INTERIEUR.
7° ANNÉE. - N° 644.
JEUDI, 8 JUILLET 1847
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Feuilleton.
On s'abonn« Y près, Marché
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cepteurs des postes du royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT,
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LePro
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VIRES ACQUIRIT EUNDO.
YPRES, le 7 Juillet.
LA. CIRCULAIRE ÉLECTORALE DEM. DE NECKERE.
Pendant longtemps les feuilles ministérielles
ont nié l'intervention efficace du gouvernement
dans les luttes électorales. On n'ajoutait pas une
foi entière aux dénégations intéressées des
journaux soudoyés par le cabinet clérical. Au
jourd'hui il serait difficileen présence de la
circulaire du commissaire de l'arrondissement
d'Ypres, de soutenir que le gouvernement
n'abuse de son influence, pour fausser les élec
tions. L'Indépendance nous a fait connaître
celte pièce qui prouve de quelle manière les
fonctionnaires, selon le cœur de S' De Theux
entendent le gouvernement représentatif et
quels moyens infâmes ils emploient pour par
venir leur but.
Ypres, le 3 juin.
Monsieur le bourgmestre,
Confiant dans les dispositions qui vous animent
pour le bien général, et dont vous n'avez cessé de
me donner des preuves, depuis l'instant où j'ai été
appelé partager, avec vous, les devoirs résultants
de la direction des affaires et de l'administration
dans les communes de cet arrondissement, je
me persuade que, dans cette circonstance, vous vou3
unirez, avec un nouveau zèle, une nouvelle ardeur,
aux sentiments qui doivent vous stimuler, pour
donner au gouvernement un témoignage de notre
dévouement, et, au chef de la province, la preuve
que nous savons apprécier et seconder ses efforts,
dans tout ce qui peut tendre au bien général j
la province elle-même confiée sa direction sage et
éclairée, un gage que nous ne restons indifférents
rien de ce qui intéresse sa propriété (tic) et sa
splendeur.
S'il est des circonstances où des devoirs impé
rieux nous sont imposés, c'est bien dans le moment
actuel, où les passions se déchaînent pour détruire
les éléments du bonheur de la nationoù l'esprit de
parti, où la perversité et l'impiété cherchent se
grouper pour mieux pouvoir jeter le trouble et le
désordre dans le paysafin de mieux établir cette
anarchie par laquelle ils espèrent abattre les trônes,
détruire la morale et la religion, sous le laux pré
texte que les hommes actuellement la tête des
affaires sont incapables de gouverner et de com
prendre les besoins de la nation et tout ce que la
prospérité du pays exige et réclame. Il est peut-
être superflu de répéter} car vous l'aurez déjà
remarqué avec moi, que toutes ces associations
politiques, loin d'être ce qu'elles s'efforcent de pa
raître, n'amènent que la désunion, détruisent tous
les éléments de prospérité et de bonheur que l'ordre
et la subordination procurent aux nations.
Il ne vous sera pas échappé que ces comités, ces
associations sont pour la plupart dirigés, soit direc
tement, soit indirectement, par des hommes dé
voués au gouvernement déchu, hommes imbus de
ces principes qui détruisent tout sentiment de na
tionalité belge, sont, par conséquent, les ennemis
déclarés de notre souverain et envient notre pays
ces institutions, ces lois qui ont donné la Belgique
cette nationalité, cette existence dont tout belge,
tout citoyen devrait être fier, et qu'il devrait pren
dre coeur de soutenir et de défendre plutôt que de
prêter la main leur destruction et leur anéan
tissement. Le moment est donc arrivé, M. le bourg
mestre, de vous pénétrer que le serment d'obéis
sance au Roi, de fidélité la Constitution et aux lois
du peuple belge, vous impose le devoir de donner
au souverain de votre choix un témoignage de notre
amour, de notre dévouement. C'est ici le cas de
donner au pays la preuve que vous avez compris
votre mission et que vous saurez remplir votre
engagement avec cette probité loyale et cette délica
tesse soutenue qui fut (sic) de tout temps la marque
distinctive du Belge et l'apanage du peuple flamand.
