INTÉRIEUR. 6* ANNÉE. N° 568. JEUDI, 15 OCTOBRE 1846. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Feuilleton du Progrès. LES BRUITS MENSONGERS. On l'abonne Tpres, Marché au Beurre, SIet chez tous les per- eepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimeitre. Pour Y prèsfr. 5-00 Pour les autres localités f 6-00 Prix d'un numéro0-25 LePro Tout ce quiconeernela réJic- tion doit être adressé, franco, l'éditeur du journal, ïpres. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine, PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. VIRES ACQUIRIT EUNDO. VPRES, le 14 Octobre. LE CIVISME DE L'ORGANE CLÉRICAL. Il faut que la jouissance de voir faire du tort ses concitoyens soit bien vive chez les béats du Journal des Baziles puisque la joie a fait explosion chez eux. Parceque la garnison de cavalerie nous a été enlevée, toute la clique clé ricale de notre ville est aux anges, l'exception de leurs adhérents cependant, qui en profitaient et qui trouvent que ce moyen de donner la fé rule ses concitoyens est un peu violent, puis qu'il frappe amis et adversaires. Mais loin d'attribuer le déni de toute justice distribulive aux mauvaises passions de ses pa trons, il en accuse tout ce fracas de libéralisme et cette -parade d'hostilité contre le gouverne ment. Nous devons répondre au BAZ1LE que jusqu'ici nous avions cru la liberté des opi nions garantie par la Constitution et qu'on pou vait donner des preuves de sympathie l'opinion libérale sans s'exposer être persécuté. Certes, Bruxelles, Gand, Liège, Anvers, sont autrement hostiles au ministère et on a jugé bon d'aug menter les garnisons de ces villes, quoique l'esprit des journaux qui s'y impriment soil tout aussi libéral que celui deja presse, dont le dévôt journal veut bien constater la vogue Ypres. Nous avons dit que la ville d'Ypres se trou vait sur la pente du déclin. Oui mais il faut que la bile jésuitique soit remontée au cerveau du scribe, qui s'exprime comme si la décadence de la ville d Ypres datait de dix ans. Ancien nement elle a été ruinée plusieurs fois cause de ces mêmes fortifications, qui aujourd hui ne lui causent que des embarras et dont on prend lâche d'amoindrir ce qu'elles peuvent offrir d'avantageux. Oui, certes la situation de la ville d Ypres a été plus prospère dans ces dix dernières années que depuis 1830 jusqu'en 1836, et alors c'étaient les patrons du béat journal qui né gligeaient les intérêts de la ville, car le seul fait mémorable qui ait eu lieu pendant cette ad ministration, ce fut le pillage de trois maisons, dont la ville fut chargée d'indemniser les pro priétaires. Si, sur l'invitation des ministres de la guerre qui se sont succédé, l'autorité communale a cru pouvoir faire une dépense de plus de 225.000 francs, sans l'entretien ordinaire des bâtiments militaires, c'était de l'argent bien placé, dans la supposition que le gouvernement fut fidèle ses engagements. Actuellement il n'en a pas été ainsi; une des deux parties ne s'en est pas tenue la foi jurée, et qui la faute? Quand le Journal des Baziles traite la pros périté de la ville depuis dix ans de fanfaronnade libérale, il sait bien qu'il avance la chose qui n'est pas, car elle est beaucoup plus développée comparativement ce qu'elle était depuis 1830 jusqu'en 1836. Si maintenant le ministère, au lieu de nous créer des moyens de mitiger les souffrances de l'indigence pendant l'hiver trouve bon de les diminuer, que la responsabi lité retombe sur lui. Quant l'administration elle a fait son devoir, si quelqu'un l'a oublié, c'est le gouvernement qui, la recherche des moyens pour diminuer le paupérisme, s'attache le rendre plus intense dans une localité, qui jusqu'ici l'avait combattu non sans quelque succès. Les haineux scribes du Journal des Baziles donnent un petit conseil l'adresse de la rédac tion du Progrès. C'est de demander humble ment pardon aux hauts dignitaires