58 ANNÉE.-N° 477.
INTÉRIEUR.
DIMANCHE/30 NOVEMBRE 1845.
JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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TIRES ACQCIRIT EUNDO.
ÏPBES, Ie 29 Novembre.
Si nous devons en croire le Journal des
Flandresle projet conçu depuis quelque temps
de relier la capitale des Flandres Bruxelles par
un chemin de fer direct qui toucherait Alost,
paraît arrêté. Ce rail-way, ou plutôt ce dépla
cement de voie se ferait au frais de l'étal et serait
continué sur Louvain. Les ingénieurs, chargés
par le ministre des travaux publics, de faire
l'étude de cet embranchement, ont terminé leur
travail et ont adopté la direction de Gand par
Wetleren et Alost la station du Midi.
Nous avons peine croire l'exécution d'un
pareil projet. Que l'état ait eu tort de créer une
station principale Matines, nous sommes d'avis
qu'on doit en convenir. Mais il y a loin de là,
un déplacement de voie coûteux et qui n'ajou
tera que légèrement la rapidité des commu
nications. Cependant depuis longtemps, on en
parle et des personnes même d être bien in
formées ont assuré que l'autorisation d'opérer
un changement de direction au rail-way national
entre Gand et Bruxelles, sera demandée aux
Chambres pendant cette session.
Qu'une pareille demande se fasse, quand un
grand nombre de localités importantes du £ays
sont sans chemin de fer et que leurs communi
cations sont bien moins faciles depuis l'établis
sement de la voie ferréec'est d'une partialité
que nous ne voulons pas qualifier. IVous savons
bien qu'on nous répondra les chemins de fer
qui doivent relier les villes secondaires la grande
artère de l'étal, sont concédés des compagnies.
Eh! nous le savons! Mais par le fait qu ils sont
concédés, seront-ils construits? Qu'on nous per
mette d'en douter, et si le gouvernement a des
capitaux employer en constructions de che
mins de fer, au lieu de s'occuper de déplace
ments de voies, qui ne sont pas si urgents, qu'il
relie des villes qui jusqu'ici n'ont pu jouir des
bienfaits des voies rapides de communications.
Il y a une année, la ville d Ypres a demandé
pour avoir un embranchement de chemin de fer
sur Courtfai. Certes, le vœu d'aucune localité ne
méritait d'être plus favorablement accueilli et
nulle n'avait autant de droits qu'elle faire valoir
pour obtenir une voie ferrée sur Courtrai. On a
paru écouter favorablement ses demandes. La
fièvre des Compagnies est arrivée, on s'est em
pressé d'en profiler, pour se débarrasser des
prétentions de la ville d'Ypres. La ligne que
nous demandions avait quelques chances de
succès. Mais un homme, dont l'influence a
été fatale de tout temps l'arrondissement
d Ypres, voulant se parer d'un masque d impartia
lité l'égard de toutes les localités de la province,
a demandé l extension de la concession et notre
ligne qui promettait d'être productive, s'est trou
vée noyée dans un déluge de chemins de fer
qui nesillonneronl jamais la Flandre occidentale
que sur la carte.
Nous pourrions voir avec moins d'amertume
les travaux qu'on est en train d'exécuter entre
Gand et Bruxelles, si la ville d'Ypres n'avait
demandé dans le temps l'exécution de sa ligne
sur Courtrai aux frais de l'état. Alors on
avait répondu que cela était impossible, les
Chambres ne voulaient plus accorder des fonds.
Mais aussi aucun de nos députés ne voulaient
se mettre en avant et nul ministre ne se souciait
de nous rendre service. M. Jules Malousi dé
voué sa ville natale et ses intérêts, quand il
s'agit dêtre élu, oubliait pendant les sessions
les besoins de la cité et de l'arrondissement
d'Ypres. Cependant il "était te seut qui par son
influence sur son parti, aurait pu faire quelque
chose en notre faveur.
Mais de quoi vous plaignez-vous, nous dira-ton,
votre chemin de fer est concédé? Oui, il est con
cédé et nous en sommes bien marris, car toutes
ces concessions n'ont eu rien de réelon com
mence le comprendre et quand il en était questi
on,on ne trouvait pas de paroles assezdures, pour
blâmer ceux qui s'opposaient ce que les An
glais vinssent dépenser leurs capitaux en Bel
gique. Bonnes gens, qui croyaient la candeur
des Anglais! En fait d'opérations financières, ils
sont nos maîtres et ils viennent d'en fournir la
preuve en France; là aussi on croyait que cétait
par suite de l'entente cordiale entre les deux
gouvernements, que les capitalistes d'Albion
désiraient être intéressés pour moitié dans les
entreprises françaises. Mais ils viennent de
lancer sur le marché les actions dont ils étaient
détenteurs et comme la place de Paris n'était
pas en mesure de les absorber, une baisse énor
me a été la conséquence de ce beau concours.
Quand, dans ces derniers temps il s'agissait
de donner dans notre province, un commence
ment d'exécution la concession demandée
avec tant d'instance et au prix de grands sacri
fices peut-êtreon aurait pu croire que c'était
sur notre ligne, que les ingénieurs avaient jeté
les yeux comme étant la meilleure et la seulé
qui devait nécessairement absorber tous les
transports sans concurrence possible. Mais là
encore nous avons rencontré le Gouverneur
de la Flandre Occidentale, qui devait favoriser,
au dépens de nos intérêts, et Courtrai et Bruges
et la société concessionnaire décida que, pour
étrenner sa concessionil fallait faire preuve
d'audace et commencer par établir une con
currence avec l'état.
