INTERIEUR. T ANNEE. N° 702. JEUDI, 27 JANVIER 1848. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Où s'abonne Ypres, Marché au Beurre, 1, et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre. Pour Y prèsfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro 0-25 Tout ce qui concerne la rédae- tiou doit être adressé, Jranco, i l'éditeur du journal, Yprea. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine. PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. TIRES ACQUIR1T EDNDO. TPRE8 le 26 Janvier. I! nous répugne de suivre le Journal des Baziles dans sa polémique mensongère, de ré futer les assertions malveillantes et de détruire l'effet des méchancetés calculées qu'il invente deux fois par semaine, pour dénigrer le minis tère libéral. Ce serait un rude métier pour un journal que celui de redresser tous les menson ges que la presse cléricale a débités depuis quelques mois. Cependant on ne peut laisser passer inaperçu des articles où les faits sont odieusement travestis et nous avions eu le lort de ne pas relever un factum du Journal des Baziles qui dépassait les limites de l'absurdité. La Sentinelle des Campagnes a cru devoir s'en occuper et notre avis, elle a eu de la bonté du reste de daigner attacher quelque importance aux élucubralions du Journal des Baziles. Nous reproduisons cet article du journal agricole, pour faire voir que ce n'est pas Ypres seulement, que M. Jules Malou ne passe pas pour un oracle financier. Le parli clérical qui devait, disait-il, quelques jours après la formation du cabinet, rester pour ainsi dire neutre, et attendre les actes du ministère nouveau, ne s'est pas fait faute, depuis lors, de men tir celle promesse, laquelle, d'ailleurs, personne n'avait pu croire. Chaque jour, les organes de la presse sainte et vertueuse ont inventé de nouvelles accusations contre les hommes que la victoire du 8 juin a amenés au pouvoir, mais malheureusement pour ces feuilles qui vantent si haut leur justice et leur impartialité, chaque accusation nouvelle qu'el les lancent est marquée au coin de la plus insigne mauvaise foi, et se trouve démentie par les faits. ^L'Fchode Courlraidonl nousavons eu déjà si gnaler les calomnieuses attaques, digne émule de XAmi de l'Ordreet de l'Organe des Flandresbout d'injures, n'a rien trouvé de mieux que de ramasser dans la fange, un articulet du Propagateur qui se publie Ypres, et est par conséquent le défenseur naturel de M. Malou. Dans ces quelques lignes il est dit A peine fut-il (le ministère) en possession du coffre-fort de l'Etat, qu'il fit preuve de sa grande économie, en dépensant quelques cent mille fr., tant pour célébrer le triomphe de la coterie libé- raie, que pour créer de nouvelles places et com- missions, et partant denoiiveaux embarras au tré- sor. Bientôt sonna pour le cabinet l'heure fatale d'indiquer son plan, sa marche, sa politique nou- velle les chambres s'ouvrirent, et quel désap- pointement! Tous les projets de loi annoncés dans le discours d'ouverture, tous appartiennent au ministère de T heux ou Nothotnb, si l'on en ex- ceple deux, parmi lesquels on compte la loi odieuse et immorale sur les successions. Et plus loin le journal ajoute Nous ne pouvons nous estimer heureux d'avoir vu la politique non— velle signaler son me adsurn par une demande de 70 millions, bagatelle jugée nécessaire pour guérir un mal que MM. Malou et Cogels, en parfaite con- naissance de cause, ne trouvent qu'imaginaire. L'invention est belle et digne des grands hommes qui nous gouvernent. Augmentation de contribu- tions, nouveaux impôts, ce sont autant de moyens ingénieux pour relever les Flandres! Il y a dans ces lignes que nous venons de repro duire, autant de mensonges que de mois. Nous vou drions bien savoir par exemple quels sont les quel ques cent mille francs que le ministère a dépensés pour célébrer le triomphe de l'opinion libérale; et quelles sont surtout les places et les commissions qu'il a créées. Nous admettons qu'on fasse de l'op position un gouvernement, mais ce qui n'est pas admissible, c'est qu'on le combatte par le mensonge et la calomnie; ce sont là des armes que n'emploient jamais des adversaires loyaux. Or, il n'est pas vrai que le ministère ait dépensé un centime pour célé brer le triomphe de l'opinion libérale; il n'est pas vrai qu'il ail créé des emplois nouveaux. Il ne suffit pas de lancer une accusation, il faut encore en prou ver la vérité or cette preuve, nous défions le Pro pagateur de l'administrer. Le ministère, dit-il, n'a présenté que des projets élaborés ou par M. deTheuxou par M. Nolhomb, sauf deux, parmi Lesquels la loi odieuse et immorale sur les successions. Que le cabinet nouveau n'ait pas répudié tout ce qui avait