La séance du congrès espagnol du 16
mars a été signalée par des débats orageux. On
sait que le président du congrès, cédant l'in
vitation qui lui avait été laite par un grand
nombre de députés, avait, d'accord avec le mi
nistère, convoqué le congrès pour ce jour-là
seulement il n'avait pas fait afficher préalable
ment dans la salle des conférences, comme le
prescrit le règlement, l'ordre du jour de la
séauce. C'est le défaut de celle simple formalité
qui a motivé une très-vive interpellation de la
part de M. Egana. Ce dernier a cru voir dans
celte convocation une atteinte la prérogative
royale. Le compte-rendu de cetleséance, donné
par les journaux de Madrid, est Irès-incomplet,
et ne fait pas connaître suffisamment 1 opinion
de M. Egana cet égard ni celle du général
Pezuela, qui est venu avec la dernière véhémence
jusqu'au milieu de la salle apostropher le pré
sident et le bureau du congrès. 11 paraît seule
ment évident que ces deux orateurs étaient
d avis d'empêcher toute réunion des membres
du congrès pendant la crise. Le Lumulle pendant
un certain temps a été si grand, et une telle
confusion régnait dans l'assemblée, que le pré
sident a été obligé d'ordonner aux huissiers
d'empêcher le général Pezuela de quitter la salle
avant d'avoir entendu la réponse qu il se croyait
en devoir de faire aux interpellations qui lui
avaient été adressées.
Après ces scènes déplorables, le congrès a
adopté, la majorité de 111 voix contre 44, la
proposition présentée par un membre de la
majoritétendant approuver la conduite du
président.
Les interpellations ont été adressées sur la
crise ministérielle au président du conseil, mar
quis de Miraflores, et sa réponse, ne jettent
aucun jour sur celle nouvelle crise. M. de
Miraflorès, se renfermant dans les limites les
plus étroites du langage officiel, s'est borné
déclarer que dans tous les conseils de cabinet,
sur toutes les questions politiques, il a eu l'ac
cord le plus parfait et le plus sincère entre tous
les membres du cabinet, et que la reine, ni
directement, ni indirectement, n'a pas fait con
naître au ministère qu'elle lui refusait sa con
fiance. Cependant c'est I issue de celle séance
que le ministère Miraflores a cessé d'exister, et
qu'il a été remplacé par le ministère Narvaez.
La contre-révolution qui a lieu en ce
moment Madrid paraît avoir produit une pro
fonde sensation dans le cabinet des Tuileries,
et depuis deux jours le conseil des ministres est
en permanence pour aviser aux moyens pren
dre afin de ramener l'Espagne un gouverne
ment régulier. On a les plus vives inquiétudes
sur l'effet que devra produire dans les provinces
espagnoles, le monstrueux personnel du mi
nistère Narvaez. Cet homme voulant régner par
l'épée, a choisi les hommes les plus décriés par
leurs antécédents, un Balboa accusé devant un
conseil de guerre de plus de quatre-vingt crimes
pour chacun desquels il a été jugé digne de la
peine de mort; un Burgos qui depuis 25 ans
est mêlé tous les tripotages, tous les scan-
Cinq minutes après, la femme de chambre rentra.
Madame la duchesse, cet homme vient sans doute d'apporter
M. le duc l'ordre de se rendre l'instant au oliâleau, car M. le duc
a aussitôt demandé ses chevaux....
En effet, peu de temps après, la voiture de M. de Bracoiano sortit
de l'hôtel.
Ce nouvel incident vint augmenter la perplexité de Jeanne et lui
donner pourtant uue lueur despoir. L'empereur désirait de voir le
duc sans doute il hésitait se pronoDoer mais, quelle serait l'issue
de cette entrevue
En réfléchissant sa position Jeanne s'avouait qu'elle n'avait
aucun reproche grave et fondé faire M. de Bracciano. 11 était
cupide, ambitieux; il comptait sur la fortune et la naissance de sa
femme pour servir ses projets mais ce nest aue poussé bout par
la demande du divorce qu'il avait révélé ses vues intéressées et
ces vues, les avouât-il 1 Empereur, ne sufliraient pas sans doute pour
autoriser une séparation. Alors ainsi que cela arrive toujours
Jeanne se demanda, mais trop tard, comment elle n'avait pas songé
la possibilité d'un refus de M. de Bracciano Elle avait trouvé
dans cette union si peu d intérêt elle se croyait même si peu liée
par la reconnaissance envers M. de Bracciano puisqu'après tout les
dales qui ont affligé l'Espagne qui en 1/134 a
été déclaré par les l'rocerès indigne de siéger
dans une chambre législalive; un Orlando, qui
est l'âme damnée de Narvaez et son complice
dans les fameuses opérations de boure. Il semble
en un mot que l'on ail réuni tous les hommes
qui par leurs antécédents peuvent attirer leplus
contre eux le mépris et l'animadversion publi
que.
