INTERIEUR.
LA CHATELAINE DE WAGRAM.
7' ANNÉE. - N° 677.
D1MAXCHE, 31 OCTOBRE 1847.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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VIRES ACQUIRIT EUNDO.
YPRESle 30 Octobre.
LE PARTI CLÉRICAL ANTIPATHIQUE AU SENTIMENT
NATIONAL DES BELGES.
Depuis qu'à la journée du juin, le pays
légal car la presse des honnêtes gens n'en
reconnaît pas d'autre, a fait justice du parti
clérical, ou dirait vraiment qu'on vil sous un
tout aulre régime. Le premier effet qu'on a
ressenti de la victoire remportée par l'opinion
libérale aux élections, c'est celui d'avoir vu le
clergé se retirer dans son domaine spirituel. Il
a senti qu'il aurait été inopportun de faire le
rodomont et que pareille conduite n'eut servi
qu'à le discréditer davantage. C'est dans les
communes surtout qu'on remarque ce change
ment de tactique. Auparavant le curé et son
vicaire étaient les autocrates non-seulement
spirituels du village, mais encore, dans le do
maine temporel, il s'était mis sur le pied de
disposer en maîtres absolus des autorités civiles
qui, sous l'ancien ministère, n'avaient garde
de les désobliger.
Les hommes honorables qui le soin des
affaires des communes avaient été remisne
supportaient qu'impatiemment le joug qu'où
leur faisait subir. Ils comprenaient que les in
jonctions du curé ne se combinaient presque
jamais avec les intérêts bien entendus des pa
roissiens. Mais abandonnés eux-mêmes, sans
appui du gouvernement centralpeu d'entre
eux avaient assez de caractère pour soulever un
conflit. La victoire du 11 juin a mis aux préten
tions exorbitantes du clergé la campagne si
non ur;e fin au moins une prudente atténua
tion, car il ne trouvera plus cet appui chez les
autorités civiles, qu'il était certain de rencontrer
sous les mixtures et le règne de M. De Theux.
La lutte sourde qui existait en petit dans la
commune, dans des proportions plus vastes se
remarquait dans les villes, mais là le clergé
s'attaquait des éléments déjà émancipés. Dans
les administrations supérieures, l'influence clé
ricale cherchait partout dominer et au pou
voir centralles élections en donnant une ma
jorité dévouée au système clérical, ne permet
taient pas des hommes qui refusaient de subir
le joug du clergé, de s'y maintenir.
Aussi pendant dix-sept ans, sans interruption
pour ainsi dire, si ce n'est de 1840 1841, la
Belgique a courbé ja tête devant les débris de
l'ancien régime, le clergé et la haute aristo
cratie coalisés pour l'exploiter. Si I on en doute,
il faut seulement se rendre compte des élé
ments qui composent l'armée cléricale où figure
la hiérarchie catholique depuis le sommet,
l'archevêque, jusqu'au dernier moine. Nous
n'exceptons aucun membre du clergé du parti
qui a rêvé la restauration de l'absolutisme par
l'octroi de la liberté la plus large dont un peuple
ait joui jusqu'ici. Le clergé est l'âme du parti
des honnêtes gens et sans lui, il ne resterait
rien. C'est le clergé qui fanatise les électeurs,
c'est lui qui, l'aide des fonds recueillis pour
faire des œuvres pies, fonde et soudoyé des jour
naux c'est lui qui mêlé la vie de chacun
épie le moment favorable pour se faire un in
strument politique de l'homme trop faible ou
trop peu instruit pour faire la part au spirituel
et au profane; c'est le clergé enfin, qui est la
cheville ouvrière du parti par lequel nousavons
été exploité pendant dix-sept ans, et qui a été
l'adversaire opiniâtre de toutes les mesures
libérales c'est-à-dire favorables la presqu -
unanimité des citoyens, mais indifférentes ou
inutiles ses intérêts de caste, si elles ne leur
étaient nuisibles. Pour la haute aristocratie,
elle n'intervenait dans les débatsque pour
jouer un rôle la cour et mettre son influence
au service du parti clérical au moment des élec
tions. N'est-ce pas ce qui a eu lieu depuis 1831
ou 1832 et quant aux adhérents laïques du
parti clérical, l'exception de ceux qui vivent
de l'église et des couvents, où sont-ils?