Cette profession de foi, vous me la donnerez,
j'espère, moi particulièrement et au pays en
général, en appuyant par votre vote et par votre
influence sur vos administrés, la candidature des
personnes qui, au Sénat et la Chambre des Repré
sentants peuvent soutenir lë gouvernement dans ses
efforts pour cimenter dans le pays cette union, ce
repos, cette paix indispensables au développement
de la prospérité, du commerce et de l'industrie, et
pouvoir faire goûter la riebesse d'une agriculture
bien dirigée.
Ces sentiments, M. le bourgmestre, vous les
partagerez avec moi, parce que de l'amour de votre
pays est le mobile de vos actes. Vous adopterez
donc avec moi les moyens de mettre ces désirs
exécution, et, pour réaliser cet heureux résultat,vous
vous empresserez de donner une preuve évidente
de votre zèle prudent et éclairé, en confiant M.
Malou-Vergauwen le mandat de vous représenter
au Sénat, et M. Van Renynglie, Charles, bpurg-
mestre Poperinghe, celui de soutenir vos droits et
de défendre vos intérêts la Chambre des Repré
sentants.
C'est avec une entière satisfaction que j'ai
l'honneur de recommander le succès de cette élec
tion, votre influence, votre coopération. Je suis
persuadé que l'empressement constant que vous
avez eu de rne témoigner votre bienveillance, ne me
fera pas défaut, et que je pourrai, comme antérieu
rement, vous exprimer la satisfaction que me pro
cure voire coopération active tous les actes admi
nistratifs et gouvernementaux que nous sommes
appelés exercer de commun accord.
Agréez, Monsieur le bourgmestre, l'assurance
de ma parfaite considération.
Le commissaire d'arrondissement,
J. DE NECKERE. H
Il peut êtreulilede relever quelques assertions
de ce pieux commissaire d'arrondissement qui
se pose en paladin d'une nouvelle croisade
contre l'impiété du siècle et l'esprit de parti.
En premier lieu, nous sommes étonné de voir
M. De Neckere demander le concours des
bourgmestres, pour donner au gouvernement
un témoignage de leur dévouement. Ainsi donc
les bourgmestres des communes sont les agents
électoraux de M. le commissaire et sous peine
de ne pas se montrer'dévoués au Salrape de In
Flandre occidentale, ils doivent manier la pâle
électorale, au commandement de M. le commis
saire et de manière faire triompher les candi
dats du gouvernement? Cependant, ni la loi
communale, ni la Constitution ne confèrent
aux bourgmestres de semblables fonctions et
nous croyons qu'ils pourraient facilement se
débarrasser des exigences du commissaire, en
refusant net d'être son agent électoral.
11 serait difficile de calomnier plus,sciemment
que ne l'a fait M. De Neckere, quand il s'esl avisé
de présenter l'opinion libérale comme déchaî
nant les passions pour détruire les éléments (ht
bonheur de la nation. Il serait ridicule de
prétendre ignorer, comment est composé le
parti libéral Ypres. Certes, ce sont gens qui
ont perdre et qui ce litre ne sont pas ama
teurs de désordres ni de troubles. Encore moins
s'attaquent-ils aux trônes, la morale et la
religion qui, s'ils n'avaient d'autres défenseurs
que M. le commissaire de district d'Ypres, se
raient bien aventurés, car, nous estimons M.
De Neckere un triste champion de la morale
et de la religion.