Il y a déjà longtemps qu'on supposait au gé
néral Narvaez l'intention secrète de se faire
nommer dictateur, mais on n'aurait pas cru que
cet homme si décrié Paris pour les excès dont
il s'est rendu coupable envers sa femme, aurait
fait preuve d un despotisme aussi éhonté. On
prétend que son but actuel en dissolvant les
corlès et en suspendant la liberté de la presse
est de précipiter le mariage de la reine avec le
fils de Don Carlos, malgré la nation qui re
pousse celtealliance de toutes ses forces. Il faut
avouer que ce serait un singulier moyen de faire
bien venir le nouveau roi que de préparer ainsi
son arrivée pac une violation flagrante de la
constitution.
On assure qu'un auguste personnage a
écrit une lettre autographe la reine Régente
Marie Christine pour se plaindre amèrement de
la tournure qu'elle avait laissé prendre aux af
faires de son pays, l'accusant d'avoir mis pour
ainsi dire le peuple espagnol au défi de se sou
lever contre le gouvernement au risque de per
dre jamais la royauté en Espagne.
Le gouvernement a reçu des nouvelles
très-graves d'Espagne, par courrier extraordi
naire du 20, et par dépêche télégraphique du
21. Rien n'a transpiré.
Nous croyons savoir de bonne source que la
révolution est commencée Madrid, et que des
exécutions ont déjà eu lieu.
Na rvaeza écrit Paris qu'il élait décidé cette
fois jouer le tout pour le tout, jouer même
la couronne de sa souveraineet qu'il ne quit
terait pas Madrid quoi qu'il arrivât. EspPub.)
Dans la séance d'hier l'académie des
sciences, il a été nommé une commission spéciale
chargée de rechercher les moyens de parer
tous les accidents qui arrivent sur les chemins
de fer, par suite de l'imprudence des employés
des compagnies.
D après des renseignements que nous avons
tout lieu de croire exacts, l'ouverture du chemin
du Nord se trouvera quelque peu relardée par
des travaux de rehaussement et rectification de
la voie dans le département de Seine-et-Oise
sur une longueur assez importante, entre Beau-
mont et Puisieux. Il importait que la confiance
des actionnaires, que I on veut attirer, ne fut
pas plus longtemps captée par des avis toujours
démentis d'un très-prochain commencement
d exploitation D'un autre côté, en présence de
malheurs fréquents et récents sur les chemins
anciennement exploités, /administration ne sau
rait être trop sévère avant d'autoriser l'ouverture
d'aucun chemin nouveau.
On lit dans le journal V Espanol Nous avons
reçu, sous enveloppe, portant le timbre de la
biens qu'on lui rendait avaient appartenu sa famille elle
qu elle avait jugé des sentiments de son mari d'après les siens pro
pres.
Malgré la fermeté de son caractère, Jeanne osait peine soulever
cette terrible question: Si l'Empereur refuse le divorce!... Alors
elle tombait dans des épouvantes sans fin.... de quelque côté qu elle
jetât les yeux, elle ne voyait que des abîmes..., Herman, mourant,...
une vie entière passée avec un homme qu elle abhorrait... Puis,
par un douloureux contraste, des visions charmantes venaient tra
verser sou esprit; elle se voyait femme d Herman, vivant, heureuse,
ignorée, dans une douce obacuiité.... Alors elle maudissait, au mi
lieu de sanglots désespérants, l'impitoyable méchanceté de M. le
duc de bracciano, qui d un mot pouvait réaliser tant de rêves.
Ainsi que les gens absorbés par l'unique pensée qui les domine
elle ne pouvait comprendre le refus de son mari qui elle avait
pourtant offert sa fortune entière. A ces violents déchirements de
i'àme succédait un morue abattement. Ainsi, après avoir en vaiu
tâché d'ébranler la grille de sou cachot dans un accès de rage déses
péré, le captif retombe anéanti sur le sol... Telles étaient la noblesse
de son cœur, que jamais il ne vint la pensée de Jeanne de faire un
honteux compromis entre ses devoirs et son amour. Ce qu'il y avait
poste de Londres, la noie suivante: Il est
certain que lord Aberdeen adonné les instructions
les plus hostiles M. Bulwer, ambassadeur d'An-
glelerre près de la cour de Madrid, afin qu'il
appuie la nouvelle combinaison proposée par le
roi Louis-Philippe, de marier la reine Isabelle H,
avec le prince de Cobourg, et lorsqu'un héritier
n serait né de ce mariage, d'unir le prince de Mont-
pensier l'Infante, sœur de la reine. Cetle note,
ajoute J'Etpanolrenferme encore d'autres curieux
détails que nous nous abstenons de reproduire,
cause du caractère anonyme de celle communica
tion.
