INTÉRIEUR.
7e ANNÉE. - N° 699.
DIMANCHE, 16 JANVIER 1848.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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TIRES ACQUIRIT EUNDO.
YPRESle 15 Janvier.
Dansun premier article, le Journal des Ba-
ziles a dénaturé toutes les circonstances de
l'inhumation qui a eu lieu Wulverghem par
ordre de l'autorité.
Avec la mauvaise foi qui la caractérise, celte
feuille suppose que le sieur De Pruyssenaere
était enterré dans le cimetière et qu'on ne l'a
exhumé que pour le déposer en terre bénite;
partant de celte version inexacte, il prétend
que la conduite du commissaire d'arrondisse
ment constitue un excès de pouvoirs et une
usurpation des attributions qui appartiennent
au procureur du roi.
Cette version étant réfutée d'avance par celle
que nous avons donnée et que nous avions pui
sée des sources officielles, nous avons eu un
instant l'espoir que le béat journal aurait eu au
moins la loyauté de rectifier les erreurs malé-
rielles que contenait son récit; il n'en est rien,
et dans son dernier n° il revient sur ce fait, pour
chercher le dépouiller de toutes les circon
stances qui rendent la conduite de Mr le curé
blâmable et odieuse aux yeux de tous les hon
nêtes gens.
Pour rétablir les faits, nous ferons d'abord
remarquer qu'il ne s'est jamais agi de demander
le concours du clergé ou de l'église, pas plus que
de faire déplacer le cercueil <1 un endroit du ci
metière dans un autre.
Le lendemain du décès, Monsieur le bourg
mestre s'est adressé Monsieur le commissaire
d'arrondissement, pour savoir ce qu'il avait
faire en présence du refus de Monsieur le curé,
de laisser inhumer le défunt dans le cimetière,
et Monsieur le commissaire a répondu que Mon
sieur le curé était maître de prêter ou de refuser
son concours, mais que dans tous les cas le
défunt devait être enterré dans le cimetière, qui
est la propriété de la commune.
Il y a loin de là avoir voulu exiger la coopé
ration forcée du clergé; or, quand Monsieur le
bourgmestre a fait part de l'ordre qu'il venait
de recevoir, Monsieur le curé a persisté s'op
poser ce que l'inhumation eut lieu dans le
cimetière. La vérité ressort des faits eux-mêmes.
Pourquoi en effet, s'il n'y avait point eu op
position de la part de Monsieur le curé, le
bourgmestre se serait-il adressé son supérieur
pour savoir ce qu'il avait faire, et pourquoi
surtout, si Monsieur le curé n'avait point per
sisté dans son opposition, Monsieur le bourg-
Feuilleton.
LA QUIQUENGROGNE.
II.— berthe la folle.
[Suite.)
L'expression de la Iristesse et d'une douloureuse commisération
se peignait sur le visage de la femme laquelle Berthe venait de
donner le nom d'Alix, mesure qu'elle entendait ces paroles qui
avaient commencé par 1 exaltation et qui aboutissaient la folie,
youlant imprimer une autre direction aux idées de cette pauvre
insensée
Mère, lui dit-elle... mais celle-ci ne la laissa pas achever.
Je ne suis la mère de personne... appelez-moi Berthe la
Folle... que votre bouche ait le courage de dire ce que votre esprit
pense... je lis dans vos yeux que voes me croyez folle.
La brise devient de plus en plus forte.reprit Alix, celle humi
dité glaciale laquelle vous vous exposez peut vous être fatale-
ne restons pas plus longtemps sur oette terrasse, rentrons dans la tour'.
Je ne erainsni la brise, ni la tempête, répondit la vieille aveo
ce calme que donne une résolution inébranlable. Ce n'est pas la
première fois depuis trois ans que l'enfant est parti, que je viens
errer pendant la nuit sur le sommet de la Ouiqueiigrogue. Oh 1 elle
me connaît bien, la Quiquengrogue, c'est une vieille amie qui me
mestre n'aurait-il point exécuté les ordres qu'il
avait reçus
Cet état de choses constituait, comme nous
l'avons indiqué, une violation flagrante au dé
cret du 20 prairial an XII, et devait attirer l'at
tention de l'autorité. Toutefois pour prendre
une détermination, Mr le commissaire crut ne
pas devoir se référer aux rapports verbaux et il
fit vérifier toutes les circonstances du fait par
un brigadier de la gendarmerie qui se rendit
sur les lieux et constata par procès-verbal en
date du 4 janvier, ce qui suit
Après nous être assuré du lieu de sa sépul-
ture, Monsieur le bourgmestre et le garde-
champêtre nous ont déclaré que le lieu où le
défunt est enterré dans un cercueil, n'appar-
tient aucunement et ne faisait nullement par-
tie du cimetière, attendu qu'il en est séparé
par une haie vive et un grand fossé et qu'il
est destiné aux enfants de l'école pour faire
leurs besoins, ce que nous avons également
remarqué: ayant en outre mesuré la distance
de la sépulture dudit De Pruyssenaere au fossé
du cimetière, nousavons trouvé qu'il y a en-
viron huit mètres.