Rien n'est moins juste que d'accuser les asso
ciations libérales d'orangisme. Aucun fonction
naire ne peut ignorerqu'il n'est plus ici question
de cette bannière et que les hommes qui font
partie des sociétés électorales, ne sont en au
cune façon les ennemis déclarés de notre Sou
verain. Il faut avoir une furieuse démangeaison
de diffamer ses adversaires, pour oser comme
M. De Neckere, prêter des sentiments d'une
fausseté insigne dans une pièce officielle, des
personnes qu il connaît, qu'il sait ne pas être
telles qu'il les dépeint. D'ailleurs que signifie
cet appel au serment de fidélité prêté au Roi
et la Conslitulion N'est-ce pas vouloir
effrayer, intimider les bourgmestres de cam
pagne et insinuer de celle manière, que la
patrie est en péril et que les ennemis du pays
seuls peuvent voler en faveur du candidat
libéral, qui se trouve ainsi mis hors la loi, par
LIES «S^yiOTE,,
(Suite.)
XI. la maison pavonnzt.
EnviioD trois mois plus lard, Raoul el Philippe se rencontrèrent
inopinément un soir devant les boutiques du quai Voltaire. Les
deux amis ne s'étaient pas revus depuis l'étrange scène après laquelle
M. d Agleville était sorti de l'hôtel de Nantcuil pour n'y plus
revenir. 11 y eut de part et d'autre un mouvement de surprise et
d'embarras puis Raoul ayant tendu la main au cousin de Margue
rite l'excellent garçon la serra cordialement et lui dit avec un
(oupir
-/■Qu'êtes vous donc devenu dans cc3 derniers temps vou3
n'avez pas paru chez moi je n'osais me présenter chez vous après
ce qui s'était passé,, je craignais, puisque vous ne me recherchiez
pas, qu'il vous lut pénible de me revoir. Je vous ai inutilement
emandc dans tous les endroits où nous avions l'habitude de nous
rencontrer; personne n'a pu me donner de vos nouvelles. Est-ec que
vous aviez quitté Paris
Non, mon cher Philippe, j'ai seulement changé de quartier,
répondit Raoul depuis trois mois, je demeure dans ces régions
éloignées que les habitants de la Chaussée-d'Antin n'explorent pas
souvent je suis citoyen du 11e arrondissement.
Vous habitez votre maison de la rue Vaugirard scoria
Philippe; ma foi, je n'aurais jamais eu l'idée de vous aller chercher
l'ombre du théâtre Robincau.
Je me suis retiré du mondereprit Raoul quand vous
voudrez me venir voir daDS mon ermitage, mon cher Philippe vous
serez le très-bien venu... Si j'osais, ajouta-t-il avec quelque hésita
tion, je vous demanderais des nouvelles d'une personne laquelle
je pense souvent avec un seutiment profond d'affection, de-respect.
Je vous en remercie pour clic, mon ami, s'écria Philippe d'un
ton qui fit comprendre Raoul que Marguerite avait géuércusemeut
gardé son secret vous avez pardonné ce caprice inouï d'une jeune
fille; votre délicatesse a fait taire les murmures de votre amour-pro-
pre,ct vous accordez votre amitié celle qui a dédaigné votre amour.
Je ne mérite peut-être pas autant que vous le pensez ces
éloges, interrompit Raoul, intérieurement confus du beau rôle qu'on
lui prêtait; mon ami, je me rends justice; je n'étais pas digne de
M11' de Nanteuil... Mais parlez-moi donc de cette famille.
Elle a eu le bonheur d'éprouver un grand malheur, répondit
Philippe aveo un soupir qui n'était point triste M. de Nanteoil
est mort...
Que dites-vous? est-il possible! Marguerite aimait tendrement
ce terrible père... Quel aura été son désespoir
—■Oui, elle l'a pleuré avec des transports de douleur... ClI
événement est arrivé quelques jours après la rupture... Il y a trois
mois déjà, et le temps n'a pas consolé Marguerite. Mmf de Nantcuil
a été bien pins raisonnable... Pourtant voyez quelle bonté de co u I
elle a regretté son afireux mari... Longtemps elle a été bien triste
mais cela commence passer.
Je suppose que vous avez assidûment porté vos consolations
la charmante veuve, dit Raoul.
Mon ami, répondit M. de Blanzac avec une fatuité naïve qui
allait bien son beau visage, yous le disiez un jour je suis un