7e ANNÉE. - N° 707.
INTERIEUR.
DIMANCHE, 13 FÉVRIER 1848.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Feuilleton.
F
On s'abonne Ypres, Marché
au Beurre, 1, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
prix de i/aboknement,
par trimestre.
Pour Ypresfr. 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro0-25
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé, Jrancsfi
l'éditeur du journal, Ypre*.
Le Progrès parait le Diman
che et le Jeudide chaque semaine,
PBIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
tires acquir1t edndo.
YPRESle 12 Verrier.
Le Journal des Baziles s'est amusé donner dans
son dernier numéro, la recherche de quelques
réfractaires par la gendarmerieles proportions
d'un événement. Voici ce dont il s'agit. Quelque»
miliciens qui devaient être incorporés, ne l'avaient
pas été; un de ceux-là avait été Bruges, mais le
sergent d'un régiment d'artillerie qui devait con
duire les miliciens destinés servir dans cette arme,
leurs corps respectifs, n'avait pas voulu le recevoir
et l'avait renvoyé pardevant la dépulation, comme
impropre au service. Mais ce conseil ne siégeant
plus, ce milicien était revenu sans être incorporé.
Le second avait été conduit sous la surveillance
d'un agent de police Bruges, mais ne s'était pas
présenté devant l'autorité compétente pour être in
corporé. Par conséquent celui-là se trouvait en
défaut et méritait d'être puni. S'il n'y avait eu que
ces deux recherches, il est probable que le Journal
des Baziles n'eii eut soufflé mot. Mais, voyez l'hor
reur Un novice chez les révérends pères Carmes
était réfraclaire et le lieutenant des gendarmes, en
acquit de ses fonctions, et de ses ordres, avait eu
l'outrecuidance cha verbaliser dans ce couvent. Il a
osé, voyefc l'impertinence! faire passer le niveau de
la loi sur la tête de l'oint du Seigneur comme sur
celle du plus humble des mortels. Voilà pour quel
motif, on le compare un pacha au petit pied, un
fonctionnaire coupable d'avoir exécuté ses ordres
avec une certaine rudesse.
Heureusement il n'en est rien. Le fonctionnaire
en question a mis toute la bienveillance possible
dans l'exécution des ordres qu'il avait reçus. Déjà
les deux premiers miliciens sont revenus de Bruges
après avoir été incorporés et le dernier est retourné
son couvent, libéré probablement en vertu de l'art.
31 i) de la loi sur la milice.
sont desanonymes, qui publiquement désavouent ce
que leur main trace sur le papier en secret, et non-
seulement il en est ainsi pour les petits journaux,
mais les feuilles catholiques les plus huppées sont
rédigées par des anonymes. Aussi aucun frein n'ar
rête ces honnêtes publicistes. Tout ce que la haine
la plus invétérée peut inventer pour nuire au mi
nistère libéral et an parti qui lesoutientau pouvoir,
se trouve imprimé dans les estimables feuilles du
clergé! Mais ces accusations qui souvent ne sont
fondéessurrien,respirent tellementla malveillance,
qu'elles excitent le dégoût et produisent un effet
diamétralement opposé celui que les adversaires
acharnés du parti libéral veulent produire.
Il faut l'avouer, la presse cléricale rend de bien
mauvaisservicesau parti dontelle affected'amplecter
la cause. Jamais dévergondage pareil n'a été remar
qué dans les journaux qui se disent les défenseurs
officiels des principes modérés, conservateurs, reli
gieux, inoraux, tandis que dans leurs colonnes, on
ne rencontre que calomnie, délire, fureur enfin, on
dirait que les plus mauvaises passions inspirent leur
polémique. Qu'on compare maintenant la conduite
des feuilles libérales, quand elles faisaient de l'op
position aux ministères catholiques qui se sont suc
cédé depuis 1841,la tactique des journaux cléri
caux, depuis lu défaite électorale du 8 Juin, et
ne devra-l-on pas convenir que ces derniers sont
descendus aux plus ignobles moyens pour satisfaire
leur rancune
Quand la presse libérale combattait les cabinets
cléricaux, elle conservait dans ses attaques une cer
taine dignité et parlait un langage qu'un honnête
homme pouvait avouer, sans que la honte lui en
montai au front. Aujourd'hui, les scribes cléricaux
Le Nouvelliste médical Belge, du G Février dr
(ie année, n° 6), prouve la nécessité d'organiser dans
le pays la police sanitaire il engage M. le Ministre
de la guerre diminuer et même retirer la garni
son des yilles qui se refuseraient réaliser cette
amélioration indispensable. Pour prouver la néces
sité de cette organisation, le Nouvelliste médical
ajoute: Nous appelons sur cette question l'atten-
lion de M. l'inspecteur général, car il ne doit pris
ignorer que le gouvernement vient de décider que
les jeunes gens la sortie de l'école militaire iront
n désormais passer un an l'école d'équitation que
l'on a résolu d'ériger Yprhs. Il nous parait
dangereux d'établir la pépinière de notre année
dans un lieu où la syphilis règne en maîtresse ah—
solue. Même sous le point de vue moralla ques-
lion n est pas sans importance.