été préparé par ses prédécesseurs, cela se conçoit, et nous ne voyons pas qu'il y ait lieu de lui en faire un si grand grief; qu'il n'ait présenté que deux lois nouvelles, cela se conçoit encore, puisquo nous ne sommes qu'au début de la session, Quant la loi odieuse des successions, l'avenir prouvera si le ministère a eu tort delà présenter. Quant nous, lorsqu'il est question d'établir un impôt, il nous semble beaucoup plus rationnel, beaucoup plus juste, de demander celui qui possède qu'à celui qui n'a rien mais nous ne voulons pas anticiper sur une discussion qui viendra en temps et lieu. Nous devons l'avouer, nous n'avons pas encore d'opinion bien arrêtée sur celte question qui paraît devoir donner lieu de vives discussions la cham bre des représentants. Mais ce qui rend surtout le Propagateur furieux, c'est que le ministère ait dit franchement, ouverte ment aux chambres et au pays que les ministères qui se sont succédé jusqu'à présent ont dévoré des millions, escompté l'avenir et laissé par conséquent un déficit considérable. Aussi, voyez comme il se redresse, et invoque MM. Malou et Cogels pour dé montrer que ce déficit n'est qu'imaginaire. Qu'im porte que les caisses de l'État soient vides, qu'im porte qu'on ait engagé pour plusieurs années les crédits budgétaires pour les routes, qu'importe qua nous ayons une dette flottante hors de proportion avec nos ressources, et qui dans un moment de crise pourrait être un embarras inextricable pour le gou vernement? Qu'importe tout cela le mal n'est qu'imaginaire c'est M. Malou qui l'a dit et quand M. Malou a parlé, on doit le croire les yeux fermés. Pour nous qui tenons un peu de saint Thomas, nous n'avons pas une confiance si aveugle, et la logique des chiffres nous a toujours paru irréfutable. Or, nous avons étudié tous les chiffres qui ont été posés devant la chambre, et quoi qu'en aient pu dire MM. Malou et Cogels, il en est résulté nos yeux la preuve irréfragable que la situation financière, sans être désespérée, n'est pas bonne, que le découvert du trésor est trop considérable, et qu'il faut absolu ment lui créer des ressources nouvelles. C'est une tâche que le gouvernement a entreprise et dans la quelle nous l'appuyerons de tous nos efforts. Il a besoin de ces ressources pour pouvoir venir effica cement au secours des Flandres, y introduire des industries nouvelles et détruire peu peu cette plaie du paupérisme que les ministères précédents ont laissé s'élendre. Ce n'est pas par des aumônes stériles qui démoralisent le peuple, mais par l'agri culture, qu'on parviendra combattre ce funeste fléau. Le ministère actuel l'a compris il accomplira sa mission les idées que M. Rogier a développées cet égard la chambre et au sénat, eu sont un sûr garant, l'approbation unanime qu'il a reçue dans ces deux enceintes lui donnera une force nouvelle pour atteindre son but, et elle le venge assez des injures que lui prodiguent des adversaires trop méprisables pour être dangereux. Une omission a été commise dans notre n® de Dimanche dernier, relativement la remise des médailles obtenues l'exposition agricole, par les cultivateurs de AVatou. Les noms de deux seulement des lauréats ont été signalés. Voici la liste exacte de ceux qui ont été l'objet de distinctions 1° A Mr De Heegher. le 2® prix du froment (médaille en vermeil); Feuilleton. LA QUIQUENGROGNE. III. le capitaine yorik. {Suite.) A voir la Reine-Jeanne se balancer fièrement sur ses ancres, ne dirait-on pas qu'elle a la conscience de sa valeur personnelle, et qu'elle revendique les titres de noblesse qu'elle a mérités par ses bons et loyaux services Croyez bien que malgré ta coquette -symé trie de sa toilette matinale el le soin qu'elle prend de paraître aussi jeune, aussi valide que lors de son départ, plus d'une cicatrice se cache sous les bançles de couleur jauue et bleue qui s'étalent sur sa coque arrondie. C'est que d'affreuses tempêtes l'ont assaillie, la Reine -Jeanne,- et qu'elle s'est prise plusieurs fois de querelle avec les croiseurs qui ont voulu l'empêcher de courir les aventures elle a triomphe de la tempele par l'habileté de ses manœuvres, auxquelles se prêtent si merveilleusement ses proportions sveltes et hardies, et la disposition de sa mâture et de son gréement; quant aux croiseurs, elle s'est battue contre eux comme une lionne et leur a fait, avec ses quarante couleuvrines et ses haches d'abordage, de telles morsures, que plusieurs ont été coulés bas, et d'autres mis hors de combat, non sans qu'on eût prélevé sur eux les frais de la guerre. Four être vaillante, la Reine-Jeanne n'élail pas invulnérable plus d'un boulet ennemi était venu se loger dans ses œuvres vives, plus d'un de ses braves défeuseurs