de l'état, las sés de nos impertinences de bas étage. Eh eh nous n'avons aucune envie de suivre ce conseil. Ces hauts dignitaires connaissent les moyens de ne pas s'exposer ce qu'on qualifie d'imperti nences et gui ne sont au fait, que des vérités que ces hauts et arrogants pachas n'aiment point voir imprimées. Il résulte de toute cette polémique que ce que nous avions pressenti était vrai, que le re trait de notre garnison de cavalerie est, de 1 aveu du Journal des Bazilesune vengeance qui n'est pas de bas étageune punition du minis tère l'endroit de la ville d'Ypres. En vérité, on se croirait revenu au bon temps du gouvernement absolu tant regretté par cer tain parti. Sous le ministère des six-Malou, il n'y a plus de justice distribulive, sinon pour eux et leurs amis. Ceux qui ne sont pas dévoués au ministère et au clergé, sont gens envers qui on n'est pas tenu d'être équitable et qui sont aux yeux de certaine clique taillables et corvèa- merci. Une erreur s'est glissée dans un petit articulet de notre dernier numéro. M. Bruneel, officier que nous croyions appartenir au 10® régiment, est du 5e, et par inattention, nous avons nommé comme s'étant distingué, De Waeghenaere, l'hôte de l'estaminet de l'Hôtel-de-Ville, au lieu qu'il fallait citer Charles De Waeghenaere employé l'éta l—ci vil. On lit dans une correspondance Bruxelloise de Impartial: La situation du parti libéral est toujours la même. La société de l'Alliance nous dira bien tôt, je l'espère, quoi définitivement nous de vrons nous en tenir. L'union est sans doute une excellente chose mais elle a été rompue avec le parti clérical quand il s'est agi de -pratiquer la constitution; nous ne reculerons donc pas devant une scis sion beaucoup moins dangereuse aujourd'hui qu'il faut maintenir le véritable esprit de la loi fondamentale. Le libéralisme constitutionnelmon cher Monsieur, ne pouvait abdiquer devant des pré tentions sans cesse renaissantes; c'eût été d'ail leurs mettre notre cause en péril, que de laisser l'opinion libérale sortir de la voie qu'elle a heu reusement suivie jusqu'à présent. Si la sépara tion devient irrévocable gardez-vous de vous en effrayer. Je ne crois pas que le libéralisme en souffre autant que vous semblez le craindre, ni que les élections de 18-47 s'en ressentent beaucoup. En tout cas il fallait choisir entre deux incon vénients: se laisser emporter ou résister un mouvement dans lequel le pays bien certaine ment ne permettra pas qu'on l'entraîne. A la distance où vous êtes, vous n'entendez que les voix solennelles et prophétiques qui sortent du trou. 3\os radicaux croient se donner de I importance en se posant comme les seuls missionnaires orthodoxes de la liberté, comme les apôtres prédestinés des temps nouveaux et ils vantent avec une infatigable ardeur leur jeunesse Oh! la bonne comédie, mon cher monsieur! L'évangile qu'ils annoncent au public est une vieille édition masquée d'un faux litre, et la plupart de nos jeunes ont la barbe grise m Le Moniteurdans un de ses derniers n"', publie une nouvelle circulaire relative au re censement général, adressée par M. le ministre nouveau chapitre AUX LEÇONS DE SIMON DE NANTLA. (1) Simon de Nantua le vieux, marchand forain, venait d'arriver dans une petite ville de Belgique où il avait déballé avec sa gravité habituelle sa pacotille de livres vieux et nouveaux d'estampes d'encriers de poche de canifs et de plumes métalliques. La foire promettait d'être brillante; une grande aftlueuce d'étrangers s'était répandue dans la ville; les carillons lançaient dans les airs leurs sons joyeux pleine volée, le drapeau national llottait sur les priucipanx monuments publics et de nombreuses troupes de bateleurs se li eraient, la grande joie de la foule, leurs grotesques ébats. Tout-à-coup une rumeur sourde se répand elle s'élève s'étend et vient frapper de stupeur une populatiou entière nue