Celte accusation lancée contre notre ville était
grave, elle pouvait a voir une grande influence sur
l'esprit de l'autorité militaire et était de nature
nuire tôt ou tard. Nous avons donc cru devoir pren
dre des renseignements sur l'exactitude des fitits
allégués et nous étions fermement résolus appuyer
les réclamations du Nouvelliste médical. Heureu
sement cet appui est inutile, car il résulte des ren
seignements, que l'allégation des faits précités opt
complètement erronée.
Dans aucune ville des Flandres, la police sani
taire n'est faite avec autant de soin et de vigilance
qu'à Ypres, nous pouvons ajouter même que sous
ce rapport, il ne reste rien faire en notre ville. Le
journal auquel nous répondons, comprendra qu'il
est impossible de donner ici le détail des mesures
de police adoptées et exécutées toujours avec rigi
dité. Nous croyons toutefois pouvoir faire connaître
que pour combattre la propagation da mal signalé,
l'autorité civile et militaire se prêtent un mutuel
concours, qu'il existe Ypres un hôpital spécial où
les malades de la ville et même ceux des communes
de l'arrondissement et des villes voisines telles que
Menin, Courtrai, etc., sont traités avec soin; enfin
que les mesures prises par notre administration
communale sont d'une efficacité telle, que le nom
bre des militaire» attoints est presque nul. C'est
ainsi qu'aujourd'hui, au moment même où on lance
une accusation grave, sur une garnison de neuf
cents hommes environ, six se trouvent l'hôpital
militaire, attaqués de la maladie qui, d'après le
Nouvelliste médical, règne Ypres en maîtresse ab
solue, et de plus que sur ces six malades, quatre ont
déclaré avoir contracté le mal avant leur arrivée
Ypres.
IL résulte de ces faits, dont nous sommes même
de prouver l'exactitude que, loin de mériter des
reproches qui sont injustes, la police de notre ville
adroit des éloges, et que dans aucune place, le
chiffre des malades dont il s'agit, comparé celui de
la garnison, n'est aussi restreint qu'à Ypres.
Nous espérons que le Nouvelliste médical et les
journaux qui ont reproduit son article, voudront
bien insérer dans leurs colonnes, la Réponse que
nous avons cru devoir faire, et contribuer ainsi A
détruire la mauvaise impres»ion faite par la publi
cation des faits erronés et q«e la malveillance ou un
esprit de localité étroit, égoïste et jaloux, ont seuls
pu inventer. Communiqué
Dans la plupart des localités de nos Flandres, le
nombre des décès, contrairement aux résultats an
térieurement obtenus, dépasse celui des naissances
d'une manière effrayante; il en est de même pour
notre ville, où cependant ne règne aucune maladie
contagieuse.
Le mouvement de l'état-civil depuis le ir Janvier
i848 jusqu'au 11 Février, comparé celui des deux
années antérieures, durant la même période, donne
pour résultat
1846. Naissanoes 61. Décès 69. Décès en plus 8.
1847. 67. 87. 20.
i8t8. 47. 99. 52.
II est remarquer toutefois que durant les mois
de Janvier et Février, le chiffre des naissances est
moindre et celui des décès plus élevé que pendant
deux autres mois quelconques de l'année. En tenant
compte de cette cause ordinaire, on trouve qu'en
1848. le nombre des décès serait de 750 environ,
celui des naissances de 383; différence en plus 367
décès. Durant les dix années précédentes (i836
1840), le chiffre moyen des naissances a été par an
de 533, celui des décès de 5a3 différence dix .nais
sances en plus.
Cet état de choses mérite d'éveiller toute l'atten
tion de l'autorité supérieure qui porterait au mal un
remède prompt et efficace, si elle consentait soit
faire entreprendre quelques travaux d'utilité pu bli—
que d'une certaine importance, soit adopter d'au
tres mesures propres soulager la misère publique.
Marché d'Ypres, du 12 Février 1048.
Malgré la fermeture des barrières, notre marché au grain était
assez bien approvisionné; il y avait environ 400 hectolitres. La vente
s'en est opérée lentement et une légère baisse s'est fait remarquer.
Les prix ont varié de fr. 18 60 fr. 20 20; prix moyen fr 19 40.
Trente hectolitres de seigle se sont vendus de 12 fr, fr 15 60;
moyenne fr. 12 80:
Seize hectolitres d'avoine ont été vendus de 8 fr. fr. 8 50; prix
moyen fr. 8 25.
Il s'est présenté en vente 50 hectolitres de fèves qui ont été vendus
en moyenne fr. 14 20.
Mille cinq cent kilogrammes de pommes de terre ont été vendus
10 fr. les 100 kilogrammes.
le
LA QUIQUEMGROGNE.
