T ANNEE. - N° 701.
DIMANCHE, 23 JANVIER 1848
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
Marché d'Ypres, du 22 Janvier 1848.
De Block, Brasseur.
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TIRES acquir1t EUNDO.
YPRES, le 22 Janvier.
La chambre des représentants a repris le
cours de ses travaux, après une vacance déplus
de quinze jours. Elle s'est occupée immédiate
ment de l'examen du budget de la justice
après avoir rayé de son ordre du jour, la modi
fication proposée par la section centrale du bud
get des voies et moyens, la loi sur les sucres,
chef-d'œuvre du dernier ministre des finances,
M.Jules Malou, dece financier incomparable au
gré de la pressecléricale. Cette base d'impôt qui
certes peut produire des millions sans exciter
la critique, puisque ce n'est pas un objet de
consommation de première nécessité, était
comprise pour une somme de fr. 3.000,000 au
budget des voies et moyens et au lieu de ce re
venu, le trésor a peine reçu 1.400.000 fr.
La loi de M. Malou son œuvre de prédilec
tion, devait sauvegarder les intérêts du trésor
et traiter sur le pied de l'égalité la canne et la
betterave. La canne et la betterave n'ont pas eu
se plaindre de l'œuvre de M. Jules Malou,
mais l'étal a payé les frais de l'inexpérience du
financier catholique, que le Journal des Baziles
présente ses lecteurs comme la perle des
capacités fiscales, avec son ami Cogelsautre
illustration catholique.
Le pays l'a bien des fois éprouvé et ses
dépens, on passefacilement pour un aigle dans
les rangs du parti catholique. Les hommes
marquants chez lui sont raies, ceux qui ont
une certaine valeur par eux-mêmes ne veulent
pas s'enrôler dans les rangs de celte opinion
que renie l'esprit du siècle. Aussi peut-on ap
pliquer ce parti le vieux dicton populaire
Dans le pays des aveugles, les borgnes sont rois.
ver dans l'impossibilité de combattre loyale
ment ses adversaires. C'est le rôle auquel s'est
abaissé le parti clérical qui veut dénigrer
l'opinion libérale et qui, pour y parvenir, ne
recule pas devant les mensonges les plus odieux.
Le marché était fortement fourni. Les transac
tions étaient peu animées et se sont faites en baisse.
668 hectolitres de froment ont été exposés en
vente des prix qui se tenaient entre fr. 18-40 et
fr. 20-40; prix moyen, fr. 19-40; baisse 20 cen
times.
Le seigle qui avait subi une forte baisse au marché
précédent, s'est relevé. 25 hectolitre» ont été vendus
des prix qui variaient entre fr. 12-80 et i4 fr.;
moyenne fr. i3-4o; augmentation 80 centimes.
L'avoine s'est vendue sans variation fr. 8-5o
l'hectolitre.
80 hectolitres de fèves ont été rapidement enlevés
un prix moyen de fr. i3-6o comme au marché
précédent.
Peu de pommes de terre ont été portées au mar
ché et cependant le prix n'en a pas augmenté il
est resté par continuation de fr. 8-5o les cent
kilogrammes.
Dans un des derniers numéros du Nouvel
liste. le malin correspondant que vous savez, le
véridique A. A. A. s'occuped élections commu
nales qui ont eu lieu dans l'arrondissement et
entre autres de celles de Warnêton. Nous of
frons au malin M. A. A, une récompense
honnête, s'il peut parvenir prouver que M. le
commissaire d'arrondissement se soit rendu
Warnêton depuis qu'il est en fonctions, ou qu'il
ait seulement foulé le territoire de celte ville.
Cela veut dire en d'autres termes, que tout ce
qu'il dit. n est point le moins du monde vrai. Un
parti qui tient gages des calomniateurs pa
tentés, doit être descendu bien bas, et se trou-
On nous écrit de Watou,21 janvier:
Hier la commune de Watou offrait un véri
table aspect de fête; dès huit heures du matin,
le son des cloches annonçait la solennité du
jour et attirait un grand nombre d étrangers.