avait perdu la vie dans le com bat mais, que lui importait elle! De tout l équipage, il n'est qu'un seul hoiume qu'elle aime, ou plutôt tout l'équipage se résume pour elle en un seul homme c'est le capitaine Yorik de Frapcsles. Lors- ue le capitainp met le pied sur le pont, la Reine-Jeanne tressaille le joie dans toute sa membrure. Et comment en serait-il autrement? n'est-c* pas le capitaine qui a fait construire la Reine-Jeanne, qui qa l'a destinée cette glorieuse mission qu'elle vient d'accomplir, qui l'a fait lutter victorieusement contre les ouragans et les croiseurs ennemis? A vrai dire, le capitaine Yorik méritait d'exciter, bord de la Reine-Jeanne, un dévouaient aussi fanatique. Il était âgé de trente ans peine; en levoyaut, on était tout d'abord frappé de la beauté un peu efféminée de son visage, et, quand on l'examinait, plus long temps, on ne voyait plus cette beauté, mais seulement l'expression de haute intelligence qui s'en exhalait, et qui n'est autre oliose que le signe dont la main de Dieu marque le front des hommes supé* rieurs; sa taille, au-dessus de la moyenne, était grêle et inclinée comme celle des personnes maladives mais le oapitaiue Yorik avait montré, dans plusieurs circonstances, qu'il était doué, malgré cette frêle enveloppe, d'une force musculaire considérable, et qu'il était très-propre supporter les plus rudes fatigues oorporelles. L'instruction qui lui avait été donnée pendant son adolescence, l'avait prédisposé aux études scientifiques, et il était devenu pres que aussi savant qu'il était possible «le l'être celte époque, mais sans avoir senti diminuer en lui cette soif île savoir qui le tourmen tait sans relâche et qui ne pouvait se comparer, pour l'intensité, qu'au désir qu'il avait d'acquérir de la célébrité. La carrière des armes s'ouvrait devant lui pour satisfaire cette dernière passion; mais il lui vint une idée bien autrement sédui sante, en ce qu'elle conciliait ses deux ambitions. Il songea raar- olier sur les traces de Christophe Colomb, dont le nom s'était ré pandu dans l'univers entier, et qui avait laissé beaucoup glaner après lui dans le ohamp des découvertes. La vieille Berthe, avec qui il avait eu des relations, dont nous expliquerons bientôt la nature et l'origine, ayant encouragé la résolution d'Yorik. la Reine-Jeanne avait été construite sous les yeux et aux frais de sou futur capitaine, tout exprès pour un grand voyage d'exploration. A bord, le capitaine Yorik fut un maître absolu, d'une inébran lable sévérité quand il fallait faire respecter la discipline, mais do miné dans toutes les circonstances, par des sentiments de justice si nobles et si rares, cette époque, dans les rapports des seigneurs avec le peuple, que les marins de la Reine-Jeanne ressentirent, tout d'abord, pour leur jeuue patron, un attachement qui se fortifia peu peu, et qui devint presque de l'idolâtrie lorsqu'ils purent appré cier son sang-froid dans le danger, son habileté dans le comman dement des manœuvres et son courage dans les combats. Le capitaine Yorik ne se commettait avec ses matelots que dans les occasions où il lui fallait payer de sa personne autant il se mon trait disposé être avec eux en communauté de périls, autant, dans la vie ordinaire, il aimait observer celte réserve calculée qui ajoute tant au prestige de l'homme revêtu d'une grande autorité. II ne paraissait sur le pont que lorsqu'il s'agissait d'un combat,d'une manœuvre décisive, ou bien d'une récompense accorder ceux de tes hommes qui s'étaient sigualés parleur bravoure ou leur zèle dans le service il avait alors soin de ne se montrer que revêtu de tous les signes extérieurs de commandement. II portait un baut-de- chausse de velours noir, un pourpoint, également de velours avec dès crevés et des bandcrolles de poitrine entre lesquelles on aperce vait les mailles d'une cotte dont le métal était aussi arti lerueut fa çonné qu'un tissu de soie; sa tète était couverte, soit d'une loque de même étofTe, que le pourpoint, soit d'un casque magnifiquement doré; un poignard au manche ciselé était passé sa ceinture, et il tenait sa main droite une hache d'aoier bruni, travaillée Damas, et si merveilleusement trempéequ'elle coupait le fer sans s'ébrêcber. Les marins dé la Reine Jeanne jouissaient si rarement de la vue de leur capitaine, que sa présence au milieu d'eux ne manquait jamais de produire une sensation semblable celle qu'éprouvaient les populations lorsqu'un roi daignait leur apparaître en grande so lennité, et que ce roi était adoré par elles. Le oapitaine Yorik se teuait constamment dans sa cabine, dont l'entrée était interdite téus, l'exception d'un jeune kornuie, d'im

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