5e ANNÉE. - N° 443.
INTÉRIEUR.
JEUDI, 31 JUILLET 1845.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
YILLE D'YPRES. conseil communal.
On s'abonne Ypres, Marché
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cepteurs des postes du royaume.
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tion doit être adressé, franco
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che et le Jeudi de chaque semaine,
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VIRES ACQUIRIT EUNDO.
TPRES, le 30rJuillet.
Déjà plusieurs fois il a été question de replâ
trer le ministère, avec I aide de quelques repré
sentants soi-disant mixtes Nous croyons assez
utile de reproduire ce qu'écrit au Journal de
Liège, concernant cescandidaluresministérielles,
son correspondant ordinaire
Ma lettre était peine partie la semaine
dernière que des bruits assez consistants sem
blaient faire prévoir quelque solution ministé
rielle; vousavez reproduit la combinaison d'après
les journaux de la capitale, mais je ne vous en
ai point parlé, car je savais que ni M. de la
Coste, ni M. de Chimay n'entreraient aux af
faires étrangères, et que, par conséquent, la com
binaison resterait incomplète. Ce n'était pas le
tout de placer M. d'Hoffschmidt au département
de M. Dechamps et celui-ci l'intérieur; il fal
lait encore pourvoir au portefeuille des affaires
étrangères, que M. Goblel laisse définitivement
tomber Or, il n'était pas très-raisonnable de
penser que la Couronne tiendrait si peu compte
de la situation et de l'opinion publiqueet
qu'elle donnerait en quelque sorte la main
former un ministère de réaction. C'est ce qui
m'a empêché de vous parler de ce bruit, je ne
pouvais croire qu'une semblable reconstitution
de cabinet fut possible, et j'ai voulu attendre.
Bien m'en a pris. Quelques jours oui fait avorter
cette penséequi. vous le croiriez peinea
été appelée par les intéressés une pensée de con
ciliation.
Cela ne doit guère vous étonner, du reste
les mots, depuis 1841 ont singulièrement
changé de signification en Belgique. Jusqu'ici
la langue française a fait son chemin dans le
mondegrâce sa simplicitéqui fait que le
plus petit comme le plus lettré la comprend
dans tous les genres qu'elle embrasse et qu'elle
traite. Cette situation n'existe plus pour elle
grâce M. Nolhomb et ses amis.
Un ministère esclave du parti clérical, instru
ment souvent servile de ses ordres, s'appelle,
Feuilletou du Progrès
dans le nouveau dictionnaireun ministère
mixte.
Un cabinet qui allume toutes les passions
au point de faire naître dans le pays une sorte
d universalité de dégoût et de mépris pour ce
qui existe s'appelle un cabinet de conciliation.
Une division radicale, complète, a pris le
nom de fusion.
M. Mercier, qui s'est sauvé la nuitdu milieu
de ses amis pour se livrer leurs adversaires,
est un libéral qui n'a pas changé de principes,
et qui n'a jamais manqué l'honneur poli
tique.
Un élu, comme M. d'Anethan, de l'univer
sité de Louvain est un libéral, et Dieu me par
donne! le facétieux M. de Mérode se charge aussi
la conscienc de ce litre. Seulement, pour ne
pas se mettre sur la même ligne que le commun,
il se dit plus libéral que nous.
Eh bien je pense que c est dans ce sens
peu-près que M. Dechamps voudra continuer
son petit essai, si la Couronne y prête la main.
11 se dira Je ne veux pas opprimer les li-
béraux; j ai la majorité, du moins je l'espère;
je m appuierai sur les deux côtés de la chambre
et je lâcherai de me tenir eu équilibre, etc.
Eu un mot ce sera le même langage qu'a
tenu M. Notbomb; ceseionlles mêmes allures;
mais M. Dechamps jouera vis à-vis des siens le
rôle que M.VI. Nothomb et Mercier ont joué
vis-à-vis des libéraux il leur dira je ferai votre
affaire si vous ne me coutrariez pas c'est-à-
dire il dira b anc aux blancs et bleu aux bleus,
c'est un métier de jésuite qui ne reste pas long
temps un mystère et qui dégoûte droite
comme gauche cependant 011 ne s'arrête p .s
si peu, et M Dechamps, qui n'a pas délaissé
son parti ignoblement, comme M Mercier,
mais qui s'est trahi lui-même, paraît avoir ou
blié tout son passé Or, selon moi, il est par
faitement permis de supposer que tout homme
qui s'est rénié se réniera encore, et personne,
dans le parti catholique, ne peut avoir con
fiance aujourdhui ni dans M. Dechamps, ni
dans M Malou. Il est des hommes qui ont des
besoins d'ambition dévorant la honte, comme
l'autruche dévore le fer on dirait qu'ils ou-
blienlque l'une nesedigère pas plus quel'aulre.
Conclusion Le ministère n est pas reformé,
et jusqu'ici 011 ne parle d'aucune nouvelle com
binaison. Nos amis politiques sont bien décidés
ne point dévier de la ligne honorable et droite
qu'ils se sont tracée, et le récent et remarqua
ble article de M. Devaux, intitulé: La Retraite
de 31. Nothomb. vous donne leur pensée et le
rôle qu'ils accepteraients'ils étaient appelés
payer de leur personne.
Séance publique du Vendredi, 1" Août 1845,
ij heure* du matin.
ORDRE DU JOUR
i° Prendre communication de la comptabilité des
divers établissements subsidiés sur la caisse com
munale, pour l'exercice 1844*
2° Procéder au règlement des comptes de l'exer
cice 1S44.
