5e AMÉE. - N° 457.
INTERIEUR.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
JEUDI, 18 SEPTEMBRE 1845.
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YPRES, le 17 Septembre.
Les circonstances actuelles sont un grave en
seignement pour le gouvernement. La perle
presque totale de la récolle des pommes de
terre doit faire sentir tout le prix qu'il faut atta
cher l'agriculture, et cependant c'est peut-être
la branche des richesses du pays qui est la plus
négligée par nos hommes d'affaires. Une seule
partie des productions agricoles de la Belgique
a manqué par une espèce de fléau destructeur
et toute l'économie financière s'en trouve bou
leversée. Non-seulement de dures souffrances
seront les conséquences de cette récolte mal
réussie, mais sans des moyens énergiques, il
serait peut-être impossible de conjurer la dé
tresse qui viendra assaillir nos classes indigentes.
Jusqu'ici, croyons-nous, les ministères qui se
sont succédé, n'out point fait en faveur de 1 agri
culture ce qu'il était possible de faire. Nous
sommes convaincus même que des améliora-
lions très-utiles eussent pu s'introduire eu Bel
gique sous les auspices d'un gouvernement plus
porté perfectionner 1 instruction agricole de
nos laboureurs. Car, qu'on ne se fasse pas illusion,
si autrefois la nation belge a été renommée
pour ses connaissances pratiques en agronomie,
nous sommes dévancés actuellement par d'au
tres peuples et surtout par les Anglais. Il serait
indispensable dans notre pays de porter l'atten
tion sur l'éducation agricole des habitants de la
campagne et de ne plus mettre une confianee
obstinée dans celte routine, qui jusqu'ici forme
la base des connaissances agronomiques de nos
cultivateurs.
Combien de fois n'avons-nous pas entendu
dire, dans l'accès de fièvre industrielle dont s'est
trouvé saisi le pays en 1838 l'industrie est la
reine du monde. Il faut convenir qu'ilyavaitde
l'exagération dans la puissance qu'on accordait
l'industrie. Car enfin il est souvent arrivé que
l'une ou l'autre branche des productions indus
trielles se trouvaient en souffrance, sans amener
nécessairement une perturbation aussi critique
pour la nation, quecellequi vient uousassailîir.
Et cependant quelles clameurs ne jetait-on pas
pour faire sortir le ministère de l'inaction dans
laquelle on le disait plongé? Que de démarches
ne faisait-on pas pour lâcher de donner l'in
dustrie périclitante de nouvelles forces et de nou
veaux moyens de soutenir la concurrence qui
paraissait l'accabler?
Nous sommes bien éloignés de blâmer les efforts
faits pour maintenir dans un état prospère, toutes
les branches de la richesse nationale, mais nous
demandons qu'on en fasse autant pour l'agri
culture. Ce qui est arrivé actuellement aux pro
duits de la terre, doit faire sentir la nécessité
de porter toute l'attention du pouvoir sur les
améliorations introduire dans l'instruction
agricole, en même temps qu'il démontre toute
la valeur d'une culture la hauteur des amé
liorations introduites par les nouvelles décou
vertes.
Nous ne sommes pas d'opinion que pour favo
riser l'agriculture, il faille frapper les grains
étrangers de droits élevés. C'est par d'autres
moyens que nous voudrions voir le gouverne
ment montrer ses sympathies pour elle. Pour
quoi ne pas établir quelques écoles d'agricul
ture, quelques fermes-modèles? L'industrie
n'a-t-elle pas d'institutions spéciales qui lui ren
dent d'utiles services, et cet exemple ne serait-il
pas bon suivre pour celte science agronomi
que, qui chez nous n'exis|e pour ainsi dire pas
Nous apprenons avec plaisir que M. Hammel-
rath élève de l'université de Gand, vient de
passer son examen de candidat en philosophie
et lettres d'une manière satisfaisante.
et ni l'intervention, par voie de pétition, de la
plupart des habitants notables de la ville.
Par arrêté royal du 6 septembre, le sieur
Valcke-Hage, serrurier-poëlier, Ypres, est au
torisé établir un appareil gaz, pour l'éclai
rage de son établissement.
On écrit d'Osleude, que deux navires belges
se préparent en ce moment pour aller prendre
des pommes de terre en Ecosse.
Nous apprenons avec plaisir, dit le Messager
le départ du sieur J. Janssens-Neyt, de Gand,
et son fils, qui ont dû quitter le port d'Ostende
le 13 septembre, pour chercher des pommes de
terre dans 1 Ecosse, où l'on dit que le tubercule
est en abondance. Plaise Dieu que leur voyage
puisse avoir un bon résultat et que d'autres né
gociants suivent cet exemple bien louable!
Dans son dernier n°, le Journal des Baziles
fait preuve, que s'il n'a pas toujours du bon
sens, au moins il se trouve en possession d'une
notable dose d'effronterie et de mauvaise foi.
