5e ANNÉE. - N° 441. INTÉRIEUR. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. JEUDI, 24 JUILLET 1845. Feuilleton «lu Progrès On s'abonne Ypres, Marché au Beurre, et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre. Pour Ypresfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro 0-25 lefro Tont ce qui concerne la rédac tion doit être adressé, franco, l'éditeur du journal, A Ypres. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine. PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. VIRES ACQUIRIT EDNDO. YPRES, le 23 Juillet. CHEMIN DE FER. Tandis que les journaux de Bruges entre tiennent presque chaque jour leurs lecteurs, de l'arrivée des ingénieurs anglais attachés au che min de fer de notre Flandre, des inspections faites par eux, des sérénades qu'on leur donne, la ville d'Ypres en est réduite des conjectures; les optimistes espèrent, les pessimistes jurent qu'on se moque de nous et ceux-ci commencent faire de nombreux prosélytes. Au fait, jus qu'à ce jour, la compagnie Richards n'est pour nous qu'un êlre fictif, un mythe, et voilà tout; aucun ingénieur n'a élé vu Ypres, aucun membre de la société concessionnaire n'a été aperçu. Cet abandon dans lequel on nous laissene donne que trop lieu de croire que la ville d'Ypres sera, si on n y prend garde, victime de sa con fiante crédulité. La ligne de Bruges Courlrai sera étudiée, exécutée, exploitée même peut- être, avant qu'on ne songe notre ligne et si des événementssurviennent, adieu beaux rêves; si l'on peut trouver un prétexte, on ne man quera pas d'ajourner l'exécution de la ligne d'Ypres Courlrai. Ce qui nous fait craindre ce résultat, c'est que notre rail-way se trouve, pour commencer les travaux dans des circonstances infiniment plus favorables que toutes les autres parties du chemin de fer de la Flandre. Un ingénieur de l'état a fait, non pas un avant-projet, dressé vue de clocher, mais un projet définitif. Tracé, devis, cahier des charges, tout est arrêté avec un soin minutieux. Pour les autres lignes, au contraire, toutes les études, tous les travaux préparatoires sont faire. De plus, si les renseignements que nous pos sédons sont exacts, et nous avons lieu de les croire tels, la société anglaise aurait conclu depuis longtemps déjàune convention avec une compagnie d'entrepreneurs belges, qui se raient chargés de l'exécution entière de la ligne de Courlrai Ypres; on ajoute même que ces entrepreneurs sont en mesure de commencer les travaux. Tout ceci ne prouve-t-il pas l'évidence qu'il y a mauvais vouloir et que peut-être quel- qu'arrière pensée gît encore d~.ns l'esprit de ceux qui longtemps ont cherché nous nuire. Le gouvernement ne devrait pas perdre de vue que la ville d'Ypres isoléel'extrémité du royaume, privée longtemps de sa part légi time dans la distribution des bienfaits prodigués tant d'autres localités, profitera plus qu'au cune autre du nouvel ordre de choses, que nos besoins sont plus actuels, plus criants, que ceux de Bruges dotée déjà d une double voie ferrée et d'un canal maritime. Du reste, nous ne réclamons aucune faveur, nous demandons que l'exécution de notre ligne ait lieu en même temps que celle de Bruges, nous souhaitons aux autres ce que nous dési rons pour nous-mêmes et notre demande est daulanl plus juste, d'autant plus rationnelle, que l'intérêt. de la province et du pays exige que le système général des voies ferrées soit complètement exécuté le plutôt possible. Nous engageons donc toutes les personnes, qui, par leur position, sont même d'amener le résultat que nous désirons, d unir leurs ef forts pour triompher des obstacles qu'on paraît disposé susciter. Nous apprenons avec plaisir que la musique fanfare du corps des sapeurs-pompiers