JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
4e ANNÉE. - N° 387.
JEUDI, 16 JANVIER 1845.
Feuilleton.
VILLE D'A PRES. conseil communal.
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daction doit être adressé, franco,
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YPRES, le 15 Janvier.
L'époque de corruption politique que la Bel
gique est en train de traverser, est le plus acca
blant témoignage qu'on puisse invoquer contre
l'absurdité de noire loi électorale, et la preuve
flagrante de la nécessité d'une réforme.
Quel a été le produit de ce système d'élection
où la matière brute et le nombre devaient né
cessairement écraser une minorité puissante par
les capacités, les talents et les lumières? Toutes
nos élections soi-disant populaires peuvent se
résumer en un conciliabule tenu chez l'évéque
de la province, où le candidat fait le serment
d'être l'homme-lige de l'épiscopat. Le clergé
de l'endroit distribue des billets, force les élec
teurs qui dépendent de lui, voter dans le bon
sens, et la chambre des représentants compte
dans son sein un vassal de la sacristie de plus.
Nous ne traçons là l'histoire que des comices
de la plupart des arrondissements qui ne comp
tent pas de grandes villes dans leurs limites.
Il est inutile de dire que pour Anvers, Liège,
Verviers, Bruxelles, Tournai, etc., la lutte est
devenue impossible au parti clérical, et que là
on ne s'en mêlera plus
Mais si une élection s'accomplit de celte ma
nière dans une foule de petites localités, pou
vons-nous dire que nous jouissions d'une repré
sentation nationale. Oui, nous en avons une,
mais qui n'est que l'ombre de ce qu'elle devrait
être; il est facile de le prouver.
Cinquante députés au moins sont le produit
du cens campagnard, et ne sont élus que sous
l'influence despotique des évêques. Peut-on de
bonne foi soutenir que ces députés soient placés
vis-à-vis du clergé dans les conditions d'indé
pendance, qui doiventêlre la première vertu d'un
mandataire de ses concitoyens. A de rares ex
ceptions près, ils ne sont la chambre que les
esclaves du chef du clergé, qui ne manquerait
pas la moindre velléité de révolte, de les me
nacer de la perte de leur mandat, menace qu'il
lui serait facile d'accomplir.
a a a'Jaaaa
Suite
iii.
Le soleil commençait peine percer le manteau de brouillard
qui enveloppait la ville d'Edimbourg, lorsque James Stewart, dans
un costume dont la richesse faisait ressortir avee avantage l'élégance
de sa taille et les grâces de sa physionomie, s'arrêta en face d'une
taverne portant pour enseigne 1 image populaire de Robert Bruce.
Il la parcourut de l'œil avec un sourire un peu dédaigneux; puis
donnant un coup de pied daus la porte qui s'ouvrit toute grande, il
entra sans plus de cérémonie.
Holà! s écria de l'intérieur une voix qui ne pouvait sortir que
d'une poitrine d Hercule, quel est le gueux de papiste qui ose péné
trer de la sorte daus la respectable taverne du grand Robert Bruce?
Est-oe que maître Banck aurait déjà oublié son ancienne prati
que? répoudit James. Ah! reprit maître Banck en changeant de
ton arec une rapidité qui faisait peu d'honneur la fermeté de ses
opinions, quel honneur pour la taverne du grand Robert Bruce!
quel...
On pourrait nous répondre que les députés
libéraux aussi dépendent d'un parti qu'ils doivent
soutenir. Il est facile de démontrer que l'analo
gie entre la position des deux genres de députés
est fausse. Certes, un représentant libéral défend
son opinion, mais il ne combat pas pour faire
prédominer des principes ouvertement con
traires la Constitution belge et nos libertés.
C'est parce qu'il croit que les principes qu'il
professe doivent rendre la Belgique plus heu
reuse que ceux prêchés sous l'empire de l'en
cyclique, par nos adversaires.
A moins d'une trahison éclatante, il est cer
tain de jouir pendant longtemps de la confiance
de ses concitoyens. S il ne renie pas les principes
de l'équité publique, la majorité qui l'aura élu
ne le repoussera pas.
En est-il de même dans le parti soi-disant
catholique? Un député de celte couleur que
représenle-t-il la chambre? Est-ce la majorité
éclairéede la nation qui tv.ponsse la domination
du clergé, ou bien cedocile troupeau assez bien
dompté par le pasteur du lieu, pour remettre
docilement un billet qui fera sortir de l'urne le
nom d'un mandataire dont le rôle la repré
sentation nationale est déjà convenu, et qui ne
pourra s'en départir sous peine de ne plus être
renommé? Tremblant devant le dernier des
prêtres, défenseur quand même des préten
tions les plus exorbitantes, ayant pour mission
de sacrifier les véritables intérêts du pays aux
intérêts de la sacristie. Telle est l'indépen
dance du dépulé clérical mais ce prix, lout
lui est permis: népotisme, intrigues, bassesses,
rien ne peut lui être imputé mal, pourvu
que jamais sa cupidité ne fasse de tort aux in
térêts de ses patrons. Quant ceux du pays,
dans les hautes régions du pouvoir, ils équi
valent zéro.
