6e ANNÉE. - N° 521.
INTÉRIEUR.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
DIMANCHE, 3 MAI 1846.
On s'abonne Ypres, Marché
au Beurre, 21et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
prix de l'abonnement,
par trimestre.
Pour Vprèsfr. 5-00
Pour les autres localités g-00
Prix d'un numéro 0-25
Le Pro
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé, franco,
l'éditeur du journal, Ypres.
Le Progrès parait le Diman
che et le Jeudi de chaque semaine.
prix des insertions.
Quinze centimes par ligne.
VIRES ACQUIRIT EDNDO.
YPRES, le 2 lllal.
A NOS LECTEURS.
Cinq ans se sont écoulés depuis la fondation
du journal Le Progrès; dévouée l'opinion libéra
le, défendant ses doctrines contre des adversaires
impitoyables dans leurs excès, la feuille Yproise
qui parut pour la première fois le 1er Mai 1841,
trouva cette époque bien des obstacles sur
monter, bien des préjugésà combattre. L'horison
politique n'était pas très-favorable au parti li
béral; la guerre, une guerre acharnée était faite
ses principes, ses vues et ses hommes. On
doit encore se le rappeler, le ministère homo
gène libéral venait de quitter le pouvoir devant
l'adresse hostile dusénatet les journaux catho
liques sonnaient la trompette guerrière contre
le libéralisme, en publiant qu'il fallait vaincre
les libéraux en masse. Que de chemin parcouru
par l'opinion, dont nous avons été un des fidèles
défenseurs, en cinq ans
Cependant alors au milieu de la joie frénéti
que qu'exhalait la presse cléricale, les germes de
l'opposition que devait rencontrer plus lard la
réaction triomphante, se laissaient deviner dans
lesadresses des quarante deux villes formulées
en faveur du maintien au pouvoir du ministère
libéral. A la chambre, l'opposition était bien
moins unie et moins forte et dans l'opinion pu
blique, il était bien établi que le parti jésuitique
avait une prépondérance telle, que quand on
parlait de mettre un terme ses empiétements,
celle entreprise était envisagée comme chimé
rique. Nos arrogants adversaires ne se doutaient
guères que cinq ans plus tard, ils en seraient
arrivés devoir se défendre contre le flot libéral,
qui menace de les engloutir!
C'est vers l'époque de la première apparition
du Progrès, que l'invention de la mixture, la
plusfatale comédie politique qu'il était possible
de mellre en scène, fut faite. Il est avéré main
tenant que si tous les esprits clairvoyants ont
de suite éventé l'hypocrite tactique et l'astu
cieuse combinaison de la mixturele pays a eu
besoin de cinq ans pour en être convaincu.
Alors seulement il a compris que ces ministères
dits mixtes ont toujours été catholiques-politi
ques et qu'il a été pris pour dupe. Sous ce
masque pseudo-libéral, la réaction poursuivit
doucement son chemin. C'est alors qu'on vit
promulguer la loi sur la nomination des bourg
mestres et celle sur le fractionnement. Les
élections eurent lieu sur ces entrefaites et le
parti libéral qu'on avait voidu décimer, reparut
la chambre aussi fort qu'auparavant. Mais
deux ans après, au renouvellement partiel du
parlement, la nation s'était rendu comptedu but
que voulait atteindre le parti clérical et la résis
tance fut organisée. Quelques membresdu parti
libéral ne furent pas réélus, maisleschefsdu parti
catholique restèrent sur le terrain électoral.
Dès ce moment, la lutte fut caractérisée.
Celait Iesprit de l'ancien régime, les idées du
moyen-âge qui se mettaient en lulle avec l'esprit
vivace des sociétés modernes, cet esprit de pro
grès et d amélioration qui travaille toutes les
nations. Nos adversaires voulaient la domina
tion, se contentaient mêmed une prépondérance
cachee, mais en dernière analyse c elaient les
forces vitales de la nation qu ils voulaient com
primer. Le libéralisme au contraire veut les
augmenter et les organiser. L'opinion cléricale
désire accaparer les institutions qui exercent de
l'influence sur l'opinion publique, afin de s'em
parer des esprits par un travail lent, mais sûr.
C'estainsi qu'elleprétend et pour cela, elle jouera
son va-tout, ne pas laisser l'autorité civile seule
en possession du droit de donner l'enseignement
public sans son intervention officielle. Elle veut
même dans les écoles de l'état, conserver la fa
culté d'infiltrer goutte goutte dans les idées
de la jeune génération, ses doctrines suran
nées et ses idées rétrogrades. C est la question
qu'on aura bientôt résoudre et qui a été cause
qu'un ministère catholique homogène est arrivé
aux affaires.
Comme on peut le voir, l'opinion libérale de
puis cinq ans a parcouru une carrière glorieuse;
si tout n'est pas faitsi l'opinion rétrogade est
au pouvoir et peut encore bien faire du mal,
au moins elle est tenue en échec et son arro
gance est considérablement diminuée. Ces per
sécutions sourdes auxquelles le parti du recul
ne se gênait pas d'avoir recours, pour poursui
vre le parti libéral, ontdû cesser devant les ma
nifestations publiques et la raideuravec laquelle
on les repoussait. Nous sommes heureux d avoir
contribué produite l'extension des principes
libéraux et d'avoir cotnbaliu outrance les idées
de privilèges et de doiitinaliou dont étaient
animés nos ennemis politiques et si l'on se re
porte au jour de la fondation du journalon
devra convenir, que nous avons montré de la
fermeté et de l'énergie, car alors le triomphe
des idées que Le Progrès se proposait de défendre
n'était pas si prochain.