Nous pourrions relever d'autres circonstances
qui rendraient la conduite de Monsieur le curé
blâmable aux yeux des hommes les plus modérés;
mais nous nous bornerons répondre au journal
du clergé, lorsqu'il affirme contrairement la
vérité, que Mr le curé n'a rien fait pour s'opposer
l'exécution des ordres de Mr le commissaire
d'arrondissement, que non-seulement M'le curé
est parvenu empêcher le fossoyeur d'obéir aux
ordres de l'autorité civile, mais qu'il s'est rendu
sur les lieux au moment où les agents de la
force publique faisaient creuser la fosse, cher
chant les détourner de leurs devoirs et les
intimider par des menaces et que ce n'est qu'a
près des invitations réitérées du commandant
de la gendarmerie et sur sa déclaration, qu'il
avait ordre d'arrêter et de conduire Ypres
quiconque viendrait faire opposition, qu'il s'est
retiré d assez mauvaise grâce, ainsi qu'il conste
d'un autre procès-verbal dressé par cet agent.
Bref, il reste prouvé par des procès-verbaux
dressés en bonne et due forme, que le corps de
De Pruyssenaere était enterré hors du cimetière
dans un endroit qui n'en fait pas partie et où
les enfants qui fréquentent l'école déposent or
dinairement leurs ordures.
Or, dans ces circonstances, nous ne pouvons
qu'applaudir la conduite ferai et énergique
de Monsieur le commissaire d arrondissement
qui a fait déposer les restes du défunt dans le
lieu consacré aux inhumations.
Si ces faits si bien établis étaient plus long
temps dénaturés, nous demanderions pouvoir
publier les procès-verbaux officiels qui consta
tent toutes les circonstances.
C'est la réponse que nous désirons pouvoir
faire au saint journal qui a l'impudence de de
mander que nous rétablissions la vérité dans nos
colonnes, alors qu'il a, lui, dénaturé jusqu'à la
moindre circonstance matérielle concernant
celte affaire.
Nous le répétons, la conduite de M. le curé
a été odieuse et elle a obtenu le blâme de tous
les honnêtes gens, malgré les efforts de certains
journaux pour en atténuer et en dénaturer la
portée.
Marché d'Ypres, du 15 Janvier 1848.
Le marché était abondamment garni. Bien que les transactions
aient été assez animées, tout n'a pu être vendu et de fortes parties
de froment n'ont pas trouvé d'acheteurs. 778 hectolitres de froment
ont été exposés en vente, des prix qui ont varié de fr. 18 40 fr.
20 80; moyenne, fr, 19 60; baisse 50 centimes sur le raarehé pré
cédent,
25 sacs de siègle ont été offerts en vente et malgré ce médiocre
approvisionnement une baisse de 50 centimes a eu lieu sur le prix du
dernier marché. Les prixsesoot tenus cuire fr. 12 00 et fr. 13 20.
L'avoine s'est faite eu baisse. 50 hectolitres ont été veudus des
prix qui flottaient entre 8 et 9 francs; moyenne fr. 8 50; baisse 50
centimes.
66 sacs de fèves out été vendus au marché, un prix moyen de
fr. 13 60; diminution sur le marché précédent 20 centimes.
Les pommes de terre ont renchéri. On pouvait les acheter fr.
8 50 les°/0 kilogrammes, 1,700 kilogrammes ont trouvé preneurs.
CONCERT DE M. MOERMA.N y CHEF DE MUSIQUE
de la Société royale de S*-Sébastien.
C'est Dimanche dr que celle charmante soirée
musicale a eu lieu dans notre Salle de spectacle.