a obtenu l'autorisation de prendre part au festival qui aura lieu Dixmude, le 2-i de ce mois, 1 oc casion de l'inauguration des bustes de Montanus et Van Poucke, qui seront placés dans h jardin nouvellement créé en celle ville. Nous espérons que celte musique qui a su déjà mériter les plus vives sympathies Ypres, saura se faire applaudir, même par les sociétés concurrentes Dixmude et que Ion ne se dou tera pas, qu'elle est créée depuis quelques mois peine. Le 21 de ce mois, jour de l'inauguration du Roi. au moment de la parade, M. le comman dant de la place d'Ypres a fait connaître M. Coussemenl, lieutenant-colonel, commandant le 5e régiment de ligne, que S. M. venait de le promouvoir au grade de colonel. La reconnais sance a eu lieu immédiatement devant le front de la troupe. M. Coussement doit avoir été d'autant plus heureux que cette promotion était pour lui et pour tous, une véritable sur prise. La musique du 5e régiment et la société des Chœurs ont donné des sérénades au nouveau colonel, dont la nomination a causé le plus vif plaisir tous les habitants de notre ville. C'est avec la plus vive satisfaction que nous apprenons que M. le baron Van Rode, lieute nant colonelau 2e régiment de chasseurs, àTour- nay, et qui est resté longtemps en garnison Ypres. comme major au Tle et au 5e régiments de ligne, vient dètre appelé Bruxelles, pour prendre le commandement en second du régi ment d élite, en qualité de lieutenant-colonel. Tous ceux qui connaissent M. le baron Van Rode, pourront témoigner que la faveur qu'on lui fait, ne sera point enviée, car M. Van Rode, comme militaire est très-estimé de ses com pagnons d'armes et sa franchise et sa loyauté lui ont toujours concilié l'affection de ses chefs et de ses subordonnés. La société des Éclaireurs de Noé, ont en voyé Cologne des pigeons qui ont été lâchés Dimanche dernier, huit heures du matin. A quatre heures et quelques minute s, le pre mier pigeon était rentré. Il appartient M. Burgho, 1 hôte de l'Estaminet d'Anvers, qui a gagué le premier prix. Le second a été remporté par M. Hennion, directeur des messageries Van Geud et Ce, et le troisième par M. J. Vanden Peereboom. Des pièces d'argenterie ont été dis tribuées aux heureux vainqueurs. Le 19 du courant, un individu d'Ooslroo- sebeke en se rendant chez lui, s'étant pris de querelle avec trois autres personnes, a élé tel lement maltraité par ces derniers que l'on craiut que ses blessures ne soient mortelles. Le retour du Roi, si vivement désiré, doit, assure-t-on, faire cesser très-proinptement le staluquo ministériel. L'opinion qui semble s'ac créditer le plus, est que tout se bornera au rem placement de M. Nulhomb et celui de M. le comte Goblet, qui paraît vouloir tout prix se LU LIVRg Q'IHIgUIRIgS. NOUVELLE. première partie. (Suite.) III. Te château de Pessac, situé une lieue de Bordeaux, au milieu d'un pays pittoresque et fertile, entouré de tout ce qui aurait du lui donner un aspect riant et animé, reposait silencieusement au milieu des habitations villageoises, et ressemblait a un immense cercueil de pierre. Nul bruit qui aurait pu rappeler le séjour des hommes ne s échappait de ses murs solitaires. Monsieur de Pessac s'avançait, accompagné du docteur et d'Al bert, et tous trois, livrés des réflexions étranges, marchaient lentement sans prononcer une parole. Aujburdhui le chemin de fer grince sur celte même route, où jadis 1 on ne trouvait pas seulement un coche public. En approchant de cette demeure, où s était écoulée son enfance insouciante, le comte sentit son cœur se seirer et battre bien triste- ment, car il se rappela que c était là aussi, qu aptes «voir sacrifié son pays son repos et ses affections, il avait retrouvé