Ne sachant comment expliquer l'inaction de la
compagnie concessionnaire du chemin de fer
de la Flandre occidentale, il l'impute l'admi
nistration communale et nous félicite de pos
séder en M. Jules Malou. ledéputéqui nous do
tera de la voie ferrée dont nous attendons vai
nement la mise en œuvre. Nous serions assez
tentés de prendre cette accusation pour une
mauvaise plaisanterie, si nous ne connaissions
la profonde méchanceté du susdit journal et de
ses patrons. Heureusement il en sera pour ses
frais de calomnies, car personne, pensons-nous,
n'a oublié ni les démarches officielles de l'auto
rité .communale et de la chambre de commerce,
Émancipation a parlé de l'élection qui a
eu lieu le 9 de ce mois, àNivellesde manière
faire croire que de l'aveu de M. le comte Lehon
des démarches avaient été faites en sa faveur, et
qu'ainsi il avait éprouvé un échec. M. le comte
Lehon a adressé d'Ostende Y Émancipation
une lettre dans laquelle il déclare, ce qu'on
savait fort bien au surplus, qu'il ne s'est point
porté candidat pour cette élection et que les
suffrages dont on a bien voulu l'honorer n'ont
été qu'une manifestation spontanée de la part
d'un grand nombre d'électeurs.
La plupart des ministres, plusieurs ambassa
deurs et chargés d'affaires le ministre et l'in
tendant de la maison du roi, divers généraux et
beaucoup d'autres hauts fonctionnaires se sont
empressés de se faire inscrire sur la liste de
souscription pour le grand banquet offert aux
artistes étrangers. Quant aux artistes qui habi
tent les provinces tous se sont associés l'ini
tiative prise par leurs confrères de la capitale
et assisteront la fête.
Consultée par le gouvernement sur la ma
ladie des pommes de terre et sur les dangers
que peut occasionner l'usage des tubercules
malades, la commission médicale de la province
de Liège a répondu en substance 1° qu'on
peut, sans danger, donner en nourriture au
S'euillctou*
11 (Kl I Kl th*
[Suite.)
VIII.
un importun.
La blessure du baron de Goetzen était légère et fut bientôt
cicatrisée. Il n'hésita plus alors profiter de l'invitation qu'il avait
reçue du marquis de Gastano. Le vieux républicain, flatté de trouver
un homme d'un nom et d'une position distingués dans celui dont il
était devenu l'obligé, l'accueillit avec une politesse et un empresse
ment tout particulier. Vincenza ne pouvait dissimuler sa joie. Jamais
la jeune fille ne parut plus brillante et plus aimable aux yeux du
baron charmé... Il éprouvait un trouble et un bonheur indéfinis
sables se retrouver près d'elle. Placé entre Lucia et Vincenza dans
l'embrassure d'une fenêtre, il s'abandonnait toute 1 originalité de
son esprit, et les délicieuses pantomimes de la ravissante Vincenza
peignaient ses yeux l'amour profond qu'il avait dû lui inspirer...
Le baron sous la puissance de ce regard de femme, se laissait aller
former mille projets pour leur avenir, lorsque la porte du salon
s'ouvrit ayee bruit.,. Ce soir-là le marquis de Castaao donnait une
fête, et les invités se pressaient déjà dans le salon d'entrée.
Le baron de Goetzen regardait avec chagrin autour de lui ces
salles tout l'heure désertes, et qui s'emplissaient de moment en
moment j Luoia s'était éloignée, le baron exprimait Vincenza, dans
son langage passionné, combien il maudissait cette foule avide de
venir l'admirer, et qui allait se placer entre elle et lui, La jeune fille,
cependant, le persifflait d'un ton moitié rieur moitié sérieux sur son
manque de courage, lorsque le comte de Ruggieri parut. Vincenza
tressaillit, et par un mouvement involontaire s'éloigna du baron.
Quant celui-ci, sa figure pâle était devenue livide. Il paraissait
terrifié. Ce trouble néanmoins ne dura qu'un éclair, et le calme re
parut rapidement sur ses traits. Le comte, la vue de l'étranger,
avait fait un mouvement en arrière et était resté frappé d'étonné-
ment, comme s'il eût cru reconnaître son rival. Mais le marquis de
Gastano, venant lui-même sa rencontre, l'accabla de questions sur
la cause de son absence. Car le comte ne s'était point présenté chez
le marquis depuis plusieurs jours.
Il s'en est fallu de bien peu que je ne revinsse jamais, répondit
le comte... Mateo, du moins, l'avait décidé ainsi.
Que dites-vous? s'écrièrent la fois le marquis, et Lucia qui
venait de s'approcher.
Le comte de Ruggieri raconta qu'il avait été arrêté quelques jours
auparavant. Il cita l'heure, le lieu, et insista avec une intention
marquée sur les moindres circonstances.... Mais il refusa obstinément
de dire quelle cause il devait son salut.
Rendant qu'il parlait, un groupe s'était formé autour de lui. Le
nom seul de Mateo avait éteint la joie au fond de tous les cœurs.
Seul, le baron de Goetzen affectait de ne prendre aucun intérêt ce
récit, et s'était approché plusieurs fois de Vincenza pour 1 inviter
danser la première.
L'Italie du nord, cette époque, et particulièrement le territoire
vénitien, était infestée par une association de malfaiteurs qui, sous
prétexte de ressentiments politiques, commettaient toutes sortes de
brigandages. Leur adresse éviter les regards de la police, leur
nombre et 1 habileté de leur chef, désigné sous le nom de Mateo, en
faisaient un fléau vraiment redoutable. Leur attehtion ne tenter
que les expéditions importantes et ne s attaquer qu'aux personnes
et aux propriétés du nouveau gouvernement, couvrait leurs violences
d'un masque moins odieux. Cette'tactique avait d'ailleurs le double
avantage de leur offrir des cbîmces de fortune plus considérables,
tout en leur assurant presque 1 impunité par les sympathies avouées
et souvent même la protection efficace du peuple. On les traqua en