Malgré le peu de publicité dont on a entouré
l'annonce de ce concert, un nombreux public
d'élite, parmi lequel on remarquait bon nom
bre de dames, remplissait dès les 6 heures,
l'enceinte brillamment éclairée île la salle.
La musique du 10® régiment a ouvert par un
morceau de Mercadante et une fantaisie des
Huguenots, ces deux parties qui composaient
le concert. Que dire de Mr Zulch et de ses in
telligents artistes pour eux les journaux de
Bruxelles et d'Anvers, leursanciennes garnisons,
ont épuisé depuis longtemps toutes les formu
les d'éloges; bornons-nous de dire que celle
fois encore ils ont mérité les chaleureux ap
plaudissements dont on a accueilli la fin de
chaque morceau.
Cependant les honneurs de la soirée ont été
incontestablement pour MM. Moerman et De
Smits ce premieraprès avoir exécuté avec
protège et me préserve de tout mal. Elle n'a pat de secrets pour moi,
la Quiqueugrogne, je sais tous les mystères qu'elle renferme, et
c'est un grand bonheur pour l'enfant
Allons dans votre chambre, je vous en prie, dit Alix qui voyait
l'esprit de la vieille Berthe emporté dans les plus étranges diva
gations.
-« Non, répondit la folle, je ne quitterai pas oette place que je
n'aie vu poindre l'horizon les vergues de la Reine-Jeannej je veux
être la première saluer le retour de l'enfant.
Puisse-t-il trouver dans le bonheur de nous revoir, un dédom
magement aux ehagrins qui l'attendent son arrivée... s'il arrive
jamais dit Alix en levant avec ferveur ses yaux vers le ciel.
Quels chagrins peut aveir l'enfaut en posant le pied sur le sol
bretou demanda Berthe.
Ne savez-vous donc pas les malheureux événements qui plon
gent dans le deuil la ville tout entière? Comment le sauriez-vous,
pauvre femme qui n'usez vos chaussures que sur les dalles de cette
sombre tourl Vous pour qui l'univers ne s'étend pas au-delà de ces
froides murailles 1
Que dites-vous donc, ma mie interrompit la vieille en pre
nant Alix par le bras et en l'amenant au bord du parapet croyez-
vous que mon univers stait aussi borné que vous le prétendes mais
regardez, je vous prie, cet espace immense qui s'étend devant nous
tout cela m'appartient et bien plus encore. Mon corps est ici, mou
esprit est partout il est allé loin... il a accompagné l'enfant, il a
veillé sur lui pendant sk longue expédition,,, mon esprit a voyagé
sur les ailes du vent qui enflait les blanches voiles de la Reine-
Jeanne» Mais de quels événements voulie/.-vous parler conti.
nua-t-elle d'un ton calme, comme si sa pensée eut été subitement
privée de sa puissance motrice et fut retombée lourdement du cie[
sur la terre.
Du combat qui a eu lieu hier, la porte de la cathédraje, entre
les Français et les miliciens de la mort de jnessire Jehan de
Bizien.fde la disparition de Raoulelte qui aura sans doute été tuée
aussi, mais dont le oorps n'a pas été retrouvé.
Tous les hommes sout mortels, répondit la folle, sans laisser
voir la moindre émotion. Mais qu'y a-t-il de commun entre l'enfant
et les personnes dont vous m'annoncez la mort
Faut-il vous rappeler que l'enfant aimait tendrement le sire
de Bizien et qu'il en était aimé paternellement Soyez sûre qu'il
voudra venger la mort violente de son ami, de son père... il va donc
exposer sa vie.
L'enfant a exposé sa vie sur l'Océan et l'Océan a respseté la
vie de l'enfant ce n'est qa'en montrant sa force et son courage que
l'enfant peut devenir le maître. Sa destinée doit s'accomplir.
Avez-vous oublié que Raoulette était sa fiaucée? N'est-ce pas
sur c®H© jeune fille qu'il avait placé toutes ses espérances? N'est-ce
pas cause d'elle qu il avait l'ambition de se rendre célèbre? A quel
désespoir ne vi-t-il pas s'abandonner, lorsqu'à sou retour on va lui
dire: celle qui avait votre amour, celle qui mêlait votre nom cha
cune de ses prières, celle qui attendait comme un suprême bonheur
le jour qui devait l'unir vous, Raoulette la belle est morte 1