(Suite.)
V. ALIX BE KERLOGVEN.
Le capitaine de la R*ine-Jeanne n'avait ni refusé, ni accepté la
«barge de prévôt que les notables étaient venus lui offrir sou dé
barquement il avait répondu qu'après une si longue absence, et
dans 1 ignorance ou il était des événements qui étaient surveiius
pendant son voyage, il avait besoin de faire des réflexions avaut
d'engager sa responsabilité d'une manière si grave; que le lende
main, l'heure du midi, il se rendrait la maison syndicale, et qu'il
serait en mesure de se prononcer relativement l'honneur qu'on
lui avait fait de le revêtir de l'autorité mililaiie. Que dans tous cas
on pouvait compter sur son dévouement aux intérêts de la ville qui
devaient avoir grand besoin d'être protégéspuisqu'ils étaient
privés de leur plus ferme appui, par la mort du sire de Bizien.
Ensuite Yorik se fraya un passage travers la foute, entra dans les
murs par la grande porte et se rendit dans la maison de la rue de
Dinan qui était habitée par une femme que nous ne connaissons
encore que sous le nom d'Alix, et qui était allée pendant la nuit,
faire une visite la sorcière de la Quiqueugrogne.
La maison dont nous parlons était une des plus vasle6 et de* plus
belles qu'il y eût Saiut-Malo. Les appartements d'Alix en occu
paient le premier étage et avaient onze fenêtres sur la rue, Yorik
efa le loquet de la porte, monta l'escalier et entra dans l apparte
ment, avec les façons d'un homme qui connaissait parfaitement ce
logis, et qui se savait le droit d'y commander, peut-être. En entrant
dans l'antichambre, il y trouva deux femmes de service qui poussè
rent en le voyant deux cris de joie.
Notre maître, notre bon maître! Madame, noire maître revient!
Pour annoucer l'heureuse nouvelle, et pour la faire arriver plus
prompteuieut aux oreilles de la personne qui était sans doute la plus
intéressée la conuaitre, les deux femmes avaient ouvert les deux
battants d'une porte de salon, et avaient crié de tous leurs poumons,
précaution qui n'était pas inutile, car leur voix avait traverser une
longue enfilade de pièces, avant de parvenir l'oratoire d'Alix, qui
était situé l'extrémité de l'appartement, et où elle avait accoutumé
d«se teuir.
Alix était fille du baron Kerloguen, tué en 1488, la bataille de
Saint-Aubin du Cormier, et de Berthe Magon de la Gerviuais, issue
d'uue noble famille de Tréguir, et dont le nom devait se perdre, ou
du moins s'effacer sous les dénominations de Berthe la folle. Berthe
la sorcière, la folle de la Tour, la sorcière de la Quiquengrogne, les
seules qui soient mentionnées parla tradition, par les légendes, ou
par les chroniques.
Ce Kerloguen était un cadet de famille, qui ne trouvant pas faire
son chemin en Bretagne, était allé demander du serviee la cour de
France, où il n'ayait pas tardé se faire remarquer par sa bonne mine
et son désir de se rendre utile. Son courage la guerre, et surtout
l'intelligence qo'il avait montrée dans une mission délicate, attirè
rent sur lui 1 attention du roi Louis XI qui le prit en estime toute
particulière et le combla de bienfaits. Tout fier de sa bonne fortune
et désireux d'en étaler la splendeur aux yeux des aînés de sa famille,
le baron de Kerloguen vint eu grand équipage Saint-Malo, sa ville
natale, et ce fut pendant ce voyage qu'il épousa Berthe Magon de la
Gervinais, après quoi il retourna Paris.
Teflle était la faveur dont jouissait le gentilhomme breton auprès
de l'astucieux Louis XI, que lorsque sa fille Alix viut au monde, en
1470, le roi voulut la tenir lui-même sur les fonds baptismaux et lui
servir de parrain.
L'enfance d'Alix s'écoula soit Paris, soit au château de Plessis-
les-Tours, absolument comme si elle eût fait partie de la liguée
royale qu'elle suivait dans toutes ses pérégrinations. Ce n'est pas que
Louis XI, qui ne se piquait pas de beaucoup d'affection pour ses
enfants, en éprouvât pour la fille du baron de Kerloguen une fois
la cérémonie du baptême terminée, et son caprice passé, il avait
peu près oublié sa filleule; mais il était une autre personne la cour
qui s'était prise du plus vif attaohement pour la petite Alix, et cette
personne, enfant elle-même, n'était autre que la fille du roi, la pria-
cesse Jeanne, qui avait six années de plus que sa jeune protégée-
Nous ne connaissons pas, dans l'histoire de la mouarchie fran
çaise, une figure de femme qui mérite d'exciter un aussi haut intérêt
que celle de cette pauvre Jeaune de France, que le ciel scanda
youloir dédommager du peu d'agrément de son extérieur, eu do-