sa femme déshonorée^ Mais lorsqu'il pénétra dans ces cours débites, où l'heibe croissait de toutes parts, en regardant tous ces vitraux go thiques, ces balcons de pierre où nulle figure humaine 11 apparaissait ses yeux, étonnés de cette vaste solitude, il se persuada que le château était abandonné, mais il fut détrompé, tout-à-coup, en en tendant une voix faible et tremblante prononcer ces mots Que désirent ces messieurs? Les trois visiteurs se retournèrent instantanément et aperçurent un vieux domestique courbé par l'âge et piomenant sur eux son regard inquisiteur. Il fixait surtout le comte avec une attention sin gulière, celui-ci allait parier, mais le docteur auquel rien n'avait échappé se hâta de répondre au serviteur Allez dire madame la comtesse, qu'un étranger qui a ren contré son fils George en Espagne désire lui parler, et que c'est le docteur Fortin, de la lléole, qui I a conduit jusqu'ici. Le domestique revint un moment après Madame la comtesse désire savoir le nom de cet étranger- Ce fut encore le docteur qui tépondit Ce seigneur s'appelle Don Chrisloval de Vegaj je pense que ce nom n'est pas connu de madame la comtesse. Le serviteur revint envoie, mais cette fois c était pour introduire le comte dans l'appartement de sa iemuie. Le docteur et Albert s'arrêtèrent dans l'anti-chambre. Ils pou vaient, de cette pièce, entendre le comte lorsqu il élèverait la voix, et c était le sigual convenu auquel tous deux devaient paraître. La chambre dans laquelle M. de Pessac avait été introduit, était l'oratoire de la comtesse elle ue recevait plus ailleurs Cétait une vaste pièce sombre et froide et de l'aspect le plus sévère Un tapis épais amortissait le bruit des pas et des tenlmes brunes interceptaient les rayons du jour. Un Christ eu iv«ite dune dimension colossale se dressait m«jestueusèment sur un fonds de velours noir, et surmon tait un Pi u -Dieu en éhène d uu travail exquis C'est que la coin- tesseéiaitagenouillée lorsqu lalouide pcriierede b'ocartse souleva, 1- Don Christoyal de Vegaj dit le serviteur. Et la portière re tomba aussitôt, laissant le prisonnier de la Bastille face face avec la coupable qui lui eu avait ouvert les portes. La comtesse se leva, fit un pas vers le visiteur, et celubci recula frappé de stupeur. Ce mouvement n'échappa point la comtesse M'auriez-vous connue autrefois, don Christoval de Vega? de- manda-t-elle, eu entr ouvrant ses lèvres décolorées, comme si elle eut voulu sourire. •—Eu effet, madame, il y a de cela bien des années, Je m explique parfaitement votre surprise, s il en est ainsi, car l'on me disait belle alors, et aujourd bui, sans avoir atteint la vieil lesse, je porte déjà toutes les marques de la décrépitude. Mais comme vous le voyez, les joies mondaines me préoccupent fort peu, et depuis longtemps je ne songe plus aux choses de la terre. En pariant ainsi, la comtesse désigna du geste sa guimpe qui fesait ressortir un visage plombé et osseux, sa robe de hure et le rosaire suspendu sou cou amaigri. Fuis- elle couliuua, comme se parlant elle-même, et voix basse Voici bien louglemps que je vis ainsi, et pourtant Dieu ne veut pas encore me rapptlei lui. M. de Pessac saisit avec vivacité l'une des mains que sa femme élevait vers le ciel C'est doue en expiation de quelque grande faute que vous avez revêtu cet habit religieux, madame? dit-il d une voix sourde. De quel droit don Cluistoval de Vega nie fait-il une pareille question? demanda la couiiesse qui avait frémi involontairement en eulemiant Cette voix stridente. Ah! c eat que vous ne songiez nullement devenir dévote, ma dame, lorsque je vous vis Versailles, si jeune, si belle, si brillante

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