importante maison commerciale d une ville des environs vient de suspendre ses payements tout a été saisi, arrêté; la ruine de cette famille est cer taine et il ne lui reste plus que la misère en partage (1) Simon de Nantua est un ouvrage de M. de Jussieu, couronné ar l'Académie française. Ce livre forme une série de leçons mora- _ps et instructives destinées la classe ouvrière et que toutes les classes pourraient lire avec fruit. Le nouveau chapitre que je me permets d'y ajouter, traite un sujet que l'écrivain français ayait négligé de traiter, sans doute par oubli. Celte nouvelle fut aussitôt accueillis que répandue. On y crut peut-être diversement, mais enfin 1 011 y crut. Si quelqu'un avait dit tous ces gens là que cette même maison loin d'être ruinée venait de réaliser un bénéfice de cinq oent mille francs il n'en est pas un qui l'eut écouté sans exprimer un doute moqueur accom pagné d'un sourire plus moqueur encore. Il faut pourtant en excepter le père Simon qui peut-être avait ses raisons pour ne pas croire légèrement celte nouvelle désastreuse. Tranquillement assis l'entrée de sa modeste boutique arrangée ^vec un ordre minutieux il attendait un livre la main l'arrivée de si s. fidèles chalands. L'un do ceux-ci se présente enfin, c'était un homme gras et replet, au teint fleuri; ses petits yeux fleur de tête exprimaient une jubi lation inaltérable. 11 salua le marchand forain d'un air familier Bonjour père Simon eh biende grandes nouvelles il pa~ rait que la maison Robert Vaels de Gand, est dans uue terrible passei il paraît qu'elle n'eu sortira pas. Ceci ne saurait être qu'un bruit répandu méchamment car je viens de la foire de Gand et je puis vous assurer que cette maison était en pleine voie de prospérité. Voilà comment les apparences sont souvent trompeuses, reprit le gros homme car cette maison est ruinée rien n1 est plus certain Vous avez donc écrit Gand pour vous eu informer Non vraiment c'est un commis-voyageur qui nous a apporté cette nouvelle. Voilà en eflet une bonne source et je vous conseille de vous en tenir celle-là, répliqua le marchand d'un ton railleur. Quant moi; j'ai un fils, garçon de magasin chez M. Vaels; je lui ai écrit aujour d'hui, et demain ou après-demain au plus tard je saurai ce qui en est. Vous en doutez donc Simon Oui, j'en doute beaucoup. Mais pourquoi -h Pourquoi et vous, pourquoi n'en doutez-vous pas Oh il parait que cette maison représentait trop selon le chiffre de ses bénéfices. Une certaine représentation est nécessaire et je puis vous donner l'assurance d'ailleurs que celle de M. Vaels ne pouvait en tamer une fortune si bien assise. Il paraît aussi que l'ordre n'y était pas considéré comme une des premières nécessités, comme la base véritable d'une entreprise commerciale. J'ai appris le contraire par mon fils. Allons dit l'homme aux yeux fleur de tête, d'un air impa tienté, il ne sera pas facile de vous persuader, père Simon. Ah 1 Monsieur, n'y a-t-il pas assez de genspersuad s sans moi, et voulez-vous que le seul homme peut-être qui ne le soit pas encore comme eux, aille sans réflexion grossirleur nombre? si cette nouvelle se confirme j'en aurai toujours acquis la certitude assez tôt. J'apprendrai avec plaisir que ceci n'est qu'un bruit mensonger, dit le chaland d'un ton plus doux; quoique l'on puisse dire, la vérito devra se faire jour. Oui, et la boute retombera tout entière sur les calomniateurs. Si la maison Vaels n'a pas arrêté ses payements et qu'elle conti nue ses opérations, les bruits tomberont il eux-mêmes. Sans doute mais sur le terrain où le reptile immonde a passé ou aperçoit parfois longtemps encore, la trace infecte de sa bave. Vous aimez toujours les comparaisons, père Simon. Je puis vous dire que c'est une vieille faiblesse car voici qua rante ans qu'elle dure*

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Le Progrès (1841-1914) | 1846 | | pagina 1