A dix heures une messe solennelle fut chau
lée l'occasion de la fête de S'-Sébastien et
en présence de tous les membres de celle société
ainsi que des autorités de la commune. A midi
un banquet était préparé el réunissait les per
sonnes notables de Watou en attendant la
distribution solennelle des médailles qui avaient
été obtenues l'exposition agricole de Bruxelles.
Notre conseil communal avait invité M. le
commissaire d'arrondissement venir présider
celte solennité. Vers trois heures, l'arrivé de
ce fonctionnaire fut annoncée el aussitôt l'ad
ministration communale accompagnée des no
tables et précédée des musiques d harmonie de
Watou et de Rousbrugghe se rendit au-devant
de lui. M. le commissaire exprima combien il
était touché d'un accueil aussi flatteur, dans
lequel il ne voyait du reste, qu'une adhésion de
la population de Watou l'institution de l'ex
position agricole.
Le cortège se mit en marche et, arrivé la
salle de réunion, le Conseil communal prit place
au bureau sous la présidence de M. le commis
saire d'arrondissement.
M. le bourgmestre, dans un discours précis
et élégant, a exposé tous les avantages que l'on,
peut attendre des expositions agricoles. Il a
félicité les habitants de Watou des succès qu'ils
ont obtenus et en terminant, honneur a-t-il
dit, honorable ministre de l'intérieur, c'est
son activité que nous avons dû l'établissement
de cet immense réseau de chemins de fer, et
c'est son intelligence el son énergie que
nous devons la création des expositions agri
coles. Cette institution sera féconde en résultats
et si toutes nos communes flamandes n'ont pas
été représentées l'exposition de cette année,
nous avons la conviction qu'au prochain con
cours, on ne les verra pas absentes d'une lice
où se débattent leurs plus chers intérêts.
Après ce discours, M. le commissaire a re
mercié les habitants de Watou de l'empresse-
meut qu'ils avaient mis répondre a l'appel du
gouvernement. Après avoir démontré que le
moyen le plus propre pour répandre les con
naissances agricoles était la création de sociétés
d'agriculture, ce fonctionnaire a longuement
insisté sur la nécessité de faire aussi quelques
efforts en faveur de l'industrie linière et il a
adjuré l'administration communale de Watou
d'ériger un atelier-modèle et de faire des sacri
fices pour y introduire les nouveaux procédés
de fabrication.
Ces discours accueillis par des applaudisse
ments unanimes, ont été suivis de la remise des
méda lies
MM. De Heeguer, Cultivateur
Une médaille d'encouragement a été décernée
par M. le bourgmestre la fermière Cathérioe
Lyoen qui avait pris part l'exposition, mais
sans obtenir une récompense.
Après cette distribution, le cortège s'est rendu
chez M. le bourgmestre qui a offert le vin d'hon
neur aux lauréats. Les autorités ont passé la
soirée chez le chef de la commune, devant la
demeure duquel les musiques de Watou et de
Rousbrugghe ont donné de brillantes sérénades.
Nous pouvons dire en finissant notre relation
de la fêle de jeudi dernier, que jamais la com
mune n'avait été aussi animée. Malgré l'âpreté
de la saison, on avait partout improvisé des
arcs de triomphe portant des inscriptions ap
propriées aux circonstances. Aussi cette fête
Feuilleton.
LA QUIQUENGROGNE.
(Suite.)
IIÏ. LE CAPITAINE YORIK.
La mort tragique du sire de Bizien, plongea les habitants de
Saint-Malo dans le deuil et la consternation. Ce n'était pas seule
ment le premier citoyen de leur ville qu'ils perdaient,c'était l'homme
qui avait toute leur confiance, le seul qui pût conjurer l'orage dont
ils étaient menacés, et les faire triompher .de3 graves difficultés dans
lesquelles ils se trouvaient engagés.
Cette catastrophe leur parut de mauvais augure comment pour
raient-ils résister aux Français, présent qu'abandonnés leur
propre inspiration, ils ne voyaient parmi eux personne dont la pru
dence et la bravoure éprouvée pussent les diriger? Il ne leur restait
doue plus qu a faire amen le honorable auprès du gouvernement,
lui remettre les clés de la ville et se dessaisir du mot d'ordre. Ils
pouvaient maintenant déchirer leurs ceintures, briser leurs perttiisa-
iies et fouler aux pieds les insiguesde la milice, puisque des soldats
étrangers auraient seuls le droit de garder la ville, et quels soldats!
les mêmes qui venaient d'assassiner leur illustre prévôt, de tuer sa
tille!