Décomposez les éléments du parti libéral et
qu'y trouvez-vous? des citoyens qui sont com
merçants, industriels, propriétaires, des savants,
des avocats des médecins, tous presque sans
exception sont libéraux. C'est la partie active
et éclairée de la population, celle qui a le plus
grand intérêt ce que les destinées du pays
soient remises entre les mains des hommes d'état
les plus capables et les plus aptes, et l'on peut,
se fier au choix que fera un parti composé
comme l'opinion libérale se trouve l'être. Tous
les intérêts vivaces de notre pays se trouvent
concentrés dans les mains de ceux qui ont
adopté pour bannière celle du libéralisme, tan
dis que chez leurs adversaires, il ne s'agit d'au
tres intérêts que de ceux de la sacristie et des
couvents, intérêts respectables sans doute, mais
un peuple qui n'en aurait pas d'autres sauve
garder, doit mourir de faim et de misère
voie dans laquelle nous ne sommes pas mal en-
gagés.
En considérant le parti libéral sous le rapport
des personnes qui comptent dans ses rangs, il
n'y a aucune comparaison établir avec la
faction catholique. Le parti libéral travaille
dans l'intérêt de tous, car ce n'est qu'en rendant
la position sociale de toutes les classes du peu
ple aussi aisée que possible, qu'il aura réellement
accompli sa mission. En est-il de même parmi
nos adversaires? Eh non, fhrmoment que leurs
intérêts étaient sauvegardés, que leur importait
le reste Dans les arrondissements dont, l'évê-
que était le grand-électeur par l'entremise du
clergé inférieur, quand les prêtres étaient satis
faits, les industries, les intérêts lésés pouvaient
se plaindre loisir y faisait-on attention Pas
le moins du monde, on annonçait avec com
ponction que les intérêts de la religion, lisez
du clergé étaient prospères" et tout était au
mieux dans le meilleur des mondes possibles.
Quoiqu'en disent les organes du clergé, sous
un ministère libéral, la Belgique se relèvera de
1 état de marasme dans lequel elle était la
veille d'être plongée par le système tbéocrati-
que. Tout ce tintamarre, tout ce bruit, toutes
ces calomnies n'empêcheront pas le cabinet de
montrer la différence qui existe entre un mi
nistère libéral et celui qui n'avait d'autre mérite
aux yeux de certaines gens, que d'être composé
des hommes d'affaires du clergé.
La presse catholique ne doit laisser qu'une seule
qualité envier, mais cetle qualité elle la possède
un si haut degré, qu'il serait difficile sous ce rap
port de lui faire concurrence. Nous voulons par
ler de celte effronterie pyramidale dont elle four
nit chaque jour la preuve, de celte impudence
qu'on ne rencontre pas un égal degré dans
-'i
feuilleton.
ix. libre Suite.
La banalité île ces consolations, toutes franches qu'elles pouvaient
être, blessait Béatrix sans la rassurer. Il y avait dans ce langage
léger et quelque peu cynique une allure qui répugnait aux délicates
susceptibilités de son cœur. Elle voulut rompre oet entretien.
Je vous remercie, Madame, dit-elle eu faisant un salut de la
main, de l'assurance que vous me donnez que la blessure de M. de
Gardeville sera bientôt fermée. Quant lui adresser des reproches
pour le peu d'égards qu'il vous a témoignés, c'est un devoir que
vous remplirez beaucoup mieux que moi. L'esprit et le charme de
toute votre personne, Madame, ne manqueront pas de leur donner
un grand poids.
Il se soucie bien de mon charme et de mon esprit repartit
Mm" de Laveruey sans paraître remarquer le geste d'adieu de
Béatrix. Ne suis-je pas d'ailleurs la sœur de l'homme qui l'a blessé?
Vous le voyez, j'ai peu de chance de l'émouvoir. Et d'ailleurs,
le tourbillon du monde qui m'emporte m'aura peut-être fait oublier
dans quelques semaines M. de Gardeville. Vous, au contraire, dans
votre douce solitude de AVagram, vous conservez vos souvenirs au
sein de la paix et de l'ombre, et l'orage, qui disperse vos fleurs, ne
saurait jamais les troubler ni les détruire.
Vous parlez comme un poète, dit d'un air distrait Mme Stiller,
et je vous admire trop pour vous contre/lire.
Moqueuse! vous ne me contredirez pas non plus sans doute
quand je me permettrai de supposer que, parmi ces souvenirs pré
cieusement conservés, il un est peu qui concerneront M. de Winter
mon frère. Il est si médiocrement aimable!
Mme Stiller fit un mouvement d'impatience.
