux pour que lés ministres soient définitive
ment renvoyés et puisque les catholiques ont la
majorité dans les chambres, eh bien, qu'ils aient
au moins le courage de 8ai»ïr les rênes du-pou
voir et de nous gouverner leur risque et péril.
Nous souhaitons que l'année 1845 soit plus
favorable l'agriculture, que celle qui est sur
le point de finir. Le ministère loin de la favoriser
a, par ses promesses la Hollandeporté un
coup funeste celle précieuse branche des
richesses du pays.
La loi des droits différentiels qui devait élever
au plus haut dégré de splendeur, la puissance
commerciale de la Belgique, vient de subir une
rude atteinte par le traité du premier Septembre.
Si le cabinet belge avait été le très-humble ser
viteur du roi de Prusse, il lui eut été impossible
de faire plus de concessions, quant la naviga
tion, sans reconnaître la Belgique comme vas
sale du Zollverein.
Nous espérons pour l'industrie belge, l'ouver
ture de nouveaux débouchés et la facilité des
communications, afin qu'elle puisse produire et
livrer au même prix que ses rivales.
Voilà les souhaits que nous exprimons. Pour
la ville d'Ypres en particulier, nous n'avons
qu'un vœu émettre, mais il comprend tous
les autres. Pour la prospérité de l'ancienne
capitale de !a Wesl-Flandre. nous souhaitons
que l'année 1845 ne s'écoule point, sans qu'on
ail commencé la voie ferrée qui nous réliera au
railvvay national.
Nous espérons bien que ce vœu sera accompli
et le Progrèssoutenu par l'estime et la bien
veillance de ses concitoyens, continuera sa car
rière, pour poursuivre sans cesse l'accomplisse
ment de ce souhait, qui doit être celui de tout
homme dévoué au bien-être de sa ville natale.
Nos lecteurs apprendront avec plaisir que
les difficultés financières qui s'opposaient la
restauration de l'église S1 Martin, sont applanies.
Par arrêté royal, en date du 3 de ce mois, un
premier subside de 4,000 francs est accordé
sur le budget de l'état pour 1845.
MM. les marchands-fabricants et manufac
turiers, appelés par la loi prendre part
l'élection des membres du conseil des prud'
hommes, se sont réunis, le 27 Décembre dr,
l'effet de procéder au renouvellement partiel
déterminé par la loi du II Juin 1809.
MM. Navez-Joye et Duhayon-Brunfaut ont
été nommés membres effectifs et MM. Léon
de Coene et Louis Lapierre, membres suppléants.
Le sénat a adopté le 27, la majorité de 20
voix contre 15, le projet de loi relatif aux
céréales.
Par décision de M. le ministre de la guerre,
le lieutenant-colonel Baikemdu 1er régiment
de chasseurs pied, est placé au 9e régiment de
ligne. Cet officier supérieur sera vivement re
gretténon pas seulement par ses supérieurs
dont il avait su se concilier l'estime, et ses
&!3(a<2a,.
ÉPILOGUE.
Suite et fin»)
IV.
LE BALCON DE FER.
Celle heure lui fut elFeclivemcnl accordée.
Mais ou ne lui permit point de la passer, comme il en exprimait
le désir, près du cadavre de sa sœur. Deux barons lui ordonnèrent
de les suivre. Elle obéit.
On lui lit traverser de vastes et sonores galeries, des escaliers
obscurs, de longs corridors. Ni elle ni ses guides ne .prononcèrent un
seul mot pendant ce trajet; seulement, quand ils furent arrivés la
salle désignée par les juges, l'un des barous lui dit, en lui désiguant
un prie-Dieu
C'est là.
Cependant, avant de réciter ses prières, Jeanne se demanda tout
bas où elle était et parut évoquer ses souvenirs. La chambre où l'on
valait de la conduire ne lui était pas inconnue, ces muraiWes nues et
délabrées portaient des caractères sans doute invisibles pour tous, mais
qui flamboyaient ses yeux comme autrefois brillaient aux yeux du
dernier roi de Babylone trois mots inconnus tracés avec le feu du
ciel. Les colonnes vacillaient sur leurs bases, la voûte menaçait
ruine, des gémissements plaintifs s'échappaient du fond des lambris;
elle crut la fois sentir la terre trembler sous elle, un écho lamen
table déchirer son oreille en allant tomber sur son cœur. Tout cela
pourtant n'était encore qu'une scène inintelligible, qu'un tableau
confus; mais tout-à-coup son regard rencontrera le baicou de fer.
Alors, un éblouissement rapide passa sur son front, ses genoux
plièrent et elle tomba, pâle et brisée, sur le prie-Dieu.
L'exactitude est le devoir des bourreaux. Quaud l'heure de
grâce fut passée, ses deux gardiens la firent lever et la menèrent sur
le balcon. Alors, la faiblesse réelle de la femme l'emporta sur la
fermeté factice de la reiue. Elle leur cria
Pitié!
Ces hommes n'avaient sans doute ni oreilles ni cœur. Ils souri
rent comme doivent faire les damnés, et, soulevant la reine de leurs
bras vigoureux, la lancèrent, malgré ses e fi or ts désespérés, du haut
du baicou de fer sur le sol,
Jeanne ne mourut point sur le coup; son châtiment devait durer
quelques miuutes encore. Ses soupirs allaient cepcudaiit s'éteindre.et
ses yeux se fermer, quaud elle s aperçut, eu soulevant péniblement
sa tête ensanglantée, un moine dominicain debout tout près d'elle,,
immobile, les bras croisés, le front caché sous son capuce et si calme,
si insensible qu'on eut dit, voir tant d'indifférence et de dureté,,
que c'était 1 ange du mal observant avec une joie muette une scène
de douleur et de destruction.
Jeanne était mourante. Elle retrouva une lueur de vie pour se
révolter contre ce spectateur barbare de ses derniers tourments.
Qui es-lu donc lui dit-elle, toi qui semblés te plaire au spec
tacle de mes souffrances
Qui je suis? je suis un homme de Dieu qui aimait la retraite
et qu'uu devoir impérieux a jeté dans le tourbillon du monde, un
homme qui voulait mourir dans le silence du cloître, et que l'ac
complissement d'un graud acte de justice a arraché au service de
Dieu.
Qui es tu? répéta la reiue dont l'œil élincela comme nn éclaii.
Jeanne, ne reconnais-tu pas ce costume dit le moine.
Miséricorde!
N'as-tu pas vu quelquefois surgir dans tes rêves un juge inexo
rable qui te demandait compté du saug versé?
Qui es-tu dit encore une fois la reine.
Je suis frère Angol, répondit le domiuicain d'une voix ton
nante, en relevant son capuce.
Ali! fil Jeanne eu se roulant dans les convulsions de l'agonie*
Elle avait reconnu le cardinal Ai me ne.
J'avais juré de venger André de Hongrie, reprit le moine avec
calme. J ai tcuu mon serment.
MOLE-GENTILHOMME.
[La Patrie.)