Il est croire que toute cette comédie finira
bientôt. A la bourse de Londres, lesactions des
chemins de fer concédés aux capitalistes anglais
en Belgique sont tombées en discréditet ne
s'élèvent plus au taux des sommes déjà versées.
Nous savons bien qu'on tâchera de galvaniser ces
entreprises mais pourra-t-on y réussir, de manière
placer les actions avec bénéfice La fin de cette
fièvre d'agiotage ne se fera pas attendre long
temps, et la ville d'Ypres restera sans voie ferrée.
Cependant il est de la plus haute importance
pour elle, qu'elle soit au plus vite reliéeau railway
de létat. Mais qu'importe la ville d'Ypres,
devons-nous nous occuper d'elle. Elle paie bien
ses contributions et le gouvernement déplacera
la ligne de Bruxelles Gand aux frais de l'état,
après qu'il a été répondu nos concitoyens que la
construction de l'embranchement sur Ypres ne
pouvait pas même être envisagée comme con
nexe l'établissement d'une ligne ferrée entre
Tournai et Jurbise.
C'est Dimanche prochain 7 décembre
qu'aura lieu le Concert vocal et instrumental
donné par M. Charles Otto, chef de la musique-
fanfare du corps des pompiers de notre ville.
Nous apprenons que M. Otto, qui depuis
longtemps déjà a su par son talent et sa com
plaisance se concilier l'estime et la sympathie de
tous, ne négligera rien pour donner celle fêle
musicale tout l'attrait possible.
Feuilleton.
LU um AMOTIiSM.
VI.
[Suite.)
Au moment où Mme Laloine montrait Lise, non comme un
objet précieux, mais au moins comme une singularité, une petite
pantoufle placée parmi tous ces objets d'art et de bronze Lise
fronça le sourcil et répondit d'une voix plus altérée encore
Oui, c'est très-joli.
Mme Laloine s'en aperçut et lui dit d'un ton alarmé
•- Est-ce que tu souffres?
Un peu, dit Lise en appuyant la main sur son cœur, mais ce
n'est rien.
Ah! s'écria Sterny.,. on étouffe ici...
Un verre d'eau sucrée et un peu de fleur d'oranger, s'il vous
plaît, dit Laloine avec inquiétude... Pardon, monsieur le
marquis.
Léonce ne sonna point, il ouvrit un? porte, entra lui-même dans
sa chambre, prit sur son commode un petit plateau où se trouvait ce
qu'on appelle un verre d'eau sucrée, et l'apporta lui même dans le salon
Oh! pardon... pardon, lui dit Mm» Laloine, cette enfant est un
j éritablc embarras»
Mme Laloine arrangea le verre d'eau et Lise le prit; sa main
tremblait. Elle le butj mais avant de le poser sur la table, elle re
garda deux lettres incrustées dans ce verre la façon des verres de
Bohême ces lettres se trouvaient sur toutes les pièces de cristal de
ce plateau. C étaient un A et un C. Il n'appartenait donc pas
Leonce. Il vit cette attention, et prenant le verre des mains de Lise,
il lui dit d un air triste et avec un accent dont l'émotion la fit
tressaillir.
C'est le chiffre de ma mère, mademoiselle.
Elle leva les yeux sur lui; il était attendri sans doute par ce sou
venir, car il posa le verre sur le plateau et se dit tout bas
C'est étrange!
Quoi donc? lui dit Mme Laloine.
Tenez, lui dit-il, pardonnez-moi cette émotion. Il y a quatre
ans, elant Nuremberg, je fis faire ce verre pour ma mère; j'arrivai
en France le cœur joyeux, car je savais que cette bien pauvre atten
tion lui ferait plaisir. Elle était morte la veille de mon arrivée,
frappée comme par la foudre. Je gardai oe verre comme un souvenir
d elle.... Personne ne s'en était servi jusqu ce jour. Je ne puis vous
dire, mais cela m'a rappelé un si triste moment.
Mme Laloine se taisait; mais Lise regardait Sterny avec un doux
saisissement de joie.
Madame votre mère est morte bien jeune, lui dit Mm Laloine.
Trop jeune pour moi, madame; elle était si noble, si bonne»
si belle. Je veux vous montrer son portrait; il est là dans ma ebam*
bre. Venez, madame, venez; vous aussi, mademoiselle, je vous eu
prie. Je veux que vous connaissiez ma mère.
Ils entrèrent dans cette chambre et regardèrent ce portrait. C'était
un chef-d'œuvre de peinturereprésentant un chef-d'œuvre de
beauté.
N'est-ce pas, dit Sterny, qu elle était belle?
Ah! oui, dit Lise avec un doux accent et les mains jointef
devant ce portrait, comme si elle eût été en face de la Vierge.
Voici le portrait de mon père, dit Sterny M. Laloine.
Le mari et la femme s'en approchèrent pour le regarder; mais
Lise resta devant celui de malade Sterny; ce portrait était animé
d'un sourire bienveillant, et un profond soupir s échappa de la poi
trine de Lise. Il lui sembla qu'une femme d'un si céleste visage avait
dû donner sou fils quelque chose de l'âme charmante et chaste qui
respirait dans ses traits. Ils quittèrent cette chambre et Lise revint
au salon le cœur soulagé et presque heureuse.
L'inspection recommença, et Lise retrouva la pantoufle la pan
toufle l'intriguait; mais il était difficile de s'enquérir de son origine.
Cependant l'occasion vint d'elle-même. Arrivé une certaine tablet
Sterny eut expliquer la valeur des objets qui s'y trouvaient cetta
dé avait été faite par Louii XVI, cette cassolette avait appartenu