Madrid, 19 Mars.
Aujourd'hui fête de Saint-Joseph il n'y a pas eu
de Bourse.
Les ministres se sont assemblés aujourd'hui. Le
conseil est resté longtemps en délibération, maiVon
n'a pas pu savoir quelles résolutions y ont été prises.
On parle de nombreuses mutations qui auraient
lieu daus le personnel des autorités provinciales, le
gouvernement désirant s'entourer d'agents sûrs et
dévoués.
Le général Balboa sera dit-on nommé gouver
neur militaire de Madrid; M. Louis dal Larro le
remplacerait comme chef politique et le général
Fulgosio serait appelé la capitainerie générale de
la Galice.
Les rédacteurs de journaux, après lecture de
l'ordonnance sur la presse, ont tenu une réunion
chez M. Borrego; on dit que plusieurs d'entr'eux
ont résolu de suspendre la publication de leurs
feuilles, attendu que désormais, le conseil des mi
nistres serait l'unique tribunal devant lequel les
affaires de presse périodique devraient être portées.
M. Christie, membre de l'Université d'Oxford,
dont la récente conversion au catholicisme a fait
quelque bruit, est décidé quitter l'exercice de la
profession médicale pour entrer dans les ordres. M.
Oskeley, ex-ministre anglican, qui s'est également
converti au catholicisme, il y a quelque temps,
entrera aussi prochainement dans les ordres sacrés.
Il a obtenu du Saint-Siège les dispenses nécessaires
cet effet. L'ancien collège d'Oscotte, dont M. New-
nian doit prendre la direction, changera son nom
en celui de Ste-Marie dans la Vallée.
On croit que le débat sur la seconde lecture
du bill des céx'éales se prolongera jusqu'à la fin de
la semaine; les protectionnistes feront tous leurs
efforts pour que cetle discussion se termine le plus
lard possible.
On va immédiatement embarquer pour l'Inde
un certain nombre de pièces de 6 qui font partie du
parc de l'artillerie légère Wocdwich.
Les journaux anglais publient de longs détails
forts confus, comme toujours, sur la victoire rem
portée par une division de l'armée anglaise sur
l'armée sikhe. Le 28 février, d'après leur récit, les
anglais auraient perdu 600 hommes en tués et bles
sés dans cette affaire. Le gouverneur-général a
ordonné de lever et d'exercer aux manœuvres
10,000 hommes pour compléter l'effectif des régi
ments du service actif. La conquête du Putigaub ne
sera pas entreprise avant le mois d'octobre.
On lit dans le Messager:
Nous recevons les détails suivants sur la
bataille que les anglais ont livrée aux Sikhs le
29 janvier.
Les Sikhs étaient au nombre de 24,000 hom
mes avec 65 pièces de canon, qu ils ont per
dues. Les anglais avaient 12,000 hommes et
de plus horrible dans sa position, c'était celte affreuse pensée qu'Her-
man allait mourir Après avoir été un instant bercée d'une men
songère espérance, idée fixe, incessante, qui surmontait toutes les
autres comme le glas d'une cloche funèbre surmonte tous les autres
bruits
Jeanne interrogeait la pendule avec une anxiété dévoraDte... Ses
yeux étaient secs, brûlants, ses lèvres décolorées, sa pâleur livide...
Tout-à-coup elle parut frappée d'une idée subite, elle écarta lente
ment les longues boucles de cheveux qui lui couvraient le front
puis, attachant sur le plancher, un coup d'œil fixe, elle sembla réflé
chir profondément. Après quelques moments, elle se leva brusque
ment, croisa ses bras sur sa poitrine.... Sa physionomie exprimait
une résolution terrible ses yeux brillaient d'un feu sombre... Oh!
que jetais lâche!., s'écria-t-elle avec amertume
A ce moment, une voiture entra dans la cour de 1 hôtel... Jeanne
se précipita la fenêtre; e|le reconnut les gens de sa tante... Si 1 Em
pereur refuse!! Jy suis décidéedit-elle d une voix sourde,...
Réparant la bâte le désordre de sa toilette, tâchant de comprimer
tant de violentes émotions, elle attendit la princesse de MontUur.
[La suite au prochain n®.J