S" Émettre un avis: i° Sur la demande du bureau
de bienfaisance de cette ville, tendante être auto
risé accepter le legs fait par M'ue la douairière
Walwein. i" Sur le procès-verbal d'une vente d'ar
bres tenue sur les propriétés de ladite administra
tion. 3° Sur le procès-verbal de location de quelques
biens ruraux appartenants au dit bureau de bienfai
sance. 4° Approuver le procès-ver bal de la vente des
herbages situés près des étangs de Dickebusch et
Zille beke.
La personne qui nous a écrit une 1 ittre con
cernant certains faits scandaleux qui se seraient
passés aux environs de Poperinghe, est priée
de se faire connaître la rédaction. II est bien
entendu qu'elle conservera néanmoins l'ano
nyme vis-à-vis du public.
Liste de* personne* domiciliée* dan* V arrondit te-'
mentqui sont appelées faire partie du jury pour
la j.m° série de la troisième session de 1845.
i° Boucquel de Beauval, propriétaire Messines.
20 Merglielynck, Ernest, propriétaire Ypres.
3° VandermterschPhilippe, propriétaire Mes
sines.
4° Vander Ghole, Edouard, brasseur Elverdinghe.
LU LIIVIEH ©'iHigtuœ
NOUVELLE.
première partie. (Suite.)
Y.
Comme vous l'avez prévusans doutele comte de Pessac refusa
d'une manière hautaine et positive son consentement au maiiage de
George avec Jeanne de Las Sierras.
Il refusa de recevoir Feruand, ainsi que le marquis d'Ambezqui
lui écrivit pour lui faire comprendre toute l'importance du parti
qu'il refusait pour son (ils.
George employa tour tour les prières, les larmes, l'emportement,
la (latteiie, il alla memeju.squà la menace, mais les lois qui nous ré
gissent aujourd hui étaient bien loin d'être les mêmes alors* et
George n avait nullement le droit de faire des sommations respec
tueuses. Le code permet maintenant un fils de dire son père
Tous ne voulez pas, eh bien, moi je veux!.. Tout est changé, et l'on
peut dire hardiment que des monstruosités out été lemplacées par
d'autres monstruosités. Pourquoi? La lumiè e a brillé du plus vif
éclat, la science a marché dans des régions incommensurables, les
arts ont fait des prodiges, mais le e«ar fcumain est resté le même!...
Cependant, un jour George s'oublia si loin en présence de mon
sieur de Pt-ssao que celui-ci, emporté par la plus vive indignation,
s'éoiia
/.Vous êtes un jeune homme indocile et irrespectueux, vous
oubliez trop qui je suis en ce lieu, je veux vous en faire ressouvenir.
Vous habiterez l une extrémité du château, moi j'habiterai l'autre;
je ne veux plus vous voir. Loisque vous vous sentirez disposé vous
soumettre, vous viendrez me le dire je ne veux plus entendre
prononcer le nom de Jeaune de Las Sierras.
Mais une raison, mon père, donnez-moi une raison! s'éteria
George, fou de douleur et de colêtc par la fortune comme par la
naissance, Jeaune m est supérieure; vous le savez bien!
A ces dernières paroles le comte tressaillit, un éclair brilla dans
ses yeux, mais il reprit tout-a-coup sa gravité, et dardant sur George
son regard sévère
Depuis votre arrivée ici, lui dit-il, vous avez mis ma patience
des épieuves beaucoup plus fortes que vous ne le supposez, j'en
suis fatigué, ne m'importunez plus.
Mais une raison, un uiotif!
Le comte frappa violemment le parquet de son pied:
1. insensé! il veut donc que je parle! murmura-t-il. Et sans
doute il s apprêtait révéler la vérité George, mais les sons d'une
voix rauque qui s'élevaient de la cour, le détournèrent instanta
nément de cette idée.
11 se pencha hors d'une fenêtre et aperçut la comtesse qui mar
chait d'un air égaré et jetait autour d'elle des regards effarés en pro
nonçant des mots presque inintelligibles parmi lesquels on démêlait
les noms du comte et de George.
Ce triste spectacle auquel il n'avait pu encore s'habituer, atten
drit M. de Pessac. Il revint vers George, le prit par le bras, et
l'ayant conduit devant la fenêtre qu'il venait de quitter
Si vous aviez dans le cœur quelque chose de ce sentiment que
tout fils doit éprouver pour sa mère, lui dit-il, vous auriez honte
d'agir ainsi dans une circonstance si affligeante et si grave. Devez-
vous d ailleurs vous montrer si surpris de mon refus? Lorsque votre
mère possédait sa raison, ne désapprouvait-elle vos projets comme je
les désapprouve aujourd'hui? Ne vous at-elle pas aussi refusé son con
sentement?
En effet, répondit George, mais elle ne motivait son opposition
qu'en blâmant ma conduite qui, je l'avoue, u était pas très-régulière
alors; aujourd'hui je suis persuadé qu'elle m'accorderait bien volon
tiers son consentement.
Vous vous trompez, reprit le comte d'une voix solennelle; vous
lie l'eussiez jamais obtenu, pas plus que vous ne l'obtiendrez de moi.
Le même motif nous guide, et ce motif vous devez 1 ignorer. Rap
pelez-vous bien ceci si jamais vous me mettez dans la nécessité de
vous le révéler, vous serez banni de ma présence et déshérité de tous
mes biens.
George, attéré par les dernières paroles du comte, comprit enfin
que des causes mystérieuses devaient eu effet motiver cette resistanco
inébranlable, peisévérante, qu'il avait rencontrée d'abord chez sa
mère, et quil retrouvait plus rigoureuse encore chez M. de Pessac.