La discussion politique, qui durait depuis le
20 de ce mois, vient de finir par un vote de
confiance. M. Delhougne avait fait la motion de
renvoyer la loi de 1834 sur 1 enseignement, aux
sections actuelles et non pas la section cen
trale qui s'était occupée de ce projet, quand la
partie sur l'enseignement supérieur et primaire
avait été discutée. En outre, il demandait que
le ministère fil connaître les amendements qu'il
se proposait d'y introduire. La première partie
de la motion fut acceptée par M. DeTheux .mais
il rejeta la seconde partie, monti antà uu lesinlen-
tions malveillantes dont les ministres sontanimés
l'endroit delà loi sut l'enseignement secondaire.
M. De 'l'heux fil du rejet de celte motion une
question d'existence pour le cabinet, et ne par
vint, malgré la menace de dissolution jetée la
chambre, menace qu'il avait si amèrement blâ
mée dans le programmede M. llogier, qu'à obte
nir une majorité de dix voix. Quarante voix ont
protesté contre les tendances du ministère d'es
camoter la loi sur ^instruction secondaire, et
cinquante oui appuyé le cabinet réactionnaire.
La majorité historique des quinze dernières
années est bien fondue. Viennent les élections
de 1847, et elle sera classée au nombre des faits
définitivement acquis l'histoire.
Parmi les opposants qui ont voté contre le
ministère clérical pur-sang, nous avons remar
qué M. Biebuyck, le représentant d'Y près. Nous
ne nous attendions guère ce vote de sa part,
dans une question de confiance. M. Biebuyck,
qui, déjà plusieurs fois, a fait preuve d'indépen
dance dans d'autres occasions, prend place
sur les bancs du centre gauche, par ce vote.
Nous espérons qu'il continuera dans celle voie,
et les électeurs indépendants dont il n'a pas
obtenu les suffrages aux élections précédentes
pourront lui accorder dans l'avenir leurs voles
avec empressement.
Pour expliquer dans un sens favorable une as
sertion très-hasardée de son fétiche M. J. Malou,
le Journaldes Baziles prête \1. Dolez des paro
les qu'il n'a pas prononcées. Comme d'ordinaire,
c'est par une calomnie (rès-caractérisée l'a
dresse de l'opinion libérale, qu'il tâche de laver
M. Jules Malou du reproche qu'on lui a fait
juste titre, d'avoir souhaité un événement exté
rieur qui put ramener l'union. Or, ce mot, dans
la bouche de M. Jules Malou, signifie la conti
nuation de l'exploitation du pays par la caste
cléricale et le maintien de sa domination ac
tuelle. M. Jules Malou n'a nullement lâché ces
paroles imprudentes, en réponse une idée
émise par M. Dolez, que le parti libéral pourrait
en cas de troubles, livrer le pays l'étranger.
L'opinion libérale a plus d'esprit de nationalité
que ses ad ver-aires, qui ne se font aucun scru
pule de recevoir des ordres d un souverain
étranger, non-seulement au point de vue reli
gieux, mais encore sous le rapport politique.
Nous défions la hargneuse feuille de citer dans
fe discours de M. Dolez, les paroles qu'elle lui
prêle.
Jeudi soir, la Société des Chœurs a remercié,
par de brillantes sérénades les dames qui par
leur talent ont bien voulu coopérer aux déli
cieuses soirées que la société nous a données
cet hiver.
Et nous aussi, nous offrons nos remercîmenls
nos aimables cantatrices, encore sous l'im
pression du concert du 13 Avril dernier, où
un public nombreux a témoigné d'une manière
non-équivoque tout le plaisir qu'il éprouvait
aux accords du maestro Bellini, rendus par
Mme J..., d'une manière si suave et avec tant
d'âme! Cette belle cavaline qu'une triple salve
d'applaudissements a presque interrompue un
instant, nous a rappelé ce bel éloge de la mu
sique La musique, dit J. Mainzer, est une
langue mystérieuse; il faut pour la sentir une
>3 âme élevée et tendre. La musique peut cal-
mer la peur, l'inquiétude, l'ennui elle sus-
pend les douleurs physiques, elle invite un
doux sommeil. Une âme tendre, passionnée
ou mélancolique trouve dans un accord, une
>3 voix qui lui répond. La musique a des ac-
>3 cents pour nos joies et pour nos douleurs;
33 elle berce l'enfant, amuse la jeunesse, élève
33 l'homme aux sublimes émotions, lui inspire
33 le courage et la résignation. La musique est
33 la seule langue digne d'être parlée Dieu;
33 la prière qui n'est pas chantée, semble s'adres-
33 ser un mortel 33
Remercions donc nos aimables cantatrices
pour les moments délicieux qu'elles nous ont
fait passer cet hiver, et remercions-les pour les
peines qu'elles se sont données eu contribuant
par leur talent varier nos amusements et nos
plaisirs, et espérons que bientôt elles nous
procureront encore le bonheur d'admirer leur
talent et de lui rendre hommage.