Si lelle est la valeur morale d'une partie des
membres de la représentation nationale, doit-on
être surpris que partout on ne rencontre que
capitulations de consciences, places acceptées
par les mandataires de la nation ou faveurs
pour leurs parents captées au prix de tel vote,
L'éloquence de maître Hatick était bout, il ne Irouva rien ajou
ter la phrase sacramentelle et invariable par laquelle il accueillait
les personnages de distinctiou qui venaient se mêler parfois aux com
mensaux habituels de sa taverne.
James se mit rire de son embarras. Tu veux dire quel profit!
n'est-ce pas?.... Eli bien! soit, appui te-nous quelque* bouteilles de
vin de France; je ne veux pas démentir une supposition si houorable
pour mon caractère.
La large face de maître Banck respira subitement la double satis
faction du tavernier qui trouve le débit de sa matchandise et de l'o
rateur qui se voit tire d un pas Difficile.
Dis-moi, ajouta James eu montrant une petite porte basse qui
fermait au loquet, avons-nous beaucoup de joueurs ce matin? Ils
sont là uoe douzaine de démous qui joueraient leur âinc avec Luci
fer en personne. Lucifer est trop habile pour jouer ce qui lui
appartient déjà. Quel est le plus enragé de ces joueurs? Ah!
Celui-là, vous le connaissez, c est lord Harry. Toujours? Tou
jours lui; toute sa fortune y a passé il a perdu cette nuit jusqu'à
son dernier sbelliug. Il île lui reste plus que sa maîtresse, il hésite
la jouer; mais il ûnira par céder, si ce n'est déjà fait. C'est bien.
£l en bomme qui connaissait les êtres, James se dirigea vers la
ou de tel service. Jusqu'ici un seul irflérêt n'a
pas été trahi, un seul parti n'a pas été joué,
c'est celui du clergé. Tout ce qu'il a prétendu,
lui a été octroyé. Une mauvaise loi électorale lui
vaut cet empire en Belgique, et il l'exerce de
manière se faire détester comme le père et le
soutien d'un ministère incapable et corrompu,
qui épuise notre pays qui renferme en son sein
tous les germes de prospérité.
Hier a été célébré avec les honneurs accoutu
més le service funèbre de Jean Sanctorum, ancien
frère d'armes de l'empire. Membre de la Société
de Guillaume Tell, ses confrères lui ont rendu
les derniers devoirs. Une foule de monde ac
compagnait la dépouille mortelle de cet ancien
débris des guerres de l'Empire, arrivé au champ
du repos éternel, un discours a été prononcé
par un ancien camarade C.-B. Gos, ancien
frère d'armes de l'empire, au nom de tous ses
compagnons.
Séance publnjue du Pendredi, 17 Janvier i845,
g heures du matin.
ORDRE DU JOUR
i° Communication de pièces.
20 Délibérer sur une demande de subside formée
par la commission administrative des hospices, pour
la construction d'un nouvel établissement pour
aliénés, d'après les indications de la commission
royale des monuments.
d* Emettre un avis sur la demande faite parle
bureau de bienfaisance de cette ville, afin d'être au
torisé louer pour uri terme de 18 ans, au prix de
deux cents fr. par an, N4 ares, 80 centiares de terre
et fond bâti du cabaret nommé le petit Lille.
4* Approuver le procès-verbal de l'adjudication
du pain, pour la salle syphilitique de cette ville.
S" Fixer le taux du rachat des cédules de ladetle
différée de la ville d'Ypres, pour l'année 1845.
On nous écrit de NVytschaete, près d'Ypres,
7 janvier
Hier a eu lieu, dans notre commune, l'au
berge hel Hoekskelocal de la société d'harmo-
petite porte qu il venait de désigner au tavernier, souleva le loquet
qui la fermait et entra dans une grande pièce mal éclairée et encore
plus mal meublée... Là se trouvaient déjà réunis une douzaine de
personnages tellement absorbés par le jeu, que nul ne s'aperçut de
sa présence il s'en alla droit un jeune homme qui se tenait im
mobile dans un coin, le regard fixe et fiévreux, la paupière rougie,
les traits pâles et altérés.
Harry, dit-il voix basse en lui frappant doucement sur l'é
paule, pour le tirer de la préoccupation profonde où il paraissait
plongé.
Harry leva sur lui le regard morne et impassible du joueur habi
tué passer vingt fois en une heure des joies du ciel aux tortures de
l'enfer. Bonjour, James, dit-il.
Et il se replongea dans le tourbillon de pensées dévorantes où se
consumait sot) âme comme au centre d'une fournaise.
Suis-moi, lui dit James, j'ai te parler.
liait y se leva et le suivit en silence. James jeta une pièce d'or
maître Bauck et sortit de la taverne.
Harry, dit-il celui-ci lorsqu'il se trouva dehors, maintenant que
te voila complètement ruiné,car ta figure et ton costume me le disent
assez olaircmcut, que vas-tu faire? Je l'ignore. -« Et si tu retrou-