Telles étaient les tristes pensées auxquelles se laissaient aller les
Malouins qui, au lieu d'être courir les champs selon leur habitude
du dimanche, se tenaient renfermés dans leurs maisons, moins
peut-être cause de la douleur qu'ils éprouvaient de la mort de leur
chef, que par la crainte d'être pillés par la soldatesque, car ils
s'attendaient tous les malheurs.
Le lundi fut consacré aux funérailles du sire de Rizieu. La cathé
drale, tendue de draperies de deuil, depuis les dalles jusqu aux
corniches des colonnes, était trop petite pour contenir la foule qui
vint rendre au défunt un dernier hommage. Lorsqu on le conduisit
au cimetière, il ne resta dans la ville, disent les chroniques, que les
eufants la mamelle avec leurs mères, et tous les navires du port
hissèrent le pavillon noir.
On remarqua, non sans une extrême surprise, fjue le comte de
Charolles, accompagné de tous les officiers de la garnison, l'excep
tion toutefois du capitaine Clément, assista, sans y avoir été invité,
celte funèbre cérémonie, et sembla, par le profond recueillement
qu'il fit paraître, prendre sa part de la douleur publique.
Le leudeuiain, tous les notables habitants furent convoqués la
maison syndicale, l'effet de pourvoir au remplacement du sire de
Bizien. L'administration municipale était confiée un syndic et
deux échevins la charge de prévôt, la plus importante, surtout en
raison des circonstances critiques où l'on se trouvait, donnait
celui qui en était titulaire, le commandement de U milice bour
geoise, la possession des clés de la ville, la garde de la banuière, en
un mot toutes les prérogatives d'un chef militaire. Ces fonctions
étaient dévolues par l'élection elles constituaient une sorte de
royauté et faisaient d'autant plus d'honneur celui sur lequel se
portaient les suffrages, qu'il n'y avait pas, dans tout le duché de
Bretaguc, une seule ville qui eut des franchises aussi extraordi
naires.
Saint-Malo se les était attirées par les services que ses hardis
marins avaient rendus au duché pendant les guerres avec les Anglais,
et principalement par la spontanéité avec laquelle ses riches négo
ciants avaient mis leurs richesses la disposition du souverain. Sous
les règnes de Henri IV, de Louis XIV et dans les premiers temps
de la révolution, les Malouins renouvelèrent ces actes de généreux
désintéressement et en furent indemuisés par des privilèges dont
on ne trouve d'exemples dans auoune autre cité.
Les citoyens sur lesquels on avait compté, comme devant se pré
senter candidats la charge de prévôt, ne parurent nullement em
pressés de faire valoir les droits quils pouvaient avoir cet honneur,
et tous finirent par se récuser eu alléguant qu'ils ne se reconnais
saient pas dignes de succéder l'homme dont toute la ville déplo
rait la perte irréparable. Quelques-uns ajoutèrent qu'il» ne croyaient
pas qu'il y eut lieu de douuer un chef la milice bourgeoise,
attendu que, selon toute apparence, le commandement militaire
allait être réclamé par le gouverneur nommé par la cour de France,
et que les miliciens seraient désarmés afin d'éviter les sanglantes
collisions dont on venait d'avoir sous les yeux un si déplorable
résultat.
Nous pouvons bien le dire sans porter atteinte l'honneur des
bourgeois, ils ne donnaient pas le véritable motif de leur refus, et ce
motif n'était autre chose que la crainte des dangers auxquels serait
exposé celui d'entre eux qui consentirait accepter le périlleux
honneur qu'on était appelé décerner. La mort du sire de Bizien
donnait réfléchir; on était convaincu qu'elle n'était point l'effet
d'un hasard, mais bien d'une préméditation, le gouverneur ayant
pensé qu'on aurait meilleur marché de la milice, lorsqu'elle se ver
rait privée de sou commandant. Si cette interprétation était y