Oh! je ue possède pas assez l'esprit de famille pour entendre
vous adresser un reproche. Bien mieux, je vous avouerai en toute
conscience que moi-même je suis enchantée que le baron parte. Je
subis souvent l'ascendant de son caractère ferme et despotique,
mais c'est toujours avec plaisir que j'entrevois l'occasion de m'y
soustraite. Combien, plus fortes raisons, devez-vous bénir la cir
constance qui l'éloigné, vous qu'il tourmente souvent de son impé
rieuse affection et de ses sollicitations importunes. En vérité, je vous
félicite d'en être débarrassée pour quelque temps... Surtout, ajouta-
l-elle avec un geste d'effroi comique, n'allez pas lui répéter jamais
ce que je vous dis là
Soyez tranquille, Madame, répondit Béatrix qui ne put s'em
pêcher de sourire. Je ne veux pas vous exposer sa vengeance.
C'est qu'il serait capable vraiment de s'attaquer l'un de mes
meilleurs amis et de lui mettre aussi dix pouoes de fer dans la poi
trine. Cet homme-là est incorrigible!
Comme elle lançait cette saillie, le duo de Reichstadt parut au
seuil de l'hôtel. Sur un geste de Mme Stiller, un domestique était
allé le préveuir qu'elle altendait. 11 s'avauça la portière, salua les
deux dames et dit M,nc Stiller que M. de Gardeville avait eu pen-
daut la nuit une fièvre des plus ardentes, mais qu'il était calme
maintenant et souffrait peu.
L'appareil, ajouta-t-il, ne sera levé que dans dix jours; alors
seulement le docteur pourra répondre du blessée. Tout d'ailleurs fait
présumer qu'il sera sauvé, Madame.
Le ciel vous entende, Monseigneur répondit Béatrix. Je suis
un peu cause de tout le mal. M. de Gardeville m'accuse peut-être.
Il vous bénit, Madame, pour la joie que lui apportent votre
sollicitude et votre présence ici.
C'est la deniicre fois, Monseigneur, que je fais cette démar
che par moi-même. Il a fallu l'excès de tuou tourment pour m'y
porter. Mais il ne serait ni sage ni convenable que je revinsse. Ne
comptez donc plus sur moi, monseigneur. J'enverrai chaque jour
un domestique l'hôtel de M. de Gardeville.
Ce que vous faites est toujours bien fait, Madame. Je regret
terais saus doute bien vivement, pour mon ami et pour moi, ce
changement de résolution, si je n'étais obligé moi même de cesser
mes visites M. de Gardeville. Je ne serais plus votre messager.
Que vous arrivc-t-il donc, Monseigneur demanda Béatrix
avec inquiétude.
Je me suis ser.li très-mal celte nuit dernière, Madame, et
j'étais si souffrant ce matin que mon médecin me défendit de sortir.
Je n ai pu le faire qu'en lui promettant de garder la chambre pen
dant quelques jours.
Et vous aussi, Monseigneur, dit Béatrix d'une voix touchaule,
Vous allez être malade 1 vous si...
Elle s'arrêta court en portaut les yeux sur AI™ de Laverney qui
semblait envelopper le duc d'un regard éclatant de coauetterie.
Schœubrunn n'est pas très-loin de Wagram (dit le duc
Béatrix si vous le permettez je vous euverrai quelquefois des
nouvelles de ma sauté.
Je vous en prie, Monseigneur!
Vous m'en priez! dit le prince en serrant tendrement la main
de M™ Stiller. Ah merci, Madame.
Mme de Laverney le suivit des yeux avec une singulière curiosité.
Lorsqu'il eut disparu, elle se tourna vers Béatrix et lui dit avec uu
naïf enthousiasme
-« Je ue l'avais jamais vu d'aussi près et aussi bien. Il est un peu
pâle, un peu grêle, un peu fatigué; mais au demeuraut, c'est un
charmaut homme, d'une figure intéressante et d'une taiile parfaite.
Mme Stiller sourit.
Et puis, reprit M. de Laverney en souriant T^esl le fils de
l'Empereur, l empereur Napoléon, le plus grand génie dus sicoles
La gloire du père se reilete ju que sur le fils et fail rayonner sou
front.
Hélas son front est triste et soucieux au contraire, dit Béatrix
en soupirant. Pauvre jeune homme
N'iinpoite! il me plaît beaucoupaiusi, répliqua Mme de La
verney.
Elle dit adieu M*« Stiller et remonta dans sa voiture.
ASchœubruuu! dit-elle au ooeher.
[La suite au proçkaia